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Ajout d’un renforcement à l’effort tranchant

Le mode de rupture à l’effort tranchant étant fragile, la conception des structures est typi- quement réalisée afin que la résistance à l’effort tranchant soit supérieure à la résistance en flexion afin de favoriser un mode de rupture ductile. Néanmoins, plusieurs cas de figure peuvent faire en sorte que la résistance à l’effort tranchant devient insuffisante ou inférieure à la résistance à la flexion. Ainsi, il peut s’avérer nécessaire d’augmenter la capacité à l’effort tranchant.

Afin d’augmenter la capacité à l’effort tranchant, il est nécessaire d’améliorer l’un ou l’autre des mécanismes de résistance à l’effort tranchant (section1.5.3). Différentes méthodes de ren- forcement ont ainsi été proposées dans la littérature. Bien que certaines méthodes peuvent permettre d’améliorer la contribution du béton à la résistance à l’effort tranchant (Bastien- Masse et Brühwiler,2016;Collins et Roper,1990;Suntharavadivel,2010), la plupart des mé- thodes de renforcement rencontrées dans la littérature consistent à ajouter un renforcement transversal supplémentaire et de l’ancrer selon différentes méthodes. Le plus souvent, le ren- forcement à l’effort tranchant est constitué de barres d’armature, de bandes flexibles ou de membranes en acier faites d’un matériau composite (fibre de verre, fibre de carbone, basalte, etc.). Le type de renforcement ajouté peut être adhérent au béton (collé sur toute la longueur des barres) ou non adhérent (ancrés aux extrémités). Les mécanismes de transfert d’effort étant différents, les barres de renforcement adhérentes et non adhérentes seront présentées séparément dans les sections suivantes.

1.8.1 Renforcement avec des barres non adhérentes

L’ajout de barres verticales non adhérantes présenté à la Figure1.52est l’une des premières méthodes de renforcement proposées dans la littérature.

Généralement, l’ajout de barres de renforcement non adhérentes est très efficace afin d’aug- menter la capacité à l’effort tranchant (Aboutaha et Burns,1994;Adetifa,2003;Adhikary et Mutsuyoshi, 2006;Altin et al.,2003; Collins et Roper,1990; Khaloo, 2000; Ma et al., 2016b; Shamsai et al.,2007;Teng et al.,1996;El-Salakawy et al.,2003;Ma et al.,2016a). Par exemple, Adhikary et Mutsuyoshi(2006) ont observé un gain de résistance de plus de 230 % en ajou- tant des barres verticales non adhérentes (ρv2fyentre 1.8 à 2.3 MPa) à des poutres sans étriers.

Néanmoins, la plupart des poutres ont atteint un rupture en flexion avant que la capacité maximale soit limitée par l’effort tranchant. C’est donc dire que la résistance réelle à l’effort tranchant n’a pas pu être évaluée. Parmi les écrits recensés, seuls Cusson(2012);Elstner et Hognestad (1957);Ferreira et al. (2016);Hoult et Lees(2009);Suntharavadivel(2010);Teng et al.(2009);Inácio et al. (2012) etTeng et al.(1996) ont pu obtenir des capacités maximales dictées par une rupture à l’effort tranchant.

V V

V V

FIGURE1.52 – Renforcement à l’effort tranchant avec des barres non adhérentes (tiré deAltin

et al.(2003))

De façon générale, les observations suivantes peuvent être mises de l’avant.

— La plupart des auteurs ont pu observé que des structures ne contenant que des barres transversales non adhérentes présentaient un moins grand nombre de fissures diago- nales que les structures renforcées à l’aide d’étriers conventionnels (Altin et al., 2003; Cusson,2012;Khaloo,2000;Cusson,2012) ;

— Lors du chargement d’une poutre, les barres de renforcement non adhérentes ne se déforment que très peu avant l’apparition d’une fissure diagonale critique (El-Shafiey et Atta,2012;Adhikary et Mutsuyoshi,2006;Cusson,2012;Inácio et al.,2012;Ferreira et al.,2016;El-Salakawy et al.,2003;Teng et al.,2009) ;

— Le développement soudain de la fissure diagonale critique s’apparente grandement au développement de la fissure conduisant à la rupture des éléments non renforcés transversalement (Cusson,2012;Suntharavadivel,2010) ;

— Avant la rupture à l’effort tranchant, la fissure critique diagonale présente une grande ouverture. De plus, les structures épaisses (dv = 630 mm) présentent des fissures plus

larges que les structures plus minces (dv =240 à 300 mm) (Cusson, 2012;Altin et al., 2003;Suntharavadivel,2010) ;

— L’augmentation de la contrainte axiale dans les barres non adhérantes est fonction de la longueur des barres, de la rigidité des ancrages et de l’ouverture des fissures (Ferreira et al.,2016;Inácio et al.,2012;Hoult et Lees,2009) ;

— Lorsque la fissuration diagonale s’ouvre, les barres de renforcement transversales non adhérentes reprennent progressivement l’effort tranchant. À la rupture de la poutre, la contrainte axiale dans ces barres a augmentée d’environ 100 à 200 MPa (Ferreira et al., 2016). Les barres verticales non adhérentes n’atteignent donc généralement pas leur limite à l’écoulement fy, sauf si une précontrainte est employée (Elstner et Hognestad, 1957;Cusson,2012;Adhikary et Mutsuyoshi,2006;Inácio et al.,2012;El-Shafiey et Atta, 2012;Ferreira et al.,2016;El-Salakawy et al.,2003;Teng et al.,2009) ;

— La rupture à l’effort tranchant se manifeste généralement par une rupture en compres- sion du béton ou par un glissement de la fissure critique diagonale. (Cusson,2012;El- stner et Hognestad,1957;Suntharavadivel,2010;Teng et al.,1996;Ferreira et al.,2016) ; — Un renforcement non adhérant entourant la section permet de confiner le béton au haut de celle-ci et d’augmenter la résistance à la compression. Les structures atteignant la rupture à la suite d’une rupture du béton en compression voient leur résistance et leur ductilité améliorées (Ferreira et al., 2016; Suntharavadivel, 2010; Shamsai et al., 2007; El-Shafiey et Atta,2012;Ma et al.,2016a).

Elstner et Hognestad(1957);Hoult et Lees(2009);Ferreira et al.(2016) ont souligné qu’une précontrainte minimale est nécessaire afin que les barres verticales soient pleinement effi- caces. Les essais réalisés parElstner et Hognestad(1957) et présentés à la Figure1.53illus- trent l’effet de la précontrainte sur la résistance à la fissuration diagonale Vcr et sur la ré- sistance totale Vr. Il peut être observé que l’ajout d’une précontrainte de 200 MPa (ρvσs0 = 0.23 MPa) permet d’augmenter l’efficacité du renforcement afin que la résistance à la flexion limite la capacité de la structure. Ce même ajout de précontrainte n’a cependant qu’un effet marginal sur la résistance à la fissuration diagonale.

En comparant ces essais avec la résistance à l’effort tranchant prédite par la normeCSA-S6 (2014) pour les éléments avec étriers (section1.7), les poutres testées avec des barres trans- versales non adhérentes et non précontraintes montrent généralement des résistances infé- rieures à celles prédites. Par exemple, les poutres post-renforcées avec ce type de renforce- ment transversal testées par Cusson(2012) etElstner et Hognestad (1957) (Figure1.53) ont montré des résistances jusqu’à 35 % et 31 % inférieures aux résistances prédites, respecti- vement. Il est cependant intéressant de souligner que l’augmentation de la force de précon- trainte verticale amenuise cette différence. Avec une précontrainte de 200 MPa ou plus (ρvσs0 = 0.23 MPa à la Figure1.53), les poutres testées parElstner et Hognestad(1957) ont montré

des résistances à l’effort tranchant similaires à celles prédites par la norme CSA-S6 (2014) (résistance expérimentale de 111 kN et prédiction de 106 kN).

0 1 0 150 Vr (kN) Elstner and Hognestad (1957) 0.17% 0.13% ρv Vr,flex σs0 (kN/mm²) ρv fy = 645 MPa fc = 29.7 MPa a/d = 2.4 d = 285 mm bw = 152 mm Vr,test Vr,csa Vcr '

FIGURE1.53 – Effet de la précontrainte sur la résistance totale et la résistance à la fissuration

sur les poutres testées parElstner et Hognestad(1957), et comparaison avec la normeCSA-S6 (2014)

1.8.2 Renforcement avec des barres adhérentes

Plusieurs auteurs ont testé des poutres en béton armé post-renforcées à l’effort tranchant avec des barres, des bandes ou des feuilles d’acier ou de matériaux composites (fibre de verre, fibre de carbone, basalte) collés à la surface de béton afin de renforcer la structure (Adhikary et Mutsuyoshi, 2006; Al-Mahmoud et al., 2009; Alkhrdaji et al., 1999; Barros et Dias,2006;Chaallal et al.,2011;Colalillo et Sheikh,2014a,b;Colalillo,2012;Collins et Roper, 1990; Cusson, 2012; De Lorenzis et Nanni, 2001; De Lorenzis et al., 2002; Dias et al., 2007; Dias et O.,2008;Valerio, 2009; Fernández Ruiz et al., 2010;Focacci et al.,2000;Godat et al., 2012, 2010; Khalifa et al., 2000, 1998; Li et al., 2001; Mofidi et al., 2012a,b, 2016; Mofidi et Chaallal,2011b;Nanni et al.,2004;Oh et al.,2003;Provencher,2010;Qin et al.,2015;Rizzo et De Lorenzis,2009a,b;Teng et al.,2009,2004;Ahmed et al.,2006;Kachlakev et Miller,2001). Barros et Dias (2006) ont testé 20 poutres de petites dimensions (150 mm × 150 mm × 900 mm et 150 mm × 300 mm × 1500 mm) renforcées avec des bandes de matériaux composites collés sur les faces extérieures des poutres selon des angles de 0°, 45° et 90°. Certaines des poutres testées ont été suffisamment renforcées afin de mener à une rupture plus ductile en flexion, alors que d’autres ont présenté une rupture plus fragile en cisaillement. Ainsi, les deux modes de rupture du renforcement observés sont présentés à la figure1.54. La plupart des poutres ont atteint la rupture à la suite du décollement local ou global des bandes de renforcement.

Décolement de la surface de béton

Séparation de la poutre Décolement des bandes

Rupture des bandes

FIGURE1.54 – Modes de rupture du renforcement observés parBarros et Dias(2006)

Le décollement du renforcement a également été observé sur des poutres renforcées par des barres d’armature collées NSM (De Lorenzis et Nanni,2001;De Lorenzis et al.,2002;Khalifa et al.,2000;Rizzo et De Lorenzis,2009a,b). Cette méthode de renforcement consiste à coller des barres par adhésif époxydique à l’intérieur de traits de scie pratiqués à la surface de la poutre étudiée. Une étude plus approfondie de la désolidarisation du renforcement des poutres réalisées parDe Lorenzis et al.(2002) a montré que trois modes de rupture peuvent conduire au décollement des barres de renforcement tel que présenté à la Figure1.55.

a) b) c)

FIGURE1.55 – Modes de rupture du décollement du renforcement par a) fissuration du béton

au pourtour de l’époxy, b), fissuration de l’époxy à la face non confinée c), décollement de l’époxy à la matrice de béton. Tiré deDe Lorenzis et al.(2002).

Les essais réalisées par Rizzo et De Lorenzis (2009a) ont permis d’analyser l’influence de inclinaison du renforcement et des propriétés mécaniques de l’adhésif sur le comportement structural et les modes de rupture. Les poutres renforcées avec des barres collées en surface (NSM, near-surface mounted) contenaient initialement une certaine quantité d’étriers disposés avant la coulée. L’ajout du post-renforcement a ensuite permis un gain significatif de résis- tance à l’effort tranchant. Le gain de résistance était à 16 % pour les poutres renforcées par des bandes de PRF (polymère renforcé de fibres) collées et entre 22 et 44 % pour les poutres renforcées avec des barres NSM. Pour toutes les poutres renforcées avec des barres NSM, le décollement d’une tranche latérale de béton semblable à celui présenté à la Figure1.54à conduit à la rupture de la poutre. Il est intéressant de souligner que le plan de fissuration verticale de cette tranche était situé dans l’axe des étriers. Il semble donc y avoir une certaine interaction entre les étriers et le post-renforcement. Cette interaction a pu être confirmée par Chaallal et al.(2011);Mofidi et al.(2012a,2016);Rizzo et De Lorenzis(2009a) etYungon Kim et James(2017) en mesurant une contribution à la résistance à l’effort tranchant significative- ment moins importante des bandes de post-renforcement en PRF lorsque des étriers étaient présents dans la structure post-renforcée.

L’utilisation de deux types d’adhésifs parRizzo et De Lorenzis(2009a) a permis de mettre en évidence qu’une rigidité plus importante de l’adhésif conduit à un décollement plus précoce du renforcement. En effet, il est avancé que la rigidité plus grande permet d’atteindre plus ra- pidement la contrainte maximale de l’époxy, ce qui accélère le décollement du renforcement et réduit du même coup sa contribution à la résistance de la poutre à l’effort tranchant. L’in- fluence de l’épaisseur et de la rigidité de l’adhésif sur la performance du post-renforcement a également été observé parOh et al.(2003).

Godat et al.(2010) ont testé des poutres rectangulaires d’une hauteur variant entre 300 et 600 mm renforcés de bandes PRF. La taille des spécimens sans renforcement a permis d’obser- ver un effet d’échelle en cisaillement (section 1.5.5). Les essais sur poutres post-renforcées ont montré que le post-renforcement à l’effort tranchant est moins efficace pour les poutres plus profondes. En effet, des déformations plus petites ont été mesurées dans les bandes de renforcement installées sur les poutres plus profondes. La force resprise par ces bandes et donc, leur efficacité, c’est ainsi avérée plus faible. Les essais réalisés parChaallal et al.(2011); Mofidi et al.(2012a) et parMofidi et al.(2016) corroborent cette observation.

Afin de réduire les sollicitations dans l’adhésif et d’augmenter la résistance à l’effort tran- chant, plusieurs auteurs ont utilisé des bandes de PRF afin d’entourer la surface de béton, améliorant ainsi l’ancrage des extrémités des bandes (Colalillo et Sheikh,2014a,b;Colalillo, 2012;Mofidi et Chaallal,2011a;Mofidi et al.,2012b). Il a également été suggéré parChaallal et al. (2011);Valerio(2009) d’insérer les barres de renforcement de matériaux composites à l’intérieur de la poutre afin que toutes les faces de la barre collée transmettent les efforts de la barre vers le béton. Cette méthode a permis d’augmenter jusqu’à 25 % la capacité à l’effort

tranchant des poutres post-renforcées (Chaallal et al.,2011;Godat et al., 2012;Mofidi et al., 2012a). De plus, ces mêmes auteurs ont noté que l’interaction avec les étriers ne réduisait pas significativement la contribution du post-renforcement à l’effort tranchant. Néanmoins, les essais d’arrachement réalisés ainsi que les essais sur poutres ont montré que le faible confine- ment de l’armature transversale post-installée pouvait conduire à une rupture par fendage de l’enrobage de béton des barres adhérentes (Godat et al.,2012). Ainsi,Mofidi et al.(2012b) ont proposé d’ajouter un ancrage aux barres de renforcement adhérentes afin d’éviter une rupture par perte d’adhérence. Cet ajout a permis d’éviter une rupture par perte d’adhé- rence des barres de renforcement et d’augmenter de 41 % la capacité à l’effort tranchant des poutres (comparativement à 25 % sans ancrage).

Fernández Ruiz et al. (2010) ont proposé des barres collées au béton afin de renforcer des dalles contre le poinçonnent. Le renforcement utilisé consistait à introduire dans des ouver- tures forées à partir du dessous de la dalle des barres de 16 mm ou de 20 mm inclinées à 45°. Suite à l’insertion des barres, l’ouverture est remplie par un adhésif époxydique et l’extrémité libre inférieure est munie d’une rondelle et d’un boulon pour compléter l’ancrage. En raison de l’enrobage important des barres, les essais réalisés sur les dalles post-renforcées n’ont pas montré de rupture par fendage de l’enrobage de béton, comme pour les barres NSM ou les bandes PRF collées en surface (Figure 1.54). Seule une rupture par cône d’arrachement ou par perte d’adhérence a pu être observée sur certaines des dalles testées. Autrement, les dalles ont atteint leur capacité maximale à l’effort tranchant après plastification du post- renforcement ou après rupture du béton comprimé. Pour certaines des dalles, la quantité élevée de barres de post-renforcement a permis d’atteindre une rupture ductile en flexion. Une méthode similaire a été utilisée par Provencher(2010),Cusson(2012) etBédard(2019) afin de renforcer des tranches de dalles épaisses (poutres) à l’effort tranchant. Les spécimens testés avaient une épaisseur de 450 mm ou de 750 mm et ont été post-renforcés avec des barres verticales adhérentes ; barres collées à l’aide d’un adhésif époxydique à haute résis- tance non ancrée mécanique à leurs extrémités. L’espacement longitudinal des barres trans- versales de post-renforcement variait entre 0.61 et 0.75dv, soit l’espacement maximal permis par CSA-S6(2014). Des essais comparatifs réalisés sur des spécimens identiques, mais sans un renforcement transversal, ont montré que les dimensions choisies étaient propices au phénomène d’effet d’échelle en cisaillement. À titre comparatif, la résistance en cisaillement des spécimens non renforcés transversalement testés parProvencher(2010) etCusson(2012) sont comparés à l’effet d’échelle observée par Bentz (2005a) à la figure1.56. De toutes les études sur le post-renforcement avec des barres adhérentes recensées, seuls ces spécimens et ceux testés parGodat et al.(2010) (d = 498 mm) étaient suffisamment profonds pour montrer un effet d’échelle en cisaillement.

3 Profondeur effective d (m) 0 Vc 0.0 Résistance au cisai llement (MPa) 0.5 bwdv fc' Provencher (2010) Cusson (2012) Bentz (2005)

FIGURE1.56 – Effet d’échelle en cisaillement présenté parBentz(2005a) et incluant les essais

deProvencher(2010) et deCusson(2012)

Les études réalisées par Provencher(2010),Cusson (2012) et Bédard (2019) mettent en lu- mière l’importance de l’espacement des barres transversales. En effet, les barres transver- sales fortement espacées à une valeur de 0.75dv ont eu tendance à être contournées par la fissure principale de cisaillement (Figure1.57a). Des gains de résistance à l’effort tranchant aussi faible que 4 % ont pu être observé pour ces poutres. De plus, la résistance à l’effort tranchant prédite par la normeCSA-S6(2014) surestime jusqu’à 48 % la capacité de ces spé- cimens. En rapprochant les barres à un ratio sv/dv de 0.61, cette même fissure tend à être traversée par 3 barres de renforcement transversales, dont une en son centre (Figure1.57b). Des gains de résistance à l’effort tranchant aussi important que 97 % ont pu être observés et les capacités prédites par la normeCSA-S6(2014) ne surestimaient que de 7 % la résistance expérimentale.

Les auteurs ont proposé que la surestimation de la capacité à l’effort tranchant par les normes de calcul soit principalement due à une perte d’adhérence de certaines des barres transver- sales collées. En observant les ancrages époxydiques de ces barres après la rupture des spé- cimens, les auteurs ont en effet pu noter une détérioration de l’adhésif (fissuration et écra- sement de l’époxy sous les crénelures) et un glissement des barres caractérisant une perte d’adhérence. Comparativement aux barres collées en surface des poutres testées parBarros et Dias(2006),Khalifa et al.(2000) etDe Lorenzis et Nanni(2001), le fendage de l’enrobage de béton pouvant conduire à une perte d’adhérence des barres n’a pas été notés parProvencher (2010) et parCusson(2012).

a) Position des barres de renforcement b)

FIGURE1.57 – Ruptures des poutres d’une hauteur de 750 mm (d ≈ 700mm) testées par a)

Provencher(2010) (Poutre 3Bb, sv/dv =0.75) et par b)Cusson(2012) (poutre 2, sv/dv= 0.61)

1.8.3 Calcul de la résistance à l’effort tranchant des éléments post-renforcés La plupart des méthodes de calcul proposées dans la littérature spécifient que la résistance peut être prédite en sommant les résistances du béton, Vc, et celle des étriers conventuels si inclus, Vs, et du post-renforcement, Vs2, à l’aide de l’équation (1.173) (Altin et al., 2003; Colalillo et Sheikh,2014a;CSA-S806,2012;De Lorenzis et Nanni,2001;Fernández Ruiz et al., 2010;Khalifa et al.,1998;Mofidi et al., 2012a,2016; Rizzo et De Lorenzis,2009b;Teng et al., 2004;Baghi et Barros,2017).

Vr =Vc+Vs+Vs2 (1.173)

Résistance du béton Vc

Typiquement, la résistance du béton est évaluée de la même façon que pour les poutres, se- lon la méthode simplifiée présentée à la section1.7.3(équations (1.151) et (1.163) (CSA-S806, 2012;Baghi et Barros,2017;Colalillo et Sheikh,2014a;Mofidi et Chaallal,2011b)). La résis- tance du béton correspond ainsi à la résistance maximale entre l’adoucissement en traction et l’enchevêtrement des granulats. Khalifa et al.(1998);De Lorenzis et Nanni (2001);Altin et al.(2003) etShamsai et al.(2007) ont également proposé d’évaluer Vcavec l’équation (1.87) proposée par ACI-318 (2014). Il est cependant reconnu que la résistance du béton évaluée avec cette équation ne prend pas en compte l’effet d’échelle en cisaillement (section1.5.5) et n’est donc pas adaptée aux structures profondes (Bentz,2005a;Collins et al.,2008;Sherwood et al.,2007,2006).

Fernández Ruiz et al. (2010) ont proposé d’utiliser la théorie de la fissure critique (CSCT) (Muttoni, 2008; Muttoni et Fernández Ruiz, 2008; Fernandez Ruiz et Muttoni, 2009) afin d’évaluer la résistance du béton au poinçonnement dans les dalles post-renforcées. L’équa- tion (1.174) permet ainsi d’évaluer Vc, pour laquelle ψ est la rotation de la dalle. Il est inté- ressant de remarquer que l’équation (1.174) est semblable à l’enchevêtrement des granulats donné par la MCFT à l’équation (1.81).

Vc,CSCT =0.75 bwd

q fc0

1+1615ψd+ag (1.174)

Résistance des étriers conventionnels Vs

La résistance des étriers installés avant la coulée est également évaluée avec la méthode sim- plifiée présentée à la section 1.7.3(équation (1.150))(CSA-S806, 2012). L’angle utilisé maxi- mise donc la contribution de l’armature, assure la plastification des étriers et permet d’éviter une rupture en compression diagonale. Dans le cas où un post-renforcement à l’effort tran- chant est présent, l’angle utilisé dans cette équation correspond alors à l’angle évalué avec l’équation (1.165) et, bien qu’une interaction soit possible entre les différents types de ren- forcement (Yungon Kim et James,2017;Colalillo et Sheikh,2014a), aucune interaction avec le post-renforcement n’est considérée. De façon simplifiée,De Lorenzis et Nanni(2001) ont proposé de considérer un angle de 45°. Une évaluation plus précise de Vs est proposée par Rizzo et De Lorenzis(2009b) en considérant l’activation du renforcement traversé par une fissure avec l’équation (1.175), dans laquelle`bar est la longueur des barres de renforcement transversales.Muttoni(2008) etFernandez Ruiz et Muttoni(2009) ont proposé de remplacer w/`barde cette équation par ψ/6 afin d’évaluer la résistance au poinçonnement d’une dalle.

Vs= Av dv svtan θ  Es w `bar ≤ fy  (1.175)

Résistance additionnelle du post-renforcement Vs2

Altin et al.(2003) ont proposé une méthode permettant d’évaluer la contribution de barres de post-renforcement non adhérantes dans la résistance à l’effort tranchant de poutres élancées. Ils ont proposé de considérer la charge conduisant à la plastification du post-renforcement et la charge de précontrainte dans le calcul de Vs2avec l’équation (1.176), dans laquelle σs0,2 est la précontrainte et αs2est l’angle des barres de post-renforcement. Cette méthode conduit

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