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3. Résultats et Discussion

3.1.1. Analyse des traitements anti-graminées

3.1.1.1. Les anti-graminées radiculaires

Ces herbicides agissent en altérant la croissance des plantules peu après la germination. On désigne souvent ces produits comme des anti-germinatifs (Ross et Childs, 1995). Ces herbicides contrôlent principalement les graminées, mais peuvent aussi agir contre certaines dicotylédones spécifiques. Ces herbicides sont généralement appliqués au sol.

S-métolachlore et pyroxasulfone

En 2014 et 2015, les trois traitements les moins sécuritaires pour le ray-grass en culture intercalaire étaient ceux incluant le s-métolachlore (nos.2- 4 et 9) et le pyroxasulfone (no.6) (figures 9 et 10). Le s-métolachlore et le pyroxasulfone sont deux molécules du groupe 15 dont le mode d’action est d’inhiber la croissance des pousses racinaires. Ils empêchent le processus normal de la division cellulaire (Ross et Childs, 1995). Ces herbicides résiduels sont soit appliqués en présemis, prélevée (no.2-4 et 6) ou en postlevée (no.9) de la culture de maïs. Ces résultats appuient ceux de Robinson et Cowbrough (2016) qui ont observé dans leurs essais avec le s-métolachlore et le pyroxasulfone, l’incompatibilité de ces matières actives en culture intercalaire de ray-grass. Dans les quelques projets réalisés au Québec, le résultat est le même. Le s-métolachlore, un herbicide résiduel homologué dans la culture de maïs, n’est pas recommandable en culture intercalaire de ray-grass (Sévigny, 2012; Laliberté, 2014 et Kablan, 2016).

Diméthénamide

Une seconde molécule du groupe 15 qui inhibe la croissance radiculaire des plantules est le diméthénamide. Cet herbicide empêche le processus normal de la division cellulaire tout comme le s-métolachlore et le pyroxasulfone (Ross et Childs, 1995). Le diméthénamide se retrouve dans le traitement no.5 en combinaison avec le saflufénacil et s’applique seulement

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en présemis ou en prélevée de la culture de maïs. Ce traitement compte parmi les premiers à faire l’objet d’étude sur la culture intercalaire de ray-grass. Les pionniers du semis de ray- grass intercalaire au Québec avaient remarqué la compatibilité de ce traitement. Il est important de mentionner que deux doses peuvent être appliquées pour cet herbicide, c’est-à- dire 0,49 kg m.a. /ha ou 0,73 kg m.a. /ha. Les producteurs agricoles utilisent généralement la dose maximale. Par souci de réalisme, la dose appliquée dans les essais de ce projet de maîtrise était de 0,73 kg m.a. /ha de diméthénamide/saflufénacil. Les résultats démontrent que le traitement de diméthénamide/saflufénacil a réduit la biomasse sèche aérienne de ray- grass, et ce, pour les deux années (figures 9 et 10). Robinson et Cowbrough (2016) ont eux aussi étudié ce traitement, mais les deux doses ont fait l’objet de leur essai. Le traitement à la dose de 0,49 kg m.a. /ha présentait un risque faible pour le ray-grass intercalaire comparativement à la dose maximale qui augmentait les dommages à la culture intercalaire. Leur recherche a aussi démontré que le traitement de diméthénamide/saflufénacil à la dose de 0,49 kg m.a. /ha serait le seul herbicide résiduel compatible à une culture intercalaire combinée de ray-grass et de trèfle (Robinson et Cowbrough, 2016).

Pendiméthaline

Les traitements no.8 et no.20 ont en commun le pendiméthaline. La différence est le stade d’application qui peut être en prélevée ou en postlevée du maïs. Cette molécule appartient au groupe 3 et affecte la croissance racinaire des plantules en inhibant les structures microtubulaires lors de la division cellulaire (Ross et Childs, 1995). Certains essais québécois avaient déjà observé que le pendiméthaline affectait la croissance du ray-grass (Sévigny, 2012 ; Asselin, 2014 et Piché-Dumontier, 2013). Les résultats obtenus dans ce projet de maîtrise appuient les observations véhiculées par les recherches précédentes. En 2014, les traitements de pendiméthaline ne diffèrent pas des traitements les plus difficiles pour la croissance du ray-grass, c’est-à-dire le s-métolachlore (nos.2-4 et 9) et le pyroxasulfone (no.6) (figure 9). Cependant, en 2015, le pendiméthaline diffère statistiquement du traitement de s-métolachlore et de pyroxasulfone (figure 10). Il serait moins dommageable pour la croissance du ray-grass en 2015 qu’en 2014. Les résultats de 2015 concordent avec les observations de Robinson et Cowbrough (2016) qui classent le pendiméthaline comme étant à risque modéré pour la culture de ray-grass intercalaire. Malgré les résultats positifs de 2015,

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le pendiméthaline se retrouve tout de même parmi les traitements les moins recommandables en situation de ray-grass intercalaire.

Isoxaflutole

La dernière molécule ayant un effet sur les graminées est la molécule d’isoxaflutole. L’isoxaflutole se retrouve dans les traitements no.3 et no.11. La différence entre ces traitements est le stade d’application et l’ajout de l’atrazine et du glyphosate. Le traitement no.3 est appliqué en prélevée du maïs avec de l’atrazine. Le traitement no.11 est appliqué en postlevée du maïs sans atrazine, mais avec une dose de glyphosate. Ces traitements sont considérés à large spectre, c’est-à-dire qu’ils contrôlent les graminées et les dicotylédones par absorption racinaire (Couteux et Lejeune, 2013). La différence avec les autres traitements d’anti-graminées radiculaires à l’étude est le mode d’action. L’isoxaflutole est un groupe 27 et inhibe les pigments de la plante au lieu d’inhiber la division cellulaire comme les groupes 15 et 3 (Ross et Childs, 1995). En fait, il agit comme inhibiteur de la synthèse des caroténoïdes de la plante (Couteux et Lejeune, 2013). Selon les résultats des deux années, le traitement en prélevée représente un herbicide résiduel sécuritaire pour le ray-grass. Toutefois, sa biomasse ne diffère pas de celle du traitement d’atrazine de prélevée (figures 9 et 10). Ces résultats appuient ceux de Robinson et Cowbrough (2016) qui classent cet herbicide résiduel de prélevée avec un faible risque pour le ray-grass intercalaire. Kablan (2016) a aussi étudié l’isoxaflutole. Les résultats indiquent que ce traitement se compare à celui du témoin désherbé à la main. Cadrin (2014) rapporte les mêmes résultats en indiquant que l’isoxaflutole en prélevée est un produit sécuritaire pour les graminées et les dicotylédones, suite à deux ans de recherche en Montérégie.

Le traitement d’isoxaflutole appliqué en postlevée (no.11) indique aussi des résultats intéressants. Même s’il est résiduel contre les graminées, l’isoxaflutole n’est pas significativement différent du traitement de glyphosate et du témoin désherbé à la main pour 2014 et 2015 (figures 9 et 10). Ce traitement est l’un des seuls anti-graminées de postlevée avec le traitement de topramezone compatible avec un ray-grass intercalaire. Malheureusement, aucune étude répertoriée n’a étudié l’isoxaflutole appliqué en postlevée du maïs avec du ray-grass en culture intercalaire.

52 3.1.1.2. Les anti-graminées foliaires

Certains traitements herbicides à l’essai ont comme particularité de contrôler les graminées suite à leur absorption par le feuillage. Les anti-graminées foliaires n’agissent pas sur les graminées qui germent après leur application (Ross et Childs, 1995). Ces herbicides sont généralement appliqués en postlevée du maïs. Dans tous les cas, ils ont été appliqués sur les plantules de mauvaises herbes avant le semis du ray-grass intercalaire.

Rimsulfuron et nicosulfuron

Le rimsulfuron ainsi que le nicosulfuron sont deux molécules ayant peu d’effet résiduel sur les graminées et les dicotylédones. Le nicosulfuron a une faible persistance d’action dans le sol (Couteux et Lejeune, 2013). Selon les recherches de la compagnie DuPont, le rimsulfuron aurait une activité résiduelle dans le sol de 10 à 14 jours contre les graminées (Service d’aide Dupont, 2016). Ces deux molécules appartiennent au groupe 2 de la famille des sulfonylurées et inhibe la synthèse des acides aminés essentiels à la division cellulaire et à la croissance des mauvaises herbes (Ross et Childs, 1995). Ils sont classés comme ayant un large spectre d’action et sont absorbés uniquement par le feuillage (BASF, 2010). Le traitement no.12 contient ces deux molécules. Que ce soit pour 2014 ou 2015, ce traitement n’a pas procuré une biomasse sèche aérienne adéquate de ray-grass (figures 9 et 10). Comme il est inscrit sur l’étiquette de ce produit, il agit par contact et n’élimine pas les plantules de graminées nuisibles ou de mauvaises herbes à feuilles larges ayant germé après l’application (Dupont, 2015). Ce n’est donc pas l’effet résiduel du traitement qui a influencé le ray-grass, mais plutôt la présence des mauvaises herbes qui a nui au bon développement de la plante de couverture.

Le traitement no.19 est le second traitement à l’étude ayant la molécule de rimsulfuron combiné à la matière active mésotrione. L’ajout de cette molécule procure une meilleure activité résiduelle contre les dicotylédones. Selon Robinson et Cowbrough (2016), le traitement de rimsulfuron/mésotrione est compatible avec le ray-grass intercalaire. Ces auteurs le classent comme étant à faible risque d’endommager le ray-grass. Kablan (2016) a aussi évalué un herbicide semblable qui contenait du rimsulfuron, du mésotrione, du nicosulfuron et de l’atrazine. À la lumière de leur recherche, les résultats obtenus avec ce traitement ne sont pas significativement différents du témoin désherbé à la main. Les résultats

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ne sont pas étonnants puisque la molécule de mésotrione est homologuée dans l’État de l’Orégon pour la production de semences de ray-grass (Annexe 2). Suite à l’analyse statistique des données de 2014 et 2015, le traitement no. 19 se classe parmi les derniers à recommander en postlevée pour un ensemencent de ray-grass en culture intercalaire (figures 9 et 10). Cette divergence dans les résultats demande réflexion. Une piste de réponse provient de la présence des mauvaises herbes. Sachant que le rimsulfuron est peu résiduel, il se peut que d’autres mauvaises herbes aient émergé suite à l’application du traitement. Ces mauvaises herbes ont pu nuire au bon développement du ray-grass intercalaire. L’infestation de mauvaises herbes était probablement plus élevée dans les essais de ce projet de maîtrise comparativement à celui de Kablan (2016) et de Robinson et Cowbrough (2016). Des recherches supplémentaires sont ici nécessaires.

Topramezone

Le topramezone est un autre herbicide qui est absorbé par le feuillage des graminées. Cet herbicide appartient au groupe 27 et inhibe les pigments de la plante. Cette molécule se retrouve dans le traitement no.16. Les plantes traitées pâlissent et deviennent blanches ou translucides. Le blanchiment est le symptôme commun des herbicides du groupe 27 qui sont aussi surnommés les herbicides "bleaching" (Lingenfelter et Hartwig, 2013). Le topramezone est le seul herbicide de ce groupe à agir par contact sur les graminées. Selon les résultats obtenus, il est aussi l’un des traitements d’anti-graminées foliaires les plus sécuritaires de sa catégorie pour le ray-grass intercalaire. En 2014, le traitement de topramezone ne diffère pas significativement des meilleurs herbicides résiduels à l’étude, c’est-à-dire le traitement de dicamba + glyphosate et de dicamba/atrazine + glyphosate (figure 9). Toutefois, les observations ne sont pas les mêmes pour 2015. Le même traitement est significativement différent des deux meilleurs traitements (de dicamba + glyphosate et de dicamba/atrazine + glyphosate), mais demeure non statiquement différent du traitement de glyphosate et du témoin désherbé à la main (figure 10). En fait, le topramezone n’endommage pas le ray-grass puisqu’il n’a pas d’effet résiduel contre les graminées. Cet herbicide est résiduel seulement pour les dicotylédones. Ces résultats concordent avec ceux obtenus par Sévigny (2012). Le traitement de topramezone était l’un des traitements qui procuraient le meilleur pourcentage de recouvrement de ray-grass (topramezone : 2,6% vs pendiméthaline : 0,5%) (Sévigny,

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2012). Une autre étude a confirmé la compatibilité du ray-grass intercalaire avec le traitement de topramezone (Piché-Dumontier, 2013).

Tembotrione

Le traitement no.10 est le seul herbicide résiduel à l’étude qui contient la molécule de tembotrione. Elle appartient au groupe 27 et inhibe les pigments de la plante. Cette molécule est absorbée par les feuilles en postlevée des mauvaises herbes. Le tembotrione est du même groupe que l’isoxaflutole et le topramezone, mais de famille différente. C’est une trikétone tandis que l’isoxaflutole est de la famille des isoxazoles et le topramezone de la famille des pyrazolones. Le traitement no.10 combine le tembotrione avec une seconde molécule, le thiencarbazone-méthyle, qui appartient au groupe 2 et qui est absorbée par le feuillage et les racines (MAAARO, 2015). Cet herbicide est résiduel contre certaines dicotylédones et graminées. Selon les biomasses sèches aériennes du ray-grass mesurées en 2013, lors d’un projet sur les cultures intercalaires de Laliberté (2014), le traitement no.10 aurait réduit le développement du ray-grass de façon considérable en comparaison avec un traitement de glyphosate. Les résultats de Laliberté (2014) concordent avec ceux obtenus dans cette étude, pour l’année 2014. Les analyses statistiques ont révélé ce traitement comme étant comparable à un traitement de s-métolachlore (figure 9). Cet herbicide résiduel est à déconseiller pour une culture intercalaire de ray-grass. Par contre, les résultats ne sont pas les mêmes pour 2015. Les résultats étaient plus positifs et l’analyse classait ce traitement non significativement différent du traitement de glyphosate et du témoin désherbé à la main (figure 10). Malgré les résultats positifs de 2014, le tembotrione se retrouve tout de même parmi les traitements de postlevée les moins recommandables en situation de ray-grass intercalaire. Des études supplémentaires sont nécessaires pour s’assurer de la compatibilité de ce traitement avec une culture intercalaire de ray-grass.

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