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Au-delà de ces échanges entre "militants", le collectif s'est véritablement constitué "en réaction" à un projet de la Ville de Lyon de rassembler tous les systèmes de paniers du territoire sous un même label "Lyon ville équitable et durable". Pour ces acteurs, qui partagent une vigilance vis-à-vis des rapports de pouvoir, ce label est perçu comme relevant d’une double "récupération" par le marché et le politique d’un mode d’action défini comme "alternatif". D'une part, ils présument que la Ville cherche à récupérer "l'image alternative" des paniers, au service d'une politique de "développement durable" essentiellement symbolique. D'autre part, ils craignent un amalgame entre paniers "associatifs" et "commerciaux", qui renforcerait "l'image alternative" des seconds et diluerait la portée politique de leurs propres projets, au risque - selon un administrateur d’Alliance - de faire "mourir le concept" AMAP.

Face à ce traitement indifférencié de tous les "paniers", l’objectif de Raccourci est de définir une "identité commune" à même d’établir une frontière entre panier "politique" et "commercial". "Vous allez pas tous nous mettre dans le même panier !" résume une salariée de l’Arbràlégumes. La constitution de Raccourci permet de faire émerger un macro-acteur chargé de discuter avec les élus pour les sensibiliser à la perception d’une différence "éthique" entre des structures qui relèvent de l’Economie sociale et solidaire (ESS) et des structures définies comme strictement commerciales,. Cette organisation collective est chargée d’un rôle de "lobbying politique" (réunion de Raccourci), à même de "faire changer le regard des politiques" et par là, tenter d’infléchir la politique municipale en matière de circuits-courts. Se présenter en tant que collectif donne plus de poids à chacune des structures, cela permet de s’appuyer sur le pouvoir du nombre et donc de la représentation, puisqu’il "représente 4000 foyers, 200 agriculteurs (…) avec ou sans soutien ils avancent" (un porte-parole de Raccourci).

Le dialogue autour du label n’a toutefois pas permis de faire changer le point de vue de la Ville, dont l’interlocuteur de l’époque "n’a pas voulu entendre" la "distinction à faire entre une association, une SARL et une coopérative (…) ça a vraiment été un travail politique de rencontres, dire non nous économie solidaire c’est pas ça (…) on n’est pas d’accord, on marchera pas ensemble" (Ibid.). Raccourci a donc refusé de participer, jugeant qu’il ne pouvait pas apporter sa "caution" à un label flou qui n’apporte pas de garantie suffisante sur le type d’initiatives fédérées. Ce faisant, il se pose en garant de la définition des alternatives et résiste à une logique descendante. Si le label s’est fait sans lui, il a tout de même obtenu le financement d’une plaquette de communication, qui lui permet de "maîtriser sa communication" face aux risques de "déformation" (un créateur de l’Arbràlégumes).

La création de Raccourci entraîne un déplacement des conceptions de l’alternative des uns et des autres. Si, au départ, les créateurs de l’Arbràlégumes revendiquent une indépendance financière vis-à-vis des politiques publiques et donc une alternative par la marge et le bas (selon une perspective antiautoritaire plus fortement affirmée que dans les autres structures), leur participation à Raccourci leur a fait réviser leur position. Raccourci est alors l’occasion d’expérimenter une version de l’alternative intégrée, pour laquelle il ne s’agit pas d’opposer alternative et institutionnalisation, mais de "composer autrement avec les politiques" (Dumain, Maurines, 2012), en cherchant à aménager une relation de type horizontale avec eux. De plus, la création de ce collectif de structures introduit un déplacement d’un régime de la participation fortement valorisé au sein des paniers à un régime de la représentation. Concrètement, Raccourci fonctionne comme "un collectif de salariés" à cause d’une difficulté à faire participer producteurs et consommateurs à ses réunions mensuelles (réunion du collectif). Il est donc porté par quatre ou cinq salariés qui sont chargés de représenter leur structure. Soulignons néanmoins que ceux-ci cultivent une réflexivité exacerbée à propos du rapport au pouvoir, leur souci de représenter le point de vue des absents, associé à un fonctionnement non hiérarchique ralentit le processus de prises de décisions (demandant des allers et retours des salariés présents vers chacune des structures).

2. Formaliser une différence politique

Un important travail conceptuel est mené par les salariés de Raccourci pour stabiliser une définition commune de l’alternative, et surtout, pour formaliser cette différence "politique" à laquelle ils cherchent à sensibiliser élus, consommateurs et producteurs. "Donner du contenu" ("politique", "éthique") aux "paniers alternatifs" passe à la fois par une activité de "problématisation" (au sens de Callon 1986 mais aussi de Dewey 1927) et par la définition de critères utiles pour "discerner" les paniers "alternatifs" des "faux systèmes". A ce titre, une charte ainsi que des plaquettes de communication communes constituent les principaux instruments produits par Raccourci.

2.1. Problématisation ou définition d’un problème public

Les salariés s’accordent rapidement autour de deux grandes causes publiques à poursuivre, à savoir : "remettre en cause le fonctionnement de l’agriculture" en défendant une agriculture "locale" "paysanne et/ou biologique", et "être moteur d’un changement de logique économique" (première réunion publique du collectif). Les "citoyens" sont par exemple invités, à travers l’adhésion à un système de panier, à "participer activement à la sauvegarde et au développement de l’activité agricole locale" (plaquette Raccourci 2012). Face à un système agricole considéré comme "verrouillé" (un salarié d’Alliance en réunion publique), ces initiatives "locales" sont chargées de permettre aux "consom'acteurs" de "reprendre une part de décision sur le devenir de notre monde !" (présentation Arbràlégumes), de "notre alimentation" et de "nos vies", "résister" à une soumission à "l’agriculture industrielle, hors-sol" : "Les agriculteurs deviennent esclaves de trusts comme Monsanto (…) la bouffe qu’on nous fait ingurgiter est faite pour nous soumettre" (Ibid.). Cultiver un goût "politique" pour l’alimentation passe par une invitation des consommateurs et producteurs à s’interroger sur la question du pouvoir : qui décide de l’alimentation ? interroge l’Arbràlégumes.

Cette problématisation requalifie le geste de consommation en acte politique : un régime de l’action "collective" (on parle de "consom’action") est chargé de rompre avec celui passif et même soumis de la consommation. La critique sociale prend alors la forme d’une critique en actes et de l’expérimentation. L’engagement passe par : "des trucs matériels", les paniers sont présentés comme "des solutions concrètes" et l’AMAP un "concept concrétisateur d’idées" (administrateur d’Alliance, op. cit.). L’expérimentation permet de faire la preuve par l’expérience qu’un "autre" mode de vie, de rapport au travail et de développement est possible : Alter-conso est par exemple qualifiée de "laboratoire de l’entreprise et l’économie de demain" (Chapelle, 2013). Les trois structures avec salariés de Raccourci partagent un souci pour "travailler autrement" en opposition à la logique salariale, guidé par des principes de "liberté autonomie et créativité" (une salariée de l’Arbràlégumes). Ce type d’emploi permet encore de lier "engagement militant" et emploi, dans le but de tendre à une certaine "cohérence" des idées avec "tout un mode de vie". Enfin, comme l’acronyme Raccourci nous l’indique, l’action prend la forme du "court-circuit", du contournement, car si l’on considère qu’il est difficile de lutter directement contre "le capitalisme", "agir pour quelque chose de différent c’est possible. L’alternative c’est une solution originale à une question que tout le monde se pose" (une créatrice de l’Arbràlégumes).

2.2. L’institution de critères de différenciation

C’est par la mise en place de garde-fous (charte, contrat, abonnement, etc.) chargés de garantir un certain niveau de respect de principes écologiques, sociaux, etc., que Raccourci justifie le fait que seuls ses systèmes sont capables de travailler en profondeur (à "s’attaquer à la racine du problème" et "créer les conditions pour que ça change vraiment"), quand les autres en restent au niveau du discours en appliquant une "pommade" qui ne s’attaque "qu’aux symptômes" (administrateur d’Alliance). La charte constitue aux yeux des salariés la réalisation la plus importante du collectif, puisque "c’est la première charte en France sur les circuits-courts" (réunion du collectif). Elle précise même la définition prévue par la loi, qui ne retient "que" la présence d’un intermédiaire maximum entre producteurs et consommateurs, sans spécifier ni la distance géographique ni le type d’économie et d’agriculture défendus. Cette charte est centrée sur l’ESS, qui constitue par exemple le statut juridique des structures en signe de différenciation des paniers "entrepreneuriaux" (sociétés anonymes) et "alternatifs" (associations, SCIC). La charte de l’agrobiologie de l’IFOAM ainsi que celle de l’Agriculture Paysanne (de la FADEAR) permettent aussi d’arbitrer entre les pratiques agricoles considérées comme acceptables ou non par le collectif. Elles servent surtout de références pour inscrire les producteurs dans une "démarche de progrès" vers "une agriculture citoyenne et territoriale". Cette charte engage encore chacune des structures à : assurer une transparence sur les pratiques agricoles, ainsi qu’une "gouvernance démocratique" des structures, ou encore à faire exister un "lien producteurs, consommateurs", en organisant "des rencontres et des échanges entre tous (…) qui favorisent le lien social et la convivialité". In fine, cette "charte d’engagements mutuels" n’est pas tant une synthèse de l’existant qu’un guide commun pour la redéfinition conjointe tant des formes de distribution que des manières de produire et de consommer en faveur d’un "commerce équitable local" (Ibid.).

Formaliser la différence politique des paniers de Raccourci passe donc principalement ici par une inscription dans l’ESS, et donc plus largement dans le répertoire de la "consommation engagée" (Dubuisson-Quellier, 2009), selon une version de l’alternative qui cultive une intrication du politique et du marchand. L’un des deux fondateurs d’Alter-Conso a par exemple consacré un essai à la "consommation citoyenne" (Mylondo, 2005) en même temps qu'il mettait en place ce système de panier. Ce double geste (à la fois théorique et pratique) indique comment un "fond" ("politique", "éthique") et une forme de paniers sont coproduits. Dans son ouvrage, Mylondo explique comment l’oxymore "consommation citoyenne" procède d’un décloisonnement du marché et du politique, puisqu’il semble à la fois porter en germe une politisation du marché et un élargissement de la citoyenneté. La "consommation citoyenne" entraîne d'une part un élargissement de la citoyenneté, en la faisant sortir des formes classiques de participation politique ("voter avec son porte-monnaie"), au risque d’un "galvaudage" de la citoyenneté à cause d’une "récupération" par le marché. Elle fait d'autre part (et surtout) la promesse d’améliorer le marché et de limiter ses "dérives" : "mieux consommer" et "mieux produire". Les structures cultivent aussi cette intrication entre économique et politique. Cette différence n’est donc pas produite que sur un plan conceptuel, elle est transportée matériellement par les paniers.

3. Comment ce goût politique est véhiculé par les paniers ?

Concrètement, les "adhérents" se rendent chaque semaine à un horaire précis dans un lieu public de leur quartier (souvent lui aussi choisi pour son caractère "militant" : centre social, local associatif, cinéma indépendant, etc.), pour récupérer le dit "panier", c’est-à-dire un lot qui est constitué des produits de la production du moment. Le terme d’"engagement" emprunté au répertoire militant est largement employé ici, pour décrire le type de participation attendu, puisque dans les systèmes avec abonnement, les "adhérents" "s’engagent" par contrat de 6 mois, payent à l’avance (selon des modalités plus ou moins souples), doivent "participer" à l’association. Les producteurs "s’engagent" aussi contractuellement à avoir une production régulière, des pratiques "respectueuses de l’environnement", à participer aux distributions, etc. Notons que les structures avec salariés introduisent une plus grande souplesse que les AMAP : parce qu’elles regroupent un réseau de producteurs (ici une quarantaine), elles offrent une plus grande diversité de produits, demandent une participation moindre de la part des consommateurs et des producteurs (puisque ce sont les salariés qui vont chercher les produits dans les fermes, et qu’un seul producteur est présent aux distributions). Participer à ces systèmes (et a fortiori dans les structures avec abonnement) implique pour les consommateurs d’accepter des "contraintes" imposées par la relation : payer

à l’avance, être disponible chaque semaine à la même heure, ne pas choisir le contenu des paniers, suivre les saisons, cuisiner et participer. Ces "paniers" combinent donc un régime de captation volontaire avec un régime d’activité fortement affirmé par le répertoire militant. La présence de contraintes (comme le fait de ne pas choisir ses produits) est définie par certains comme un signe d’"engagement".

Les aliments prennent une saveur politique. Déjà le type d’aliments est cadré par la saison, des méthodes et une "région" de production (moins de 100 km). La "proximité" est ici gage de "fraîcheur", de "maturité", à la différence des circuits "longs" où - selon un arboriculteur - les fruits n’"ont pas de goût" parce qu’ils ne sont pas cueillis mûrs. Afin de diversifier les paniers toute l’année, les producteurs doivent multiplier les variétés (là encore les structures avec salariés acceptent une plus grande spécialisation des producteurs). La diversité des goûts est donc constituée en objet de connaissance pour les consommateurs qui apprennent à identifier, accommoder et goûter les différentes variétés, elle est aussi un objet d'engagement pour lutter contre l’"agrobusiness" à travers la question du maintien d’une multiplicité d’exploitations en réaction à la concentration, ou encore celles de la réduction de la "biodiversité cultivée" par le catalogue officiel, de la privatisation des semences, etc. Le "vrai goût" se développe alors en association avec un dégoût éprouvé pour le "chimique" et "l’insipide" associés à "l’agrobusiness". Il est d’autant plus savoureux que l’on est sensible éthiquement aux différences de conséquences que ces deux types de production supposent. Goûter consiste à se poser la question à laquelle l'Arbràlégumes invite ses futurs adhérents "Qui produit ? Où ? Dans quelles conditions sociales et environnementales ?", ou à cultiver un art des conséquences en portant attention aux différents êtres engagés indirectement par notre action (de l'achat jusqu'à la production, mais aussi après l'achat, puisque la manière dont on cuisine et recycle ses déchets sont interrogées). L’aliment, devenu un moyen d'action, peut alors prendre le goût de la revanche et de la résistance, comme le dit cette inscription apposée par un producteur sur ses conserves : "C’est toujours ça que l’industrie agroalimentaire n’aura pas !".

Le goût des aliments est aussi utilisé comme un vecteur d’engagement. Il est considéré comme un moyen privilégié pour déclencher une prise de conscience et une réflexion qui fondent un "engagement" : "le déclic" passe souvent selon un créateur de l'Arbràlégumes par un goût "qui fasse tilt", un "choc" "qui entre en résonance avec leur histoire" et déclencherait une réflexion pour comprendre les enjeux du "manger local". La conscientisation politique est alors envisagée comme un processus : "tu peux pas faire changer d’avis les gens du jour au lendemain, il faut des étapes, pour accepter de voir la part d’ombre de l’alimentation" (une créatrice de l’Arbràlégumes, op. cit.).

Avec l’opération annuelle "Pommes en ville", qui consiste en une distribution gratuite de 5000 pommes sur l'espace public, pour faire "découvrir les structures" de Raccourci (et en particulier les 86 lieux de distribution répartis sur le Grand Lyon, qu’une plaquette de communication commune est chargée de répertorier - Raccourci, 2012). "Une pomme produite localement" fraîchement cueillie, donnée de la main à la main, sans être calibrée nettoyée emballée ou encore étiquetée, est utilisée comme un opérateur de rencontre et un "support d’information" (invitation aux bénévoles, 2012). Ces fruits offrent des "prises" (Bessy et Chateauraynaud, 1995) pour comparer et évaluer deux types de circuits de production et de distribution. Lors de la session 2012, beaucoup de fruits sont tachés par la grêle, des champignons, ou troués par des insectes, malgré cela presque tous les passants en prennent. Ces "défauts d’aspects" sont considérés par certains passants comme des détails, leur faisant privilégier une évaluation de la qualité par une prise gustative plutôt que visuelle, telle une femme qui réagit à l’évocation des taches : "non mais on est bien d’accord, c’est rien ça. Mais le goût ça n’a rien à voir". Un arboriculteur utilise "ces imperfections" pour alimenter la discussion et inverser l’ordre des grandeurs : "on peut discuter à partir de ces taches, ça c’est des signes de grêle, et ça c’est une tavelure, c’est un champignon, quand on voit ça, on peut être sûr que c’est pas traité". Equipés de ce savoir de type indiciaire, les consommateurs apprennent les codes qui permettent de faire la différence entre deux modes de production et de distribution. Les qualités se construisent par contraste avec le système agroalimentaire "classique", puisque les aliments "sans défauts" deviennent signes de la présence de "mauvais" traitements, quand les "imperfections" se transforment en traceurs d’un mode de production "naturel". Une compétence à "percevoir en éthique" se transmet autour des pommes, un savoir permettant de lire "leurs expressions morales", et de percevoir l’écart qui sépare ces systèmes de paniers de l’agriculture "productiviste" et de la grande distribution (Laugier, 2011).

4. Un collectif à l’épreuve de différentes formes de politisation.

Aujourd’hui, l’existence de Raccourci est remise en question face à un essoufflement des salariés qui portent sur un temps souvent bénévole un collectif, qui dispose certes d’une "autonomie" vis-à-vis du politique mais de peu de moyens pour agir (réunion). Cet effet d’essoufflement est inhérent au manque de participation des consommateurs et des producteurs, il est redoublé par la sollicitation des salariés à participer à d’autres regroupements qui émergent autour de la "relocalisation de l’alimentation" (Labruyère61, PIRAT, PTCE). En 2013, les salariés ont donc convoqué producteurs et consommateurs pour réfléchir au devenir de Raccourci. Ce collectif apparaît donc mis à l’épreuve par différentes formes de politisation.

Tout d’abord, nous avons noté qu’il fonctionne comme "un collectif de salariés" à cause d’une difficulté à faire participer producteurs et consommateurs. Cette tension entre un régime de la participation et un de la délégation se retrouve au niveau de chaque structure, elle est intensifiée par ce statut de "collectif de structures". D’une part, la grande majorité des producteurs et consommateurs participe peu et de manière irrégulière aux distributions, à l'animation et à l'administration de structures qui restent en large partie pilotées par les salariés. Pour remédier à cela, les salariés relancent régulièrement la participation et tentent de l'encadrer par des règles, des outils, etc. D’autre part, en ce qui concerne la participation aux réunions de Raccourci, les salariés notent une tension entre un engagement dans le "proche", "localisé", fortement valorisé avec les paniers, et une mise en réseau vécue comme distante : "c’est peut-être trop loin" de leurs préoccupations (réunion). Néanmoins, lorsque certains consommateurs participent, ils se trouvent "en décalage" au sein d’un collectif de "professionnels", "d’initiés", du fait d’un investissement moindre en terme de temps et d’une différence de connaissance des dossiers (un porte-parole de Raccourci). Pour contrecarrer ce manque de participation, qui pose d’autant problème aux salariés qu’ils cultivent une vigilance sur le rapport pouvoir et cherchent à "avoir un système tripartie", ils s’efforcent d’être de bons représentants (Ibid.).

La création de deux autres collectifs plus larges, en terme d’acteurs concernés et d’ambitions, amplifie cette logique de représentation et de professionnalisation. PIRAT - Pôle d’Initiatives pour une Relocalisation de l’Alimentation sur les Territoires - rassemble tous les membres de Raccourci ainsi que d’autres acteurs (dont la fédération des jardins partagés et un Jardin de Cocagne). Alors que PIRAT est en train de réaliser son étude de faisabilité, un projet de "PTCE agri-alimentaire" (Pôle Territorial de Coopération Economique agriculture alimentation de la métropole lyonnaise) prévoit déjà la fusion de PIRAT avec un autre groupement (GRAP : Groupement Régional Alimentaire de Proximité qui rassemble les épiceries de l’ESS). Ces "pôles" territorialisés témoignent de la pluralité de méta- organisations, qui émergent très rapidement autour de ces nouvelles formes d’agriculture et cultivent un agir collectif territorialisé. On passe ici clairement d’un régime de la participation à une logique de réseau territorialisé qui demande des compétences en ingénierie agricole et territoriale : le problème de PIRAT selon une consommatrice c’est que "les consommateurs ne sont pas représentés" (réunion de Raccourci). Ces pôles procèdent d’une institutionnalisation d’"alternatives". Financé et cadré par la Région et la CRESS, le

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