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Droits intellectuels

I. 5. Aspects cliniques : les candidoses

Les infections par les levures du genre Candida (Scully et al, 1994; Horgan & Powderly, 2003) sont appelées candidoses (anciennement moniliases). L'envahissement des tissus par ces micro-organismes est responsable de nombreuses pathologies: des infections superficielles cutanées (intertrigo, onyxis et perionyxis, otite externe), gynécologiques, ophtalmiques (kératomycose) et des infections profondes du tube digestif, des bronches et des poumons. L'envahissement peut être généralisé à tout l'organisme. Dans la cavité orale, les levures peuvent provoquer différentes lésions des muqueuses (muguet, chéilite, perlèche, amygdalite, pharyngite). Le Tableau IV énumère les facteurs favorisant une candidose oropharyngée. L’utilisation des antibiotiques et le SIDA ont contribué à l’augmentation

de la fréquence des candidoses orales (Soysa et al, 2008).

Symptomatologie (Horgan & Powderly, 2003)

La majorité de patients n’ont pas de plaintes ; certains se plaignent de sensation de brûlure, d’altération du goût ou de difficultés pour s’alimenter. L’examen clinique de la cavité orale montre des aspects variables.

La candidose pseudomembraneuse ou muguet apparaît sous forme de petites plaques blanchâtres sur les muqueuses; lorsque ces plaques sont grattées, la muqueuse érythémateuse sous-jacente peut légèrement saigner. Toutes les

muqueuses orales peuvent en être atteintes. Ces lésions doivent être différenciées de la leucoplasie ou du lichen plan.

 La candidose érythémateuse atrophique apparaît sous forme de plaques

rouges sur le palais ou sur une langue atrophique dépapillée. Cette forme de candidose est particulièrement associée à une xérostomie, des déficiences nutritionnelles ou des irritations locales; elle est souvent rencontrée chez les porteurs de prothèse.

Age  enfance

 vieillesse

Assuétudes  tabagisme

Médicaments  antibiotiques à large spectre

 corticostéroïdes

 chimiothérapie cytotoxique

Pathologie orale  prothèses, appareillages orthodontiques

 sécheresse de bouche (radiothérapie,

prises de médicaments, maladie des glandes salivaires , …)

Pathologie immunitaire  infection HIV

 neutropénie

 déficit de l’immunité cellulaire

Pathologie métabolique  diabète

Pathologie nutritionnelle  déficience en fer

 malnutrition

 La candidose hyperplasique concerne la langue, les commissures internes des lèvres ou la muqueuse vestibulaire. Ces lésions ne peuvent être détachées contrairement aux infections pseudomembraneuses. Deux facteurs associés particulièrement à cette candidose sont le tabagisme et le statut sécréteur du groupe

sanguin (les non-sécréteurs sont plus susceptibles à l’infection: Thom et al, 1989;

Lamey et al, 1991 ; Ben-Aryeh et al, 1995). Chez les patients chroniquement infectés, la

nourriture ou le tabac peuvent colorer les lésions en brun.

Candida sp. peut aussi infecter les commissures des lèvres (chéilite angulaire ou perlèche) et produire des lésions fissurées associées à un inconfort, une brûlure ou une douleur. La complication majeure des candidoses oropharyngées est l’expansion à l’œsophage. Le diagnostic d’oesophagite peut être fait cliniquement chez des malades qui ont des symptômes tels que dysphagie ou douleur rétrosternale après un épisode de candidose oropharyngée.

Diagnostic(Horgan & Powderly, 2003)

Le diagnostic d’une candidose se fait par inspection de la cavité buccale. La

recherche du microorganisme n’est pas toujours contributive puisque Candida est un

commensal communément retrouvé en bouche. L’apparence de la lésion et la présence de levures à l’examen microscopique ne sont pas toujours suffisantes pour confirmer le diagnostic. Les grattages des lésions actives examinées avec 10% d’hydroxyde de potassium démontrent l’apparence caractéristique de pseudohyphes et de bourgeons de levures. La culture n’est pas nécessaire habituellement sauf si les lésions ne disparaissent pas avec la thérapie antifongique appropriée. Jadis, les laboratoires de microbiologie distinguaient C. albicans des autres espèces par un test de germination (ou filamentation). L’identification des autres espèces n’était pas réalisée en routine. Actuellement, la spectrométrie de masse MALDI-TOF permet une identification rapide

des espèces de Candida (Bader et al, 2010; Pinto et al, 2011). Les biopsies sont utiles

Identification au laboratoire

Prélèvement. L’écouvillonnage des muqueuses orales ou des surfaces dentaires permet de récolter les levures qui y adhèrent. La recherche de levures peut aussi se faire après rinçage de la cavité orale.

Microbiologie. Les échantillons sont par la suite ensemencés sur un milieu de culture. Il

existe différents milieux solides pour l’étude et l’isolement du Candida:

 le milieu de Sabouraud (Bridson, Oxoid manual, 1990), milieu universel:

peptone 10 g/l, glucose 40 g/l et agar 15 g/l) dans lequel on incorpore un antibiotique à large spectre (chloramphénicol 0,1 g/l et/ou gentamycine 0.5 g/l) ainsi que de l’actidione (cycloheximide 0,001 % w/v) qui inhibe certains saprophytes ; il existe aussi un milieu de Sabouraud liquide (glucose 20 g/l),

 les milieux chromogéniques (Odds & Bernaerts, 1994 ; Perry & Freydière,

2007) dans lesquels des substrats d’enzymes de Candida permettent de

différencier certaines espèces par la coloration des colonies,

 les milieux pauvres tel le corn meal agar, le rice extract agar, le rice agar tween, le potato-carrot-bile agar permettant d’observer outre eumycélium, pseudomycélium et blastoconidies, des chlamydoconidies spécifiquement pour C. albicans (Casal & Linares, 1981).

La conversion entre les différentes formes de C albicans (blastoconidies ou

pseudohyphe) peut être affectée par la température, le pH, le milieu gazeux, l’apport en nutriments, les conditions de croissance, par la présence d’un inducteur chimique comme du sérum, de la proline ou du N-acétylglucosamine (Odds, 1979; Buchan and Gow, 1991). Les deux formes ont été retrouvées chez des patients sains et malades ; pour certains auteurs, le lien de la forme pseudohyphye à la maladie est controversé (Gow & Gooday, 1987). Cependant, cette conversion est cliniquement importante car elle pourrait aider les cellules à proliférer et envahir les tissus, à tromper le système immunitaire par une altération de l’antigénicité de surface et à survivre à un traitement antifongique (Soll et al, 1987).

C. albicans produit des tubes germinatifs (test de germination ou filamentation) endéans les 60 minutes si on met une goutte de suspension de levures dans du sérum humain (ou de certains mammifères) placé à 37° C (Taschdjian et al, 1960 ; Hilmioglu et al,

2007).

Immunologie. De nombreux tests immunologiques reconnaissent tantôt la présence

d’antigènes de Candida sp. (Marot-Leblond et al, 2006), tantôt d’anticorps (Clancy et al,

2008).

Biochimie. Des batteries de tests biochimiques (galerie API 20C AUX, RapID Yeast Plus System, VITEK Yeast Biochemical Card, …) sont utilisées pour l’identification des

espèces de Candida en se basant entre autre sur l’assimilation de différents sucres

(Wadlin et al, 1999 ; Verweij et al, 1999). Récemment, l’utilisation de la spectrométrie

de masse MALDI-TOF permet d’identifier rapidement les levures par comparaison de

leurs spectres protéiques à des bibliothèques de référence (Bader et al, 2010; Pinto et

al, 2011).

Biologie moléculaire. Des techniques de biologie moléculaire sont utilisées dans les

laboratoires spécialisés pour détecter, caractériser et identifier des souches de Candida

(Williamsson et al, 1987 ; Williams et al, 1995 ; Baskovả et al, 2007).

Traitement

Ce paragraphe n’a pas la prétention d’exposer les traitements des différentes formes cliniques de candidoses, mais tente d’expliquer la nécessité de décontaminer les prothèses dentaires sans utiliser l’arsenal thérapeutique afin d’éviter l’émergence de

souches résistantes. Il existe en effet une grande variété d’agents actifs pour le

traitement des candidoses: polyènes, azoles, échinocandines. Le succès et l’utilisation

préventive des premiers composés azoles chez les patients immunodéprimés (SIDA,

…) ont favorisé l’apparition de souches résistantes au miconazole (Carrilo-Muñoz et al,

1996), et au fluconazole (Ellepola & Samaranayake, 2000). La recherche

pharmaceutique n’a cessé de développer des dérivés (itraconazole, voriconazole,

posaconazole…) qui puissent échapper – fût-ce pour un temps – aux mécanismes adaptatifs des levures (Ellepola & Samaranayake, 2000). Tout comme pour les

antibiotiques, l’émergence de résistances aux antifongiques devient un problème de santé publique impliquant une prescription raisonnée de ces médicaments.

La Figure 2 illustre différents mécanismes envisagés dans la littérature (Prasad & Kapoor, 2005) pour expliquer la résistance aux azoles : inhibition d’enzymes de la voie métabolique de l’ergostérol, diminution de l’expression de certaines enzymes de cette

voie, modification de la paroi de Candida, limitation de la diffusion des azoles au travers

de la paroi, clairance par des pompes à azoles.

lanostérol synthase ergostérol génome (a) (b) (c) (e) (d)

Figure 2. Mécanismes de résistance aux azoles (schéma original inspiré de Revankar & Graybill, Antifungal Therapy in Anaissie et al. Clinical mycology, 2003) : a) limitation de la diffusion des azoles au travers de la paroi, b) inhibition d’enzymes de la voie métabolique de l’ergostérol, c) diminution de l’expression de certaines enzymes de cette voie, d) clairance par des pompes à azoles, e) modification de la paroi de Candida.

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