• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 : AGENTS PATHOGÈNES ZOONOTIQUES VECTORISÉS ET MALADIES ASSOCIÉES

B. Acanthocheilonema reconditum chez l’hôte intermédiaire

Ces microfilaires peuvent être ingérées lors d’un repas sanguin par des puces ou des poux. Les espèces reconnues comme hôtes intermédiaires sont les suivantes : C. canis, C. felis, P. irritans, Pulex simulans et Echidnophaga gallinae pour les puces ; Heterodoxus spinigeret Linognathus setosus pour les poux (Leite et al., 2012 ; Sivagurunathan et Atwa, 2017). L’infestation par A. reconditum ne semble pas nuire à la survie des hôtes intermédiaires (Napoli et al., 2014).

31

Des études de prévalence d’A. reconditum chez les puces rapportent qu’elle s’élève à 70,5 % lorsque les puces sont issues d’animaux microfilarémiques et 5,1 % lorsqu’elles ont été prélevées sans prendre en compte le statut de l’animal (Pennington et Phelps, 1969 ; Brianti et al., 2012).

3. Hymenolepis diminuta

Hymenolepis diminuta est un cestode cosmopolite à cycle dixène. Ce parasite est communément rencontré chez les muridés et occasionnellement chez les carnivores domestiques ou chez l’Homme.

La transmission du parasite se fait par ingestion de l’arthropode infesté, le plus souvent chez les enfants (Kılınçel et al., 2015). La plupart du temps, les infections humaines sont asymptomatiques mais de légers troubles digestifs ont également été décrits.

De nombreux insectes peuvent assurer l’évolution d’H. diminuta, ce qui explique le caractère cosmopolite de celui-ci : des coléoptères granivores, des aphaniptères (c’est-à-dire des puces), des lépidoptères et des myriapodes. Il a été démontré que Xenopsylla cheopis est un hôte intermédiaire naturel du parasite (Gárate et al., 2011). Des études anciennes rapportent également que ce cestode pourrait se développer chez C. felis (Marshall, 1967), C. canis et P. irritans (Oldham, 1931). Cependant aucune étude récente n’a de nouveau investigué l’importance de ces espèces de puces dans l’épidémiologie d’H. diminuta. Comme c’est le cas pour D. caninum, les larves de puces s’infestent par ingestion de fèces contaminés (Kalaivani et al., 2014).

III. Bactéries zoonotiques transmises par les puces

Les puces peuvent être les vecteurs de différentes espèces de bactéries, dont la plupart sont zoonotiques. La transmission peut se faire via la piqûre ou par contamination de lésions cutanées par des déjections de puces infectées.

1. Yersinia pestis

Yersinia pestis est une bactérie Gram négatif responsable de la peste, maladie humaine revêtant différents aspects : peste bubonique, peste septicémique et peste pneumonique. C’est une variante clonale de Yersinia pseudotuberculosis d’apparition récente. Elle est transmise via des ectoparasites, en particulier les puces de l’espèce X. cheopis, parasites des rongeurs sauvages réservoirs naturels du bacille.

32

À la suite de la réapparition de la peste dans les années 1990 dans plusieurs pays, elle a été classée par l’OMS dans la catégorie des maladies ré-émergentes. Il convient de rappeler que Y. pestis est toujours responsable de plusieurs milliers de cas humains par an, en particulier en Afrique. Des foyers sont présents dans l’Ouest des États-Unis (Californie), en Amérique du Sud (Brésil, Pérou, Equateur et Bolivie), en Afrique (Madagascar, Tanzanie, Mozambique, Ouganda, République démocratique du Congo, Malawi, Zambie, Algérie…) et en Asie (Inde, Chine…) (Figure 11). En 2017, Madagascar a subi l’épidémie de peste la plus importante des années 2000 avec plus de 2 000 cas et 200 décès déclarés (Galy et al., 2018). D’après l’OMS et Stenseth et al. (2008), la peste est actuellement absente en Europe, en Australie et en Antarctique.

Figure 11. Régions du monde où la peste est présente dans le réservoir sauvage (d’après www.who.int)

L’agent de la peste est principalement transmis par des puces de rongeurs : Xenopsylla spp., Nosopsyllus spp., Neopsylla spp., Ceratophyllus spp., Citellophillus spp. et Oropsylla spp. (Gubareva et al., 1976 ; Voronova et al., 1987 ; Gage et al., 2000 ; Bazanova et al., 2004 ; Wilder et al., 2008a ; Wilder et al., 2008b ; Zhang et al., 2017). Dans des foyers de peste déclarés, des puces de l’espèce P. irritans ont été retrouvées positives pour l’ADN de Y. pestis, suggérant que cette puce pourrait être impliquée dans la transmission interhumaine (Ratovonjato et al., 2014).

Lorsqu’une puce prend un repas de sang chez un mammifère atteint de peste, les bactéries se répliquent dans le proventricule. Leur survie dépend de la toxine murine Yersinia (Ymt) qui protège les bactéries de la lyse par les enzymes digestives (Hinnebusch et al., 2002). Après une semaine, les bactéries forment des agrégats denses enfermés par une matrice extracellulaire brune. Ce biofilm

33

bactérien adhère aux épines qui tapissent l’intérieur du proventricule, obstruant celui-ci et empêchant la puce de se nourrir correctement. L’absence de repas sanguin complet entraîne des tentatives d'alimentation répétées au cours desquelles des bactéries peuvent être délogées du biofilm et transmises à l'hôte. En conditions expérimentales, de nombreuses espèces de puces peuvent s’infecter avec le bacille. Les puces ne présentant pas ou peu de blocage du proventicule, comme C. felis et C. canis, sont considérées comme de mauvais vecteurs.

Cependant, Bland et Hinnebusch (2016) ont montré que, si le comportement alimentaire de C. felis était modifié, ces puces pouvaient transmettre de façon plus efficace le bacille de la peste. Après infection expérimentale de C. felis par Y. pestis, si ces dernières ont un accès restreint à des repas sanguins (quatre fois par semaine en moyenne, mimant ainsi le comportement alimentaire de X. cheopis), elles peuvent rester infectées par le bacille pendant un mois et le retransmettre régulièrement au cours de cette période. Ces travaux suggèrent qu’une attention particulière doit être portée à C. felis, et que son rôle potentiel de vecteur secondaire ne doit pas être négligé. En effet, dans certaines régions comme l’Ouganda, cette espèce représente l’espèce de puce prédominante retrouvée libre dans les habitations humaines.

Les principaux réservoirs de Y. pestis sont des rongeurs appartenant à plusieurs familles : muridés, sciuridés et cricétidés (Galy et al., 2018). Lorsque le biotope de ces populations est perturbé (inondations, compétitions territoriales, irrigation, développement agricole…) ou que l’hôte vient à mourir, les échanges de puces entre rongeurs plus ou moins sensibles sont favorisés, déclenchant ainsi des épizooties (Duplantier et al., 2005). De plus, X. cheopis, majoritairement responsable de la transmission du bacille, est peu spécifique et peut infester les carnivores domestiques et accidentellement l’Homme.

Les chats sont sensibles au bacille de la peste et déclarent le plus souvent une forme pulmonaire de la maladie. Ainsi, ils peuvent être à l’origine d’infestations humaines via les aérosols (Gage et al., 2000 ; Dobler et Pfeffer, 2011). Chez les chiens, l’infection est généralement peu sévère (Orloski et Eidson, 1995) et ils sont souvent utilisés comme sentinelles de la maladie. Ces carnivores domestiques peuvent être à l’origine de l’introduction du bacille de la peste dans l’environnement humain par le biais de leurs ectoparasites contaminés. Une corrélation positive a été montrée entre des patients atteints de peste et ceux dormant avec leurs chiens (Chomel et Sun, 2011). Dans les foyers de peste, une attention particulière doit donc être portée aux animaux domestiques et aux puces qu’ils véhiculent.

34

2. Mycoplasma spp.

Les mycoplasmes hémotropes ou hémoplasmes sont de petites bactéries (0,3 µm x 0,8 µm) épi-érythrocytaires dépourvues de paroi cellulaire et disposant d’un génome réduit. Appartenant auparavant aux genres Eperythrozoon et Haemobartonella, ces agents pathogènes ont été reclassés dans le genre Mycoplasma.

A. Mycoplasmes zoonotiques du chat et du chien et modalités de