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1.4 De la théorie à la pratique

1.4.1 ANTS : simulation de fourmilière

ANTS est une application ayant pour but de simuler le comportement d’une fourmi- lière lors de tâches de fourragement, c.-à-d. de recherche de nourriture. Ici la fourmilière est modélisée comme un système multi-agent devant s’adapter au mieux à son environnement physique constitué de points de nourriture, d’obstacles et de sol praticable. Les agents sont facilement identifiables : les fourmis fourrageuses.

Le comportement nominal des fourmis a été déterminé par des éthologues, comme des vecteurs de préférences sur les actions à mener en fonction des perceptions [Topin et al., 1999a,b]. Les fourmis explorent l’environnement et déposent des phéromones lors de leurs déplacements. Ainsi, comme dans l’exemple donné dans le paragraphe 1.1.2.2, plus un che- min est fréquenté, plus il attire les fourmis par une forte concentration en phéromones.

Le but de l’application de la théorie des AMAS à ce problème n’était pas de simplement

modéliser le comportement des fourmis dites "naturelles", mais de montrer l’apport de com- portements coopératifs en terme d’efficacité, c.-à-d. le nombre de ressources rapportées au nid en un temps donné. Topin et al. ont identifié six situations (SNC) dans lesquelles un com- portement coopératif pourrait améliorer le comportement nominal des fourmis naturelles. Les fourmis ainsi obtenues sont appelées robots-fourmis :

1. Un premier cas de concurrence survient lorsqu’une fourmi voit deux ressources. Une fourmi naturelle est attirée proportionnellement par la plus importante. Mais pour être plus coopératif, le robot-fourmi va vers la ressource ayant le plus de disponibilité, même si elle est moins importante, ou si la ressource se trouve plus loin, pour ne pas aboutir au même état du monde où les ressources sont inégalement exploitées.

2. Un deuxième cas de concurrence survient lorsqu’une fourmi en mode exploration voit une autre fourmi en exploration. Une fourmi naturelle ira indifféremment vers la fourmi ou ailleurs. Le robot-fourmi est en SNC car il visitera une zone déjà couverte par l’autre robot-fourmi. Il évite donc cette zone et il n’ira pas dans la direction du robot-fourmi perçu afin d’améliorer l’exploration collective de l’environnement.

3. Une troisième situation de concurrence survient quand une fourmi suit sa piste de phé- romone et voit des ressources. Une fourmi naturelle est attirée proportionnellement par la phéromone et la ressource, elle a donc plus de chance de suivre la piste, qui comporte a priori une grande concentration de phéromone. Un robot-fourmi risque de se retrou- ver en situation de concurrence s’il se dirige vers des ressources exploitées par d’autres agents. Pour éviter cette concurrence potentielle, il ira s’il le peut vers des ressources nouvelles. Il va vers les ressources, même si la phéromone est présente en grande quan- tité.

4. Parce qu’un robot-fourmi est coopératif, il donne spontanément des informations aux autres robots-fourmis s’il croit que ces informations peuvent leur être utiles. C’est ce que l’on appelle la communication spontanée. Ainsi, une fourmi qui rentre au nid et voit en passant des ressources, détient une information sur la localisation de ces res- sources. Une fourmi naturelle ne prend pas en compte l’information liée à la perception de cette ressource. Par contre le robot-fourmi continue son chemin vers le nid en dépo- sant plus de phéromone dans le but de donner des informations plus exactes aux autres sur l’environnement tel qu’il le perçoit, sinon il serait en situation d’inutilité.

5. Une fourmi doit retourner au nid sans être chargée au maximum parce que son temps maximum hors du nid est écoulé. Une fourmi naturelle dépose de la phéromone en retournant au nid, comme elle le fait dans tous les cas puisqu’elle est chargée. Le robot- fourmi, par souci de bien informer ses partenaires, ne laisse pas de trace de phéromone, sinon il est en situation d’inutilité. Ici aussi, l’agent dispose d’une information supplé- mentaire : il n’y a plus de ressource là où il se trouve. Pour coopérer, il communique cela aux autres, en ne déposant pas de phéromone. Si, par la suite, l’agent découvre des ressources, il le communiquera aux autres.

6. Une fourmi qui rentre au nid en ayant trouvé des ressources, recrute d’autres fourmis. La fourmi naturelle recrute en fonction de la quantité de nourriture ramenée au nid. Toujours par souci d’informer de manière la plus juste possible, le robot-fourmi recrute en fonction de la dernière quantité de phéromone déposée. En effet, il dispose d’une

1.4. De la théorie à la pratique

information supplémentaire : la somme des ressources détectées pendant le trajet. Ce critère est bien meilleur pour décider que d’autres robots-fourmis doivent sortir du nid que celui de la nourriture rapportée. Encore, une fois, s’il n’agissait pas ainsi, le robot- fourmi serait inutile.

Les résultats présentés par Topin et al. sont significatifs de l’apport de tels compor- tements coopératifs et montrent que les robots-fourmis, ayant les mêmes caractéristiques physiologiques que les fourmis œcophylles, explorent de manière plus optimale l’environ- nement [Topin et al., 1999b].