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Application aux ´ equations diophantiennes

Un des int´erˆets de la factorialit´e des anneaux d’entiers (ce qui est ´equivalent `a ˆetre principal dans ce cas) est la r´esolution d’´equation diophantiennes. Voyons d’abord deux lemmes tr`es simples.

5.32 Lemme. — SoitK un corps de nombres etm un entier premier avechK. Si aest un id´eal de OK et si am est principal, alors a est principal.

Preuve. — Par hypoth`ese dans CK, on a am ∼ OK. Puisque hK est l’ordre de CK, on a aussi

ahK ∼ OK. Par le th´eor`eme de Bezout, il existe des entiers r et s tels que mr+hKs= 1. Donc

a=amr+hKs ∼(am)r(ahK)s ∼ Or KOs

K ∼ OK

eta est principal.

5.33 D´efinition (Id´eaux ´etrangers). — Soit a1 et a2 deux id´eaux de OK. On dit que ces id´eaux sont ´etrangers si a1+a2 =OK.

Si a1 et a2 sont ´etrangers, il n’y a pas d’id´eaux premiers p tels que a1 ⊂ p et a2 ⊂ p car sinon

a1+a2 ⊂p, et donc il n’y a pas d’id´eaux premiers communs aux factorisations en id´eaux premiers dea1 eta2.

5.34 Lemme. — Soit K un corps de nombres et a1,a2 des id´eaux ´etrangers. Supposons qu’il existe un id´eal b et un entier m tels que a1a2 =bm. Alors il existe deux id´eaux b1 et b2 tels que

a1 =bm1 et a2 =bm2 .

Preuve. — Ecrivons les d´ecompositions en produit d’id´eaux premiers de a1, a2 etb :

a1 =pe1 1 . . .pep p a2 =qf1 1 . . .qfq q et b=rg1 1 . . .rgr r

Commea1 eta2 sont premiers entre eux, on a

a1a2 =pe1 1 . . .pep p pf1 1 . . .pfq q =rmg1 1 . . .rmgr r .

On d´eduit quer=p+q et que m divise les ei et lesfj. Donc a1 eta2 s’´ecrivent bien sous forme de puissancem-i`eme d’un id´eal.

5.5.1 Equation de Mordell y

2

= x

3

+d

5.35 Th´eor`eme. — Soit d 6 −1 sans facteurs carr´es, avec d ≡ 2,3 mod (4). Supposons que le nombre de classe de Z[√

d] n’est pas divisible par 3. Alors l’´equation y2 = x3 +d admet des solutions en nombres entiers si et seulement si d=±1−3a2, a∈N et dans ce cas les solutions sont x=a2 −d, y =±a(a2 + 3d).

Preuve. — Remarquons d’abord que x et y sont premiers entre eux ; en effet si p divise x et y, alors p2 divise d, ce qui est contraire `a l’hypoth`ese. De plus x est impair car sinon on aurait y2 ≡dmod (4), alors que les seuls carr´es modulo 4 sont 0 et 1.

Ecrivons l’´equation sous la forme (y+

d)(y−d) =x3 et passons aux id´eaux dans OK (pour all´eger l’´ecriture, on notera hαi l’id´eal engendr´e par α dans OK et non αOK),

hy+√

Soit p un id´eal premier divisant hy+√

di et hy−di. Alors y+√

d ∈ p et y−d ∈ p, d’o`u 2y ∈ p, donc p|h2yi et ´egalement p|hxi car il intervient dans la factorisation en id´eaux premiers de hxi3. En prenant les normes, il vient que N(p)|N(h2yi) = 4y2 et N(p)|N(hxi) = x2. Puisque x est impair, N(p) est impair, donc N(p)|y2. Or N(p)6= 1 car p est premier, donc x et y ont un facteur en commun, contradiction. Ainsihy+√

diethy−disont ´etrangers et d’apr`es le lemme 5.34, il existe un id´eal a deOK tel que

hy+

di=a3.

Comme a3 est principal et que 3 ne divise pas hK, le lemme 5.32 montre que a est principal. Commed ≡ 2,3 mod 4, on a OK = Z[√

d] et donc il existe donc a, b∈ Z tel que a =ha+b√

di

d’o`u hy+√

di=ha+b√

di3. Il existe donc une unit´e ε deOK telle que y+√

d=ε(a+b√

k)3.

Or les seules unit´es de OK sont±1 (proposition 1.54). Comme (1,√

d) forme une base deOK, il vient

y=±a(a2+ 3db2) et 1 =±b(3a2+db2).

De la deuxi`eme ´equation, on tire b=±1 et d=±1−3a2. D’o`uy=±a(a2+ 3d) et en reportant dans l’´equation y2 =x3+d de d´epart

x3 =a6+ 6a4d+ 9a2d2−d. Or (d+ 3a2)2 = 1, donc d=d3 + 6a2d2+ 9a4d et en reportant x3 =a6−3a4d+ 3a2d2−d3. D’o`ux=a2−d.

5.5.2 L’´equation de Fermat x

3

+y

3

= z

3

C’est en 1994 que Andrew Wiles parvint `a montrer que l’´equation de Fermatxn+yn =zn n’a pas de solutions enti`eres non triviales pour n > 3. Les solutions de l’´equation dans le cas n = 2 ´etaient connues depuis fort longtemps sous le nom de triplets pythagoriciens. Kummer avait r´eussi `

a d´emontrer ce r´esultat pour certaines valeurs den. On trouvera dans [Duv98] le casn= 5. Outre la factorialit´e de l’anneau des entiers de Q5), la d´emonstration utilise la connaissance de ses unit´es. Dans le cas n= 3 que nous pr´esentons ici, la question des unit´es est plus simple.

5.36 Lemme. — Tout ´el´ement de l’anneau Z[ω] des entiers de Q(√

−3) peut ˆetre associ´e `a un ´el´ement de Z[√

−3], c’est-`a-dire que pour tout x∈Z[ω], il existe ε∈Z[ω]× tel que εx∈Z[√ −3].

Preuve. — Soitx= α+β

√ −3

2 ∈Z[ω] avec α, β ∈Z. Siα, β sont pairs, il n’y a rien `a montrer car x∈Z[√

−3]. Supposons α et β impairs et envisageons quatre cas. (i) α ≡1 mod (4) et β≡1 mod (4). On a

2 = α+β √ −3 2 × 1 + √ −3 2 = −α−3β+ (α−β)√ −3 4 ∈Z[√ −3] (ii) α ≡1 mod (4) et β≡ −1 mod (4). On a

xω = α+β √ −3 2 ×1 + √ −3 2 = α−3β+ (α+β)√ −3 4 ∈Z[√ −3]

(iii) α ≡ −1 mod (4) et β ≡1 mod (4). On a xω4 = α+β √ −3 2 × 1 √ −3 2 = 3β−α−(α+β)√ −3 4 ∈Z[√ −3] (vi) α ≡ −1 mod (4) et β ≡ −1 mod (4). On a

5 = α+β √ −3 2 × 1 √ −3 2 = α+ 3β+ (β−α)√ −3 4 ∈Z[√ −3]

5.37 Th´eor`eme. — L’´equation x3+y3 =z3 n’a pas de solutions en entiers relatifs x, y, z non nuls.

Preuve. — Soit x, y, z des entiers relatifs avec x3+y3 +z3 = 0 et (x, y, z)6= (0,0,0). On peut supposer x, y, z premiers entre eux quitte `a simplifier par leur PGCD. Les entiers x, y, z ne sont donc pas tous les trois pairs. Il est impossible que tous les trois soient impairs ou que deux d’entre eux soient pairs et le troisi`eme soit impair (la somme serait impaire), donc quitte les permuter, on peut supposer x, z impairs et y pair. Choisissons une solution telle que |y| soit minimal, et posons x =a+b et z =a−b; alors a et b sont premiers entre eux (sinon x et z, donc x, y etz auraient un diviseur commun) et de parit´e diff´erente (car x etz sont impairs). Il vient

2a(a2+ 3b2) =−y3.

Puisque a et b sont de parit´es diff´erentes, a2+ 3b2 est impair et comme y est pair, c’est que 8 divise 2a et tout diviseur commun `a 2a et a2 + 3b2 est impair, donc divise a, donc divise 3b2. Comme a et b sont premiers entre eux, il en r´esulte PGCD(2a, a2 + 3b2) = 1 ou 3. Envisageons les deux cas.

(i) PGCD(2a, a2+ 3b2) = 1. De 2a(a2+ 3b2) =−y3, on en d´eduit qu’il existe r, s∈Z tels que 2a = r3 et a2 + 3b2 = s3, avec s impair. On factorise dans l’anneau factoriel OK des entiers de K =Q(√

−3). Il vient

(a+b√

−3)(a−b√

−3) =s3. Soit p qui divise a+b√

−3 et a−b√

−3, il divise leur somme 2a et leur diff´erence 2ib√

3. En prenant les normes NK/Q(p)|4a2 et NK/Q(p)|12b2. Or NK/Q(p) est impair car il divise a2 + 3b2, donc NK/Q(p)|a2 et NK/Q(p)|a2+ 3b2, d’o`u NK/Q(p) = 1 et p∈A× car a eta2+ 3b2 sont premiers entre eux. Ainsi les id´eauxha+b√

−3ietha+b√

−3isont premiers entre eux et d’apr`es le lemme 5.34, il existe ht0i tel que ha+b√

−3i=ht0i3, d’o`u l’existence de ∈ O×K tel que a+b√

−3 =t. Mais toutes les unit´es deOK sont des cubes (propositon 1.54), donc on peut ´ecrirea+b√

−3 =t3 avect∈ OK.

D’apr`es le lemme 5.36, il existeε∈ OK tel queεt∈Z[√

−3]. Puisque εest une racine sixi`eme de l’unit´e de C, on a ε3 =±1, donc a+b√

−3 = ε3(εt)3 = (±εt)3. Par suite il existe u, v ∈Z

tels que a+b√

−3 = (u+v√

−3)3, et en d´eveloppant

a =u(u+ 3v)(u−3v) et b= 3v(u−v)(u+v).

Commeb est impair,v, u−v etu+v sont impairs, doncu est pair. Commea etb sont premiers entre eux,u et 3v le sont aussi, donc ´egalement 2u et 3v puisque 3v est impair. Puisque 2a=r3, il vient

Comme 2u, u+ 3v et u−3v sont premiers entre eux deux `a deux, il existe l, m, n ∈ Z tels que 2u = l3, u+ 3v = m3 et u−3v =n3. Par addition, m3+n3 = l3 avec l pair et l, m, n premiers entre eux. De plus

|y3|=|2a(a2+ 3b2)|=|l3(u2−9v2)(a2+ 3b2)|>3|l2|>|l3|

donc 0<|l|<|y|, ce qui contredit la minimalit´e de |y|.

(ii) PGCD(2a, a2 + 3b2) = 3. Posons a = 3c. On a que b et c sont de parit´es diff´erentes et premiers entre eux. L’´equation 2a(a2+ 3b2) = −y3 s’´ecrit

18c(3c2+b2) = −y3.

Soit d un diviseur premier de 18c et 3c2+b2. On a d 6= 2 car b et c sont de parit´es diff´erentes ; on a aussid 6= 3 car 3 ne divise pas b sinon 3 diviserait a et b. Enfin si d|c, on a d|b donc d = 1. Ceci prouve que 18cet 3c2+b2 sont premiers entre eux, donc par unicit´e de la factorisation dans

Z, on a 18c=r3 et 3c2+b2 =s3 avec s impair. En proc´edant comme dans (i), on obtient

b=u(u+ 3v)(u−3v) et c= 3v(u−v)(u+v)

avecuimpair,v pair,uetvpremiers entre eux. Puisque 18c=r3, il vientr3 = 54v(u−v)(u+v) et r´etant un multiple de 3, en ´ecrivantr= 3r0, on ar03 = 2v(u−v)(u+v). Les nombres 2v, u−v, u+v sont premiers entre eux deux `a deux, donc il exitste l, m, n ∈ Z tels que l2 = 2v, m3 = u−v, n3 =u+v d’o`u en ajoutant l3+m3+ (−n)3 = 0 avecl pair. Enfin

|y3|=|18c(3c2+b2)|=|27l3(u2−v2)(3c2+b2)|>27|l3|>|l3|, ce qui contredit encore la minimalit´e de |y|.

Chapitre 6

Anneaux d’entiers euclidiens

6.1 G´en´eralit´es

Rappelons la d´efinition d’un anneau euclidien.

6.1 D´efinition. — Un anneau int`egre A est dit euclidien s’il existe une application (appel´ee stathme) Ψ : A −→N telle que si a, b∈A, avec b = 0, il existe6 q, r ∈A tel que a =bq+r avec Ψ(r)<Ψ(b).

On montre facilement qu’un anneau euclidien est principal. Etant donn´e un anneau euclidien et un stathme Ψ, il est int´eressant de construire un stathme v´erifiant des conditions plus fortes.

6.2 Proposition. — Soit A un anneau euclidien. Il existe un stathme ϕ satisfaisant les pro-pri´et´es suivantes.

(i) 0 est l’unique ´el´ement o`u ϕ s’annule ;

(ii) pourx, y non nuls deA, on aϕ(x)6ϕ(xy)avec ´egalit´e si et seulement siyest inversible ; (iii) x est inversible si et seulement si ϕ(x) = 1.

Preuve. — (i) Soit Ψ un stathme. Pour b 6= 0, on ´ecrit 1 = bq +r avec Ψ(r) < Ψ(b), et Ψ n’est pas minimal enb. Donc 0 est le seul ´el´ement en lequel Ψ est minimal. En rempla¸cant Ψ par Ψ1 = Ψ−Ψ(0), le stathme Ψ1 s’annule en 0 et seulement en 0.

(ii) Pour touta, on pose Ψ2(a) = inf{Ψ1(aξ), ξ= 06 }. Clairement Ψ21 et Ψ2 ne s’annule qu’en 0. Montrons qu’il existe une division euclidienne pour Ψ2. Soit a et b 6= 0. Il existe x tel que Ψ2(b) = Ψ1(bx). Faisons la division euclidienne de a par bx pour Ψ1 :

a=bxq+r avec Ψ1(r)<Ψ2(bx).

Alors Ψ2(r) 6Ψ1(r)< Ψ1(bx) = Ψ2(b), donc r est le reste d’une division euclidienne de a par b pour Ψ2 qui est donc bien un stathme euclidien.

Pourx, y non nuls de A, on a

Ψ2(xy) = inf

ξ6=0Ψ1(xyξ)> inf

η6=0Ψ1(xη) = Ψ2(x).

Supposons Ψ2(xy) = Ψ2(x). En faisant la division de x par xy pour Ψ2, on a x = xyq+r et Ψ2(r) < Ψ2(xy) = Ψ2(x) ; Si r = 0, on aurait l’in´6 egalit´e Ψ2(x(1−yq)) > Ψ2(x) qui est fausse. Doncr = 0, yq= 1 et y est inversible.

(iii) Comme 1 divise tout ´el´ement nul x de A, on a Ψ2(1) 6 Ψ2(x), l’´egalit´e ayant lieu si et seulement si 1 et x sont associ´es, c’est-`a-dire si et seulement si xest inversible.

Finalement en posant ϕ(0) = 0 et ϕ(x) = Ψ2(x)−Ψ2(1) + 1 pour x6= 0, ce stathme satisfait les conditions souhait´ees.

Voici un lemme qui permet de construire des stathmes sur des anneaux d’entiers.

6.3 Lemme. — Soit K un corps de nombres ϕ une application OK −→ N multiplicative sur

OK, c’est-`a-dire v´erifiant

∀z, z0 ∈ OK, ϕ(zz0) = ϕ(z)ϕ(z0).

Alors l’application ϕ se prolonge en une fonction multiplicative sur K, et ϕ est un stathme sur

OK si et seulement si pour tout z ∈K, il existe γ ∈ OK tel que ϕ(z−γ)<1.

Preuve. — Rappelons que le corps des fractions deOK estK. Soitz=α/β ∈Kavecα, β ∈ OK. En posant

ϕ(z) = ϕ(α) ϕ(β)ϕ(1),

on voit que cette d´efinition prolonge de fa¸con multplicative ϕ `aK.

SupposonsOK euclidien pourϕ et soitz =α/β ∈K, avec α, β ∈ OK. Il existeq, r ∈ OK tels queα=βq+r avec ϕ(r)< ϕ(β), donc ϕ

α β −q =ϕ r β <1. R´eciproquement, soit α, β ∈ OK, avec β 6= 0. Il existe γ ∈ OK tel que ϕ

α β −γ

<1, d’o`u avec r=α−βγ,ϕ(r)< ϕ(β) et OK est euclidien pour ϕ.

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