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Applications aéronautiques et spatiales

CHAPITRE 1 : Présentation des systèmes Pile à Combustible hybridés

II. Les Piles à combustible

II.3. Applications aéronautiques et spatiales

Le domaine du spatial, avec son caractère expérimental, a été le premier à utiliser la technologie des PàC à bord d’engins volant. Depuis quelques années, les PàC font leur entrée dans le domaine aéronautique. D’abord à l’état de projets et d’études de faisabilité (il y a une vingtaine d’années), et plus récemment à l’état de démonstrations scientifiques, lors desquelles des prototypes utilisant la technologie PàC sont conçus, réalisés et utilisés dans des expérimentations. Ce paragraphe est dédié à la présentation non exhaustive de diverses applications aéronautiques et spatiales des PàC.

II.3.1.

Les modules spatiaux

Les premières PàC à prendre leur envol furent celles utilisées par les américains lors de la conquête spatiale. En effet, les missions Apollo (PàC alcaline) et Gemini (PEMFC) embarquaient des PàC à bord de leurs modules spatiaux afin d’y produire de l’électricité (Figure 6).

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a) b)

Figure 6 : PàC alcaline du programme Apollo (a) et PEMFC du programme Gemini (b).

La navette spatiale américaine est équipée de PàC Alcalines (AFC pour Alkaline Fuel Cell) (Figure 7). Trois PàC fournissent durant le vol la totalité de l'énergie électrique utilisée à bord. Les PàC sont alimentées en hydrogène et en oxygène pur. Chacune des PàC est capable de fournir 12 kW de puissance maximale (durant 15 minutes) et 7 kW de puissance continue [12].

a) b)

Figure 7 : Space Shuttle (a) et son AFC (b) (NASA).

II.3.2.

Les ballons et dirigeables

II.3.2.1)

Ballons de haute altitude

Une équipe de recherche japonaise [13] a testé un système PEMFC embarqué à bord d’un ballon de haute altitude destiné à réaliser des mesures météorologiques à 35 km au-dessus du niveau de la mer. A cette altitude sont associées une pression et une température ambiante extrêmement faibles et donc défavorables : 0,08 bar et -45 °C environ. L’utilisation d’un système H2 /

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O2 est rendue nécessaire par la faible pression ambiante d’une part (un système aérobie ne pourrait pas fonctionner avec une pression d’air si faible) et par la température de l’air ambiant (les gaz entrant à la cathode doivent être humides et à une température raisonnable, au moins positive). Le système utilisé est composé d’un stack de 16 cellules d’une surface active de 162 cm². 50 à 80 W sont extraits du système (soit moins d’un dixième de sa puissance maximale) afin de ne pas avoir à le refroidir (dans le but de simplifier son utilisation en phase de test). Bien que conçu pour être refroidi par un circuit d’eau, il est simplement isolé thermiquement de l’air ambiant pour s’auto-réchauffer. Les gaz non consommés par la réaction sont rejetés sans recirculation. Les conduites d’évacuation des gaz sont réchauffées afin que l’eau (liquide ou vapeur) ne gèle pas à cause des faibles températures rencontrées.

II.3.2.2)

Dirigeables

L'association française de recherche Dirisoft (loi de 1901) travaille en liens étroits avec l'ENS Cachan (entre autres) sur les nouvelles générations de dirigeables. L'objectif de cette association est d'étudier la faisabilité d'aéronefs de type dirigeables en réalisant des démonstrateurs à échelle réduite. Les applications sont nombreuses : surveillance maritime et inspection d'installations industrielles, télécommunications (antennes relais à haute altitude) et transport de charges lourdes. Dirisoft a mis au point un dirigeable propulsé grâce à une pile à combustible PEMFC H2 / Air (système Ballard 1.2 kW). Le dirigeable MC 160 (Figure 8), présenté à Royan en 2006, a été le premier aéronef au monde propulsé par une PàC. Le MC 500 pourra, dans un futur proche, déplacer une charge de 500 kg et sera équipé d'une PàC hybridée. L'association Dirisoft est en relation partenariale avec le pôle de compétitivité PÉGASE. (www.dirisoft.fr)

a) b)

Figure 8 : Photographies du dirigeable Dirisoft MC 160 (b) et de sa PEMFC (a) (NEXA Ballard 1,2 kW). L’armée américaine voit également l’intérêt des PàCs pour des applications sur dirigeables et a investi 400 M$ pour le développement d’un dirigeable de surveillance continue. Ce dernier, équipé

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de panneaux solaires et de PàC régénératives (PàCs couplées à des électrolyseurs), serait capable de demeurer en l’air 10 ans sans ravitaillement. L’énergie solaire captée est utilisée le jour pour alimenter les systèmes et les électrolyseurs qui produisent de l’hydrogène et de l’oxygène. La nuit, les PàC prennent le relais en utilisant les gaz produits durant la journée.

II.3.3.

Les UAV

Les drones aériens, couramment appelés UAV (Unmanned Aerial Vehicles), sont eux aussi un sérieux secteur d’application pour les PàC, et plus particulièrement pour les PEMFC. L’énergie électrique produite peut alors alimenter un moteur électrique entrainant une hélice conventionnelle et assurant la propulsion, ou bien alimenter les systèmes embarqués (radars, caméras, communications, etc.). Un des intérêts d’utiliser une motorisation électrique pour ce type d’aéronefs, dans le cadre d’applications militaires, est qu’elle dégage nettement moins de chaleur qu’un moteur thermique (une PàC fonctionne à 80 °C environ, contre plusieurs centaines de degrés pour un moteur thermique). Ainsi, la signature thermique de l’engin est réduite et il devient moins facilement détectable. Les émissions sonores sont également nettement amoindries. De plus, cela permet de n’avoir qu’un seul système de conversion énergétique pour alimenter un ou des moteur(s) électrique(s) et les systèmes embarqués.

Par ailleurs, les PEMFC anaérobies sont tout à fait adaptées aux HALE, High Altitude Long Endurance UAV, pour Haute Altitude Longue Endurance. En effet, l’évolution à haute altitude requiert des systèmes anaérobies (à cause de la diminution de pression ambiante liée à l’altitude) ce qui élimine les moteurs thermiques à pistons. Enfin, les PEMFC permettent de répondre aux besoins d’autonomie pour ce type d’applications.

Plusieurs articles et rapports ont été publiés sur le développement et les essais d’UAV équipés de PEMFC apportant l’énergie motrice, notamment par l’Institut de Technologie de Géorgie, à Atlanta (Georgia Institute of Technology) [14–16]. L’UAV, conçu pour l’étude, est équipé d’une PEMFC H2 / Air de 500W, dont le stack compte 32 cellules de 64 cm² pour une masse de 4.96 kg. L’air est comprimé par un ou deux compresseurs selon la demande de puissance. Le système produit une énergie électrique spécifique de 7.1Wh.kg-1 et une puissance spécifique de 52 W.kg-1. L’objectif de cette étude est porté sur le rendement et les consommations des équipements à différentes conditions de vol (différentes puissances).

D’autres UAV alimentés par des PàC ont d’ores et déjà volé, comme celui développé par le Laboratoire de Recherche Navale de Washington (NRL pour Naval Research Laboratory) [17]. L’UAV (Figure 9) est équipé d’une PEMFC Protonex Technology Corp. de 92 W alimentée en hydrogène contenu dans un réservoir en composite à base de carbone à 310.105 Pa et en air comprimé par une

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ou deux pompes selon la demande de puissance. Le système comporte également un humidificateur et un radiateur. Le système PàC développe une puissance spécifique de 44 W.kg-1 (2.1 kg) et l’avion 30 W.kg-1 (3.1 kg). Le réservoir d’hydrogène permet une autonomie de 3 heures.

Figure 9 : UAV du Naval Research Laboratory.

L’ION Tiger, également développé par le NRL est un drone d’application militaire à endurance élevée. Il a établi en 2009 un record mondial d’endurance avec un vol de 23 heures [18].

Figure 10 : ION Tiger, UAV détenteur du record mondial d'endurance en 2009 avec 23 heures de vol.

II.3.4.

Les avions

Comme mentionné précédemment, les applications pour PEMFC dans les avions sont nombreuses. Les PEMFC peuvent être utilisées pour produire l’énergie nécessaire à la propulsion d’avions légers ou bien pour produire l’électricité nécessaire aux systèmes de bord d’avions de ligne ou de jets privés. Quelques-unes de ces applications sont présentées ci-après à travers des exemples concrets.

II.3.4.1)

Propulsion d’avions légers

Le 3 Avril 2008, Boeing a fait voler le premier avion équipé d’un système hybride associant une PEMFC H2 / Air à une batterie Lithium ion. L’avion (Figure 11) a décollé et est monté à une

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altitude de 3300 pieds (1000 m) en mode hybride. Il a ensuite effectué un vol rectiligne en palier de 20 minutes à une vitesse de 62 nœuds (100 km.h-1) utilisant uniquement la PEMFC. L’avion est un Diamond Aircraft modifié dont l’envergure a été augmentée pour atteindre 16.3 m.

a) b)

Figure 11 : Avion Boeing (a) et DLR Antares H2 (b) tous deux équipés d’un système PEMFC. L’Institut de Thermodynamique Technique du Centre de Recherche Aérospatial allemand (Institute of Technical Thermodynamics, DLR German Aerospace Center) a mis au point, en collaboration avec BASF et Serenergy, un moto-planeur équipé d’une PEMFC alimentant un moteur électrique entrainant une hélice conventionnelle [19] (Figure 11). L’avion est un planeur Antares modifié, portant une citerne sous chaque aile. L’une d’elle accueille le système PEMFC, l’autre le réservoir d’hydrogène. L’hélice est propulsive en position arrière. L’envergure de l’avion est de 20 m. Le système PàC peut fournir jusqu’à 25 kW. Le rayon d’action est de 750 km pour une durée de vol de 5 heures, le tout avec 4.9 kg d’hydrogène. Le rendement total du système propulsif entier est de 44%, soit le double des technologies conventionnelles pour ce type d’application. L’Antares DLR-H2 est le premier avion à avoir décollé n’utilisant que l’énergie fournie par sa PàC.

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Un second moto-planeur est en cours de conception, l'Antares H3. Il sera doté de deux PàC et de deux réservoirs d'hydrogène (Figure 12). L'Antares H3 aura une autonomie de 50 heures et un rayon d'action de 6 000 km. Son premier vol était prévu en 2011 [20].

Le projet ENFICA-FC (ENvironmentally Friendly Inter City Aircraft powered by Fuel Cell) mené par Politecnico di Torino a permis de faire voler un avion équipé d'une PàC H2 / Air de 20 kW hybridée avec des batteries Lithium Polymère de 20 kW [21]. L'avion, un Rapid 200 modifié (Figure 13), a volé le 28 mai 2010 lors d'une démonstration publique. A cette occasion un record de vitesse a été établi à 135 km.h-1. L'altitude de vol était de 700 ft (213 m). Le consortium dirigé par le Pr. Giulio Romeo (Politecnico di Torino) a porté ses efforts sur les aspects suivant : choix d’un avion aux performances aérodynamiques élevées et capables de recevoir le système PEMFC, modification de la cellule de l’avion (berceau moteur, stockage d’hydrogène), définition de l’architecture électrique (PàC et batterie en parallèle, avec un convertisseur DC/DC pour chacune, ainsi q’un convertisseur DC/AC relié à un moteur brushless), analyse des temps de réponse du système électrique et enfin essais en vol. Une attention particulière a été portée à la sécurité du système : par exemple, en cas de panne de la PàC, le temps mis par les batteries pour prendre le relais et assurer l’apport de puissance nécessaire pour un atterrissage d’urgence tout en sécurité a été analysé.

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II.3.4.2)

Apport de puissance pour avion de ligne

a) b) c)

Figure 14 : PEMFC Michelin (a), train d'atterrissage avant modifié (b) et essais de roulage (c). Le DLR en collaboration avec Airbus a réalisé plusieurs démonstrations d'apport de puissance électrique par une PEMFC à bord d'un A320. Produite par Michelin, la PàC H2 / Air fournit une puissance de 20 kW (Figure 14) et est installée dans la soute de l'avion. Son intégration à l'avion permet de la manipuler, de la sortir et de la remettre en position facilement. Ainsi, la PàC a permis d'alimenter des systèmes de bord comme la pompe du circuit hydraulique, qui anime les ailerons de l'avion. La PàC peut également faire office d'APU (Auxiliary Power Unit, Unité de Puissance Auxiliaire) qui assure la production d'électricité au sol lorsque les réacteurs ne sont pas en fonctionnement [22]. Enfin, le 30 juin 2011, le DLR a expérimenté un système électrique permettant le roulage au sol (roulage entre piste d'atterrissage et point de stationnement) d'un A320 (Figure 14) [23]. Ce système électrique consiste en un train d'atterrissage avant modifié, comprenant deux moteurs électriques (un dans chaque gente) alimentés par une PàC (Michelin). L'avion de 47 tonnes peut ainsi rouler sans utiliser ses réacteurs, réduisant les émissions sonores et de gaz à effet de serre. Le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre serait de 19 %, soit pour l'aéroport de Frankfort et pour les avions de la classe des A320, une réduction de 44 tonnes de gaz émis chaque jour.