• Aucun résultat trouvé

3.1.1-H

ISTORIQUE DES ETUDES PALYNOLOGIQUES

Dans le Massif armoricain, les premières analyses polliniques ont été menées dans les années 1920-1930 lors des travaux de Erdtman (1924) et Dubois & Dubois (1933) sur des tourbières littorales finistériennes. Il faut ensuite attendre les années 1960 pour que de nouvelles études soient effectuées en Bretagne par Dubois & Sauvage (1963) sur des tourbières littorales et Van Zeist (1963) dans les Monts d’Arrée et les Montagnes noires.

Avec la publication en 1974 de ses résultats obtenus au cours des quinze années précédentes, essentiellement en Finistère mais aussi dans le marais de Dol-de-Bretagne, M.-T. Morzadec- Kerfourn livre une première synthèse accompagnée d’une somme d’informations importante (MORZADEC-KERFOURN 1974). Elle établit alors un cadre qui fera date pour les recherches

paléoenvironnementales dans la région. Dans les années 1970, L. Visset et N. Planchais se sont intéressés aux tourbières de Basse-Loire et plus récemment, Voeltzel (1987) a étudié pendant sa thèse les formations de la plaine alluviale de l’estuaire de la Loire.

A début des années 1990, la thèse de D. Marguerie concernant l’évolution de la végétation armoricaine, à partir d’études polliniques et anthracologiques de zones humides et de sites archéologiques (MARGUERIE 1992), est venue enrichir le cadre breton. De même, toutes les thèses

menées autour du passage du XXème au XXIème siècle sous la direction de L. Visset au laboratoire

d’Ecologie et des Paléoenvironnements Atlantiques de Nantes, ont précisé notre perception des dynamiques de la végétation dans les secteurs de la Basse-Loire (CYPRIEN 2001, OUGUERRAM

2002) et de la Mayenne (BARBIER 1999).

Enfin, les analyses effectuées ces dernières années au sein du laboratoire Archéosciences de Rennes (AOUSTIN 2005, GAUDIN 2004, MARGUERIE 2009, OILLIC 2011) ont contribué à étoffer encore un peu plus le corpus de données armoricaines. Celui-ci continue actuellement à être alimenté et des thèses en cours (GANNE en cours, REINBOLD en cours), en plus de la présente,

viendront bientôt améliorer notre connaissance de divers aspects de l’évolution des paysages en Bretagne.

3.1.2-D

ONNEES SELECTIONNEES

Malheureusement, à partir de l’ensemble de ces travaux, bien peu nombreuses sont les séquences polliniques qui ont pu être intégrées à la démarche suivie dans cette thèse par rapport au nombre total de séquences existantes. En effet, notre méthode d’étude est conditionnée par un nombre minimal de trois datations absolues, non séparées par un/des hiatus entre les échantillons datés, permettant ainsi de proposer un modèle d’âge pour chaque profil. De fait, la quasi-totalité des sondages retenus ici proviennent d’études relativement

récentes (AOUSTIN2005, BARBIER 1999, CYPRIEN 2001, MARGUERIE 1992,2009, OUGUERRAM 2002,

VISSET et al. 2005, VISSET & BERNARD 2006). En revanche, celles issues des travaux anciens (VAN

ZEIST 1963, VISSET 1979, VOELTZEL 1987), ainsi que des plus récents (GANNE en cours, OILLIC

2011, REINBOLD en cours), n’ont pas pu être utilisées, car les datations manquent encore à cette

heure ou bien se retrouvent intercalées avec des hiatus.

3.1.3-Z

ONATION POLLINIQUE

Vis-à-vis de la zonation des séquences polliniques, la méthodologie employée pour la plupart des séquences sélectionnées ici se résume en trois étapes, le processus pouvant d’ailleurs ne pas s’étendre à l’ensemble de ces trois étapes.

Dans un premier temps, les analystes établissent des Zones d’Assemblages Polliniques Locales (ZAPL) sur la base de chaque profil pollinique et valables uniquement pour ce profil. Selon Cushing (1963), celles-ci correspondent à « une famille de sédiments distinguée des couches adjacentes par des différences importantes dans le contenu pollinique issu des plantes contemporaines du dépôt ». Chez certains auteurs, cette étape peut avoir été effectuée par le truchement de tests statistiques réalisés sur ordinateur (variogrammes, arbres hiérarchiques), tels que ceux décrits par Marguerie (1992).

D. Voetzel crée plus tard un niveau supérieur qu’il qualifie du terme de « phase écologique » (VOELTZEL 1987). Il la défini comme résultant « d’une variation significative apparaissant dans le tracé de la courbe d’au moins un taxon local ». Elle peut ensuite être divisée en sous-phases, assez comparables alors aux ZAPL d’E.J. Cushing. Ces phases écologiques ne s’appliquent toujours qu’à la séquence pollinique étudiée et ne sont en aucun cas transposables à d’autres profils. Cette partition des diagrammes polliniques en phases et sous-phases écologiques a été reprise par l’ensemble des auteurs qui ont travaillé en Massif armoricain depuis (BARBIER 1999, CYPRIEN

2001, MARGUERIE 1992, OILLIC 2011, OUGUERRAM 2002).

Dans un troisième et dernier temps, les phases écologiques ainsi crées peuvent être, ou pas selon les cas, rattachées à des zonations de référence comme celle établie par Godwin (1940) pour la Grande-Bretagne qui a inspiré celle de Morzadec-Kerfourn (1974) puis celle de Visset (1979) pour la Bretagne. Ce dernier rattachement est cependant employé plus par facilité sémantique que par correspondance stricte avec les évènements décrits dans chacune des ces références car les auteurs précisent clairement que la chronologie des séquences reste avant tout basée sur les datations 14C relatives à chacune d’entre elles.

Dans sa thèse, Oillic (2011) a fait le choix d’ajouter une étape supplémentaire entre les phases écologiques et le rattachement à un cadre général (MANGERUD et al. 1974). En effet, il rassemble

les phases écologiques propres à chacune de ses séquences polliniques au sein de Zones d’Assemblages Polliniques Régionales (ZAPRs). Il estime alors que « des assemblages polliniques semblables, enregistrés dans des dynamiques similaires, peuvent être considérés comme contemporains » et que « les variations observées dans l’ensemble de ces niveaux révèlent une évolution de l’environnement à une échelle plus large que celle du site ». Lorsque les correspondances s’avèrent suffisantes entre plusieurs profils polliniques pour effectuer ce

rapprochement, tant au niveau des dynamiques de végétation que de la chronologie de ces dynamiques, les conditions sont pour lui remplies pour la création d’une ZAPR.

Cette nouvelle étape le rapproche ainsi de la méthode employée notamment par Ch. Leroyer en Bassin parisien, en lui permettant par là même de fusionner les deux approches, même si les dénominations employées diffèrent toujours.

3.1.4-A

CQUISITION DU MATERIEL D

ETUDE

La majeure partie des sondages polliniques du Massif armoricain utilisés dans cette thèse proviennent de tourbières continentales et quelques de tourbières maritimes ou de fonds de vallées. Une reconnaissance des épaisseurs sédimentaires et de leur stratigraphie en divers points du milieu de dépôt est préalablement effectuée à la tarière de pédologue afin de déterminer la position du sondage à effectuer.

Des sondes manuelles, tel le carottier soviétique de type « GIK » (BELOKUPITOV & BERESNEVITCH

1955), ont généralement été utilisées pour extraire le sédiment. Ce carottier est constitué d’un demi-cylindre de 45 cm de longueur pour 10 cm de diamètre. Il permet d’éviter le tassement des sédiments prélevés ainsi que toute contamination par des pollens de niveaux différents.

Lorsque l’épaisseur de sédiment s’avère faible ou bien que celui-ci est difficile d’accès, c’est un carottier manuel de plus petites dimensions (50 cm de longueur pour 5 cm de diamètre) qui est utilisé. A l’inverse, lorsque la profondeur à atteindre est plus importante (supérieure à 1,50 mètre), un système motorisé par un compresseur hydraulique, mis au point au Laboratoire d’écologie et des paléoenvironnements atlantiques de Nantes (VISSET & HAURAY 1980,1988),

actionnant un treuil permettant d’enfoncer puis de retirer le carottier, a permis de pénétrer plus profondément dans le sol.

Quelque soit le modèle de carottier utilisé, lors d’un prélèvement par carottes successives (de 45 cm ou 90 cm), la pointe du carottier engendre une perturbation des vingt premiers centimètres du prélèvement suivant. Afin de limiter ces perturbations, deux sondages sont effectués en parallèle à peu de distance l’un de l’autre, permettant ainsi de réaliser des carottes en alternance à des profondeurs décalées.

Les séquences sédimentaires ainsi récoltées sont ensuite protégées dans des gaines de PVC et emballées sous film plastique.

Sur site archéologique, la démarche diffère du fait de la possibilité de prélever directement le sédiment sur des coupes fraichement dégagées et ravivées afin d’éliminer toute pollution par la pluie pollinique actuelle. L’échantillonnage peut se faire à vue en prenant en compte la stratigraphie directement visible en coupe. Le tout est ensuite conditionné sous film plastique.

Dans le cas de tourbières littorales, la compaction importante et les passées sableuses contraignent à l’emploi de tubes PVC de fort diamètre (10 cm), enfoncés dans le sédiment à coups de marteau à la faveur de la marée basse (MARGUERIE 1992).

3.1.5-P

ARTICULARITES DES MILIEUX DE DEPOT

Les marais maritimes se forment en retrait des dunes littorales du fait du barrage que celles- ci génèrent pour les cours d’eau. Les dépressions d’arrière-dune constituent donc des milieux humides favorables à la constitution de tourbières plus ou moins halophiles suivant la salinité plus ou moins affirmée de la zone. Les contacts avec la mer n’ayant lieu que lors des très fortes marées, l’eau n’y est généralement que peu saumâtre.

Les tourbières fossiles des estrans du littoral armoricain résultent de l’immersion de ces anciens marais à sédimentation organique, parfois tourbeuse, suite à la remontée du niveau marin au cours de l’Holocène (MORZADEC-KERFOURN 1974). Une partie des sédiments argilo- tourbeux a pu résister à l’érosion marine et s’est retrouvée enfouie sous le sable des plages actuelles.

Il parait évident que les analyses polliniques de ces zones humides littorales sont influencées par la proximité du milieu marin et ce facteur doit être pris en compte dans les reconstitutions paysagères. Il n’en demeure pas moins que le pollen des secteurs avoisinants vient lui aussi se déposer à leur surface, fournissant ainsi une image de la végétation de la zone qui ne peut être négligée, particulièrement lorsque les zones humides propices aux dépôts organiques font défaut plus à l’intérieur du continent.

Les tourbières continentales ont besoin de deux facteurs pour se développer, une zone constamment inondée et une production de matière organique supérieure à la décomposition (MARGUERIE 1992). Pour cela, l’évapotranspiration doit être inférieure à l’alimentation en eau la

circulation de celle-ci extrêmement ralentie, et le marais doit être colonisé par des végétaux hygrophiles comme les sphaignes (Sphagnum), de grands hélophytes (Typha, Phragmites) et la bruyère des marais (Erica tetralix). Dans le Massif armoricain, ces conditions sont souvent remplies du fait de l’humidité importante du climat et de l’imperméabilité du substrat géologique.

On différencie tourbières de bas-marais (topogènes) et tourbières de haut-marais (ombrogènes) de par leur position topographique, de laquelle résulte l’origine de leur apport hydrique. Les premières sont situées en fonds de vallées et voient les eaux de ruissellement leur procurer l’humidité suffisante. Les secondes se développent indépendamment de la topographie grâce aux eaux de pluie.

L’évolution naturelle d’une tourbière la conduit à son comblement par les couches successives de végétation non dégradée qui s’accumulent jusqu’à leur assèchement une fois dépassé le niveau de la nappe phréatique. Des espèces de moins en moins hydrophiles prennent alors le relais, finissant elles-mêmes par laisser la place à un taillis humide composé d’aulnes, de saules et de bouleaux, marquant ainsi la fin du cycle de tourbification et donc la mort de la tourbière.

L’homme peut venir perturber ce cycle en drainant ou en plantant des arbres à proximité immédiate des zones marécageuses ce qui entraine l’assèchement de la tourbière et donc sa fin, parfois même des incendies. A l’inverse, s’il extrait de la tourbe, il lui procure un nouveau départ en abaissant son niveau relatif par rapport à la nappe phréatique.

Qu’elles se forment en milieu littoral ou continental, les tourbières ont donc une évolution qui peut s’avérer mouvementée. Les perturbations peuvent être d’origine naturelle (transgressions, assèchements, incendies, érosion) ou anthropique (drainage, incendies, exploitation), il n’en résulte pas moins qu’elles se marquent parfois clairement dans les sondages par des hiatus sédimentaires ou, du moins, par des changements de types de dépôts (passées sableuses ou argileuses, couches carbonisées). Une fois cet aspect pris en compte, ces milieux présentent l’avantage de fournir des séquences généralement continues qui peuvent renseigner une bonne partie de l’Holocène. De plus, la présence de restes végétaux organiques permet de procéder relativement aisément à des datations 14C.