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Les auteurs

Anne Perret est Psychiatre, Responsable de l’unité fonctionnelle de Psychiatrie de l’Adolescent de Hôpital Louis Mourier à Colombes (92).

Fabien Poulle est Directeur des Accueils Educatifs en Val d’Oise, Fondation la vie au Grand Air Saint-Ouen l’Aumône (95).

Type de recherche et/ou format de publication

Article publié dans la revue Pratiques en santé mentale. 2015, 3. p. 17-20, présentant les principales caractéristiques d’un dispositif d’accueil familial séquentiel de jeunes adolescents. L’originalité de ce dispositif permet de repenser les modalités d’accueil des adolescents dits « difficiles ».

Principales thématiques développées

L’Accueil Familial Séquentiel Jeune est un dispositif interinstitutionnel créé en janvier 2006 par la Vie au Grand Air, le conseil départemental du Val d’Oise, la Protection Judiciaire de la Jeunesse et le service de psychopathologie de l’adolescent de l’hôpital de Pontoise. Ce dispositif répond aux besoins des adolescents âgés de 10 à 18 ans, dont l’autorité parentale réside sur le département du Val d’Oise, et qui relèvent à la fois du champ sanitaire et du champ socioéducatif et/ou judiciaire. Ces jeunes sont souvent renvoyés d’un lieu à l’autre sans être réellement pris en charge dans la continuité de leur trajectoire. En effet, faute d’une prise en compte de la dimension de la clinique, faute d’une pensée globale pluri-partenariale du dispositif, l’articulation entre le soin et l’éducatif, reste cloisonnée et ne permet pas de tenir compte de la problématique complexe de ces jeunes.

Un projet en réponse à différents constats : - Des placements en urgence

Les placements des jeunes sont souvent pensés dans l’urgence, sans travail clinique préalable, et viennent alors faire rupture dans leur trajectoire. Cependant, l’urgence qui pousse à la décision ne vient pas de la situation elle-même, mais de l’impuissance des parents et des professionnels à pouvoir penser et prendre du recul. L’acte de séparation est posé sans que celle-ci ne puisse être élaborée alors même que tout adolescent y est confronté (positionnement subjectif requis face à la nécessité de grandir, de se différencier et de changer de place au sein des générations).

- Des parcours d’errance

Ces jeunes sont successivement exclus des lieux et institutions de prises en charges (menées conjointement par la psychiatrie, l’aide sociale à l’enfance, la protection judiciaire de la jeunesse, le secteur associatif socioéducatif) pour se retrouver le plus souvent dans un parcours d’errance. Ainsi,

par l’échec des prises en charge proposées, les institutions répètent le plus souvent l’histoire familiale de ces jeunes.

Les indicateurs de problématiques repérés dans les pratiques : - Un environnement familial fragilisant et parfois même pathologique :

L’adolescent est placé dans un contexte d’évolution déstructurant du fait de négligences, carences, et d’une absence de cadre et de limite.

- Des placements multiples, répétés, marqués par l’échec :

Ces adolescents se retrouvent souvent face à une solution institutionnelle inadaptée, inopérante, adoptée par défaut. Ils posent des problèmes qui aboutissent de manière récurrente à des ruptures dans les lieux d’accueil, les accompagnements, les soins.

- L’agir comme mode de relation et d’expression :

Ces jeunes répètent au quotidien les mêmes schémas de fonctionnement (fugues, violence, mises en danger, mise à mal du lien). Il s’agit alors de créer, d’innover là où la parole ne peut plus circuler et ainsi de définir au travers de la compréhension de l’agir les besoins et les attentes.

- Les troubles psychiques et psychiatriques :

Les parcours de vie (particulièrement traumatique) et les vécus de carences affectives et éducatives ont marqué leur développement psychique. Or celui-ci se trouve remanié au moment de l’adolescence. Ces jeunes peuvent présenter des troubles de l’attachement, de l’image de soi, des troubles cognitifs, des troubles psychiatriques (pathologies limites, troubles psychotiques et du comportement). Ces troubles se manifestant à l’adolescence ne sont pas figés.

Le dispositif : l’Accueil Familial Séquentiel Jeune

Fragilisés par des histoires de vie complexes, ces adolescents sont au carrefour de l’éducatif et de la santé mentale. Pour la plupart, ils se retrouvent dans des situations d’exclusion (sociale, scolaire, affective, familiale, institutionnelle). Il est nécessaire de leur proposer non pas un modèle d’institution censé réparer ou combler mais au contraire admettre les failles, leurs failles dans le dispositif. Il faut donc que les institutions se pensent elles–mêmes comme possiblement faillibles, qu’elles s’inscrivent, non pas dans la toute-puissance mais qu’elles se vivent comme manquantes et qu’elles travaillent dans la complémentarité les unes avec les autres. L’articulation interinstitutionnelle vise à cette complémentarité. La notion de séquentialité également. La dimension thérapeutique du cadre ne repose pas uniquement sur le fait que des soignants participent au dispositif, mais elle repose sur la manière même dont le cadre lui-même est pensé.

L’Accueil Familial Séquentiel Jeune ne va pas proposer une solution unique et durable, mais une solution transitoire, articulée avec les autres institutions. L’adolescent sera ainsi admis avec des repères limités dans l’espace et dans le temps, repères adaptables et individualisés pour chaque jeune accueilli.

L’outil utilisé est la famille d’accueil, dans la perspective que la famille elle-même peut avoir une fonction thérapeutique car elle a une fonction humanisante (rapport aux interdits fondamentaux, processus de transmission), ceci à condition que ces enjeux soient travaillés par une supervision.

L’accueil chez un assistant familial est l’une des orientations privilégiées au terme de la prise en charge à l’AFSJ. La période d’observation et d’évaluation permet de dégager pour certains jeunes l’adéquation de ce type d’hébergement aux problématiques présentées. Cependant, la rencontre entre un jeune et une famille d’accueil, ainsi que l’inscription dans la continuité d’une relation structurante n’est pas programmable. Ces rencontres sont fonction de l’adéquation entre d’une part, les besoins et les troubles du jeune et d’autre part, la configuration, la dynamique familiale et les ressources de la famille d’accueil. Il est donc important de ne pas comprendre l’indication en famille d’accueil comme une « valeur sûre », mais bien de s’interroger sur les modalités de cette rencontre et de prendre en compte tous les facteurs qui peuvent la favoriser ou la mettre à mal.

Trois impératifs sont pris en compte pour repenser les modalités d’accueil des jeunes : - Les besoins de l’adolescent, épuisé par son vécu persécutif et abandonnique ; - Les particularités de la problématique familiale ;

- Les mouvements psychiques auxquels sont exposés les professionnels en lien avec les problématiques rencontrées.

Trois niveaux sont ainsi requis dans l’organisation de l’Accueil Familial Séquentiel Jeune :

- Le service d’Accueil Familial Séquentiel Jeune proprement dit qui assure l’accompagnement du jeune dans la famille d’accueil, ainsi que le travail avec la famille naturelle (il est important que ces deux axes de travail soit concomitants, afin d’éviter un décalage trop important dans la compréhension de la situation et son traitement).

- Le suivi thérapeutique externe du jeune et la supervision des familles d’accueil.

- L’accompagnement de la famille naturelle par le référent éducatif de l’aide sociale à l’enfance gardant la référence externe de la prise en charge.

Fiche no 22

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