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CHAPITRE 1: REVUE DE LITTÉRATURE

5 TRAITEMENT DE L’ARTHRITE RHUMATOÏDE

5.2 Traitements pharmacologiques

5.2.1 Anti-inflammatoires non-stéroïdiens

L’administration d’antidouleurs et d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens vise à réduire la douleur, l’inflammation, et la raideur associées à l’arthrite rhumatoïde, mais n’affectent pas la réponse immunitaire ou la progression de la maladie de façon significative. Les personnes atteintes d’arthrite rhumatoïde souffrent de douleur chronique, pouvant être intense, et qui peut être déclenchée par une stimulation délicate ou un mouvement léger. L’inflammation articulaire libère des cytokines pro-inflammatoires, histamines, bradykinines, et autres facteurs, menant à un profil cytokinique local altéré, ce qui sensibilise les nocicepteurs périphériques (van Laar et

al., 2012). Des cascades cellulaires mènent ensuite à une sensibilisation centrale, c’est-à-dire

une hypersensibilité généralisée à la douleur (Woolf, 2011).

Le traitement pharmacologique de la douleur chez les personnes atteintes d’arthrite rhumatoïde peut être direct, via l’administration d’agents analgésiques, dont l’acétaminophène ainsi que les opioïdes. Les agents analgésiques présentent un risque important de dépendance (particulièrement les opioïdes), de toxicité, et d’interactions néfastes avec autres substances. L’administration d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens représente un traitement direct de l’inflammation, et indirect de la douleur; les AINS réduisent relativement l’inflammation locale et généralisée, ce qui a pour effet d’atténuer la sensibilisation des nocicepteurs; un effet additionnel consiste en la réduction importante de la raideur matinale. Les AINS ont également des effets indésirables, notamment des effets secondaires gastrointestinaux et cardiovasculaires.

D’autres thérapies sont utilisées en complément aux traitements classiques, incluant des antidépresseurs tricycliques, des agents antiépileptiques, des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, et agents topiques comme la lidocaïne (van Laar et al., 2012). L’administration d’antidouleurs et d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens chez les personnes atteintes d’arthrite rhumatoïde est généralement complémentaire à des traitements visant à ralentir la progression de la maladie.

5.2.2 Corticostéroïdes

L’administration de corticostéroïdes vise à réduire l’inflammation associée à l’arthrite rhumatoïde, en atténuant l’activité du système immunitaire. Leur efficacité à apaiser les désordres inflammatoires est le résultat des effets pléitropiques du récepteur glucocorticoïde sur plusieurs voies de signalisation, spécifiquement le blocage de la transcription de plusieurs protéines inflammatoires par NF-κB et par AP-1, ainsi que l’induction de protéines anti- inflammatoires comme IkB, l'annexine 1, et la MAPK phosphatase I (Coutinho et al., 2011, Rhen et al., 2005).

La pléitropie du récepteur glucocorticoïde, par contre, peut mener à des effets néfastes, notamment l’immunosuppression, l’hypertension, l’inhibition de la réparation des blessures, et des dérangements métaboliques. La résistance acquise aux glucocorticoïdes est également commune chez les patients atteints d’arthrite rhumatoïde (Chikanza, 2002). Ces propriétés nocives contre-indiquent la thérapie aux glucocorticoïdes prolongée. L’administration de corticostéroïdes n’affecte pas la progression de la maladie.

5.3

DMARDs

Les DMARDs (disease-modifying antirheumatic drugs) sont une catégorie de traitements qui ont un effet direct sur le cours de la maladie chez les patients atteints d’arthrite rhumatoïde, par exemple en inhibant la progression du dommage structural ou en réduisant les niveaux d’anticorps autoréactifs, en amont comparativement aux autres types de traitements, qui visent plutôt à traiter les symptômes engendrés par la maladie (Kirwan et al., 1983, Smolen et al., 2015, V. Wright et al., 1980a). Les DMARDs peuvent être caractérisés par leur origine synthétique ou biologique (Smolen et al., 2014b).

5.3.1 DMARDs synthétiques

Les DMARDs d’origine synthétique sont des agents chimiques utilisés pour traiter la polyarthrite rhumatoïde. Ces traitements peuvent être catégorisés selon qu’ils sont conventionnels (csDMARD) ou ciblés (tsDMARD). Les csDMARD sont des DMARDs synthétiques dont la capacité à modifier le cours de l’arthrite rhumatoïde a été déterminée de manière empirique, soit de manière fortuite ou suite à des hypothèses concernant des aspects spécifiques de la pathogenèse (Kirwan et al., 1983).

5.3.2 Méthotrexate

Le méthotrexate est un DMARD synthétique dit conventionnel, csDMARD (Smolen et al., 2014b), dont l’administration pour traiter l’arthrite rhumatoïde est d’usage commun depuis une trentaine d’années (Michael E Weinblatt et al., 1985). Le méthotrexate est généralement considéré comme étant le DMARD le plus efficace et sécuritaire à long terme (Pincus et al., 2003), et est le traitement de première ligne recommandé par l’EULAR (Smolen et al., 2010b). Le mécanisme d’action précis du méthotrexate dans le traitement de l’arthrite rhumatoïde n’a pas encore été identifié, mais plusieurs rôles ont été proposés : l’inhibition de la prolifération des lymphocytes T ainsi que la promotion de leur apoptose, la libération d’adénosine anti- inflammatoire, et un effet sur l’expression de molécules d’adhésion et la production de cytokines (Schnabel et al., 1994, Wessels et al., 2008). Le méthotrexate peut être administré en monothérapie ou en combinaison avec d’autres DMARDs, auquel cas il augmente leur efficacité (Smolen et al., 2010b). Outre le traitement de l’arthrite rhumatoïde, le méthotrexate est utilisé comme agent de chimiothérapie dans le traitement de plusieurs cancers (Rajagopalan et al., 2002), et peut également être administré dans les cas où il est nécessaire de mettre fin à une grossesse extra-utérine (Mol et al., 2008). Dans les cas où il existe une contre-indication ou une intolérance au méthotrexate, l’EULAR recommande l’administration d’autres DMARDs synthétiques tels que leflunomide, sulfasalazine, ou sels d’or (Smolen et al., 2010b).

5.3.3 Autres csDMARDs

Le leflunomide est un csDMARD ayant un effet inhibiteur sur l’enzyme dihydroortate déshydrogénase, qui participe à la synthèse d’uridine monophosphate, empêchant ainsi la

synthèse de l’ARN (Greene et al., 1995). La sulfasalazine est un csDMARD dont l’effet exact dans le traitement de l’arthrite rhumatoïde n’a pas encore été identifié, mais qui est probablement relié à une inhibition de la voie de signalisation par NF-κB (Wahl et al., 1998). L’injection intramusculaire d’or métallique est considérée comme un csDMARD et dont le rôle dans le traitement de l’arthrite rhumatoïde n’a pas encore été identifié (Wolfe et al., 1993).

5.3.4 tsDMARDs

Les DMARDs synthétiques ciblés (tsDMARDs, targeted synthetic disease-modifying antirheumatic drugs), diffèrent de la catégorie des csDMARDs par leur méthode de développement, qui ciblait une structure moléculaire particulière en vue de la neutraliser (Smolen et al., 2014b). La catégorie des tsDMARDs comprend les traitements au tofacitinib, fostamatinib, et apremilast, dont les cibles moléculaires sont la classe des kinases janus, la tyrosine kinase splénique, et la phosphodiestérase-4, respectivement (Braselmann et al., 2006, Genovese et al., 2015, Kremer et al., 2009).

5.3.5 Agents biologiques

Les agents biologiques sont une catégorie de DMARDs qui diffèrent des agents synthétiques de par leur nature biologique et non synthétique. Les agents biologiques sont catégorisés selon qu’ils sont des agents biologiques d’origine (boDMARD) ou des agents biosimilaires (bsDMARD)(Smolen et al., 2014b).

Les agents biologiques d’origine sont généralement des anticorps monoclonaux contre des protéines extracellulaires spécifiques, ou sont des formes recombinantes de molécules inhibitrices naturelles de cytokines impliquées dans la réponse immunitaire (King et al., 2012, Moreland et al., 1997). La principale cytokine ciblée par plusieurs traitements boDMARD est le facteur de nécrose tumorale (TNF, tumor necrosis factor), qui est surexprimé chez les personnes atteintes d’arthrite rhumatoïde et participe de manière importante à la réponse inflammatoire (Feldmann et al., 2003, E. M. Ruderman, 2012b, Tracey et al., 2008). Plusieurs boDMARD visent à inhiber l’action du TNF : adalimumab, certolizumab, etanercept, golimumab, infliximab (Kempeni, 1999, Maini et al., 1999, Mazumdar et al., 2009, Peppel et al., 1991, Ruiz Garcia et al., 2011). Certains boDMARD ciblent d’autres cytokines, comme l'IL-1 (anakinra), ou l'IL-6 (tocilizumab) (Mertens et al., 2009, Venkiteshwaran, 2009). D’autres traitements de cette

catégorie ciblent plutôt une population cellulaire spécifique, comme les lymphocytes B (le rituximab inhibe CD20 et détruit ainsi les lymphocytes B qui expriment cette molécule) ou les lymphocytes T (l’abatacept inhibe le signal de costimulation par la protéine B7 exprimée sur les cellules présentatrices d’antigènes et requis pour l’activation des lymphocytes T) (Edwards et

al., 2004, Teng et al., 2005).

Plusieurs nouveaux agents biologiques sont présentement à différentes étapes de développement, ciblant d’autres molécules telles l’IL-6R, BAFF (B-cell activating factor), IL-17 et son récepteur, IL12/23, GM-CSF, IL-21, et IL-20 (Avci et al., 2015).

Les bsDMARD sont des versions alternatives de molécules biologiques où les structures primaires, secondaires, tertiaires, et parfois même les modifications post-traductionnelles, ont été reproduites, et qui ont un effet similaire à la molécule d’origine (Dörner et al., 2012). Les agents biosimilaires sont l’équivalent des versions génériques de produits pharmaceutiques produits par des compagnies autres que celles qui ont développé la molécule d’origine, et sont généralement moins coûteux que les agents biologiques d’origine (Huub Schellekens, 2004). Par exemple, l’Etacept est un biosimilaire de l’etanercept produit par la compagnie pharmaceutique Indienne Cipla.

L’administration de DMARDs aux personnes atteintes d’arthrite rhumatoïde présente un certain nombre d’inconvénients importants, notamment des effets secondaires graves et un lourd fardeau financier.

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