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I.1 G ENERALITES SUR LA POLYPLOÏDIE ET LES POLYPLOÏDES

I.1.4 Rôle de la polyploïdie dans l’adaptation et l’évolution des espèces

I.1.4.2 Adaptation et plasticité phénotypique

I.1.4.1 Diversification et évolution des espèces

La polyploïdie serait la clef de la diversification des espèces végétales (Soltis, 2009) et de leur succès évolutif à long terme (Van de Peer et al., 2009). D’après Fawcett et al. (2009), la majorité des WGD se regroupe au cours d’une unique période coïncidant à la crise crétacé-tertiaire13

(KT ; Figure 7.B). Avec l’idée que les espèces polyploïdes auraient une adaptabilité supérieure et une tolérance accrue à des conditions environnementales variables, les auteurs ont émis l’hypothèse que la polyploïdie aurait contribué à la survie et à la diffusion des espèces de plantes pendant ou à la suite d’évènements d’extinction produits à la crise KT. Mais il faut tout de même nuancer le lien qu’il peut y avoir entre les extinctions massives d’espèces et les évènements de WGD car pour certains paléopolyploïdes tels que des champignons (Saccharomyces cerevisiae) ainsi que pour l’apparition des Eudicotylédones supérieurs14 (core eudicotyledons), il n’y a aucune indication qui permette de relier ces deux évènements (Van de Peer et al., 2009 ; Figure 7.A). Selon ces auteurs, il est également difficile de définir le rôle de la polyploïdie dans la diversification et l’évolution des espèces et de savoir si la polyploïdie a un rôle dans la survie des organismes lors des extinctions massives ou si elle facilite les transitions évolutives et la complexification biologique15.

I.1.4.2 Adaptation et plasticité phénotypique

Dans des environnements adaptés aux parents diploïdes, les polyploïdes et diploïdes se développent et cohabitent alors que dans des environnements non adaptés aux parents diploïdes tels que les hautes altitudes et latitudes où les températures sont plus froides, les polyploïdes survivent mieux que leur parents diploïdes (Chen, 2007). L’adaptation à de nouvelles niches écologiques peut être illustrée par le cas des plantes invasives et des plantes arctiques. Comme le soulignent Prentis et al. (2008), la majorité des plantes invasives sont polyploïdes. Cette hypothèse peut s’expliquer par des différences de fitness ou de compétition entre des populations ayant différents niveaux de ploïdie et par une meilleure colonisation des polyploïdes dans des milieux extrêmes comme cela a été observé dans la flore arctique (Prentis et al., 2008). Brochmann et al. (2003) soulignent que le succès de la colonisation des polyploïdes dans la zone arctique serait basé sur l’état d’hétérozygotie fixé de leur génome.

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La crise KT, survenue il y a environ 65 millions d’années, est la plus récente des extinctions massives d’espèces. L’origine de cette crise n’est pas encore clairement établie, un ou plusieurs évènements pourraient en être la cause comme l’impact d’astéroïdes ou une activité volcanique intense.

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Les Eudicotylédones supérieurs ou noyau des dicotylédones vraies appartiennent aux angiospermes. Ils forment un groupe monophylétique comprenant de grands clades comme les Rosidées et les Astéridées.

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Exemple de l’interaction angiospermes et insectes. Cette interaction aurait joué un rôle majeur dans la diversification des niches écologiques chez les angiospermes. Les angiospermes ont développé des innovations facilitant grandement la pollinisation par les insectes telles que l’association des organes reproducteurs mâles et femelles sur le même axe ou encore le développement de périanthe très coloré. Les phénomènes de polyploïdisation des angiospermes seraient associés à l’explosion de la pollinisation par les insectes à la même période qui auraient permis aux plantes de conquérir de nouvelles niches écologiques (Van de Peer et al., 2009).

REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

I. POLYPLOÏDIE : Modifications des génomes, du transcriptome et du phénotype

Cet état permettrait une meilleure survie des espèces pendant des périodes climatiques instables.

La plupart des auteurs s’accorde sur la théorie que l’état polyploïde jouerait un rôle important dans la plasticité phénotypique et les capacités adaptatives des nouvelles espèces. La plasticité phénotypique se traduit par la capacité d’un génotype à produire de multiples phénotypes en réponse à des conditions environnementales variées (Pfenning, 2010). L’acquisition de certains caractères par les polyploïdes, comme la tolérance aux fortes sécheresses, la production de graines asexuées, la résistance aux insectes nuisibles, le temps de floraison, la taille des organes et la biomasse, permettrait à ceux-ci d’occuper de nouvelles niches écologiques et favoriseraient leur utilisation dans l’agriculture. (Osborn et al., 2003 ; Chen, 2007). Il a été observé chez plusieurs espèces polyploïdes une vigueur et une biomasse plus importantes que chez les espèces parentales diploïdes. Ni et al. (2009) soulignent que, dans des conditions environnementales contrôlées, il y a un accroissement de la vigueur assimilable à de la vigueur hybride16 chez un allotétraploïde néosynthétique d’Arabidopsis (A. thaliana x A. arenosa) par rapport à ses deux parents. Dans cette étude, les auteurs montrent que l’allopolyploïde présenterait un meilleur contrôle du rythme circadien jouant un rôle dans la croissance et permettant un rôle la synthèse accrue de chlorophylle et d’amidon. Anssour et al. (2009) soulignent également, qu’au niveau cellulaire, des lignées allopolyploïdes de Nicotiana (N x obtusiata) ont des phénotypes intermédiaires aux parents. Dans cette étude, les auteurs montrent que les auto- et allopolyploïdes naturels de Nicotiana subiraient des changements morphologiques, génétiques et génomiques. Des études ont été menées sur d’autres espèces telles que Brassica (Lukens et al., 2003) et Triticum (Takumi et al., 2009) pour lesquelles des changements morphologiques et des variations dans la période de floraison ont été constatés. Chez Spartina (Ainouche et al., 2004 et 2009 ; Maricle et al., 2006), des différenciations morphologiques observées relèveraient d’une très grande plasticité phénotypique de l’allopolyploïde naturel (Spartina anglica) se traduisant par sa très large amplitude écologique et sa tolérance aux conditions réductrices et aux sédiments riches en sulfites.

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La vigueur hybride ou hétérosis est définie par une meilleure croissance et survie des hybrides comparés aux espèces parentales (Chen, 2010).

~11.4 Ma ~1,5 Ma 300,000-12,000 ans <150 ans <80 ans ~60 ans

Zea mais (Maïs)

Gossypium hirsutum (Coton)

Arabidopsis suecica (Arabette)

Spartina anglica (Spartine)

Tragopogon miscellus (Salsifis sauvage) Senecio cambrensis (Séneçon)

~8000 ans Triticum aestivum (Blé)

Polyploïdes synthétiques (Génomes contributifs exacts connus et disponibles)

Polyploïdes naturels très récents (Génomes contributifs exacts connus et disponibles)

Récents Anciens

Polyploïdes naturels établis (Génomes contributifs exacts souvent inconnus ou non disponibles, évolution après polyploïdisation)

< 10,000 ans Brassica napus (Colza)

< 200,000 ans Helianthus decapetalus (Tournesol)

~3.7 Ma Brassica oleracea (Chou)

~11.4 Ma ~1,5 Ma 300,000-12,000 ans <150 ans <80 ans ~60 ans

Zea mais (Maïs)

Gossypium hirsutum (Coton)

Arabidopsis suecica (Arabette)

Spartina anglica (Spartine)

Tragopogon miscellus (Salsifis sauvage) Senecio cambrensis (Séneçon)

~8000 ans Triticum aestivum (Blé)

Polyploïdes synthétiques (Génomes contributifs exacts connus et disponibles)

Polyploïdes naturels très récents (Génomes contributifs exacts connus et disponibles)

Récents Anciens

Polyploïdes naturels établis (Génomes contributifs exacts souvent inconnus ou non disponibles, évolution après polyploïdisation)

< 10,000 ans Brassica napus (Colza)

< 200,000 ans Helianthus decapetalus (Tournesol)

~3.7 Ma Brassica oleracea (Chou)

Figure 8 : Représentation de différents modèles d’étude au cours du temps.

Sur cette figure sont cités des exemples de polyploïdes naturels établis anciens ou récents et de polyploïdes très récents (moins de 200 ans) souvent utilisés comme modèles d’étude de la polyploïdie.