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Altération des acides nucléiques et des nucléotides

3. La fraîcheur du poisson …

3.1 Les changements post-mortem influençant la fraîcheur du poisson

3.1.2 Altération du filet de poisson

3.1.2.3 Altération des acides nucléiques et des nucléotides

Altération des acides nucléiques (ADN, ARN)

L’autolyse du filet de poisson conduit également à l’altération des acides nucléiques comme l’ADN et l’ARN sous l’effet des enzymes hydrolytiques. Un ensemble de processus contribue à la dégradation de l’ADN. Le principal phénomène de dégradation de l’ADN est d’origine enzymatique. Les enzymes endogènes (autolyse) et les enzymes microbiennes participent à cette dégradation (Marchuk et al., 1998)

Les endonucléases notamment les désoxyribonucléases vont agir sur l’ADN en le clivant et conduisent à la libération d’oligonucléosomes. Chez l’Homme, la quantité d’oligonucléosomes varie avec la durée de conservation post-mortem (Nzengue, 2007). Dans les premiers stades post

mortem, l’importance de la dégradation enzymatique de l’ADN dépend d’un certain nombre de

humidité, température) (Vass, 2001). Contrairement à l’ADN, l’ARN est très instable et il se dégrade rapidement après la mort sous l’action des ribonucléases activées par les protéases lysosomiques (Terova et al., 2011 ; Seear et Sweeney, 2007). Cependant des études sur la stabilité de l’ARN du muscle post mortem du bœuf (Fitzpatrick et al., 2002), du porc (Malik et al., 2003), du lapin (Marchuk et al., 1998) et du rat (Wetzel et al., 1994) ont montré que les ARN sont relativement stables à la température ambiante entre 24 et 48h après la mort. L’intégrité des ARN du muscle squelettique du poisson post mortem a été étudiée chez le bar (Decentrarchus labrax) (Bahuaud et al., 2010 ; Terova et al., 2011 ; Seear et Sweeney, 2008). Ces auteurs montrent l’influence de la température sur le niveau d’altération des ARN. Les ARN du muscle de poisson post mortem peuvent aussi être altérés par les ribonucléases bactériennes (Terova et al., 2011).

Dégradation de l’ATP et formation des dérivés de l’ATP

La figure 1.4 illustre la dégradation de l’ATP pour former l’adénosine diphosphate (ADP), l’adénosine monophosphate (AMP), l’inosine monophosphate (IMP), l’inosine (Ino), l’hypoxanthine (Hx), la xanthine (HxR) et l’acide urique (Au). Les enzymes qui interviennent dans ce processus sont l’ATP-ase, la myokinase, l’AMP-désaminase, l’IMP-phosphohydrolase, le nucléoside phosphorylase; l’inosine nucléosidase et la xanthine oxydase (Gill, 1992). La dégradation des catabolites de l’ATP s’effectue de la même manière dans la plupart des poissons, mais la vitesse de chaque réaction individuelle (d’un catabolite à l’autre) varie beaucoup d’une espèce à l’autre. La voie de dégradation de l’ATP conduisant à l’inosine est entièrement due aux enzymes autolytiques tandis que la conversion de l’inosine en hypoxanthine est accélérée par la nucléoside phophorylase bactérienne (Surette, 1987). Les catabolites de l’ATP caractéristiques de l’autolyse sont l’ADP, l’AMP, L’IMP et l’Ino. Les autres catabolites sont plutôt des produits d’altération.

Ces nucléotides sont impliqués dans le développement de certaines flaveurs. Le goût amer du poisson est lié aux teneurs élevées en Hx (Tikk et al., 2006) tandis que l’IMP est responsable du goût recherché du poisson frais qui n’existe que dans les produits de la mer de première qualité (Aristoy et Toldrá, 2009). Aucun des catabolites de nucléotides n’est considéré comme ayant un rapport avec les changements perceptibles sur la texture pendant le processus autolytique excepté bien sûr l’ATP dont la perte est associée à la rigor mortis. Saito et al., (1959) sont les premiers à utiliser les catabolites de l’ATP pour mesurer l’état de fraîcheur du poisson. C’est ainsi qu’ils ont développé une formule pour la fraîcheur du poisson basée sur ces changements autolytiques :

où [ATP], [ADP], [AMP], [IMP], [Ino] et [Hx] représentent les concentrations relatives de ces composants dans le muscle du poisson, mesurées à différentes périodes pendant la conservation. Le paramètre K ou indice de "fraîcheur" donne une estimation de fraîcheur relative basée principalement sur les altérations autolytiques qui se produisent pendant la conservation post

mortem du muscle. La fraîcheur est proportionnelle à cet indice ; plus la valeur de K est élevée, plus

le niveau de fraîcheur est bas. Ce facteur ne peut pas être appliqué pour certaines espèces comme le cabillaud d’Atlantique qui atteignent une valeur maximale de K de loin supérieure à la durée de conservation. La variation du facteur K en fonction des espèces de poisson est due d’une part par à la variation du taux d’accumulation de l’hypoxanthine entre les espèces au cours du temps (Fraser et al., 1967). L’accumulation rapide de Hx dépend de la vitesse de dégradation de l’ATP qui est dépendante de l’activité de l’ATPase. L’activité de l’ATPase est optimale à pH 6 et est calcium-dépendant comme les calpaïnes (Gill et al., 2000).

Figure 1.3: Décomposition de l’ATP Durant les processus d’altération du poisson

La figure 1.5 montre la variation des teneurs en Hx entre les espèces. D’après ce graphe, la détermination du facteur K ne sera pas utile pour la rascasse du Nord et pour l’espadon. Par ailleurs, la manutention physique accélère aussi les changements autolytiques dans le poisson réfrigéré.

Figure 1.5 : Variation du taux d’accumulation de Hx de différentes espèces durant la conservation

sous glace (Fraser et al., 1967).

Les catabolites de l’ATP utilisés pour la détermination du facteur K peuvent être séparés, identifiés et quantifiés par leur absorbance par chromatographie ionique ou par chromatographie liquide haute performance après une extraction acide suivie d’une neutralisation (Viciena-Nogues et al., 1997 ; Mora et al., 2010). Des méthodes enzymatiques ont été développées également pour déterminer le facteur K (Okuma et Watanabe, 2002).

L'utilisation de métabolites de l'ATP comme indice de fraîcheur est une technique de recherche qui n’est pas largement utilisée dans l'industrie en raison du coût élevé et de la durée des analyses. Le développement futur de cette approche exige des méthodes fiables et rapides pour la mesure des cataboliques de l’ATP.

3.2 La fraîcheur des poissons : entre lyse membranaire et libération d’enzymes. Quelle