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6.4 Analyse de données

6.4.2 Analyse de données radiologiques

Cette analyse requière, dans un premier temps, la numérisation des clichés radiographiques, sous un format d’image standard (TIFF ou DICOM). Cette numérisation est réalisée grâce à un scanner à rouleaux (Vidar Scan VXR12®, GIPS, France) et à une interface spécifique (carte

Thèse en Biomécanique de Sabina Marcovschi Champain 67 PCMCIA + logiciel adapté) permettant l’acquisition des images de résolution suffisante (75 -150 dpi selon le format des radiographies) et d’une profondeur des niveaux de gris de 12 bit.

Ensuite, un logiciel spécifique (Spineview®, Surgiview, France) permet l’analyse des images numérisées, basée sur l’identification des repères anatomiques et générant un calcul automatique d’un grand nombre de paramètres. Le logiciel et les principaux paramètres calculés seront présentés dans la suite.

Présentation de l’outil d’analyse radiologique

Le logiciel Spineview a été développé par une étroite collaboration entre le Laboratoire de BioMécanique de l’Ensam, Paris (France), le Laboratoire LIO, Montréal (Canada) et la société Surgiview (Paris, France). Une première version de ce logiciel avait été validéeRajnics'01;Rillardon'03b en comparaison des mesures manuelles, pour un nombre limité de paramètres calculés à partir des radiographies de profil sagittal. Une deuxième version de ce logiciel a été proposée récemment, permettant le calcul d’un nombre plus important de paramètres et apportant des améliorations concernant le temps de mesure et la détection des contours.

Nous avons utilisé cette dernière version, qui permet l’analyse de cinq types de radiographies : flexion-extension cervicales et lombaires, clichés de posture sagittale ou frontale, ainsi que des clichés dynamiques d’inclinaison latérale (bendings). Pour tous ces types de clichés, l’analyse comporte quatre étapes : identification des repères anatomiques sur l’image numérisée, détection des contours des vertèbres (Figure 54 A), validation de ces contours ou correction manuelle et

calcul des paramètres à partir des repères identifiés (Figure 54 B et C), avec la possibilité d’enregistrer les données géométriques (contours) et numériques (valeurs des paramètres) de l’analyse.

La validation de cette version du logicielChampain'06 s’est déroulée1 à travers des tests de précision et

1 Ces travaux se sont déroulés pour la plupart durant l’année de DEA précédant cette thèseChampain'02 et ont été Figure 54 : Détection des contours (A) et analyse des radiographies

dynamiques lombaires (B) et en posture sagittale (C).

Thèse en Biomécanique de Sabina Marcovschi Champain 68 de reproductibilité, évaluant la fiabilité des mesures, suivis d’une investigation de la validité du calcul des paramètres (par rapport à la littérature) et des limites d’utilisation de ce logiciel en activité clinique de routine. Nous présentons dans la suite une synthèse de ces travaux pour l’analyse des radiographies dynamiques (flexion-extension) lombaires et en posture sagittale (pour plus de détails, voir l’article en Annexe 2.1).

La précision des mesures a pu être investiguée pour les paramètres angulaires mesurés en flexion- extension, à travers l’analyse de radiographies prises sur des spécimens anatomiques, selon un protocole défini par Templier et al.Templier'98b. Ainsi, 5 spécimens anatomiques de rachis lombaire T12-S1, exempts d’anomalies, ont été instrumentés avec des tiges métalliques (kirschner) au niveau des corps vertébraux. La base des segments était fixée sur un socle et un bras de levier appliqué à l’autre extrémité permettait d’obtenir des positions simulant la flexion ou l’extension physiologiques (Figure 55 A). Les radiographies de ces spécimens ont été réalisées sous un angle d’incidence radiologique de 0° et centrées sur L3 afin de minimiser les distorsionsTemplier'98b.

A partir de ces radiographies, nous avons pu quantifier les amplitudes de mobilité en flexion – extension (Figure 55 B) pour chaque niveau intervertébral, de la manière suivante :

- la numérisation (sous Matlab®) de points sur les tiges de kirschner (repère indéformable, visible sur toutes les radios) permet le calcul des amplitudes de mobilité de référence, avec une erreur de mesure estimée à ± 0,8° pour un intervalle de confiance à 95% (2 écarts types).

-en parallèle, les valeurs des mêmes paramètres sont obtenues par analyse des clichés radiographiques sous Spineview, à partir des contours vertébraux.

Les tests de Student et Wilcoxon ont montré l’absence d’une éventuelle différence statistiquement significative entre les valeurs mesurées selon ces deux méthodes. La distribution des erreurs de mesure (Spineview versus référence,∆) étant normale (gaussienne, test de Kolgomorov-Smirnov) et indépendante du niveau intervertébral, nous avons pu calculer un estimateur global de précision (tous niveaux confondus), qui est de 1,96 x l’écart-type de ∆, pour un intervalle de confiance à 95%. Nous avons obtenu une précision de mesure de ± 2° pour les amplitudes de mobilité du rachis lombaire.

finalisés au debut de ce projet.

A. B.

Figure 55 : Flexion-extension des specimènes anatomiques (A) et amplitude de mobilité calculée à partir de ces clichés (B).

Thèse en Biomécanique de Sabina Marcovschi Champain 69 Pour chaque type de radiographie (posture ou flexion-extension) et chaque variable, la reproductibilité des mesures a été investiguée à travers un protocole de test-retest de la manière suivante : trois observateurs ont analysé par séries de 30 analyses (suffisamment espacées dans le temps) trois types de radiographies de qualité différente, choisies aléatoirement dans une classe représentant une visibilité variable des repères anatomiques : bonne (routine), faible et mauvaise. Le total de 270 analyses obtenu pour chaque paramètre a été traité de la manière suivante :

- pour les paramètres calculés pour chaque niveau vertébral, une analyse préliminaire de comparaison de variances a été effectuée, afin de vérifier l’indépendance de la reproductibilité des mesures selon le niveau vertébral

- toutes les variables ont été ensuite testées par ANOVA, afin d’évaluer les erreurs de mesure intra- et inter-observateur. Un coefficient de corrélation intra-classe a été également calculé afin de fournir une estimation complémentaire de la puissance de la mesure inter-observateur.

Les résultats étant caractérisés en termes de moyenne (M), écart type (ET) et coefficient de variation (ET/M), le coefficient de reproductibilité, pour un intervalle de confiance à 95%, est égal à 1,96 x ET et sera considéré un estimateur global de reproductibilité. Il se situe globalement entre 1-4 mm pour les paramètres linéaires (distances) et entre 0,1 et 5,5° pour les paramètres angulaires, avec des variations dépendant sensiblement de la visibilité des repères anatomiques sur la radiographie.

La validité du calcul a été investiguée et démontrée pour les principaux paramètres rachidiens et pelviens par comparaison et superposabilité entre les valeurs obtenues sur des sujets asymptomatiques (60 volontaires, 42% hommes et 58% femmes, âge moyen 43 [22-68] ans) et celles présentées dans la littérature pour des populations équivalentes.

Principaux paramètres biomécaniques issus de l’analyse radiologique

Radiographies en posture sagittale

Selon les repères anatomiques impliqués dans leur calcul, on distingue plusieurs classes de paramètres à signification biomécanique, présentées dans la suite.

Paramètres vertébraux

Pour chaque niveau vertébral, nous avons calculé : les inclinaisons des plateaux vertébraux (angle entre un plateau supérieur ou inférieur et l'horizontale,

Figure 56 A) les hauteurs vertébrales et les cunéiformisations vertébrales (angle entre le plateau supérieur et le plateau inférieur d'une vertèbre donnée, Figure 56 B).

Ces paramètres permettent une caractérisation de la géométrie du segment mobile analysé, complétée par le calcul des paramètres improprement nommés vertébraux, car ils donnent des informations relatives au disque ou au segment mobile global. Dans cette dernière catégorie on cite les angles intervertébraux( Figure 57A), la hauteur discale Frobin'97 (

Figure 57 C : pour deux vertèbres adjacentes, étant donné la bissectrice de leurs plans moyens, ce paramètre est calculé

Figure 56 : A. Inclinaisons des plateaux vertébraux et B. cunéiformisation vertébrale.

Thèse en Biomécanique de Sabina Marcovschi Champain 70 (en antérieur et postérieur) comme la somme des distances entre les coins adjacents des vertèbres et cette bissectrice ) et les proportions de hauteur disque/vertèbre sousjacente. A ceci se rajoute un paramètre quantifiant l’alignement sagittal et le glissement d’une vertèbre par rapport à celle sousjacente : le listhesis sagittal, calculé comme le décalage entre le coin antéro (ou postéro)- inférieur d'une vertèbre et le coin antéro (ou postéro)-supérieur de la vertèbre sous-jacente, et exprimé en pourcentage par rapport au plateau supérieur de la vertèbre sous-jacente (Figure 57 B).

Paramètres rachidiens

Deux classes de paramètres rachidiens ont été mesurés : ceux décrivant les courbures (lordose, cyphose) et ceux dits transversaux, calculés à partir des repères rachidiens et pelviens, décrivant l’équilibre sagittal du rachis.

Dans la première catégorie (Figure 58 A)Legaye'93;Stagnara'82, nous mentionnons le calcul de la cyphose T4T12 (angle entre le plateau supérieur de T4 et le plateau inférieur de T12), la lordose L1S1, mesurée entre le plateau supérieur de L1 et le plateau sacré et la lordose lombaire - angle formé par les plateaux supérieur et inférieur respectivement des plus inclinés vertèbres de la courbure lombaire (le plus souvent L1L5).

Dans la deuxième catégorie, nous mesurons :

- les Gites de T1 et T9, comme angles entre la verticale passant par le centre de l'axe bicoxo- fémoral et la droite reliant ce point au centre du corps vertébral de T1, resp. T9Legaye'93 (Figure 58 A)

- et l’inclinaison globale du rachis comme angle entre la verticale et la droite passant au sens de moindres carrés par les centres de tous les corps vertébraux, le milieu de l’axe bicoxo-fémoral et les conduits auditifs externes (Figure 58 B).

Un paramètre un peu particulier est la Total Lumbo-Pelvic Lordosis PR-T12 (TLPL), angle mesuré entre le plateau inférieur de T12 et le segment « pelviradius » de JacksonJackson'00b, unissant le centre de l’axe bicoxofémoral et le coin postéro-supérieur du sacrum ( Figure 58 B).

Figure 57 : Paramètres improprement denommés « vertébraux » : A. angle intervertébral, B. listhesis sagittal (ici mesuré en postérieur) et C. hauteur discale, ici mesurée

en antérieur.

Thèse en Biomécanique de Sabina Marcovschi Champain 71 Paramètres pelviens

Le rôle de ces variables dans la détection des anomalies du basin ou de la charnière lombo- sacrée est bien établi dans la littératureBoulay'98;Legaye'93;Duval-Beaupere'92;Legaye'98;Boulay'06, qui cite particulièrement trois paramètres, représentés sur la Figure 59.

Ils sont :

-la pente sacrée : angle formé par le plateau sacré avec l’horizontale Legaye'93;

- la version pelvienne : angle formé par la verticale et la droite D passant par le milieu de l’axe bicoxo-fémoral et le centre du plateau sacré, - et l’incidence pelvienne : angle entre la perpendiculaire au milieu du plateau sacré et la droite D Legaye'93.

Valeurs de référence (Annexe 2.2)

Afin d’évaluer l’influence du traitement sur la géométrie rachidienne, nous avons calculé des valeurs de référence pour les paramètres susmentionnés à partir des radiographies en posture sagittale d’un groupe « témoin » de 63 sujets asymptomatiques (42% hommes, 58% femmes, âge moyen 43 ± 12 ans)Champain'06.

Figure 59 : Principaux paramètres pelviens. PS= pente sacrée, VP= version pelvienne et

IP= incidence pelvienne.

A. B.

Thèse en Biomécanique de Sabina Marcovschi Champain 72 Radiographies dynamiques (flexion-extension lombaire)

L’analyse de ce type de clichés a été axée sur deux paramètres, décrivant la cinématique des segments mobiles lombaires.

La mobilité intervertébrale (MI) a été calculée, pour chaque niveau intervertébral, comme la différence entre l'angle intervertébral en flexion et celui en extension. En dehors de son importance pour caractériser la cinématique des niveaux libres, ce paramètre permet également de quantifier la mobilité résiduelle des niveaux instrumentés et d’évaluer la non-union, conformément à la littérature McAfee'01.

Le Centre Moyen de Rotation (CMR)Skalli'02;Pearcy'88 donne la localisation du point autour duquel la vertèbre susjacente tourne par rapport à celle sousjacente en passant de la flexion maximale à l’extension maximale dans un plan sagittal. Pour un segment intervertébral donné, ce paramètre est exprimé, par superposition des contours sur la vertèbre sousjacente, en coordonnées X et Y dans un référentiel appliqué à cette vertèbre sousjacente (Figure 60). Etant donné que l’incertitude des CMR augmente considérablement pour des MI inférieures à 3° Templier'98b;Champain'06, le calcul de ce paramètre n’est pas effectué dans cette situation.

Valeurs de référence (Annexe 2.2)

Pour l’analyse dynamique, les valeurs de référence ont été obtenues à partir des clichés dynamiques de 19 volontaires asymptomatiques (11 hommes & 8 femmes, âge moyen 34±10 ans).