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Arguments des tierces parties

i.207 S'agissant de l'expression "governmental purposes" (besoins des pouvoirs publics) figurant à l'article III:8 a) du GATT de 1994, l'Australie note que le sens ordinaire du mot "purpose" peut être

"practical advantage or use" (avantage ou utilisation pratiques).237 Bien que ce sens ordinaire ne soit peut-être pas aussi courant que celui que le Canada laisse entendre, l'Australie estime qu'il apparaît plus approprié si l'on considère l'expression "les besoins" qui figure dans la version française de l'article III:8 a) du GATT de 1994. En ce qui concerne l'expression "pour être revendus dans le commerce", elle note que le sens ordinaire du terme anglais "commercial" est "concerné par le

"commerce" ou engagé dans le "commerce"; le commerce est défini comme étant l'activité d'acheter et de vendre".238 À son avis, la notion de bénéfice dans ces deux définitions est un aspect secondaire.

L'Australie déclare qu'une interprétation de l'expression "pour être revendus dans le commerce"

comme signifiant achat effectué en vue d'une revente avec bénéfice serait une définition trop étroite – qui élargirait les exemptions possibles des obligations d'accorder le traitement national énoncées à l'article III. Elle dit que l'article III:8 a) n'était pas censé viser la situation dans laquelle les pouvoirs publics concluent des contrats pour la fourniture ou l'achat d'électricité à des prix fixes, qu'ils vendent ensuite sur le marché pour la consommation générale.239

b) Brésil

i.208 Le Brésil estime que les plaignants limitent indûment le champ de l'expression "pour les besoins des pouvoirs publics" figurant à l'article III:8 a) du GATT de 1994, en soutenant qu'elle vise uniquement les achats effectués pour le propre usage des pouvoirs publics ou leur propre avantage. À son avis, l'interprétation des plaignants semble indiquer que le seul objectif des pouvoirs publics est d'assurer le maintien et le fonctionnement normal de leur bureaucratie, sans tenir compte du fait que la bureaucratie d'État n'est qu'un moyen de réaliser une multitude de fins, définies par chaque société.

Le Brésil soutient que l'expression "besoins des pouvoirs publics" ne peut pas être interprétée conceptuellement, et qu'elle peut être interprétée uniquement au cas par cas et au vu de la fonction spécifique exercée par les pouvoirs publics considérés dans chaque secteur de l'économie. Toutefois, il estime que la définition des "besoins des pouvoirs publics" ne peut pas être aussi large que le laisse entendre le Canada, car cela amoindrirait considérablement la portée de l'obligation d'accorder le traitement national énoncé à l'article III du GATT de 1994.240

c) Chine

i.209 La Chine estime que l'expression "achetés pour les besoins des pouvoirs publics" figurant à l'article III:8 a) du GATT de 1994 signifie que i) les pouvoirs publics sont la raison de l'achat; ii) ils tireront avantage du résultat ou de l'effet de l'achat; ou iii) ils sont le but ou la fin de l'achat. Dans les présents différends, elle considère que l'électricité achetée par l'OEO ne l'est pas pour les besoins des pouvoirs publics parce qu'elle est injectée dans le réseau pour être vendue aux consommateurs finals.

237 Australie, communication en tant que tierce partie (DS412), paragraphe 20; et communication en tant que tierce partie (DS426), paragraphe 20.

238 Australie, communication en tant que tierce partie (DS412), paragraphe 30; et communication en tant que tierce partie (DS426), paragraphe 30.

239 Australie, communication en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 16 à 35; communication en tant que tierce partie (DS426), paragraphes 16 à 35; et déclaration en tant que tierce partie (DS412 et DS426), paragraphes 21 à 24.

240 Déclaration du Brésil en tant que tierce partie (DS412 et DS426), paragraphes 2 à 8.

En outre, la Chine note que l'électricité vendue aux agents économiques servira à la production de marchandises destinées à la vente dans le commerce.241

d) Union européenne (dans le différend DS412)

i.210 En tant que tierce partie dans le différend DS412, l'Union européenne estime que le matériel de production d'énergie renouvelable fabriqué en Ontario et celui qui est importé du Japon et d'autres pays sont des "produits similaires" au sens de l'article III:4 du GATT de 1994. Elle soutient que les mesures contestées sont des "prescriptions" au sens de l'article III:4 et que l'on peut raisonnablement s'attendre à ce que les mesures contestées modifient de manière défavorable les conditions de concurrence entre les produits nationaux et les produits similaires importés. L'Union européenne rappelle que le programme TRG crée parmi les producteurs d'énergie éolienne et solaire photovoltaïque implantés en Ontario des incitations à utiliser du matériel de production d'énergie renouvelable produit en Ontario. S'agissant de l'article III:8 a), elle estime qu'il n'y a pas d'"acquisition" au sens de cette disposition, et que même si les pouvoirs publics de l'Ontario acquéraient effectivement de l'électricité, ce serait pour qu'elle soit revendue dans le commerce ou serve à la production de marchandises destinées à la vente dans le commerce.242

i.211 Passant aux allégations au titre de l'Accord sur les MIC, l'Union européenne souligne que l'Accord sur les MIC est un accord à part entière, qui s'applique indépendamment de l'article III du GATT de 1994. Elle note aussi que les mesures en cause seraient visées par le paragraphe 1 a) de l'Annexe de l'Accord sur les MIC. Une constatation établissant qu'une mesure relève du paragraphe 1 a) entraîne, en elle-même et à elle seule, une constatation de violation de l'article 2:1 de l'Accord sur les MIC et donc une constatation de violation de l'article III:4 du GATT de 1994. Par conséquent, selon l'Union européenne, le Groupe spécial n'a pas besoin d'examiner d'abord s'il y a violation de l'article III:4 du GATT de 1994 pour conclure ensuite qu'il y a violation de l'article 2:1 de l'Accord sur les MIC.243

e) Japon (dans le différend DS426)

i.212 En tant que tierce partie dans le différend DS426, le Japon soutient que la qualification et le traitement prévus par le droit interne ne peuvent pas avoir d'incidence sur l'application ou l'interprétation des dispositions des accords visés, ou plus généralement, sur la détermination du point de savoir s'il y a eu manquement à une obligation dans le cadre de l'OMC. Pour des raisons semblables, il estime que la manière dont un Membre choisit d'administrer son régime fiscal est peu pertinent pour la question de savoir si une transaction particulière est une "acquisition" ou un "achat"

aux fins de l'article III:8 a) du GATT de 1994.244

f) Corée

i.213 La Corée estime que le texte de l'article III:8 a), lu dans son ensemble, donne à penser que le sens du mot "acquisition" n'est pas complètement identique à celui du mot "achat", puisque cette disposition utilise les deux termes dans la même phrase d'une manière qui laisse penser qu'il peut y avoir des types d'acquisition qui ne comportent pas d'achats. Il apparaîtrait que le terme "acquisition"

englobe toute forme d'acquisition par les pouvoirs publics, y compris, mais non exclusivement, l'"achat".245

241 Chine, communication en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 8 à 22; et déclaration en tant que tierce partie (DS412 et DS426), paragraphes 2 et 3.

242 Communication de l'Union européenne en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 27 à 42.

243 Communication de l'Union européenne en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 43 à 47.

244 Communication du Japon en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 13 à 15.

245 Communication de la Corée en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 16 à 18.

i.214 En outre, la Corée déclare que la puissance électrique n'est pas un objet matériel, mais une forme d'énergie produite généralement lorsque l'on fait tourner des bobines de fil dans un champ magnétique pour provoquer un flux d'électrons (le courant électrique) du fait de la différence de potentiel (la tension). Elle soutient que la question reste ouverte pour ce qui est de savoir, dans les circonstances des présents différends, i) si l'électricité devrait être considérée comme un "produit", et ii) si une définition du "produit" (faisant référence à l'électricité renouvelable éolienne, solaire photovoltaïque ou provenant d'autres sources "propres") qui prend en considération les méthodes utilisées pour produire l'électricité serait appropriée lorsque l'intention est de réaliser des objectifs environnementaux importants.246

i.215 Quant à l'expression "besoins des pouvoirs publics", la Corée soutient que l'interprétation qui en est donnée par le Canada reviendrait à considérer que toutes les acquisitions des pouvoirs publics sont effectuées "pour les besoins des pouvoirs publics", ce qui la rendrait inutile. En outre, elle note qu'il apparaît que le Canada laisse entendre que les "besoins des pouvoirs publics" peuvent être distingués de l'intérêt de la société dans le but allégué de l'action gouvernementale. Elle estime que le Canada a raison de souligner l'importance d'un approvisionnement adéquat et fiable en énergie électrique pour le bien-être public. Cependant, elle note que la même description pourrait s'appliquer à presque tout autre domaine de l'activité économique. Par conséquent, la Corée soutient qu'il apparaîtrait qu'un critère au titre de l'article III:8 a) qui exige seulement un certain lien entre l'achat et une question quelconque relative au bien-être public est inadéquat.247

g) Mexique

i.216 Le Mexique estime que lorsqu'il est constaté qu'une subvention subordonnée à l'utilisation de produits nationaux de préférence à des produits importés est prohibée au titre de l'Accord SMC, il y a nécessairement violation de l'obligation d'accorder le traitement national prévue à l'article III du GATT de 1994. En outre, les mesures subordonnées à l'utilisation de produits nationaux constituent des mesures concernant les investissements et, étant incompatibles avec l'article III du GATT de 1994, elles entraînent aussi automatiquement une violation de l'article 2:1 de l'Accord SMC.

Toutefois, le Mexique est d'avis que, dans le cas d'achats par les pouvoirs publics, les mesures sont exclues du champ d'application de l'article III du GATT de 1994 et de l'article 2:1 de l'Accord SMC.248

h) Norvège

i.217 La Norvège convient avec les plaignants que la question essentielle dans les présents différends est de savoir si l'OEO "achète" effectivement de l'électricité, ou s'il fonctionne uniquement comme "chambre de compensation". À cet égard, elle fait valoir qu'il ne suffit pas d'examiner si les activités de l'OEO sont désignées par le terme "acquisition". S'agissant de l'interprétation par le Canada de l'expression "besoins des pouvoirs publics", la Norvège estime qu'elle inclurait en pratique tout achat effectué par les pouvoirs publics. Cela rendrait l'expression "besoins des pouvoirs publics"

inutile et permettrait aussi aux Membres de contourner l'obligation énoncée à l'article III:4 du GATT de 1994.249

i) États-Unis

i.218 En ce qui concerne l'analyse de la "similarité" au titre de l'article III:4 du GATT de 1994, les États-Unis rappellent que plusieurs groupes spéciaux ont jugé important le fait qu'une mesure établit

246 Communication de la Corée en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 22 à 26.

247 Communication de la Corée en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 31 à 34.

248 Mexique, communication en tant que tierce partie (DS412), paragraphes 16 à 19; et communication en tant que tierce partie (DS426), paragraphes 16 à 19.

249 Déclaration de la Norvège en tant que tierce partie (DS412 et DS426), paragraphes 2 à 6.

une distinction entre un produit national et un produit importé uniquement sur la base de l'origine.250 S'agissant de l'article III:8 a), les États-Unis traitent les trois questions suivantes.

i.219 Premièrement, les États-Unis soutiennent que le Canada a attribué indûment un "objet et [un]

but" à l'article III:8 a) du GATT de 1994. Ils rappellent que l'article 31 de la Convention de Vienne dispose que l'interprétation des dispositions d'un traité sera éclairée par l'objet et le but du traité. Par conséquent, selon eux, l'identification correcte de l'objet et du but d'un accord ne résulte pas de l'examen d'un sous-article isolé de cet accord.251

i.220 Deuxièmement, les États-Unis font valoir que le Canada a donné une interprétation trop large de l'expression "besoins des pouvoirs publics" figurant à l'article III:8 a). Ils font valoir que l'interprétation du Canada vide de son sens l'expression "achat pour les besoins des pouvoirs publics"

pour deux raisons: i) presque toutes les acquisitions des pouvoirs publics sont "ordonnées par" un document quelconque des pouvoirs publics; et ii) l'interprétation du Canada est circulaire, car il est difficile de concevoir une situation dans laquelle des pouvoirs publics affirmeraient qu'ils n'agissent pas en ayant à l'esprit un but qui est le leur.252

i.221 Enfin, les États-Unis considèrent que le Canada a identifié incorrectement le produit pertinent aux fins de l'article III:8 a). Il apparaît que les achats particuliers auxquels s'applique la prescription TRG relative à la teneur en éléments locaux – les ventes de matériel par des fabricants à des producteurs d'électricité privés – diffèrent, quant à leur nature et en vertu des contrats de la prétendue acquisition d'électricité par les pouvoirs publics qui est au cœur du moyen de défense du Canada fondé sur l'article III:8 a). Autrement dit, bien que le Canada identifie systématiquement l'électricité comme étant le "produit" visé par l'article III:8 a), il cherche à justifier des prescriptions relatives à la teneur en éléments locaux qui s'appliquent au matériel. Selon les États-Unis, il ne s'ensuit pas qu'une prétendue acquisition par les pouvoirs publics d'une catégorie de marchandises au regard de l'article III:8 a) justifie une prescription relative à la teneur en éléments locaux, qui vise des achats privés d'une catégorie différente de marchandises. Les États-Unis estiment que l'interprétation avancée par le Canada étendrait la portée de l'article III:8 a) bien au-delà de son sens ordinaire, en l'élargissant effectivement pour permettre que l'acquisition par les pouvoirs publics d'une marchandise serve à faire jouer toutes sortes de prescriptions relatives à la teneur en éléments nationaux.253

3. Évaluation par le Groupe spécial