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8.4 Améliorations et perspectives

9.1.2 Agrégats d’acides aminés

Les cibles étudiées ici ont été produites par la source d’agrégation gazeuse décrite page 60, à partir des mêmes poudres commerciales que celles utilisées lors des expériences sur les molécules isolées. L’ion projectile fut, là aussi, le Xe20+ à 300 keV.

9.1 Acides Aminés : glycine et valine

Glycine

La figure 9.4 présente les produits cationiques issus de la collision entre un faisceau d’ions Xe20+à 300 keV et une distribution d’agrégats neutres de [d

2]glycine, montrant la formation d’agrégats jusqu’au tétramère. Aucun agrégat doublement (ou multiplement) chargé n’est observé sur le spectre. La partie précédant le monomère (m/q = 77) corres- pond à la fragmentation résultant de la collision.

Figure 9.4: Spectre de masse des produits chargés obtenu après interaction d’agrégats de glycine avec un faisceau de Xe20+ à 300 keV.

La fragmentation de la molécule de glycine, environnée de l’agrégat a été observée et la figure 9.5 montre la comparaison des intensités de chaque pic pour la molécule isolée

(en pointillé bleu) et de l’agrégat (trait plein rouge). Les intensités ont été normalisées

par rapport au pic d’eau (m/q = 18) provenant du gaz résiduel. Puisque la densité des cibles était différente et méconnue lors de chacune de ces deux expériences, il n’est pas possible de comparer directement les intensités. Toutefois, les intensités relatives d’un pic par rapport à un autre peuvent être comparées. En particulier, le cas de l’ion intact (Gly+, m/q = 77) et du fragment majoritaire issu de la cassure de la liaison C − C

α

(NH2CD+2, m/q = 32) constitue une mesure de la probabilité de fragmentation et peut être étudié sur chacun des spectres (c’est-à-dire pour chacun des systèmes).

On constate que le rapport de ces intensités (I32/I77) est aux alentours de 19 pour la molécule isolée, là où il vaut 1,5 pour la molécule dans l’agrégat. De plus, le fragment COOH+ disparait dans le cas des agrégats (figure 9.5 et 9.6 à droite). Ces deux obser- vations conduisent à penser que la cassure de la liaison C − Cα est fortement réduite.

Il y a donc un effet protecteur induit par l’environnement sur la molécule. De fait, les agrégats de glycine sont constitués de monomères liés entre eux par des liaisons hydro- gène de quelques centaines de meV [110] qui constituent alors la liaison la plus faible du système. L’excès d’énergie est redistribué au travers de l’agrégat en causant la cassure

Figure 9.5: Histogramme des intensités normalisées des produits chargés obtenus après interaction d’un faisceau de Xe20+ à 300 keV et de molécules isolées (poin- tillé bleu) et d’agrégats (barre pleine rouge) de [d2]glycine en fonction de leur rapport masse sur charge.

de ces liaisons hydrogène préférentiellement.

Néanmoins, la disparition du fragment COOH+ n’est certainement pas le seul fait de la répartition de l’énergie dans l’agrégat mais signe également la mobilité de la charge. En effet, si ce fragment est bien dû à la multi-capture d’électrons, la redistribution de la charge sur l’ensemble de l’agrégat de glycine empêche l’apparition de cette voie.

Figure 9.6: Comparaison détaillée des pics correspondant aux signaux de la glycine cationique (gauche) et du fragment COOH+ pour la molécule isolée (

- -)

et en agrégats ( ). La normalisation des intensités est donnée par rapport au pic d’eau.

En outre, la largeur du pic correspondant à la molécule intacte simplement ionisée (m/q = 77, figure 9.6 à gauche) est bien plus importante dans le cas des agrégats que dans celui de la molécule isolée. Cela indique une énergie cinétique plus grande, mise en jeu lors du processus de formation. Le signal correspondant à l’espèce protonée et l’espèce

9.1 Acides Aminés : glycine et valine ayant subi une déshydrogénation peut également se superposer aux pics. En négligeant ces dernières contributions (le pic est très majoritairement dû à l’agrégat ionisé), il a été déterminé que l’énergie cinétique maximum du cation était de 2,1 eV (voir équation 7.17 page 70). Il semble donc bien que le cation de la molécule soit produit à partir d’agrégats plus gros après évaporations et/ou fragmentations successives. Le cation se situe ainsi à la fin d’une chaine au cours de laquelle l’agrégat dissipe l’excès d’énergie transféré durant la collision par la perte de certains de ses constituants.

Valine

Figure 9.7: Spectre en m/q des produits chargés obtenu après interaction d’agrégats de valine avec un faisceau de Xe20+ à 300 keV.

Le spectre de masse obtenu après interaction entre un faisceau d’ions Xe20+ à 300 keV et une distribution d’agrégats neutres de valine est montré sur la figure 9.7. Les intensités relatives des produits chargés (dans le cas de la molécule isolée et dans le cas des agrégats) sont montrées sur la figure 9.8. On remarque alors que le pic correspondant au cation de la molécule intacte est présent sur le spectre des agrégats alors qu’il était absent dans le cas de la molécule isolée. Ainsi, grâce à son environnement immédiat, le cation de valine (comme celui de glycine) est stabilisé et peut survivre après l’interaction. Le spectre montre également des agrégats contenant jusqu’à sept molécules liées entre elles par des liaisons hydrogène.

Comme dans le cas de la glycine, l’agrégat protège la molécule de valine et limite la cassure de la liaison C − Cα. Le rapport des intensités (I72/I117) passe ainsi de « l’in-

fini » dans le cas de la molécule isolée (pas de pic à m/q = 117) à environ 1 pour les agrégats. De plus, la grande largeur du signal est certainement due à une énergie ciné- tique plus grande (voir figure 9.9, à droite) et indique là aussi que le cation de valine est

Figure 9.8: Histogramme des intensités relatives des produits chargés obtenus après interaction d’un faisceau de Xe20+ à 300 keV et de molécules isolées (poin- tillé bleu) et d’agrégats (barre pleine rouge) de valine en fonction de leur rapport masse sur charge.

le résultat de la fragmentation d’agrégats plus gros qui « refroidissent » par évaporation de monomères, ou par fission (se scindant en deux à chaque fois). Le signal correspon- dant au cation (Valn+ NH2C4H8)+ n’est pas visible sur notre spectre, contrairement à ce qui a été observé dans le cas de la collision d’électrons avec des agrégats de valine piégés dans une gouttelette d’hélium [111] ou lors de la photodissociation d’agrégats de valine [112]. La formation de ce cation étant attribuée à la cassure de la liaison C − Cα

d’une valine voisine dans l’agrégat, l’absence de ce pic confirme encore la protection de la liaison C − Cα par l’environnement que constitue l’agrégat.

Figure 9.9: Comparaison détaillée des pics correspondant aux signaux de la valine ca- tionique (gauche) et du fragment COOH+ pour la molécule isolé () et en agrégats ( ). La normalisation des intensités est donnée par rapport au pic d’eau.

9.2 Base azotée : adénine Ensuite, au niveau des fragments de la molécule (comme nous l’avons fait pour la glycine), la complète disparition du signal du cation COOH+ est observée (figure 9.8 et 9.9). La voie de fragmentation majoritaire reste la perte du groupement carboxyle, conduisant à la production de (Val − COOH)+. La perte de la chaine latérale est elle aussi gênée comme le montre l’absence de signal à m/q = 74.

Fort de ces observations, il apparait que les pics compris entre 26 et 30 seraient dûs à la cassure de la liaison C −Cα suivie de la perte de la chaine latérale. L’intensité relative

de ces fragments est fortement réduite laissant penser que la deuxième étape (la perte de la chaine latérale) est moins nécessaire. Cela va dans le sens d’une dissipation de l’excès d’énergie par une suite d’évaporations et de fissions au sein de l’agrégat.