• Aucun résultat trouvé

Si/silanes/AuNP/molécules

CHAPITRE 5. CARACTÉRISATION CHIMIQUE DES INTERFACES

5.1.1 Analyse vibrationnelle des constituants

J'ai réalisé des mesures Infrarouge au LCP en utilisant un spectrophotomètre FTIR (Brucker Vertex 70, détecteur MCT 400-4000 cm 1) avec un module ATR (réexion totale atténuée) ou en transmission. Un spectre est constitué de 300 acquisitions avec une résolution de 1 cm 1. Les mesures Raman ont été réalisés par Maroua Ben Haddada du LRS avec un spectromètre Raman modulaire (HL5R) de Kaiser Optical Systems Inc. (USA) équipé d'une diode laser à haute puissance proche infrarouge à 785 nm (400 mW) couplée par bre de verre à une sonde holographique (pour les échantillons en solution). La puissance de sortie du laser est de 10 mW. La sonde est placée à peu près à 8 cm du fond de la cuve. Pour chaque spectre, 30 acquisitions de 5 s étaient enregistrées pour améliorer le rapport signal/bruit.

5.1.1.1 Dodécanethiol (DDT) et thiophénol

Ces deux molécules de fonctionnalisation sont des archétypes dans ce genre d'études, elles ont été beaucoup étudiées dans l'équipe. Le thiophénol se caractérise par une vibration C-H du cycle benzénique vers 3057 cm 1 [115]. Dans le cas du DDT greé sur l'or (Table 5.1 et annexe D), en fonction de l'organisation de la couche, on visualisera trois résonances SFG (dues aux trois modes de vibration d'élongation du groupement CH3, Figure 5.3b) ou cinq (si les CH2typiques des chaînes alcanes deviennent visibles). Lorsque les chaînes alcanes sont droites et organisées, la symétrie du système ne donne aucun signal SFG provenant des CH2, tandis que lorsque les chaînes alcanes se replient et se désorganisent, on observe des défauts dans ces dernières tels sue les modes de vibration des CH2 deviennent visibles sur les spectres SFG. On peut comparer ce spectre à celui enregistré en réectance infrarouge (Figure 5.3a) sur l'or. On observe deux types de diérences :1) la présence majoritaire des modes de vibration d'élongation des groupement CH2 d'alcanes en infrarouge, en raison de leur nombre important, qui disparaissent en SFG ; 2) l'apparition d'un mode supplémentaire en SFG (résonance de Fermi) qu'il est impossible de visualiser en infrarouge du fait de la présence majoritaire des modes de vibration d'élongation des groupements CH2 dans cette zone. A partir de ces mesures expérimentales, il est possible

CHAPITRE 5. CARACTÉRISATION CHIMIQUE DES INTERFACES

de tabuler (Table 5.3) les modes de vibration d'élongation symétrique et antisymétrique des groupements CH2 et CH3 des chaînes alcanes.

Par abus de langage, je parlerai par la suite de vibration C-H anti/symétrique pour désigner le mode de vibration d'élongation anti/symétrique du groupement C-H.

Figure 5.3  Spectres Infrarouge de la molécule de DDT greée sur de l'or pendant 7 jours (a) et SFG de la molécule de DDT greée sur de l'or pendant 48h (b).

Fréquence de vibration (cm 1) Mode de vibration 2851 CH2, ss 2876 CH3, ss 2921 CH2, as 2933 CH3, F R 2966 CH3, as

Table 5.1  Caractéristiques énergétiques des principaux modes de vibrations des chaînes alcanes.

5.1.1.2 APTES et MUA

Le spectre infrarouge de l'APTES est donné sur la Figure 5.4. On y retrouve les quatre modes présents sur le dodécanethiol (même si la vibration CH2 symétrique est étonnamment faible). La structure de la molécule conrme que les vibrations visibles dans la zone des C-H proviennent, comme pour le dodécanethiol, des fonctions méthyl et méthylène des chaînes du propyl et des trois groupements ethoxy. Le MUA possède quant à lui uniquement des fonctions CH2 de chaîne alcane. Lors de l'étude par SFG des échantillons de la série LRS, on s'attend donc d'une part à la disparition des signaux caractéristiques des CH3 de l'APTES en raison de la condensation des silanes de surface en siloxanes avec élimination du groupement ethoxy, et d'autre part à une disparition des signaux des méthylènes si les couches sont bien ordonnées. Nous verrons par la suite que la réalité n'est pas aussi simple comme nous pouvons l'observer à la Figure 5.2 c.

CHAPITRE 5. CARACTÉRISATION CHIMIQUE DES INTERFACES

Figure 5.4  Spectres Infrarouge de l'APTES sous forme solide

5.1.1.3 Citrate et acide tannique

Concernant le spectre infrarouge de l'acide tannique présenté sur la Figure 5.5a, sans sur-prise, il se compose principalement de vibrations méthylène. Étant donné sa très faible concen-tration en solution lors des synthèses de nanoparticules (voir Chapitre 4), sa contribution devrait rester négligeable. Le cas du citrate est plus complexe. Le spectre infrarouge de la molécule sous forme solide est présenté sur la Figure 5.5b.

Figure 5.5  Spectres Infrarouges de l'acide tannique à 1% en masse dans de l'eau (a), du citrate sous forme solide (b) ; spectre Raman d'une solution de citrate saturée (c).

Contrairement à ce que l'on pourrait attendre à la vue de la structure moléculaire, on n'ob-serve pas les modes des deux groupements CH2 identiques à ceux des alcanes. Les modes de vibrations se composent de deux résonances nettes à haute énergie (2924 et 2965 cm 1), et d'un mode plus faible vers 2850 cm 1. L'attribution de ces pics n'est pas évidente. En analyse Raman (Figure 5.5c), une solution de citrate saturée présente les deux mêmes pics à haute énergie. Cependant, le spectre infrarouge d'une solution de nanoparticules après synthèse (réalisée sans acide tannique) montre la présence des deux pics à basse énergie attribuables au citrate (Figure 5.6).

CHAPITRE 5. CARACTÉRISATION CHIMIQUE DES INTERFACES

Figure 5.6  Spectre Infrarouge d'une solution colloïdale de AuNPs

Une analyse attentive des spectres des diérents sels de citrate dans la librairie du fournisseur Sigma Aldrich montre que les spectres Raman possèdent deux pics (ou ensembles de pics à haute énergie), alors que les spectres infrarouges sont composés des trois pics mentionnés ci-dessus (2850, 2920 et 2965 cm 1). Pour comprendre l'origine de ces pics, j'ai réalisé une série de spectres infrarouges d'une solution de citrate de concentration molaire (3 g dans 10 mL d'eau) en faisant varier le pH par ajout progressif d'acide sulfurique pur (99%, Figure 5.7).

Figure 5.7  Spectres Infrarouges du trisodium citrate en fonction du pH.

Cette expérience permet de comprendre le comportement du couple citrate/acide citrique en solution, ou plus précisément la réponse vibrationnelle des diérentes formes du tri-acide. A pH

CHAPITRE 5. CARACTÉRISATION CHIMIQUE DES INTERFACES

élevé, donc sous forme totalement déprotonée citrate (avec trois groupements carboxylates), les deux modes de vibration à haute énergie du Raman sont clairement visibles. Leur position est étonnante pour des modes de vibration d'élongation du groupement CH2, en particulier pour le mode à haute énergie. Néanmoins, de tels comportements de décalage vers le bleu de modes de vibration de méthylènes ont été observés dans certains acides carboxyliques, en particulier pour la forme déprotonée (ion carboxylate associé à l'acide étudié, forme basique) [116]. Lorsque le pH diminue, le citrate se protone progressivement (les pKa des trois fonctions acide sont respectivement 6,40 ; 4,76 et 3,14). Cela correspond sur les spectres de vibration à un basculement vers les modes à basse énergie (2850 et 2920 cm 1) et à une disparition du mode à 2975 cm 1. À pH acide, on retrouve les deux modes de vibration du CH2 habituels des chaînes alcanes. Il est possible d'interpréter ces résultats de façon qualitative : lorsque le citrate est protoné (acide), l'environnement des deux groupements CH2 ne dière pas beaucoup de ceux d'une chaîne alcane, malgré la présence des groupements acides. En revanche, suite à la déprotonation (ion carboxylate), la densité électronique est modiée par délocalisation électronique sur les groupements carboxyliques1. Cela conduit à une augmentation des fréquences de vibration des groupements CH2 à proximité par augmentation de la force de la liaison chimique. En infrarouge, lorsque le pH est proche de 6,40 (coexistence des forme AH3 et AH2) ou sous forme solide (cela revient à ne pas contrôler le pH), on s'attend donc à visualiser les trois modes de vibration, ce qui est le cas pour les spectres expérimentaux (Figures 5.5a et 5.7). Le cas du spectre de la solution colloïdale est intéressant (Figure 5.5c), on pourrait s'attendre à trouver le citrate sous forme déprotonée (basique), donc des modes de vibrations plutôt à haute énergie. Mais, le pH de cette solution nale est plutôt acide (pH=5,6), ce qui explique la présence majoritaire des vibrations de l'espèce protonée. Il semble qu'en Raman, le pic à 2850 cm 1 ne soit jamais visualisé (spectres Aldrich des espèces hydrogénées par exemple), ce qui laisse supposer que son activité Raman est nulle pour des raisons de symétrie. Ces résultats sont synthétisés dans les Tables 5.1 et 5.2.

CHAPITRE 5. CARACTÉRISATION CHIMIQUE DES INTERFACES

Molécule Fréquence de vibration (cm 1) Mode de vibration

APTES 2851 CH2, ss 2885 CH3, ss 2928 CH2, as 2972 CH3, ss MUA 2850 CH2, ss 2920 CH2, as acide tannique 2850 CH2, ss 2921 CH2, as citrate 2851 CH2, déprotoné 2920 CH2 2965-2975 CH2, protoné

Table 5.2  Caractéristiques énergétiques des principaux modes de vibrations des dié-rents constituants des échantillons.