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a) Améliorer l’information des femmes sur l’évolution de leur fertilité avec l’âge et sur les résultats de l’AMP

« Le recul de l’âge de la grossesse est une cause majeure d’infertilité », comme l’a souligné Mme Jacqueline Mandelbaum (1). Depuis une trentaine d’années, l’âge moyen à la première maternité progresse régulièrement : il atteint quasiment 30 ans (2), contre 24 ans en moyenne dans les années 1970.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE NAISSANCES VIVANTES POUR 100 FEMMES DE CHAQUE ÂGE ENTRE 1983 ET 2008

Lecture : pour 100 femmes de 25 ans, il y a eu 9,7 naissances en 2008 ; en 1983, 100 femmes de 25 ans donnaient naissance à 14,9 enfants

Source : Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE)

Le désir d’enfant est « de plus en plus tardif dans notre société », ce que Mme Joëlle Belaisch-Allart (3) a expliqué de la façon suivante : « C’est là un phénomène social qui résulte d’une meilleure maîtrise de la contraception. Toute une génération de femmes, leurrée par le slogan « Un enfant quand je veux » - certes porteur mais mensonger car la pilule, c’est seulement de ne pas avoir d’enfant tant que l’on n’en veut pas –, ont voulu prendre le temps de terminer leurs études, de progresser dans leur carrière professionnelle, de rencontrer l’homme de leur vie, d’acheter avec lui la maison de leurs rêves… avant de songer à faire un enfant vers la quarantaine, âge auquel cela est, hélas, beaucoup plus difficile. Il faut en outre compter avec les secondes unions, de plus en plus nombreuses, où des couples dont chacun des membres a déjà des enfants, souhaitent concrétiser leur amour par un autre enfant. »

(1) Audition du 11 février 2009.

(2) « Bilan démographique 2008. Plus d’enfants, de plus en plus tard », INSEE Première n° 1220 (janvier 2009).

(3) Audition du 31 mars 2009.

Or, si la ménopause constitue une limite absolue au démarrage d’une grossesse, les capacités fertiles de la femme diminuent plusieurs années avant, et ce dès la trentaine. Selon M. François Olivennes (1), gynécologue-obstétricien au centre d’AMP Eylau-La Muette, « le taux de fécondité baisse à partir de trente-cinq ans » ; selon une étude récente de l’INED (2), la probabilité d’obtenir une grossesse reculerait même dès l’âge de 30 ans « et devient quasiment infime à partir de quarante ans, alors que la femme continue d’avoir des règles jusqu’à la ménopause, vers cinquante ans. »

Par ailleurs, si les progrès de l’AMP donnent parfois le sentiment que la médecine peut répondre à toutes les demandes, il apparaît que l’AMP n’est qu’un remède incertain à l’infertilité après 35 ans (cf. supra, le graphique sur l’évolution avec l’âge des résultats des FIV). Ainsi, d’après Mme Jacqueline Mandelbaum, contrairement à l’image véhiculée par certaines grossesses tardives médiatisées, « le taux de succès de l’AMP connaissant la même évolution, celle-ci ne saurait être une solution pour ce type d’infertilité. »

Pourtant, cette réalité est encore méconnue des femmes, comme l’ont déploré plusieurs personnes entendues par la mission.

Mme Joëlle Belaisch-Allart a regretté « l’ignorance, voire le déni, du déclin de la fertilité avec l’âge des femmes [qui] se nourrissent de ces reportages diffusés à l’envi dans les médias sur des femmes enceintes de 50 ou 60 ans, où l’on oublie seulement de préciser que celles-ci ont bénéficié d’un don d’ovocytes et non pas d’une FIV classique. »

De même, M. François Olivennes a jugé « urgent d’informer les femmes sur les limites de leur reproduction » en soulignant qu’elles « pensent qu’elles peuvent avoir un enfant jusqu’à l’âge de la ménopause, ce qui est faux. (…) Je vois des couples qui vivent ensemble depuis quinze ans et qui décident d’avoir un enfant à la quarantaine. Quand on leur explique ce qu’il en est, ils regrettent les choix qu’ils ont faits, par manque d’information. J’ai été attaqué par certaines féministes, mais je me contente de donner de l’information. Chacun peut mener sa vie comme il le veut, mais qu’il le fasse en toute connaissance de cause ». Il est en effet essentiel d’améliorer l’information sur ce point, et de « ne plus laisser penser qu’on peut être enceinte quand on le veut », selon les termes de Mme Jacqueline Mandelbaum (3).

Trop souvent négligée, cette question soulève pourtant de réels enjeux éthiques, dans la mesure où il s’agit de donner aux femmes les moyens d’exercer pleinement leur liberté de procréer ou non. Il conviendra notamment de veiller à ce que cette information soit délivrée de manière positive et factuelle et ne puisse évidemment pas être perçue comme une injonction à procréer. Le CCNE pourrait dès lors être saisi de cette question et des modalités selon lesquelles cette

(1) Audition du 4 mars 2009.

(2) « La baisse de la fertilité avec l’âge », INED (octobre 2008) (3) Audition du 11 février 2009.

information pourrait être organisée, à travers des campagnes d’information ou encore dans le cadre du colloque singulier avec le médecin.

De manière plus générale, une réflexion collective doit aussi être engagée sur les moyens de favoriser des grossesses plus précoces, comme l’a notamment suggéré Mme Joëlle Belaisch-Allart, s’agissant par exemple des modes d’accueil des jeunes enfants, de la conciliation de la vie familiale avec la vie professionnelle, ou des modalités de remplacement et d’organisation de l’activité pendant les congés maternité. Dans ce sens, M. Pierre Le Coz (1) a indiqué que le CCNE, loin de vouloir remettre en cause le travail des femmes, souhaitait « aider [les femmes] à prendre leurs décisions en toute connaissance de cause et œuvrer afin que les pouvoirs publics favorisent une meilleure conciliation entre éducation des enfants et vie professionnelle ».

À défaut d’une telle réflexion, on peut craindre que l’âge moyen des candidates à l’AMP ne cesse de s’accroître, avec des chances de succès sensiblement plus limitées, voire qu’un jour les femmes mettent leurs ovocytes en réserve par vitrification pour pouvoir poursuivre leurs études ou mener à bien leurs projets professionnels.

Mme Chantal Lebatard (2) a également appelé de ses vœux le renforcement de « la prévention de certaines infertilités dues, par exemple, à des maladies sexuellement transmissibles ou à l’âge tardif de la procréation. Ce volet oublié de prévention peut être d’ordre social, avec l’information sur les risques des pratiques sexuelles non protégées et des maternités retardées, tout en favorisant la place des jeunes familles pour que les projets d’enfants ne soient pas retardés indéfiniment, ceux-ci pouvant conduire à des maternités à risque et des fécondités retardées ».

b) Renforcer la recherche sur les causes de la stérilité

En amont des interrogations, notamment éthiques, suscitées par l’AMP, les citoyens du forum de Rennes ont jugé nécessaire de travailler à mieux comprendre les causes de la stérilité et de développer les moyens pour pallier l’infertilité et l’hypofertilité. Ils ont invité les pouvoirs publics à « tout mettre en œuvre pour réduire les causes environnementales et sanitaires de l’infertilité. »

Mme Chantal Lebatard (3) a également jugé « important de développer la recherche pour lutter contre les infertilités et les stérilités non maîtrisées. Il faut consentir autant d’efforts en faveur de cette démarche que dans celle visant à contourner les stérilités et à y apporter des réponses ». M. André Syrota, directeur général de l’INSERM (4), a aussi attiré l’attention sur la nécessité de « trouver les moyens d’améliorer les taux de succès, qui ne dépassent pas aujourd’hui 50 % ». Il a estimé que « cette relative inefficacité tient à un manque de connaissances

(1) Audition du 18 novembre 2008.

(2) Audition du 11 mars 2009.

(3) Idem.

(4) Audition du 13 janvier 2009.

biologiques sur les mécanismes et les multiples origines des infertilités – génétiques, environnementales, psychologiques… On se contente aujourd’hui d’un classement assez sommaire, distinguant seulement entre les infertilités d’origine dite maternelle, paternelle, mixte ou inconnue. »

Il apparaît dès lors indispensable de renforcer la recherche dans ce domaine afin de mieux connaître les causes de la stérilité et, le cas échéant, d’identifier les moyens de la prévenir. Il pourrait être suggéré de compléter l’article L. 1418-1 du code de la santé publique, aux termes duquel l’Agence de la biomédecine est chargée de « promouvoir la recherche médicale et scientifique, pour les activités relevant de sa compétence » – par exemple en matière d’AMP.

Cette adjonction recouvrirait les recherches sur les causes de l’infertilité et lui permettrait de lancer des appels à projets et de contribuer au financement de recherches dans ces domaines.

Proposition n° 5. Améliorer l’information du public sur l’évolution de la fertilité des femmes avec l’âge et sur les résultats de l’AMP, en suggérant une saisine du CCNE par le ministre chargé de la santé sur les modalités de mise en œuvre de cette information.

Développer la recherche sur les causes de l’infertilité, notamment environnementales et sanitaires et étendre les missions de l’Agence de la biomédecine afin qu’elle puisse lancer des appels à projets dans ce domaine.

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