• Aucun résultat trouvé

PARTIE I : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

6.5 Toxicité

6.5.6 Altération de l’ADN due au stress oxydant

L’ADN, structure moléculaire dépositaire du patrimoine génétique est une macromolécule possédant une structure complexe (formée de paires de bases reliées entre elles). Elle est très sensible à l’attaque des radicaux libres. Ceci revêt un caractère particulièrement critique compte-tenu du rôle clé de cette molécule dans l’expression et la transmission de l’information génétique. L’atteinte de l’ADN implique le franchissement préalable de toutes les barrières de défense mises en place par les végétaux, la potentialité de détoxication des cellules ou de l’organisme et enfin du potentiel des systèmes de réparation de l’ADN de l’organisme.

Divers effets peuvent alors être observés:

• Une formation de bases oxydées

• Des sites abasiques qui sont une partie de l’ADN dépourvue d’une base purique ou pyrimidique et ayant perdu l’information génétique par rupture de la liaison entre

• Des cassures au niveau des brins d’ADN, qui peuvent être double ou simple brin.

• Apparition d’adduits à l’ADN. Ils correspondent à la formation de produits d’addition entre le polluant et les nucléotides (adduits pour addition et produits), suite à la péroxydation des lipides.

• Des pontages ADN-protéine

Ces lésions au niveau de l’ADN entraînent des ruptures de chromosomes en fragments acentriques générant des micronoyaux lors de la division cellulaire. Ce sont des entités nucléaires indépendantes qui se retrouvent hors du noyau, dans le cytosol (Lagadic et al, 1997). Ils apparaissent sous forme de petits noyaux à côté du noyau principal. Les lésions au niveau de l’ADN peuvent également provoquer des aberrations chromosomiques, c'est-à-dire un nombre ou une structure anormale des chromosomes, mais également des échanges de chromatides sœurs, qui consiste en un échange symétrique entre le matériel chromosomique entre 2 chromatides sœurs.

Les micronoyaux peuvent aussi résulter d’un dysfonctionnement au cours de la division cellulaire gênant la migration chromosomique (Cotelle et Ferrard, 2001).Ils proviennent alors de chromosomes entiers ou de fragments et qui, du fait de leur migration incomplète, se retrouvent hors du noyau.

Les agents capables de générer des dommages sur l’ADN sont dits génotoxiques. Le caractère génotoxique des micropolluants pourrait constituer la composante majeure de la toxicité à long terme, c'est-à-dire des perturbations lentes mais irrémédiables, dues à une exposition prolongée des populations à des contaminations, même à de très faibles niveaux (Chenon, 2001). Ces micropolluants affectent les individus ou leur descendance en modifiant le patrimoine génétique des espèces. Ce qui pourrait avoir un impact sur la reproduction, le développement des populations ainsi que sur leur biodiversité en affectant des gènes essentiels.

Pour évaluer cette génotoxicité des polluants, des tests de génotoxicité ont été mis en place, c'est-à-dire des tests permettant la détection de la capacité d’une substance ou d’un processus physique à générer des dommages sur le matériel génétique. Ce sont en général des tests mono- spécifiques qui consistent à mesurer la réponse des organismes. Ces tests ont surtout été développés sur des modèles expérimentaux comme des systèmes cellulaires ou des organismes entiers. Ils peuvent notamment être réalisés sur des plantes sélectionnées et homogènes lors de leur exposition à des polluants et ils permettent l’établissement de courbes « concentration/réponse » après exposition des organismes à des quantités croissantes de polluants (Chenon, 2001).

Divers tests existent, tels que le test d’Ames (Ames et al., 1973), conduit avec des souches de Salmonella typhimurum. Un des gènes codant pour la synthèse de l’histidine est inactivé, empêchant sa synthèse et une seconde mutation provoquée par le polluant étudié restaure cette synthèse. Il existe également le test mutatox qui a pour but de détecter la présence d'agents mutagènes dans un produit testé. Ce test mesure la fréquence d'apparition d'une mutation portant sur la bioluminescence d'une bactérie marine.Enfin, il existe des tests permettant la détection d’aberrations chromosomiques. Un test, mis au point en 1981 par Randerath, permet la détection d’adduits à l’ADN. C’est une

méthode de radiodétection où l’ADN est marqué in vitro après extraction. Un marquage au 32P permet de détecter les adduits par autoradiographie. Il existe également des tests permettant de détecter les cassures au niveau des brins d’ADN, tel que le Comet Assay, mis au point par Singh en 1988 et dans lequel les cellules, incluses dans de l’agarose sont lysées puis soumises à une électrophorèse. Au cours de cette dernière, l’ADN nucléaire présentant des cassures migre de façon hétérogène, les brins d’ADN vont migrer de façon plus importante que le noyaux. Après un marquage fluorescent, on peut observer une image en forme de comète présentant une tête (contenant l’ADN intact) et une queue (contenant l’ADN fragmenté) (Menke et al., 2000). Ce test largement utilisé sur les cellules sanguines animales peut également être appliqué à des cellules végétales (Cotelle et al., 1999). Enfin, il existe le test dit des micronoyaux, auquel est consacré le paragraphe suivant, et qui fait l’objet d’une partie de ces travaux de thèse.

L’emploi de ces différents tests a permis de montrer que la plupart des métaux pouvaient avoir des effets génotoxiques. Les travaux de Qun et Xiao (1995) sur Vicia faba par exemple, ont montré que pour des concentrations supérieures à 1 mg.kg-1 de Pb dans le milieu de culture, l’indice mitotique (ou nombre de cellules en division pour 100 cellules) diminuait et le nombre d’aberrations chromosomiques augmentait. De même, des travaux de Bhowmik et Sharma (2000) sur différentes plantes, ont montré pour des concentrations en plomb allant de 0,001 à 1 mg.kg-1 de Pb, une réduction progressive de l’index mitotique et une augmentation des aberrations chromosomiques.