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Chapitre 1. Dépôt et caractérisation des films minces métalliques

2. Pulvérisation cathodique de films minces dans un bâti industriel

2.2. Application aux dépôts métalliques nanométriques sur isolant

Historiquement la pulvérisation assistée par un champ magnétique a été introduite pour

augmenter la vitesse de dépôt. La pulvérisation sous tension alternative est quant à elle

utilisée pour pulvériser des matériaux isolants qui n’évacuent pas les charges.

L’équipement à notre disposition se sert de ces modes particuliers pour réaliser des

dépôts métalliques sur l’oxyde de grille. Nous rappelons ici leur principe et leur

implémentation sur la machine de dépôt utilisée.

2.2.1. Présentation du bâti de dépôt

Nous avons utilisé une machine Applied Materials « Endura » capable de déposer 4

types de matériaux dans des chambres distinctes. Chacune comporte une cible

métallique différente : titane, aluminium, titane-aluminium (30 % atomique

d’aluminium) ou lanthane.

Ces chambres sont reliées par une zone de transfert pompée à un vide secondaire où les

plaques sont manipulées par un bras articulé. Des plaques chauffantes permettent de

E C D F 1 2 3 4 5 Dépôt Al Dépôt La Degaz Dépôt TiN Dépôt TiAlN Chargement E C D F 1 2 3 4 5 Dépôt Al Dépôt La Dépôt Al Dépôt La Degaz Dépôt TiN Dépôt TiAlN Dépôt TiN Dépôt TiAlN Chargement

Figure 1-7 : Schéma de principe de l’équipement (à gauche) et d’une chambre de dépôt utilisée

(à droite).

11

i. Flux de gaz

Les chambres sont constamment pompées sous un vide secondaire grâce à une pompe

cryogénique qui permet d’atteindre des vides poussés à 5.10

-5

mTorr. Lors du dépôt, de

l’argon est introduit pour créer le plasma. Le flux de gaz est contrôlé par une valve à

débit réglable entre 0 et 150 sccm (unité valant 1 cm

3

/min dans les conditions normales

de température et de pression). La pression dans la chambre est comprise alors entre 1 et

25 mTorr. Elle dépend du flux entrant mais elle peut également être contrôlée par une

valve ajustable en sortie de chambre. Les chambres de dépôt qui comportent une cible

de titane ou titane-aluminium possèdent également une arrivée d’azote pour réaliser un

dépôt TiN ou TiAlN par pulvérisation réactive. Le plasma dissocie l’azote pour former

des radicaux libres réagissant avec le titane, qui modifient significativement les

paramètres de la décharge. Nous présentons la mise en œuvre pratique de ce mode de

pulvérisation dans la partie 3.1.

ii. Thermalisation

Le dépôt est toujours réalisé à une température de 20 °C. Les plaques sont thermalisées

via un support électrostatique, refroidit grâce à un échangeur thermique. De l’argon sur

sa face inférieure assure le transfert thermique entre le support et la plaque. Le temps de

dépôt peut atteindre plus de 2 minutes selon l’épaisseur visée. Pour limiter

l’échauffement des parois du réacteur, nous imposons des temps maximum de dépôt de

100 s en divisant les temps plus longs en plusieurs cycles de dépôt séparés d’une étape

de refroidissement. Si le film accumulé sur les parois venait à subir des cycles

thermiques, des parties pourraient se détacher et tomber sur la plaque, y causant des

particules tueuses pour le circuit. Les parois et la cible sont également thermalisées à 16

°C grâce à une circulation d’eau dé-ionisée commune.

2.2.2. Application d’un champ magnétique : pulvérisation

magnétron

Pour remédier à la faible vitesse de dépôt des décharges luminescentes continues ou

radiofréquence, nous utilisons la pulvérisation magnétron. Le principe est d’ajouter un

aimant permanent dont l’axe magnétique Nord/Sud est normal à la cible à pulvériser, de

façon à produire un champ B parallèle à la cible. L’intensité du champ est choisie de

façon à affecter les électrons et peu les ions qui sont ramenés vers la cible. Le taux

d’ionisation est considérablement augmenté à proximité de la cible, ce qui a pour

conséquence d’augmenter d’un facteur 100 la densité de courant traversant la cible. Par

conséquent il est possible d’abaisser la pression et la tension de travail et d’obtenir des

vitesses de dépôts satisfaisantes.

Figure 1-8 : Effet de la présence d’un aimant sur la trajectoire des électrons.

11

L’ajout d’un aimant en rotation au dessus de la cible permet de créer un plasma local et

déporté par rapport au substrat à bombarder. C’est un moyen efficace pour localiser le

plasma à une position voulue et d’optimiser ainsi l’uniformité du flux d’atomes

Les géométries des chambres, des aimants et des cibles sont optimisées par le fabricant

en vue du dépôt de chaque matériau dans des dimensions nanométriques. Nous avons la

possibilité dans une moindre mesure d’ajuster finement l’écartement entre la cible et le

substrat pour chaque procédé.

2.2.3. Décharge radiofréquence

Lors de l’exposition au plasma, une surface diélectrique ne peut évacuer les charges

déposées. En quelques microsecondes la charge accumulée devient suffisante pour

claquer le diélectrique. Une tension alternative doit être appliquée aux électrodes pour

décharger cycliquement ces surfaces. En effet la chute de tension de gaine oscille entre

des valeurs positives et négatives, permettant alternativement un flux d’électrons et

d’ions d’impacter la surface diélectrique. Les chambres que nous employons possèdent

donc un générateur radiofréquence d’une puissance de 1kW associé à un générateur

continu, reliés à la cible. L’emploi d’une haute fréquence apporte d’autres avantages

que nous allons détailler.

i. Pulsation plasma

Tout d’abord il est nécessaire de définir le comportement collectif des particules

chargées d’un plasma en réponse à une perturbation électrostatique. En effet sous l’effet

d’un champ électrique transitoire, les ions et électrons se séparent puis oscillent jusqu’à

revenir à un état d’équilibre. La force de rappel qui les relie est l’interaction

coulombienne. Elle conduit à l’oscillation des électrons et des ions à une pulsation dite

pulsation plasma

0 2

.

.

ε

ω

m

q

n

p

= (avec n, m la densité et la masse de la particule

considérée). La fréquence associée 2πω

p

est de l’ordre de l’ordre du GHz pour les

électrons et de l’ordre du MHz pour des ions argon dans un plasma de décharge

conventionnel. Cela signifie que les particules suivent la pulsation de la perturbation

électrostatique tant qu’elle ne dépasse pas la pulsation plasma de la particule considérée.

Ce phénomène nous donne une liberté supplémentaire pour contrôler séparément la

réponse des ions et des électrons à condition d’utiliser un générateur radiofréquence.

ii. Phénomène d’autopolarisation

Nous allons maintenant étudier l’effet d’une tension alternative sans composante

continue sur le potentiel du plasma et les flux de particules qui parcourent les gaines. La

tension alternative est appliquée entre les électrodes et conduit à faire osciller la tension

de gaine. Lorsque la tension de gaine est positive, une charge négative est laissée par le

bombardement électronique sur la surface diélectrique. Lorsque la tension est négative,

les ions - plus lents - ne parviennent pas à compenser cette charge car ils sont moins

nombreux à impacter la surface. Il apparaît un excès de charge (voir la figure 1-9 à

gauche) qui doit être compensé sur un cycle pour maintenir l’égalité entre flux d’ions et

d’électrons.

Surface conductrice Surface isolée

Charge à la surface

Tension de gaine

Figure 1-9 : Effet de l’application d’une polarisation alternative sur les gaines. A gauche les

parois conductrices sont reliées à la masse, à droite elles sont isolées.

12

Cet excès augmente avec l’amplitude de la tension alternative, qui contrôle le

mouvement des particules (voir équation 5). Ce phénomène a lieu également sur des

surfaces conductrices isolées de la masse par une capacité (dite de blocage). La charge

ne s’évacue pas et diminue le potentiel de la surface. Une composante continue négative

dite d’autopolarisation s’ajoute à la tension de gaine pour atteindre un régime stable

(voir la figure 1-9 à droite).

L’emploi d’un générateur radiofréquence à 13,56 MHz permet d’agir uniquement sur

les électrons. Les ions ne suivent que la composante continue de la tension de gaine.

iii. Distribution des tensions en mode radiofréquence

Dans une décharge continue la surface pulvérisée est placée à la cathode. Nous allons

voir que cette condition ne suffit pas dans une décharge radiofréquence où les parois

sont isolées de la masse par une capacité de blocage. La capacité de blocage modifie le

schéma électrique équivalent de la décharge. Il en résulte une répartition des tensions

différentes, que nous résumons ici.

Les gaines sont des zones de charge d’espace qui peuvent être modélisées par une

capacité Cg qui dépend de leur épaisseur dg et de leur surface A. En valeur moyenne la

tension d’autopolarisation se distribue donc selon un diviseur capacitif entre la chute de

potentiel aux gaines de la cathode et des parois Vg,c et Vg,p.

p c c p c p p c

dg

dg

A

A

Cg

Cg

Vg

Vg ≈ = × Eq. 3

Cette relation se simplifie moyennant l’hypothèse suivante :

n c p p c

A

A

Vg

Vg





Eq. 4

où 1,5 < n < 2

6

Pour maximiser le bombardement à la cathode, il faut donc que celle-ci ait une surface

plus petite que le reste des parois.

a. Configuration triode b. Oscillation des gaines a. Configuration triode b. Oscillation des gaines

Figure 1-10 : Répartition du potentiel dans un bâti de pulvérisation radiofréquence. A gauche,

configuration du réacteur radiofréquence

6

. A droite, répartition du potentiel dans un plasma

Sur l’équipement de dépôt, les parois et le substrat sont découplés capacitivement par

une boîte d’accord (figure 1-10 à gauche). Elle permet d’annuler la tension

d’autopolarisation sur le substrat et d’éviter ainsi l’endommagement de l’oxyde de

grille. Une autre boite d’accord sert à adapter l’impédance du réacteur pour maximiser

la puissance transmise du générateur au plasma.

iv. Mécanisme d’allumage du plasma en mode radiofréquence

Le mouvement des ions ou électrons dans le champ alternatif E

0

.cos(ωt) dépend de son

amplitude E

0

et de sa pulsation ωt. La décharge s’établit et se maintient dans des

conditions qui dépendent des rapports ω/ν

e,i

et x

e,i

/d, où d est l’épaisseur de gaine, ν

e,i

est la fréquence de collision électron-neutre ou ion-neutre, et x

e,i

est l’amplitude du

mouvement des électrons ou des ions dans le champ alternatif :

2 , 2 , 0 , i e i e i e

m

qE

x

ν

ω

ω +

= Eq. 5

• Si cette amplitude x

e,i

est plus grande que l’épaisseur de la gaine, le plasma a les

même propriétés qu’une décharge continue. L’équation ci-dessus montre que le

mouvement des électrons ou des ions est limité en augmentant la fréquence ou

en diminuant l’amplitude du champ E

0

.

• Si la fréquence est suffisamment grande pour que x

i

< d < x

e

, une charge positive

apparaît au centre de la décharge qui tend à réduire le potentiel de claquage.

• Lorsque x

e

< d, les électrons oscillent autour des gaines sans impacter les

électrodes. Leur mouvement d’oscillation des gaines présenté à droite sur la

figure 1-10 accélère les électrons à leur lisière. A basse pression les électrons

sont réfléchis lors de l’expansion. A haute pression les électrons oscillent autour

de la lisière. Ces deux phénomènes permettent de fournir une énergie suffisante

aux électrons pour ioniser le gaz

5

.

Un générateur continu est prévu pour apporter une tension constante supplémentaire

sans modifier la composante alternative pour accélérer la vitesse de dépôt.

v. Distribution en énergie en mode radiofréquence

Comme nous venons de le voir, l’allumage en mode radiofréquence se produit dans des

conditions de tension et de pression réduites par rapport au mode continu. L’énergie des

électrons dans le plasma radiofréquence est considérablement réduite par rapport au

mode continu. Une illustration figure dans le graphique ci-dessous, réalisé dans une

chambre de dépôt similaire à celle utilisée.

Figure 1-11 : Densité d’électrons (normalisée) en fonction de leur énergie. Effet d’une

puissance radiofréquence (en jaune) ou continue (violet). A pression réduite la queue de

distribution contient plus d’électrons énergétiques (tirets)

11

Le mode de dépôt radiofréquence est donc essentiel pour le dépôt d’oxyde de grille,

pour éviter leur claquage ou limiter leur dégradation par les électrons très énergétiques.