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Cette étude apporte de nouvelles connaissances sur les groupes de soutien ; cette section vise à les mettre en perspective avec les études antérieures sur les groupes de soutien présentées dans le cadre de référence.

L’étude de Terrillon (2002) portait sur des familles pratiquant l’apprentissage en famille et non sur des regroupements de parents-éducateurs, et les résultats rapportaient que celles-ci ne s’identifiaient pas aux normes sociales auxquelles adhéraient les intervenants scolaires. Lors des évaluations, ces derniers semblaient alors imposer une obligation de résultats aux enfants, en termes de performances attendues dans le cas d’une progression scolaire typique. A l’instar des participants de Terrillon (2002), les groupes de soutien de cette étude adhèrent à une normativité différente de celle qui est issue de l’école ; celle-ci semblant plus proche d’une norme juridique en accord avec une vie sociétale. Cette étude contribue donc à confirmer les résultats de Terrillon (2002) et, fait intéressant, les deux études ne portent pas sur le même pays (France et Canada).

Tyler et Carper (2000) ont décrit le processus d’évolution des groupes de soutien en Caroline du Sud jusqu’au point où ceux-ci ont obtenu l’autorisation légale de s’autogérer et de gérer les pratiques d’apprentissage en famille de ses membres, sans que ceux-ci n’aient besoin d’interagir avec les autorités scolaires légales. Comme pour les groupes de soutien de cette étude, des normes sociales ont été élaborées collectivement, ce qui confirme la possibilité que de tels regroupements de parents- éducateurs puissent participer à une construction normative particulièrement adaptée à leurs besoins. Cependant, il s’agit de nuancer la portée des normes sociales établies en Caroline du Sud et dans les deux groupes de soutien québécois participants : certaines

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normes sociales du groupe de soutien principal de la Caroline du Sud portent explicitement sur l’enseignement des parents-éducateurs, tel que l’enseignement de matières précises, sur 180 jours par an, etc. tandis que pour les groupes de soutien québécois, les normes sociales sont plutôt relatives à un enrichissement de l’expérience éducative. Ils ne tiennent donc pas explicitement compte de l’enseignement dispensé à la maison. Les parents-éducateurs ont néanmoins rapporté des changements dans leur pratique à la maison mais ceux-ci sont plutôt dus aux partages entres les parents- éducateurs et ne font pas l’objet de normes explicites.

Safran (2009, 2010) a montré que les groupes de soutien d’apprentissage en famille fonctionnent comme des communautés de pratique ; ils partagent un but commun, un engagement mutuel et le même répertoire. En effet, les groupes de soutien participants partagent un but commun, défini dans les objectifs ou les missions des groupes, ceux- ci étant revu annuellement lors des assemblées générales. L’organisation d’activité et le partage de ressources en sont des exemples actuels. Les membres s’engagent mutuellement lorsqu’ils adhèrent au groupe et participent aux activités. En s’engageant dans le groupe, les parents-éducateurs acceptent de respecter les normes sociales collectives élaborées par les membres et contribuent à les adapter et à les faire évoluer afin qu’elles soient le plus appropriées à leur pratique. Le répertoire partagé fait référence à une culture partagée par les membres, qui peut s’exprimer par des « stories, slang, 'in' jokes, jargon, routines, artefacts and modes of operating32 » (Safran, 2009,

p. 21). Les entrevues de groupe ne permettent pas de faire émerger un répertoire propre à chacun des groupes participants. Néanmoins, ce qui ressort est une complicité et une compréhension entre les différents membres des deux groupes et qui s’expriment par des phrases commencées par un membre et finies par un autre, des sous-entendus fréquents et des rires partagés. Cette étude tend donc à confirmer les propos de Safran

32 Des histoires, un argot, des blagues, un jargon, des routines, des artefacts et des modes de

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(2009, 2010) sur le fonctionnement des groupes de soutien comme des communautés de pratique.

Quant à la revue de littérature de Kunzman et Gaither (2013), les groupes de soutien y étaient abordés selon leur niveau de formalisation : les « groupes de soutien », les « groupes-guides », les « écoles de mamans » ou les « groupes coopératifs ». L’analyse des deux groupes de soutien québécois ne permet pas de les catégoriser dans l’un ou l’autre des types de groupes présentant puisqu’ils partagent des éléments de plusieurs d’entre eux. En effet, ils visent à des échanges d’informations et à un encouragement mutuel comme les « groupes de soutien » selon Kunzman et Gaither (2013). Les parents-éducateurs partagent leurs ressources, que ce soient lors d’activités, de discussions ou même en ligne comme les « groupes-guides » (Kunzman et Gaither, 2013). Une expertise éducative s’ouvre aux parents-éducateurs, par exemple, lorsqu’un parent-éducateur organise et anime une activité sur un thème particulier ou à l’aide d’une pratique d’enseignement différente comme dans les « écoles de mamans » (Kunzman et Gaither, 2013). Et enfin, ils ont un accès régulier à des locaux pour leurs activités et à l’occasion une activité peut être animée par un animateur ou un conférencier invité comme dans les « groupes coopératifs » (Kunzman et Gaither, 2013). Les groupes participants ont cependant démontré un niveau supérieur d’engagement puisqu’ils œuvrent à une représentation du mouvement d’apprentissage en famille dans leur région, ce qui traduit un engagement collectif qui complète la classification de Kunzman et Gaither (2013).

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