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II. APPROCHE NUTRITIONNELLE : LE CALCIUM DANS L’ALIMENTATION

3. TABLES NUTRITIONNELLES : LES SOURCES ALIMENTAIRES DE CALCIUM

3.5. Assurer les ANC sans produit laitier ?

3.5.1. Alternatives aux produits laitiers : les autres sources de calcium

3.5.1.1. Les algues alimentaires

L’idée de l’utilisation des algues dans l’alimentation peut surprendre, mais cela fait longtemps qu’elles sont exploitées et consommées en France. En effet, les industriels les utilisent sous la forme d’additifs, surtout pour leurs propriétés gélifiantes. Bon nombre de flans, plats cuisinés et même produits cosmétiques en contiennent. Dans l’industrie agroalimentaire on les trouve soit sous forme pure, soit sous forme d’acide alginique (E 400) :

- E 401 alginates de sodium ; - E 402 alginates de potassium ; - E 403 alginates d’ammonium ; - E 404 alginates de calcium ;

- E 405 alginates de propylène glycol.

Actuellement, elles sont de plus en plus utilisées comme source de calcium dans les jus végétaux, présentés comme des « laits » bien que cette appellation n’ait pas lieu d’être (cf. II) 3.4.1.1.). L’algue lithotamme en est l’exemple type. Elle est souvent ajoutée aux jus d’amande ou de riz pour en garantir la teneur en calcium.

87 A noter une caractéristique peu connue des consommateurs de ces jus végétaux : le lithothamne n’est pas complètement soluble dans ces préparations et il a tendance à faire un dépôt au fond de la brique. Si l’utilisateur ne prend pas la précaution de bien la secouer avant de se servir, l’algue ayant pour but premier d’apporter le calcium ne sera pas consommée.

Le lithothamne ou Lithothamnium calcareum est une petite algue rouge au thalle très fortement minéralisé. Le séchage à l’état vivant lui fait perdre sa couleur et lui donne un aspect calcaire, à l’origine de son nom. (81), (82) Elle se trouve en profondeur sur les côtes bretonnes et méditerranéennes, mais également en Islande, en Norvège, et en Angleterre. (81)

Elle constitue le principal composant du maërl, milieu marin biogénique constitué d’accumulation d’algues riches en calcaire, de débris de coquilles et de sable. C’est sous cette forme qu’elle est le plus souvent récoltée.

Le lithothamne et les autres algues marines captent directement par osmose les éléments minéraux de la mer et les concentrent. (83) Elles sont en moyenne dix à quinze fois plus riches en oligoéléments et minéraux que les plantes terrestres. De plus, le lithothamne contient du calcium hautement biodisponible. En effet, il y est présent sous la forme de carbonate de calcium et la composition de l’algue est fortement alcaline (avec un pH égal à 9) ce qui rend le cation particulièrement assimilable par l’organisme. L’intérêt du lithothamne a d’ailleurs été démontré sur le rééquilibrage acido-basique, la lutte contre l’excès d’acidité gastrique, et surtout sur la minéralisation osseuse. (83), (84)

Notons que le lithothamne est relativement peu utilisé en Asie, où l’on emploi une grande variété d’autres algues que nous représentons ci-après. Ce sont toutes des concentrés de minéraux. Le tableau 19 donne la composition en calcium, autres minéraux et en iode de quelques-unes de ces algues alimentaires. Elles y sont classées par genre ou espèce dont on précise le nom d’usage. Ces valeurs doivent être considérées comme des valeurs moyennes, car il faut garder à l'esprit que la composition des algues (comme celle de tout végétal) est modulée par de multiples facteurs tels que l’origine géographique, la saison ou la méthode de récolte. (83), (85), (62)

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Tableau 19 : teneur nutritionnelle moyenne de quelques algues alimentaires (mg/100 g de

matière sèche (MS)) (85), (62), (83) Nom Na K Mg Ca P Fe I Ascophyllum nodosum Géomon noir 2859 2269 836 1652 162 21,8 68,2 Himanthalia elongata Haricot de mer 3687 5970 1616 712 104 2,5 14,4 Laminaria digitata Laminaire digitée 3148 4592 800 847 857 9.3 485,5 Laminaria japonica Kombu 2564 10582 1052 803 761 13,3 235,9 Laminaria saccharina Laminaire sucrée 3633 6249 834 801 208 23,1 340,7 Undaria pinnatifida Wakamé 5169 7142 1106 1002 319 17,2 19,1 Lithothamnium calcareum Lithothamne 317 92 2653 30445 113 144,3 6,4 Palmaria palmata

Dulse ou petit goémon 1659 6812 241 547 280 34,8 32,5

Porphyra sp. Nori, Porphyre 1983 1733 486 318 518 37,2 5,1 Enteromorpha sp. Aonori 4759 1847 2439 1613 1043 234,1 9,4 Ulva sp. Laitue de mer 1974 1952 2776 1198 181 78,9 9,2 Arthrospira sp. Spiruline 618 1360 560 487 1041 79,7 0

Le lithothamne est l’algue la plus riche en calcium avec une teneur moyenne impressionnante de 30445 mg pour 100 g de matière sèche. Parmi les autres algues alimentaires les plus couramment utilisée et riches en calcium, figurent :

Le haricot de mer (712 mg/100 g) :

Il est très consommé en Bretagne et relativement peu en Asie où il est moins connu. De couleur vert olive, il prend l’aspect d’une sorte de ruban. Il est connu sous le nom de « spaghetti de mer ». Sa consistance assez tendre permet sa consommation, généralement cru en salade, ou cuit en poêlée. Au-delà de sa teneur en calcium, il est très riche en oligoéléments et vitamines. (86), (62), (83)

89 La laitue de mer (1198 mg/100 g)

Il s’agit de l’algue la plus consommée en Europe. Sa texture est beaucoup plus élastique que celle du haricot de mer. Elle se consomme soit crue, hachée finement, soit cuite en accompagnement ou en soupe. Sa densité calcique est très importante, comme sa teneur en fer qui s’élève à 78,9 mg/100g contre 1,59 mg/100g pour les lentilles cuites par exemple. Elle est également riche en protéines (10 à 25% de sa masse sèche) ce qui en fait également un produit de consommation intéressant. (84), (62), (58)

Le nori (318 mg/100 g)

Il s’agit d’une algue de couleur noire une fois séchée. Elle est extrêmement fine et plus parfumée gustativement que les précédentes. Concentrée en calcium comme les autres, elle se distingue par sa richesse en vitamine A, en oméga 3 et 6 ainsi qu’en acides aminés essentiels. (83), (84), (62)

Elle représente le plus gros volume de production des algues au Japon. (83) Elle peut être consommée grillée (yakinori) dans les rāmen (nouilles de blé à la chinoise) ou accompagner de nombreux plats comme les sobas coréennes (nouilles de sarrasin). Par ailleurs elle permet la confection des makizushis. En France, le nori est consommé cru, haché finement, cuit avec du poisson, ou rajouté en fin de cuisson dans les pâtes et les légumes.

Le kombu (847 mg/100 g)

C'est une grande algue dure. Sa texture est épaisse et charnue et son goût iodé. Elle est aussi très consommée au Japon et en Corée, et elle se prête bien à la cuisson avec des céréales ou des légumineuses germées. Le kombu se démarque des autres algues riches en calcium par sa teneur en iode. (83), (84), (62)

Le wakamé (1002 mg/100 g)

Le wakamé est une algue brune. La nervure centrale large et épaisse demande d'être cuite ou ébouillantée rapidement, après quelques minutes de trempage, suite à quoi elle peut compléter un plat de légumes ou de poissons. Les feuilles quant à elles sont longues et tendres, et elles peuvent être consommées crues en salade. (85), (83), (62), (84)

La dulse (547 mg/100 g) :

De couleur rosée, la dulse a une saveur douce qui la rend facilement consommable. Bien que sa teneur en calcium soit inférieure à celle du wakamé, du kombu, ou de la laitue de mer, une portion de 100 g de Dulse apporte plus de calcium que 3 yaourts, ce qui est remarquable. Elle est couramment utilisée en Europe du Nord.

90 Ainsi, les algues peuvent constituer une alternative aux produits laitiers de par leur densité calcique très attrayante. Cependant, quelques réserves peuvent être émises quant à leur utilisation.

Nous l’avons vu, leur richesse minérale s’étend bien au-delà du calcium puisque elles sont toutes extrêmement concentrées en macro et microéléments (Na, K, Mg, P, I, Fe…). De ce fait, il faut rester relativement vigilant car un excès d’apport de ces minéraux n’est pas toujours souhaitable, même s’ils accompagnent une quantité importante de calcium. Il faut surtout être attentif vis-à-vis de l’apport iodé et sodique. Le rinçage des algues avant utilisation permet d’enlever le sel de surface. Toutefois le taux de sodium reste souvent important, et il est nécessaire d’en tenir compte dans les préparations culinaires.

En ce qui concerne l’iode, une consommation importante pourrait entraîner des troubles thyroïdiens bien que les excès d’iode soient rares dans la population. Toutefois, il est essentiel de surveiller une surcharge iodée par consommation importante d’algues, surtout de kombu ou de laminaire sucrée. Leur consommation est contre-indiquée chez des patients traités par hormones thyroïdiennes.

Un dernier point reste à souligner : l’impact écologique de la consommation d’algues. En effet, l’algue lithothamne qui présente certainement le plus grand intérêt quant à l’apport de calcium, est en fait le squelette d’une algue morte. Sa physiologie est assez lente. Aussi, s’il existe actuellement un gisement encore important de ces squelettes (ce qu’on récolte sous forme de maërl), son abondance risque de se tarir. De plus le lithothamne améliore la structure du sol marin auquel il fournit de nombreux minéraux et oligoéléments. C’est la raison de son succès en agrobiologie. Malheureusement la surexploitation menace cet écosystème.

Cette algue est maintenant facile d’accès dans de nombreux magasins « bio » ce qui facilite sa diffusion mais surtout son exploitation. Il nous parait donc important de ne pas baser tout l’apport calcique complémentaire sur cette seule denrée.

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