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Comme leur nom l’indique, les APE sont des accords de partenariat, impliquant des droits et obligations de part et d’autre. Le respect de ces obligations par chacune des parties est essentiel pour la réussite de l’initiative dans son ensemble. Bien que ces nouveaux accords offrent de nouvelles opportunités pour les économies des pays ACP, ils présentent également de nombreux défis. Il est donc crucial que chaque pays ACP détermine clairement ses buts et priorités, et identifie des objectifs réalistes et réalisables. Les négociations sont l’occasion pour les deux parties d’arriver à s’entendre sur les questions abordées dans le cadre des APE.

Initialement prévues pour une durée de cinq ans, les négociations ACP-UE ont été structurées autour de deux phases : une phase pour l’ensemble des ACP (A) et une phase pour les négociations régionales (B).

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A. La phase I : un cycle pour l’ensemble des pays ACP

La première phase entre la Commission européenne et le groupe ACP dans son ensemble a commencé le 27 septembre 2002 et devait durer une année. Elle avait pour but de définir le format, la structure et les principes des négociations.

Durant cette première année de négociation, il s’agissait pour les pays ACP de définir quels étaient leurs problèmes communs et quelle approche adopter de sorte à mieux défendre leurs intérêts individuels et collectifs. Aussi, ces négociations devaient aborder des questions d’intérêts communs pour les pays ACP. Afin de s’y préparer, ces derniers ont examiné ces questions dans six groupes de travail portant sur :

· L’accès aux marchés ; · Les services ;

· L’agriculture et la pêche ;

· Les questions liées au commerce ; · Les questions liées au développement ; · Les questions juridiques.

La Commission européenne, quant à elle, a aussi proposé de considérer les questions transversales relatives aux « outils » d’intégration régionale.

La structure convenue pour la phase 1 des négociations correspond au mécanisme décisionnel interne des deux parties.

Du côté du groupe ACP, le Conseil des ministres du groupe ACP assume la direction des négociations, et est responsable tant de leur conduite que de leur approbation. Le Conseil est soutenu dans sa tâche par le Comité ministériel commercial du groupe ACP. La conduite des négociations proprement dite se déroule à deux niveaux différents :

· Les négociations politiques de fond sur chaque groupe de sujets spécifiques sont menées par des porte-parole ministériels des pays ACP ;

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· Les négociations préparatoires se déroulent au niveau des ambassadeurs du groupe ACP en poste auprès de l’Union européenne. Dans un souci de cohérence au niveau du groupe ACP, entre les négociations de l’APE et celles qui se déroulent à l’OMC, un mécanisme de consultation et de coordination entre les ambassadeurs du groupe ACP en poste à Bruxelles (auprès de l’UE) et ceux en poste à Genève (auprès de l’OMC) a été proposé ;

Le travail préparatoire technique pour les négociations est mené à travers un groupe de coordination, soutenu par des groupes spécifiques.

Le Secrétariat ACP, sous le contrôle du Comité des ambassadeurs, doit entreprendre les préparatifs techniques des négociations, avec l’aide du groupe consultatif des experts commerciaux de haut niveau.

Du côté de l’UE, la Commission européenne a reçu mandat du Conseil européen pour négocier les APE avec les pays ACP. En pratique, c’est la Direction générale (DG) du Commerce qui mène les négociations des APE, en coordination avec la DG Développement, la DG Agriculture, la DG Entreprises et sociétés de l’information. Les Etats membres de l’Union apporteront leurs conseils aux négociations par le biais du Comité de l’article 133 TUE et du groupe de travail sur le développement du Conseil. La Commission européenne fait régulièrement rapport à ces groupes de travail, ainsi qu’au Conseil des affaires générales et des relations extérieures de l’UE. Le Parlement européen et l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE sont consultés au cours des négociations.

A l’occasion de la deuxième réunion ministérielle ACP-UE, qui s’est tenue le 2 octobre 2003, le Conseil des ministres ACP et les Commissaires européens du Commerce et Développement, Messieurs Pascal Lamy et Poul Nielson, ont adopté une déclaration commune115 et un rapport conjoint faisant ressortir les convergences et les divergences résultant de la première année de discussions116. Ces deux documents sont le fruit de compromis. D’un côté, les pays ACP souhaitaient avoir un accord juridiquement contraignant

116

Voir le rapport conjoint sur la phase « tous ACP-CE » des négociations sur le site du Secrétariat ACP :

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sur les questions convenues dans la phase I pour servir de directives aux négociations régionales de la phase II. De l’autre, la Commission européenne ne cessait de soutenir que l’objectif des discussions au niveau tous ACP était de clarifier les problèmes et que l’Accord de Cotonou constituait une base une base juridique suffisante pour les négociations. En outre, même dans les cas où il y a convergence, des divergences d’interprétation demeurent souvent. Par exemple, les pays ACP et l’UE conviennent que l’accès aux marchés de l’UE devrait être maintenu et amélioré aux termes des APE. Toutefois, dans le contexte de la libéralisation croissante des échanges et de la réduction du traitement préférentiel, une amélioration de l’accès aux marchés ne peut découler que de règles d’origine plus favorables et d’un traitement détaillé des obstacles non tarifaires. L’engagement pris par l’UE de s’attaquer aux questions de cette nature reste flou.

Après une phase initiale d’un an de négociation au niveau tous ACP, les négociations des APE ont été effectuées au niveau régional avec les six groupements régionaux APE autodéterminés117.

B. La phase II : Négociations d’APE régionaux

Selon l’article 35.2 de l’Accord de Cotonou : « la coopération économique et commerciale se fonde sur les initiatives d’intégrations régionales des Etats ACP considérant que l’intégration régionale est un instrument clé de leur intégration économique. » Il revient aux pays ACP de proposer les configurations géographiques qu’ils jugent les plus appropriées.

Les négociations régionales ont débuté en octobre 2003 et devaient aboutir à la conclusion d’APE individuels entre l’UE d’une part, et les six régions ACP d’autre part. Ces négociations ont lieu au niveau de six régions, dont quatre sont situées en Afrique, une dans les Caraïbes (CARICOM) et une dans le Pacifique. A ce jour, seule, la région des Caraïbes a conclu un APE complet avec l’UE.

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LIPCHITZ Anna, Les Accords de partenariat économique : des accompagnements nécessaires, Document de travail n°36, 2007, Agence Française de développement, p. 18.

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Les négociations ont débuté avec chaque région selon le calendrier suivant118 :

· A partir du 4 octobre 2003 avec l’Afrique centrale (CEMAC) ; · A partir du 6 octobre 2003 avec l’Afrique occidentale (CEDEAO) ; · A partir du 7 février 2004 avec l’Afrique orientale et australe (AFOA) ; · A partir du 16 avril 2004 avec les pays ACP des Caraïbes ;

· A partir du 8 juillet 2004 avec la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (CDAA) ;

· A partir du 10 septembre 2004 avec les pays ACP du Pacifique.

Bien que les négociations régionales soient totalement indépendantes les unes des autres, elles se sont calquées sur un cadre de négociation similaire en terme de principes et de calendriers. Dans chaque région, les deux parties se sont fixé une feuille de route conjointe pour le déroulement des négociations. En règle générale, ce cadre se subdivise en deux parties : la première partie procède à un état des lieux de l’intégration régionale et vise à la renforcer en abordant la question des entraves techniques aux échanges et des mesures sanitaires et phytosanitaires ; la deuxième partie est consacrée à des négociations de fond sur le contenu du nouvel accord de partenariat119.

Il a déjà été indiqué que chaque région décide de son organisation, de sa préparation et de sa conduite pour ses négociations d’APE. A titre d’illustration, le cas de l’Afrique de l’Ouest est brièvement présenté120.

Les chefs d’Etats d’Afrique de l’Ouest ont chargé deux organisations régionales de négocier un accord APE avec l’UE. La CEDEAO qui englobe les Etats de l’UEMOA et d’autres pays de la région, dont le Nigeria, constitue l’organisme faîtier pour ces négociations.

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Commission européenne. 2005. Les aspects relatifs au commerce et au développement dans les négociations

sur les APE. pp.1-39. Document téléchargé sur l’internet. Lien URL : http://www.acp-eu-trade.org/library/files/CE_FR_1005__CE_Les -aspects- relatifs-au-commerce-et-au-développement-dans-les-négociations-sur-les-APE.pdf

119

Commission européenne, Intégration régionale pour le développement des pays ACP, COM (2008) 604 final/2, p. 8.

120

BILAL Sanoussi,, Is the EU a model of Regional Integration ? Risks and Challenges, Background Note, septembre 2007, p.7.

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La Mauritanie participe également avec la CEDEAO aux négociations des APE. La CEDEAO et l’UEMOA ont constitué un Comité régional de négociation pour préparer une feuille de route (un plan d’action) pour les apports techniques nécessaires aux négociateurs. Le mandat de négociation approuvé, les négociations entre l’UE et la CEDEAO ont officiellement débuté le 6 octobre 2003.

L’organisation pour les négociations est la suivante :

· Le Conseil des ministres de la CEDEAO est l’instance politique qui prend les décisions formelles, donne les orientations nécessaires et fixe les mandats des négociations. · Le Comité ministériel de suivi assure le suivi et l’évaluation des négociations.

· En termes de structures de négociations, le Comité régional de négociation (CNR) conduit les discussions avec l’UE pour la deuxième phase.

· Au sein de la délégation du CNR, le Secrétariat exécutif de la CEDEAO et la Commission de l’UEMOA sont des négociateurs en chef. Ceux-ci sont assistés de haut fonctionnaires et d’experts.

· Prennent également part aux négociations, en tant que participants au CNR, un coordinateur du Comité des Ambassadeurs, un représentant du secteur privé, un représentant du Comité technique d’appui.

· Enfin, le lien entre la région et l’UE est assuré par le Groupe des Ambassadeurs basés à Bruxelles, et l’interface entre la CEDEAO et l’OMC est assurée par le Groupe des représentants permanents à Genève.

Après avoir analysé les principales caractéristiques des APE, il convient de présenter ses objectifs.

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