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Acteurs de la régulation de l’expression génétique des organites

3. Régulation de l’expression génétique des organites pendant un stress biotique

3.3. Acteurs de la régulation de l’expression génétique des organites

Les NEP sont des ARN polymérases encodées dans le noyau impliquées dans la transcription des organites. Deux sont impliquées dans la transcription mitochondriale : RPOTM et RPOTMP (pour RNA polymerase T7- like, soulignant l’origine phagique de ces ARN polymérases (Liebers et al., 2017)). Peu de choses sont connues concernant la répartition de la transcription mitochondriale entre RPOTM et RPOTMP. Cependant, la présence d’éventuels facteurs de transcription chez la mitochondrie d’Arabidopsis fait encore débat, notamment au sujet de facteurs bien connus chez le chloroplaste et également présent dans la mitochondrie (Beardslee et al., 2002). Ces protéines peuvent être impliquées dans la régulation de l’expression des gènes des organites, comme le supposent Liere et al. (2011). RPOTMP semble être responsable seulement de la transcription de nad2, nad6 et cox1, alors que RPOTM transcrit également ces gènes. Les auteurs supposent que cette redondance fonctionnelle a pour but d’assurer une certaine finesse dans la régulation de l’expression de ces gènes. Chez le chloroplaste, on retrouve aussi deux NEP impliquées dans la transcription : RPOTP et RPOTMP. RPOTP semblerait être capable de reconnaitre des promoteurs particuliers, puisque sa surexpression montre une augmentation de la transcription pour certains gènes possédant ce promoteur (Liere et al., 2011).

3.3.2. Facteurs sigma

Une spécificité de la transcription des chloroplastes est la présence des facteurs sigma. Au nombre de 6 chez Arabidopsis thaliana, ces facteurs de transcription codés dans le noyau sont reconnus par la PEP afin d’initier

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la transcription. Il semblerait que ces différents facteurs sigma, à travers l’étude de leurs mutants, aient des rôles assez redondants même si SIG2 et 6 semblent être primordiaux dans les étapes précoces de développement (Liere et al., 2011). Les rôles et spécificités des différents facteurs sigma chez Arabidopsis sont résumés dans le tableau I (adapté de Lerbs-Mache, 2011) :

Inspiré de Lerbs-Mache (2010).

Sans parler de redondance fonctionnelle entre les facteurs sigma, la plupart des promoteurs de gènes et opérons chloroplastiques semblent être reconnus par différents facteurs sigma et finalement assez peu semblent être spécifiques d’une ARN polymérase puis d’un facteur de transcription. On peut rapprocher cette absence de spécificité d’une part à l’absolue nécessité de transcription chloroplastique pour la survie de la plante, et d’autre part à la méthode de reproduction non sexuée des organites. En effet, si l’on suit l’hypothèse du « cliquet » de Muller (1931), la multiplication asexuée risque d’entrainer sur le long terme des mutations altérant la viabilité de l’organisme donc sa disparition. Le manque de spécificité des différents promoteurs peut s’expliquer comme étant une stratégie évolutive permettant d’échapper à cette théorie et d’assurer une transcription des gènes chloroplastiques (Lerbs-Mache, 2011). Mais les mutations et recombinaisons n’ayant pas seulement lieu dans les promoteurs, d’autres mécanismes existent peut-être pour pallier les modifications génomiques, et pas seulement lors de la transcription. Les trois paragraphes suivant vont décrire des familles de protéines connues pour interagir avec l’ARN des organites, participer à sa maturation et de ce fait, jouer un rôle dans la régulation de l’expression des gènes.

3.3.3. RIP/MORF

Les protéines RIP (pour RNA-editing factor Interacting Protein) également appelées MORF (pour Multiple Organellar RNA editing Factor) constituent une famille de protéines connues pour être impliquées dans l’édition C vers U des ARN des organites. Le tableau ci-dessous résume les différentes RIP/MORF connues à ce jour chez Arabidopsis thaliana.

Tableau II : Résumé des différentes protéines RIP connues chez A. thaliana et de la proportion de sites

Facteur sigma AGI Spécificités Rôles putatifs

SIG1 AT1G64860

Expression induite suite à exposition lumière bleue ou rouge (Onda et al., 2008). Spécifique pour la transcription de l'opéron psaA (Tozawa et al. , 2007). Interagit en double-hybride avec SIB1, protéine

impliquée dans les réponses SA et JA (Morikawa et al., 2002).

Régulation rapide du PS I via la transcription de l'opéron psaA (Lerbs-

Mache, 2010).

SIG2 AT1G08540 Mutant KO déficient en chlorophylle (Privat et al., 2003). Reconnaissance spécifique des promoteurs de psaJ et trnV-UAC (Privat et al., 2003).

Régulaton de la traduction et de la biosynthèse de la chlorophylle (Lerbs-

Mache, 2010).

SIG3 AT3G53920

Reconnait de nombreux promoteurs in vitro mais très peu de conséquences en terme de transcription chez le mutant KO (Lerbs-Mache, 2010). Expression indépendante de la lumière (Privat et al., 2003). Transcrit

spécifiquement psbN et atpH (Zghidi et al., 2007).

Compléter l'action des autres facteurs sigma (Lerbs-Mache, 2010).

SIG4 AT5G13730 Transcription spécifique de ndhF, et absence de la protéine NdhH, probablement dégradée par absence de complexe avec NdhF (Favory et al., 2005).

Régulation de la quantité des complexes NDH (Lerbs-Mache, 2010).

SIG5 AT5G24120 Transcription spécifique de psbD, mais peut reconnaitre d'autres promoteurs si peu de concurrence (Nagashima et al., 2004). Expression induite par différents stress abiotiques (Nagashima et al., 2004).

Protection contre les stress en réparant le centre de réaction du PS II (Lerbs-Mache,

2010).

SIG6 AT2G36990 Mutant KO déficient en chlorophylle (Ishizaki et al., 2005). Semble impliqué dans la transcription de très nombreux gènes dans les phases initiales de développement (Loschelder et al., 2006).

Régulation de la transcription lors d'étapes spécifiques du développement de

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d’édition impactés par leur mutation

.

Adapté de Sun et al. (2016). M : Mitochondrie ; P : Plaste ; NA : pas d’information.

On remarque que sur les 10 protéines RIP/MORF étudiées à ce jour, 5 seulement semblent jouer un rôle dans l’édition, les 5 restantes ayant un effet mineur sur l’édition, une redondance fonctionnelle ou pas d’effet du tout (Sun et al., 2016). Les auteurs remarquèrent également une certaine redondance dans les sites d’édition affectés entre les différentes protéines RIP, à l’exception de RIP1 qui semble contrôler pas moins de 250 sites d’édition mitochondriaux sans redondance avec des protéines de la même famille (Bentolila et al., 2013). Autre fait intéressant, si certaines protéines RIP affectent systématiquement de nombreux sites d’édition et non un nombre très limité, cela sous-tend que ces protéines ne jouent pas un rôle dans la spécificité de reconnaissance des sites, mais plutôt dans un complexe protéique d’édition. L’absence de motifs connus dans les protéines RIP et les interactions observées avec des protéines de familles différentes impliquées dans l’édition appuient cette hypothèse (Sun et al., 2016; Yang et al., 2017).

3.3.4. ORRM

Les protéines ORRM (pour Organelle RNA Recognition Motif-containing) sont une famille de protéines codées dans le noyau et envoyées dans le chloroplaste et la mitochondrie (Shi et al., 2017). Ces protéines sont caractérisées par la présence d’un motif RRM (pour RNA Recognition Motif) de liaison aux ARN, d’environ 80 acides aminés et très conservé dans la famille. Identifié pour la première fois dans les années 1980, les différents projets de séquençage de génomes montrèrent que ce motif est très répandu dans le vivant, et pas seulement chez les Eucaryotes mais aussi chez les Bactéries (Maris et al., 2005). Les protéines ORRM sont connues pour fixer l’ARN dans les organites des plantes, et jouer un rôle dans l’édition C vers U des ARN. Jusqu’à présent, 6 protéines ORRM ont été décrites chez Arabidospsis thaliana. Deux protéines ORRM ont été mises en évidence comme jouant un rôle dans l’édition dans le chloroplaste, ORRM1 (Shi et al., 2017) et ORRM6 (Hackett et al., 2017). En se basant sur les similarités de séquence avec ORRM1, ORRM2, 3, 4 furent mises en évidence (Shi et al., 2015, 2016), tout comme ORRM5 dans un second temps (Shi et al., 2017). Petite spécificité d’ORRM4 : à la différence des mutants affectés dans les autres orrm, qui ne présentent que quelques défauts d’édition, le mutant ∆orrm4 présente pas moins de 270 altérations d’édition dans la mitochondrie, ce qui en fait un facteur majeur de l’édition dans la mitochondrie (Shi et al., 2016). Bien que les protéines ORRM soient capables de fixer l’ARN, ce résultat suggère que les protéines ORRM peuvent faire partie d’un complexe protéique jouant un rôle dans l’édition, sans jamais être le facteur de spécificité déterminant la base éditée. Dans ce phénomène d’édition, une famille de protéines a été particulièrement bien étudiée, elle aussi connue comme fixant l’ARN, il s’agit des protéines à motifs PPR.

AGI Localisation subcellulaire (MS/MS) % de sites d'édition chloroplastiques selon Bentolila et al. (2013) % de sites d'édition mitochondriaux selon Bentolila et al. (2013)

RIP1 MORF8 AT3G15000 M, P 22% 77%

RIP2 MORF2 AT2G33420 P 100% NA

RIP3 MORF3 AT3G06790 M NA 26%

RIP4 MORF4 AT5G44780 NA NA NA

RIP5 MORF5 AT1G32580 M NA NA

RIP6 MORF6 AT2G35240 NA NA NA

RIP7 MORF7 AT1G72530 NA NA NA

RIP8 MORF1 AT4G20020 NA NA 19%

RIP9 MORF9 AT1G11430 P 97% NA

RIP10 / AT1G53260 NA NA NA

M: Mitochondrie ; P: Plaste. Adapté de Sun et al. (2016) Nom

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3.3.5. Protéines PPR

Les protéines PPR (pour pentatricopeptide repeat) sont des protéines décrites uniquement chez les Eucaryotes et contenant des motifs répétés de 35 acides aminés (Small et Peeters, 2000). Ces motifs permettent à la protéine PPR de lier l’ARN : un motif PPR fixant une base azotée. Codées dans le noyau, leur immense majorité est envoyée dans le chloroplaste et/ou la mitochondrie, avec pour principal rôle la régulation de l’expression des gènes des organites. Décrites pour la première fois par Small et Peeters (2000), ces protéines sont très proches des protéines TPR (pour tetratricopeptide repeat), dont le motif permet l’interaction avec d’autres protéines (Blatch et Lässle, 1999). L’une des particularités de cette famille de protéines est leur abondance chez les plantes. Par exemple, Cheng et al. (2016) ont dénombré 496 gènes codant pour des protéines PPR chez Arabidopsis, faisant de cette famille l’une des plus abondantes du génome. Malgré de nombreuses études lors de ces 20 dernières années, le rôle exact de la majorité des protéines de cette famille n’est pas encore connu. Bien que de nombreuses protéines nucléaires soient impliquées dans la régulation de l’expression génique des organites, je me suis particulièrement intéressé à la famille des PPR lors de la thèse.

3.4. Les protéines PPR