• Aucun résultat trouvé

Approche à gradient de gonflement

4. Applications numériques

4.3 Approche à gradient de gonflement

On s’intéresse ici aux mécanismes d’endommagement ductile pour lesquels le niveau

d’endommagement est gouverné par le gonflement local de la matière11, notamment ceux décrits

par le modèle de Rousselier. Il est alors possible de contrôler la localisation en pénalisant les forts gradients de gonflement, dans l’esprit des approches à gradients de déformation présentées au § 3.2. Moyennant cette restriction, la famille d’éléments finis mixtes introduite au § 2.2 pour

11 En pratique, cela exclut la ruine ductile en cisaillement, associée notamment au phénomène de germination continue et contrôlée par le glissement plastique.

-40 -20 0 20 40 distance à la fissure (mm) 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 endommagement

approche à déformation régularisée interpolation a=cos(x/d)

approche à gradient d’endommagement interpolation a = exp(-|x|^1.5 / d’)

traiter au mieux les forts niveaux de déformation plastique caractéristiques de la ruine ductile se prête parfaitement à une telle approche car le gonflement local y est une variable nodale : l’accès à son gradient est en effet aisé sur le plan numérique.

Modélisation

On adopte comme point de départ la forme différentielle (4.20) dont on rappelle qu’elle n’est généralement pas exacte (i.e. le problème ne dérive pas d’une énergie) en présence de grandes déformations plastiques. Elle introduit le gonflement G comme une variable cinématique a

priori indépendante des déplacements. Le multiplicateur de Lagrange P , qui s’interprète comme

la pression, vise à assurer au sens faible une compatibilité entre les déplacements et le gonflement. En s’inspirant des formulations à second gradient (4.26), la forme différentielle est enrichie d’un terme quadratique en gradient de gonflement qui pénalise les localisations du champ de gonflement, et donc celle d’endommagement :

( ) ( ) ( )

0 D H 0 ext ln W P P G J G P c G G d   δ = + δ + τ − δ + − δ + ∇ ⋅∇δ Ω − δ ⌡ τ Id : L Q (4.49)

On retrouve ainsi la forme d’énergie libre enrichie (4.27), à ceci près que seul le gradient du terme de gonflement de la déformation est pris en compte, pondéré par le paramètre c (N) qui

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5

déplacement vertical imposé (mm) 0 20 40 60 80 100 résultante (N / mm épaisseur)

introduit la longueur interne. L’interprétation (4.28) en termes de tenseur de contrainte d’ordre supérieur perdure, mais elle ne sera pas utilisée sur le plan numérique.

Formulation numérique

Avant discrétisation spatiale, la forme différentielle (4.49) correspond à la variation de l’énergie enrichie, au bémol près des grandes déformations. L’introduction du gonflement comme une variable indépendante permet néanmoins, après discrétisation spatiale, de s’affranchir du recours à des éléments finis C1−conformes en déplacement, très peu pratiques surtout en 3D. En fait, la formulation mixte prend en compte le gradient de déformation (via le gonflement) pratiquement sans aucune modification : la contribution de chaque élément aux efforts intérieurs se voit simplement augmentée d’un terme proportionnel à ∇G. En particulier, le choix de fonctions de forme reste celui préconisé dans le tableau IV.2.

De ce fait, on pourrait s’attendre à ce que la prise en compte des termes non locaux s’effectue sans surcoût. En fait, la réalité est plus nuancée dans la mesure où une discrétisation spatiale adéquate des champs mécaniques en présence de localisation n’est obtenue qu’avec des maillages suffisamment fins dans la zone de localisation. Comparativement à un calcul élastoplastique standard, le maillage sera donc bien plus fin, avec une répercussion immédiate sur les temps calculs.

figure IV.13 – Eprouvette AE4 : géométrie et caractéristiques du matériau Elasticité 198 000 MPa ; =0.3 495 MPa y E= ν σ = Ecrouissage

( )

0 1 0 0 R 1 015 MPa ; 0.15 n n y y p p n σ = σ + − σ σ σ = = Endommagement 1 4 0 490 MPa ; 2 5 10 D f σ = = = ×

Couplage non local 5.2 N

Application

Cette dernière application illustre toute la chaîne de calcul dédiée à la rupture ductile : loi de Rousselier, éléments finis quasi-incompressibles, modèle non local à gradient de gonflement. On cherche à y décrire la ruine d’une éprouvette axisymétrique entaillée dont on sait expérimentalement qu’elle conduit à un profil de fissuration en forme de cône tronqué ou cup-cone, c’est-à-dire un trajet de fissuration inconnu a priori.

La géométrie de l’éprouvette et les caractéristiques du matériau (acier ferritique 16MND5) sont données en figure IV.13. Seule la zone utile de l’éprouvette, au voisinage de l’entaille, est modélisée ; elle est soumise à des déplacements imposés sur ses bords supérieur et inférieur. On n’exploite pas la symétrie par rapport au plan z=0 qui exclurait la formation d’un cup-cone (rupture de symétrie). En revanche, on se restreint à un problème 2D en tenant compte de la symétrie axiale, conformément à l’expérience. Cela autorise l’usage d’un maillage extrêmement fin, nécessaire dans la mesure où la zone d’endommagement est a priori inconnue. En s’appuyant sur les éléments triangulaires P2-P1-P2, il en résulte un problème à 30 000 triangles et 200 000 degrés de liberté (et à matrice tangente non symétrique). On s’astreint en outre à des incréments de chargement suffisamment petits pour que l’incrément de déformation plastique ne dépasse jamais 5 % : plus de 250 incréments sont alors nécessaires.

Les résultats sont conformes aux attentes. En termes de réponse globale de l’éprouvette d’une part, voir figure IV.14 sur laquelle on observe en particulier le point de localisation (1) qui

0 0,05 0,1 0,15 0,2

relative diameter reduction 0

200 400 600

Normalised load F/S0 (MPa)

(1)

(2)

(3)

(4)

correspond à une rupture de pente : la localisation de l’endommagement se fait sentir à l’échelle de la structure. En termes d’évolution de la porosité d’autre part, avec prédiction de l’initiation de l’endommagement au cœur de l’éprouvette où la triaxialité est la plus forte, de la propagation à plat vers l’entaille et enfin de la bifurcation en biais jusqu’à atteindre le bord de l’éprouvette, voir figure IV.15. Au moment de la ruine, les niveaux de déformation plastique atteints sont très élevés (de l’ordre de 200 %).

Le caractère opérationnel de la chaîne de calcul est donc démontré, en particulier son aptitude à déterminer des trajets de fissuration complexes. A la différence des problèmes fragiles, aucune instabilité n’est détectée. Le niveau de dissipation est en effet largement supérieur en régime

(1) Localisation (2) Branching

(3) Bifurcation (4) Ultimate fracture

ductile. En revanche, des difficultés subsistent là aussi, notamment en raison de mailles extrêmement étirées dans la zone de fort endommagement. Un remaillage complet y serait sans doute nécessaire, à l’instar de ce qui est pratiqué dans les simulations de mise en forme. Mais c’est un problème qui reste difficile à cause des questions de projection des champs d’un maillage à l’autre.

5. Conclusion

Documents relatifs