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Approche méthodologique des entretiens et limites des terrains d’étude

1.3. Problématique, terrains et méthodologies de recherche

1.3.2. Approche méthodologique des entretiens et limites des terrains d’étude

En complément des développements présents au sein des articles, l’objectif de cette sous-partie divisée en deux temps est de présenter précisément la méthodologie sur laquelle la thèse s’est reposée pour mener à bien les entretiens qualitatifs de recherche. Premièrement, les méthodologies retenues pour réaliser et analyser les entretiens semi-directifs avec les divers acteurs seront présentées ainsi que les récits de vie auprès des migrants âgés. Deuxièmement, nous ferons état des limites, des difficultés et des questionnements qui ont jalonné la phase de mise en œuvre des entretiens de recherche au sein des terrains d’études.

o 1.3.2.a. Une méthodologie qualitative, réalisation et analyse des entretiens.

La recherche doctorale a donc opté au niveau méthodologique pour une approche qualitative dans une volonté compréhensive et inductive. Dans cette intention l’entretien en tant qu’outil reconnu au sein des sciences humaines et sociales (Blanchet et Gotman, 2010), a représenté la technique d’enquête qualitative mobilisée. La finalité visée à travers la mise en œuvre d’entretiens a été d’explorer et interroger les connaissances relatives à l’objet d’étude, dans le cadre de la thèse : les vieillesses immigrées. L’usage des entretiens qualitatifs s’est révélé complémentaire à l’analyse de la littérature, dont l’approche méthodologique a été présentée en amont (1.2.1.).

Au regard de la multiplicité des formes d’entretiens qualitatifs existant dans le champ des sciences sociales (Flick, 2007), la thèse a retenu les entretiens qualitatifs semi-directifs et les récits de vie comme outils pour mettre en œuvre les terrains de recherche. Ces deux méthodes vont ici être développées successivement, tout en prenant en compte qu’elles seront également décrites plus succinctement au sein des articles de recherche (Articles n°4, 5 et 6).

- Les entretiens semi-directifs auprès des acteurs professionnels, bénévoles et politiques.

Par sa forme semi-directive, ce type d’entretien permet de faciliter l’expression libre des personnes interrogées. S’il représente un mode « d’interaction proche de la conversation » (Nossik, 2011, § 6), l’entretien semi-directif permet pour autant de s’assurer de cadrer la nature des échanges autour de l’obtention des informations thématiques souhaitées. Dans la relation de communication instaurée, il présente aussi l’avantage par la non-directivité des échanges de favoriser l’exploration du discours de l’interviewé. Cette technique d’enquête laisse donc place au recueil d’informations

ou de thèmes qui n’avaient pas été envisagés ou pressentis par l’enquêteur. Durant la situation d’entretien, l’agencement des questions ou des thèmes abordés n’est pas strict au sens où chaque thème et question seraient posés successivement dans un ordre chronologique qui ne pourrait dévier. Au contraire, il relève d’une souplesse de la part du (jeune) chercheur qui s’adapte à l’interlocuteur au gré de l’avancement de l’entretien, en respectant la dynamique du discours de l’acteur interrogé. Enfin, les recherches d’informations effectuées avant les entretiens (statistiques, littérature existante) ont été importantes, puisqu’elles ont permis d’interroger ensuite les connaissances et les observations subjectives des acteurs. Cette mise en regard est substantielle selon S. Beaud, pour qui « la possession d'un certain nombre de données objectives est

indispensable si l'on veut mettre ensuite en rapport ces dernières (collectées de manière éparse tout au long de l'entretien) et les points de vue subjectifs exprimés par l'enquêté » (Beaud, 1996,

p.241).

Pour la thèse, les entretiens semi-directifs ont été utilisés au sein des deux terrains d’études pour interroger les principaux acteurs médico-sociaux, gérontologiques, associatifs et politiques intervenant potentiellement auprès des migrants âgés. Cet outil d’enquête présentait alors l’intérêt de questionner et ainsi de saisir auprès des acteurs leurs représentations et expériences associées aux situations rencontrées et aux évènements vécus en lien avec l’objet de recherche (en contexte professionnel, bénévole, politique, etc.) (Blanchet et al, 2005). Par ce choix, la finalité était premièrement d’adopter une perspective exploratoire sur le thème de recherche. Deuxièmement, cela a également contribué à collecter les informations et connaissances permettant à Montreuil et en Maine-et-Loire de répondre à la seconde hypothèse de recherche (1.3.1.b.). Pour rappel cette dernière interroge l’éventuel moindre recours des migrants âgés aux actions, services et structures gérontologiques. Ce probable moindre recours est envisagé à partir des éventuelles disparités territoriales existantes en fonction des contextes territoriaux, et ce en fonction de la sensibilisation des acteurs aux problématiques que connaissent les migrants âgés.

Concrètement, la première démarche a été de définir la liste des acteurs à solliciter, ci-après les différentes structures et organisations auprès desquelles une demande d’entretien a été adressée au sein des deux terrains d’études sont présentés.

Les principaux organismes et structures sollicités :

 Centres locaux d’information et de coordination gérontologique

 Centres communaux d’action sociale  Services sociaux départementaux  Direction départementale de la cohésion

sociale

 Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes  Services sociaux des hôpitaux

 Centres de soins de suite et de réadaptation

 Services d’aide à domicile et services de soins infirmiers à domicile

 Foyers de travailleurs migrants et résidences sociales

 Bailleurs sociaux

 Élus en charge des personnes âgées, de la solidarité

 Comité départemental des retraités et des personnes âgées

 Associations intervenant auprès des migrants âgés.

Concernant le guide d’entretien élaboré (Annexe I)63, celui-ci a été construit en regard des objectifs

de recherche, il n’était pour autant pas figé, mais évolutif. En effet, en préservant les grands thèmes définis, il a été ajusté en amont de la réalisation des entretiens aux spécificités de chaque acteur en regard de son domaine d’intervention ou d’action, et en fonction de la position et du rôle de l’acteur dans l’institution (certaines questions étaient par exemple ajoutées dans le cadre d'un entretien avec un élu politique, qu'il n’aurait pas été légitime de poser à un intervenant de centre social par exemple).

L’ensemble des acteurs et structures sollicité a été contacté dans un premier temps par mail, celui- ci étant accompagné d’un fichier PDF de présentation du projet de recherche (Annexe V). L’intention de ce document validé par l’encadrement de thèse était de développer le contexte et l’objectif de la recherche, la méthodologie et les étapes du projet. De plus, le document introduisait synthétiquement les principaux thèmes et questions posées dans le cadre des entretiens semi- directifs. En cas de non-réponse, une ou plusieurs relances téléphoniques étaient réalisées auprès des structures et acteurs.

Au sein des deux terrains de recherche, ce sont en définitive 39 entretiens semi-directifs64 (dont 10

collectifs) qui ont été réalisés auprès de 52 professionnels, bénévoles et élus. 15 structures ont répondu uniquement par des échanges téléphoniques ou par emails et 58 structures ou acteurs n’ont pas donné de réponses ou ont répondu défavorablement à la demande d’entretien.

63 La manière dont les entretiens se sont déroulés est présentée également en Annexe I.

64 Les entretiens réalisés sont détaillés au sein d’un tableau en Annexe I présentant les acteurs rencontrés dans chaque territoire de recherche et les dates de réalisation des entretiens.

Dans la mise en œuvre des entretiens, la posture adoptée a été primordiale pour favoriser autant que possible l’expression la plus libre possible des intervenants. Il s’agissait donc de proposer une écoute attentive et empathique (Kaufmann, 2016), tout en restant conscient des enjeux inhérents à toute situation de communication. De même, il était important de guider les propos et les échanges avec les interlocuteurs pour ne pas dévier des objectifs de recueils d’informations. Pour réorienter les échanges, la technique de la « relance-miroir » (Demazière 2007) a été utilisée le plus souvent possible en reprenant ainsi directement les paroles de l’acteur interrogé. Cette technique permettait notamment d’éviter autant que possible l’usage des questions qui pouvaient comprendre et « imposer des catégorisations du monde préconçues par le chercheur » (Nossik, 2011, § 6). Dans les entretiens, il a aussi parfois été difficile auprès d’élus expérimentés de ne pas se faire « embarquer » dans leurs préoccupations actuelles, s’éloignant petit à petit du thème de recherche (passant par exemple du vieillissement des immigrés « qui ne pose pas problème », aux problématiques rencontrées par les « jeunes de l’immigration » au sein des quartiers prioritaires). Les apports expérientiels des premiers entretiens avec leurs lots de tâtonnements, d’hésitations et de difficultés ont été profitables pour constamment essayer de conforter la posture de recherche en entretien et les relations nouées avec les acteurs interrogés. C’est donc un apprentissage constant qui au gré de l’avancement de la réalisation des terrains d’études m’a permis de me questionner et d’entrevoir les ajustements possibles au service de la recherche en construction. Enfin, la conclusion des entretiens était souvent propice à des échanges plus informels sur la recherche, mais également bénéfiques pour demander des contacts auprès d’autres acteurs ou structures. Cela présentait l’avantage de pouvoir contacter ces derniers, tout en les informant que j’étais orienté par l’un de leurs partenaires ou collègues, ce qui a grandement favorisé l’obtention d’entretiens.

- Le recueil de récits de vie auprès des migrants âgés.

Au sein des diverses approches biographiques existant dans le champ des sciences humaines et sociales, la thèse a eu recours aux récits de vie. Ces derniers en tant que « modalité de production

de connaissances » (Interrogations, 2017, en ligne) permettent par le recueil de récits

biographiques, sous la forme narrative, de questionner et d’étudier des parcours individuels à la lumière des expériences vécues et exposées par les personnes interrogées. D’après le sociologue D. Bertaux, les récits de vie sont donc « une production dialogique d’un discours improvisé sans

notes, sans recours aux archives écrites, se fondant sur la remémoration spontanée des principaux événements tels qu’ils ont été vécus, mémorisés et totalisés, s’efforçant d’en retrouver les enchaînements, et communiquer à la personne en face avec un souci réel de véridicité/véracité »

« travail » que représente le fait de retracer sa propre vie (Ibid.), et donc de donner à voir à partir de son discours d’une forme de réalité sociale subjective (Nossik, 2011). Ainsi, « loin d’être des

artefacts inutilisables dans un cadre scientifique parce que trop subjectifs ou narrativisés, les récits de vie constituent donc un corpus précieux en raison même de leur subjectivité » (Ibid., p. 125).

Au niveau géographique, cet outil de recherche est peu fréquemment utilisé au sein de ce champ disciplinaire. Il est pour autant fécond en offrant la possibilité de recueillir « dans le même moment

une expérience individuelle irréductible et une expérience sociale globale. Pour le géographe, la pertinence de ce type de matériau tient à cette double dimension » (Gumuchian, 2000, p. 341). En

devant présenter, décrire son parcours, la personne se retrouve en position de retracer et progressivement analyser son propre itinéraire sociospatial. « C'est donc plus qu'un simple exercice

de collecte d'informations ; c'est aussi une construction ou une reconstruction de son espace de vie par le narrateur lui-même » (Ibid., p.342). Contrairement à d’autres approches biographiques, les

récits de vie présentent aussi l’intérêt d’appréhender plus synthétiquement les parcours de vie des personnes interrogées (Poirier et al., 1993, citée par Plard, 2012). Ainsi, le fait de pouvoir réduire les temps de rencontre pour le récit de vie à un entretien long, au lieu de plusieurs séquences d’entretiens, était important au regard des difficultés parfois rencontrées en contexte d’entretien avec les sujets de l’étude (ces différents freins et difficultés seront décrits dans la sous-partie suivante 1.3.2.b).

En tant que principaux sujets de la recherche, les migrants âgés ont donc été les informateurs privilégiés pour accéder à la richesse des connaissances qu’ils détiennent sur leurs parcours, leurs expériences et les éventuelles épreuves et difficultés rencontrées au fil de leur avancée en âge. Les récits de vie se sont donc révélés pertinents pour saisir auprès d’eux leurs trajectoires sociospatiales singulières à partir de leurs expériences vécues. Par cette méthodologie d’enquête, il était alors possible d’interroger les liens existants entre leurs parcours biographiques et leurs situations actuelles à la retraite et dans la vieillesse. La mise en œuvre des récits de vie permettait ainsi de mettre à l’épreuve la troisième hypothèse de recherche (1.3.1.b.), celle-ci interrogeant à l’échelle individuelle, en quoi l’expérience de la migration influencerait tant sur le plan social que spatial les trajectoires biographiques des migrants dans la vieillesse. Par le recours aux récits de vie, il était également possible de saisir dans l’analyse de leurs trajectoires les principaux changements et épreuves qu’ont rencontrés les individus d’après leurs propres expériences.

Dans l’emploi de cette méthode, il était cependant important d’être vigilant quant aux limites associées à cet outil de recherche. Notamment, une distance existe de fait entre la réalité subjective retransmise lors de la réalisation du récit biographique par la personne et le parcours biographique

qu’a réellement connu l’individu. De cet « écart » ont ainsi émergé de vifs débats au niveau scientifique, critiquant notamment « l’illusion d’authenticité des récits de vie. “L’authenticité”

supposée de ce qui est narré [pouvant tendre] à réifier et essentialiser la parole des individus et les individus eux-mêmes (Spivak, 1988) » (Olmedo et Mekdjian, 2016, en ligne). Néanmoins, dans cet

entre-deux de la réalité subjective et objective, il faut distinguer selon D. Bertaux un niveau intermédiaire représentant un troisième ordre de réalité entre l’histoire réelle et le récit qu’en fait la personne. C’est ce que ce chercheur nomme « la totalisation subjective de l’expérience vécue » (Bertaux, 2010, p.75). Ce niveau intermédiaire est alors constitué « de souvenirs, mais aussi de

leur mise en perspective, de réflexion continue et d'évaluation rétrospectives. Mémoire, réflexivité, jugement moral, joies et souffrances y contribuent, ainsi que les autres facultés intellectuelles du sujet, ses “équipements culturels” et son idéologie, sa vision du monde et de sa place dans le monde » (Ibidem). Les récits de vie permettent donc en définitive de recueillir des informations et

des indices à trois niveaux différents : au niveau individuel (l’intériorité propre au sujet) ; au niveau des relations intersubjectives (avec l’ensemble des relations durables de la personne) ; et au niveau socio-structurel (le système et les mondes sociaux qui contribuent à la définition « des positions,

des statuts, des rôles, des normes, des valeurs, des significations partagées » (Ibid., p.71)). Ce

dernier aspect apparaît particulièrement intéressant par rapport aux personnes immigrées vieillissantes, qui du fait de leur expérience de la migration au cours de leur vie ont été amenées à être en relation avec des contextes territoriaux et socioculturels pluriels.

À travers l’usage des récits de vie dans la thèse, c’est donc l’ancrage subjectif des individus qui a été exploré en situation d’entretiens. Comme cela sera décrit dans l’article n°6, les limites associées à « l’idéologie biographique » (Bertaux, 2010) ou « l’illusion biographique » (Bourdieu, 1986) ont aussi été prises en considération. Ces deux termes font référence à la propension que peuvent avoir les individus lors de la mise en œuvre du récit de leur vie à se représenter « le cours de [leur]

existence comme présentant après coup une forte cohérence. (…) C’est ce phénomène de reconstruction a posteriori d'une cohérence, de “lissage” de la trajectoire biographique, que [D.

Bertaux avait] repéré et désigné comme “idéologie biographique” » (Bertaux, 2010, p.37).

Malgré cet enjeu, les récits biographiques sont avantageux pour identifier et analyser les ruptures de linéarités biographiques en lien avec les personnes (Bidart, 2006). La mise en œuvre des récits permettait pour exemple de tendre à identifier les bifurcations biographiques65 dans les trajectoires

65 En comparaison des transitions biographiques qui correspondent « à des passages institutionnalisés du cycle de vie » (Mazade 2011, p.4) et donc prévisibles (la retraite par exemple), les bifurcations biographiques correspondent quant à elles à « toute situation sociale dans laquelle un évènement imprévisible a des effets irréversibles, c'est-à-dire durables,

et qui, amorcé dans un contexte spécifique, a des conséquences sur des registres plus étendus de la vie sociale » (Raynaud, 2010, § 3).

des migrants âgés. Ces bifurcations correspondant à des instants impliquant des changements importants et des évènements non prévus par l’individu, générant de multiples conséquences et adaptations pour celui-ci (Bessin, Bidart et Grossetti 2009).

Par rapport à l’échantillon de recherche (présenté dans l’article n°6), les personnes interrogées ont donc été choisies en regard de leurs caractéristiques communes répondant à l’objet de recherche, c’est-à-dire l’expérience de la migration au cours de leur vie tout en étant actuellement à la retraite et en vivant au sein du territoire de recherche (ou au moins partiellement pour les transmigrants). Au regard des objectifs de l’étude, l’échantillon s’est révélé extrêmement ouvert et diversifié en termes d’âges (60 ans ou plus), d’origines (européens et non européens) de sexe (femmes et hommes) et au regard des conditions d’habitat (propriétaire, locataire, résident en foyer ou résidence sociale). La recherche des individus pouvant participer aux entretiens de recherche a nécessité la mise en œuvre de différentes stratégies pour augmenter les possibilités d’accès à ces publics. De même, les récits de vie ont été mis en œuvre uniquement sur l’un des deux terrains de recherche, en Maine-et-Loire où sept récits de vie ont été réalisés, complétés par la réalisation de deux focus groups (les stratégies d’approches et ce choix territorial seront justifiés en 1.3.2.b.).

Concernant le déroulement des récits de vie, ceux-ci pareillement aux entretiens semi-directifs avec les acteurs ont débuté par une présentation de la recherche en argumentant l’importance du recueil de témoignages prenant la forme de récit de vie. Les conditions de réalisation des entretiens ont bien entendu été rappelées (anonymat, demande de l’accord pour l’enregistrement, respect de la parole, possibilité d’arrêter à tout moment l’entretien, etc.).

L’entretien était ensuite ouvert par la question introductive suivante :

« Si vous l’acceptez, pouvez-vous me parler de votre parcours de vie ? Où êtes-vous nés ? Comment êtes-vous arrivés en France ? »

Une fois la situation d’entretien amorcée, le récit devait suivre la voie choisie par la personne. Il était alors important dans les conditions de mise en œuvre de l’entretien et dans les postures adoptées de générer auprès des migrants âgés une « incitation à se raconter » (Demazière, 2003) favorisant le partage de leurs itinéraires biographiques et le recueil de leurs propres perceptions et argumentaires sur les significations de leurs parcours (Ibid.). L’entretien était donc structuré autour d’un échange, ponctué de relance (« relance-miroir »), les récits de vie ne s’apparentant en aucun cas à un monologue (Chaxel, Fiorelli et Moity-Maïzi 2014). Le récit de vie était également l’occasion d’explorer différents thèmes associés aux trajectoires biographiques de l’individu (migratoire, familiale, professionnelle, passage à la retraite, activités et relations, habitat et espaces

de vie, relation au pays d’origine et pratiques transmigratoires, santé et vieillissement, fin de vie et choix funéraires, etc.). Pour autant, pour explorer ces thèmes, le procédé employé a été différent que lors des entretiens semi-directifs. En effet, dans la dynamique de l’entretien il était essentiel que ce soit les individus qui évoquent les thèmes par eux-mêmes. Si à la fin de l’entretien, ceux-ci ne les avaient pas évoqués ou couverts, ces points étaient abordés pour recueillir ces informations (Bertaux, 2010). Cela permettait en définitive, tout d’abord de nourrir l’échange, mais également de s’assurer du recueil des informations consubstantielles à la recherche. Pour exemple, lors des échanges, les migrants âgés étaient interrogés à travers les relances sur les individus composant leur réseau social. Cela permettait d’identifier ensemble « les autrui significatifs » tels que les nomme C. Bidart (2006), avec qui l’individu entretient des liens et relations ayant marqué leur parcours passé ou présent. De même, les migrants âgés étaient aussi invités au cours de l’entretien à faire part de leur avenir, ce dernier étant « affecté de conditions de possibilité ou de désirabilité » (Demazière, 2003, p.76). Enfin, au regard de l’inscription disciplinaire, il était important au sein des échanges de permettre aux personnes de décrire le plus précisément possible leurs espaces de vie au sein desquels elles ont vécu, ce qui n’a pas toujours été aisé principalement du fait des freins associés à la langue.

À la fin de la réalisation du récit de vie et après avoir remercié les personnes, des discussions plus informelles non enregistrées sur le thème de recherche ou le parcours de la personne ont souvent