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CHAPITRE 4 : PRÉSENTATION DES RÉSULTATS

4.2 O RGANISATION SYNDICALE B (OSB)

4.2.4 Modalités de socialisation (VI-2): la revitalisation par l’intégration

4.2.4.2 Une approche personnalisée

Ce dernier témoignage nous transporte directement vers la question des modalités de socialisation de proximité. Il semble que les jeunes y soient très sensibles et qu’on puisse susciter la participation de ceux-ci par le contact humain.

Au plan local, il semblerait que le recours aux délégués de plancher soit un outil efficace pour le recrutement de militants et pour stimuler la participation des membres.

Faut qu’il y a eu une approche préliminaire pour qu’un jeune puisse s’impliquer, c’est du one-on-one. Si [le jeune] ne s’est pas fait approcher, il ne connaitra pas l’aspect collectif du syndicat. Sinon il va plus prendre en compte le côté individualiste. Il se dit « j’ai un syndicat, mais je ne sais pas il est où, je l’ai jamais vu, je n’ai pas été approché par eux, je ne connais pas le fonctionnement, je ne connais pas l’ensemble, la mobilisation, la vie en arrière de ça. Donc je vais pousser mes revendications personnelles. » Tant qu’il n’est pas pris en charge [par son syndicat], il va y avoir une perception, par les anciens, que le jeune est beaucoup plus pro patronal que pro syndical dû au fait qu’il n’a pas eu d’interaction avec son syndicat. Selon la grosseur

de ton syndicat, tu vas avoir des délégués de plancher. Ton délégué de plancher doit connaître quelques jeunes. Si t’as 25% de jeunes dans ton usine ou dans ton endroit de travail, bien le délégué de plancher même s’il n’est pas sur le même site que le bureau syndical, il doit en connaître quelques un et là, c’est de les approcher un à un (Entretien B-3).

Les relations interpersonnelles semblent porter fruits dans certains cas : l’expérience réussie du mentorat dans les assemblées générales en est un exemple.

Un syndicat me disait qu’ils ont mis en place des parrains pendant les assemblées. Un vieux de la vieille va amener un jeune. Pendant tout le long, le jeune pose ses questions au parrain pour dire quand c’est le temps de poser des questions et là, personne ne va lui dire que ce n’est pas le temps! (Entretien B-1).

Parmi les représentants jeunes rencontrés, deux sur trois ont confié avoir été recrutés par un représentant syndical d’expérience qui les ont personnellement formé et encouragé à participer comme militant dans leur syndicat local (Entretiens B-1, B-3). En ce sens, la socialisation de proximité, une personne à la fois, semble stimuler la participation des jeunes qu’elle atteint.

Quand je suis rentré à l’usine, j’ai travaillé avec l’ancien président du syndicat qui était là depuis 25 ans et il m’a expliqué les luttes et le pourquoi on était syndiqué. Un syndicat qui vient d’être créé est toujours plus fort parce que les gens savent pourquoi ils se sont syndiqués, tandis que quand tu arrives dans un milieu déjà syndiqué, il y a un rattrapage à faire parce que la personne ne sait pas pourquoi elle est syndiquée. (Entretien B-1).

L’ancien président [de l’OSB] était président d’une autre unité dans la même usine que moi et il a poussé pour moi et j’ai été approché en septembre 2011 pour le CJNB (Entretien B-3).

La socialisation de proximité semble prendre plusieurs formes et s’insère souvent en marge de la socialisation à caractère distancié.

Je suis allé au congrès et j’ai adoré. J’ai adoré parce que j’ai échangé avec des conseillers, des avocats, des présidents, des agents de grief, des trésoriers… j’ai

échangé avec plein de monde! C’était hyper enrichissant côté connaissances (Groupe de discussion B-7, intervenant 5).

Les représentants du CJNB, qui organisent les activités de formation et de réseautage dédiées aux jeunes, accordent d’ailleurs une attention particulière à la mise en relation informelle des jeunes qui y participent.

Quand tu mets des gens qui partagent le même intérêt, soit le syndicalisme, parce qu’ils sont là pour se faire former, donc le soir ça parle de syndicalisme. Ça encourage, ça les fait partager. Je pense que dans [la formation dédiée aux moins de 30 ans], l’informel est plus important que ce qu’on apprend dans la classe, parce que ça crée des liens, ça crée des réseaux (Entretien B-2).

Au final, on note que la revitalisation des modalités de socialisation pour encourager la participation des jeunes provient en majeure partie de l’OSB et du CJNB et peu des syndicats locaux. Ce constat inquiète puisqu’on nous a fait part d’un certain exode des jeunes militants vers d’autres lieux de participation collective, tels que les organismes communautaires (Entretien, B-2). De surcroît, la socialisation mise en place par l’OSB ou le CJNB génère peu d’intérêt pour les représentants locaux, surchargés par les tâches normales de gestion des relations de travail et de services syndicaux.

La socialisation distanciée demeure modeste en temps de paix industrielle. L’accueil des nouveaux membres n’est pas pratique courante et les assemblées générales sont désormais dénaturées en ne servant qu’à diffuser de l’information sur les activités du syndicat local. La même tension s’observe entre le national et le local au niveau des communications. Il semble en effet que le message de l’OSB ne soit pas relayé au plan local par les militants. De plus, la communication strictement locale ne parait pas rejoindre son public cible. Le recours aux nouvelles technologies ne constitue toujours pas une source d’innovations pour l’instant.

Néanmoins, les modalités de socialisation de proximité démontrent un certain degré de dynamisme et d’innovation. Une « approche préliminaire » pourrait atténuer l’incompréhension des traditions et accélérer une participation active des jeunes (Entretien B-

2). Le processus de socialisation pourrait ainsi s’enclencher par des expériences positives. La formation de délégué de plancher peut faire en sorte de multiplier ces approches préliminaires, diffuser l’information syndicale, faciliter les communications et assurer le recrutement de nouveaux militants. On doit aussi noter l’importance significative du réseautage en marge des activités et mécanismes de socialisation à caractère distancié.

Nos observations sur les modalités de socialisation répertoriées à l’OSB sont récapitulées dans le tableau qui suit (9).

Tableau 9 : Modalités de socialisation à l’OSB

VI-2 Sous-dimensions Synthèse des résultats

Modalités de socialisation

Activité(s) et mécanisme(s) de

socialisation à caractère distancié mis en place par le syndicat

- Accueil et intégration déficiente; - Assemblée générale;

- Processus de traitement des griefs;

- Formation syndicale pour les jeunes membres et les militants syndicaux; - Communications et diffusion de l’information : babillard syndical, médias

sociaux.

Remarque(s) : les jeunes rencontrés soutiennent que la majorité des modalités de socialisation mises en place ne visaient pas les jeunes en particulier. Les jeunes pourraient évacuer les lieux de socialisation à caractère distancié pour s’impliquer ailleurs ou de manière différente. La « tradition » syndicale présente peu de signification pour les jeunes rencontrés et on remet en question la conflictualité comme vecteur de socialisation.

Activité(s) et mécanisme(s) de

socialisation de proximité mis en place par le

syndicat

- Délégués de planchers;

- Mentorat par les pairs expérimentés;

- Interactions informelles en marge des activités et mécanismes de socialisation à caractère distancié.

Remarque(s) : les modalités de socialisation de proximité permettent d’amorcer positivement le processus de socialisation. Une approche personnalisée serait à privilégier et le rôle des délégués de plancher gagne en importance de ce fait.

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