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1 – Matériaux massifs

a – Diagramme de bandes

Les propriétés électroniques et optiques des semiconducteurs proviennent de leur struc-ture électronique, elle-même provenant de l’arrangement ordonné et périodique des atomes les constituant (on dit qu’ils ont une structure cristalline) [1]. La structure électronique d’un semiconducteur est formée de nombreux niveaux d’énergie, que l’on appelle bandes d’éner-gies permises, séparées par des bandes d’énerd’éner-gies interdites. Dans le cas des semiconduc-teurs, on distingue en particulier deux bandes d’énergie : la bande de valence qui est la bande la plus haute en énergie où tous les états d’énergie sont occupés par des électrons au zéro absolu (T=0 K), et la bande de conduction qui est la première bande où tous les états d’énergie sont vide au zéro absolu. La bande de conduction et la bande de valence sont sé-parées par une bande d’énergie interdite dont la valeur minimum Eg est appelée gap. Si Ec

et Ev correspondent respectivement au minimum et au maximum des bandes de conduction et de valence, on a alors la relation suivante

Eg = Ec− Ev. (2.1)

Les diagrammes de bandes sont usuellement représentés dans l’espace réciproque asso-cié au vecteur d’onde−→

k . Suivant leur diagramme de bandes, les semiconducteurs peuvent se classer en deux catégories, ceux à gap direct et ceux à gap indirect. Les semiconducteurs à gap indirect (par exemple Si ou Ge) ne présentent pas Ecet Ev au même point de l’espace réciproque, contrairement aux semiconducteurs à gap direct (par exemple InP ou GaAs). Seuls les semiconducteurs à gap direct sont actuellement utilisés pour la réalisation d’émet-teurs ou de récepd’émet-teurs optique car ils sont beaucoup plus efficaces [1]. Dans la suite de ce mémoire de thèse, nous ne parlerons que de l’absorption des semiconducteurs à gap direct. La figure 17.a montre un diagramme de bandes typique autour du gap d’un semiconducteur à gap direct. On distingue trois bandes de forme parabolique, la bande de conduction et deux bandes de valence dégénérées en k = 0. La bande de valence de plus faible courbure est ap-pelée bande des trous lourds (ou hh pour Heavy Hole) et celle de courbure plus importante

a) b)

Fig. 17 – a) Diagramme de bandes typique d’un semiconducteur à gap direct (d’après [2]). b) Energie Eg du gap en fonction du paramètre de maille à température ambiante pour quelques se-miconducteurs III-V de structure cristalline de type Zinc Blende , et de composition binaire (carré) ou ternaire (ligne) (d’après [3]).

bande des trous légers (ou lh pour Light Hole) [1]. L’énergie du gap dépend des structures électroniques et cristallines et du paramètre de maille. Elle est typiquement égale à quelques eV (au dessus de 5 eV le matériau est considéré comme isolant). En optoélectronique, les semiconducteurs les plus utilisés sont à base d’éléments de la colonne III (par exemple Al, Ga et In) et V (par exemple P, As et N) du tableau périodique de Mendeleïev. La figure 17.a montre l’énergie Eg du gap de quelques semiconducteurs III-V en fonction du paramètre de maille, à température ambiante.

b – Absorption optique autour du gap

Lorsqu’un matériau semiconducteur à gap direct est soumis à une excitation lumineuse d’énergie adéquate, le phénomène d’absorption prend alors place, suivi par celui de la relaxa-tion. Il existe plusieurs types d’absorption comme l’absorption bande à bande, l’absorption par les impuretés, l’absorption par les porteurs libres ou encore l’absorption par des proces-sus multiphonons (vibrations de réseaux). Il existe aussi plusieurs types de relaxation qui sont les recombinaisons non-radiatives (principalement dues aux défauts du réseau cristal-lin), les recombinaisons radiatives et enfin les recombinaisons Auger.

Dans le cas d’un semiconducteur parfait à gap direct, excité avec une énergie proche de celle du gap, l’absorption interbande et les recombinaisons radiatives sont les deux phéno-mènes prédominants. La figure 18 illustre ces deux phénophéno-mènes. Tout d’abord, un photon incident ayant une énergie supérieure ou égale au gap est absorbé par le matériau (étape 1 sur la Fig. 18). Cette absorption va alors créer une paire électron-trou, l’électron allant dans la bande de conduction et le trou dans la bande de valence. Ce processus d’absorption inter-bande a un temps caractéristique de quelques dizaines de femtosecondes. Ensuite, l’électron (le trou) va se relaxer vers le minimum (maximum) de la bande de conduction (valence) en donnant son excès d’énergie au réseau (étape 2 sur la Fig. 18). C’est le phénomène de thermalisation avec un temps caractéristique de quelques centaines de femtosecondes. Enfin, l’électron et le trou vont se recombiner en émettant un photon d’énergie équivalente à celle

Fig. 18 – Illustration des phénomènes d’absorption interbande et de recombinaison radiative dans un semiconducteur à gap direct. On distingue trois étapes, d’abord l’absorption d’un photon (1), la thermalisation vers les centres de bande (2) et enfin la recombinaison (3).

du gap (étape 3 sur la Fig. 18). Ce phénomène de recombinaison a un temps caractéristique de quelques nanosecondes.

L’absorption dans un matériau dépend de son coefficient d’absorption α. Pour un ma-tériau semiconducteur à gap direct, α est directement proportionnel à la densité d’états qui représente le nombre d’états possible par unité de volume et d’énergie. On obtient donc un coefficient d’absorption de la forme

α ∝ (h ν − Eg)1/2, (2.2)

avec h la constante de Planck et ν la fréquence de l’onde incidente. Pour un semiconducteur on a typiquement α ≥ 104cm−1.

Fig. 19 – Spectres d’absorption du GaAs en fonction de l’énergie des photons incidents pour 4 dif-férentes températures : 294 K (cercle blanc), 186 K (carré), 90 K (triangle) et 21 K (cercle noir) [4].

en fonction de l’énergie des photons incidents pour plusieurs températures de substrat [4]. Des mesures similaires ont aussi été obtenues avec de l’InGaAs en accord de maille avec l’InP [5]. On remarque qu’à température ambiante, le spectre d’absorption est très proche de la forme définie par l’Eq. (2.2). Cependant, au fur et à mesure que l’on diminue la tem-pérature de l’échantillon, le spectre d’absorption change. Tout d’abord, la diminution de la température provoque une augmentation de l’énergie du gap d’où une translation du spectre vers les plus hautes énergies. Mais surtout, un pic d’absorption apparaît autour de l’éner-gie du gap, qui est d’autant plus prononcé que la température est basse. Cette absorption supplémentaire est due à la création d’excitons. Un exciton est une particule fictive formée par une paire électron-trou. Les états excitoniques apparaissent lorsque des paires électrons-trous sont créées, comme par exemple lors de l’absorption optique. Les charges positive du trou et négative de l’électron vont s’attirer et ainsi former une paire électron-trou, plus com-munément appelé exciton. A cause de cette liaison coulombienne, l’exciton a une énergie plus faible qu’une paire électron-trou non-liée et les états excitoniques sont situés juste en-dessous de l’énergie du gap. Dans le cas du GaAs, le premier état excitonique n’est situé qu’à 5 meV en-dessous de l’énergie du gap. L’effet de l’absorption excitonique est d’augmenter sensiblement la valeur du coefficient d’absorption autour du gap, cependant à température ambiante l’énergie thermique est suffisante (kBT /e = 25 meV) pour ioniser tous les exci-tons. Dans le cas d’un semiconducteur massif, il est donc nécessaire de travailler à très basse température pour observer les effets excitoniques.

2 – Puits quantiques

a – Les structures de dimensions réduites

L’utilisation depuis une vingtaine d’année de techniques de croissance contrôlées au ni-veau atomique (épitaxie) a permis de réaliser des structures semiconductrices de dimensions très réduites. Le contrôle de l’épaisseur, mais aussi de la forme et de la composition des struc-tures, permet de réaliser des hétérostructures (empilement de structures de dimension et de composition variées) parfaitement adaptées à l’application visée (lasers, détecteurs, diodes, etc. . . ). Outre le fait d’améliorer l’intégration, le principal intérêt de réduire la dimensiona-lité des structures semiconductrices vient de la modification du diagramme de bandes qui en résulte. Ces modifications apportent de nouvelles propriétés optiques et électroniques très intéressantes pour la réalisation de nouveaux composants.

Suivant leur dimensionalité, on peut distinguer quatre grandes familles de structure : – Les structures 3 D. Elles correspondent aux semiconducteurs massifs que l’on a déjà présenté à la page 36 (cf. Fig. 20.a).

– Les structures 2 D. Ces structures sont appelées des puits quantiques (ou QW pour Quantum Wells) et correspondent à des couches dont les épaisseurs peuvent varier entre quelques nanomètres et une centaine de nanomètres (cf. Fig. 20.b). Cette faible épaisseur suivant l’axe de croissance permet de créer un confinement des porteurs suivant cette même direction (les électrons et les trous sont réparties en sous-bandes discrètes).

– Les structures 1 D. Ces structures, appelées fils quantiques, sont similaires à des fils de quelques nanomètres de diamètre et plusieurs dizaines de nanomètres de long (cf. Fig. 20.c). Ce type de structure permet de réaliser un confinement des porteurs suivant deux directions

Fig. 20 – Densité d’états pour a) un matériau massif (3 D), b) un puits quantique (2 D), c) un fil quan-tique (1 D) et d) une boîte quanquan-tique (0 D) (d’après [6]).

de l’espace, alors que les porteurs sont libres de se déplacer suivant la troisième (correspon-dant à l’axe du fil).

– Les structures 0 D. Ces structures, appelées boîtes quantiques ( ou QD pour Quantum Dots), sont similaires à de petites boîtes de taille nanométrique (cf. Fig. 20.d). On obtient dans ce cas un confinement des porteurs suivant les trois dimensions de l’espace.

Le confinement des porteurs suivant certaines directions va profondément modifier la densité d’états et donc la forme du spectre d’absorption. La figure 20 montre la forme de la densité d’états suivant les quatres types de structures. Pour la suite de ce mémoire de thèse nous ne parlerons pas des structures 1 D et 0 D car il est encore actuellement très difficile de réaliser de telles couches actives fonctionnant à 1550 nm et nous n’avons donc pas pu réaliser de composants avec de telles structures.

b – Diagramme de bandes d’un puits quantique

Un puits quantique est constitué d’une couche d’épaisseur nanométrique comprise entre deux couches de matériau barrière. Pour obtenir le confinement des porteurs, le matériau constituant le puits doit avoir une bande interdite inférieure à celle du matériau barrière. La figure 21.a montre le diagramme de bandes d’un puits quantique. On observe bien l’effet du confinement des porteurs suivant l’axe de croissance (axe z). En effet, contrairement au plan transverse où les courbes de dispersion sont continues, l’énergie des porteurs suivant l’axe de croissance est désormais quantifiée. Un autre effet visible du confinement des porteurs

a) b)

Fig. 21 – a) Diagramme de bandes typique d’un puits quantique et b) diagramme d’énergie dans un puits quantique.

dans le puits est la levée de la dégénérescence de la bande de valence que l’on observe en k = 0 dans le cas des matériaux massifs (cf. Fig. 17). Dans un puits quantique, l’énergie de la bande interdite est plus importante que celle du matériau massif équivalent (cf. Fig. 21.b). En effet, l’énergie E nécessaire pour réaliser la première transition est désormais égale à

E = Eg+ Ee+ Eh, (2.3)

avec Eg l’énergie du gap du matériau massif, Ee le décalage d’énergie de la bande de conduction dû au confinement et Eh le décalage d’énergie de la bande de valence dû aussi au confinement. Ces deux décalages dépendent de l’épaisseur Lqw du puits quantique, mais aussi des masses effectives m des trous et des électrons, suivant la relation suivante (pour un puits de profondeur infinie)

En = ~ 2 2 m  n π Lqw 2 , (2.4)

avec ~ la constante de Planck réduite et n le niveau d’énergie concerné par le calcul [2]. Comme les masses effectives des trous lourds et des trous légers sont différentes, on observe bien une levée de dégénérescence des bandes de valence. Cette levée de dégénérescence est d’autant plus importante que le puits a une faible épaisseur.

c – Absorption dans un puits quantique

La densité d’états d’un puits quantique va différer de celle d’un semiconducteur massif à cause de la quantification des niveaux d’énergie suivant l’axe de croissance. En conséquence, le spectre d’absorption sera aussi différent. Comme l’énergie dans un puits est quantifiée, on va donc obtenir un spectre d’absorption en marche d’escalier. La figure 22.a montre schéma-tiquement le spectre d’absorption typique d’un puits quantique, ainsi que celui du matériau massif équivalent pour comparaison.

a) b)

Fig. 22 – a) Spectres d’absorption typiques d’un puits quantique (trait plein) et d’un semiconducteur massif (trait en pointillés) sans tenir compte des effets excitoniques. b) Spectre d’absorption expérimental d’un ensemble de multi-puits quantiques InGaAs/InAlAs (Lqw=10 nm) mesuré à température ambiante [2].

Fig. 23 – Spectres d’absorption à température ambiante d’échantillon de GaAs massif et de puits quan-tiques GaAs/AlGaAs (10 nm/21 nm) [7].

La figure 22.b montre le spectre d’absorption expérimental de multi-puits quantiques In-GaAs/AlInAs mesuré à température ambiante [2]. On constate tout d’abord que le spectre d’absorption expérimental montre bien une variation en marche d’escalier de α, preuve de la quantification des bandes d’énergie, mais on constate aussi que les effets excitoniques sont visibles même à la température ambiante. La figure 23 montre les spectres d’absorptions à température ambiante d’un échantillon de GaAs massif et de multi-puits quantiques de GaAs. L’effet du confinement dans les QW est clairement visible si on compare les deux spectres d’absorption. Comme prédit par l’Eq. (2.4), l’énergie du gap d’un QW est plus importante que celle du matériau massif équivalent. De plus, la levée de dégénérescence de la bande des trous lourds et de celle des trous légers est nettement confirmée grâce aux deux absorptions

excitoniques qui en résultent. Les mesures expérimentales de spectres d’absorption d’un QW montrent que l’absorption excitonique est nettement visible même à température ambiante (cf. Figs. 22 et 23) contrairement à ce que l’on constate dans le cas des matériaux massifs (cf. Fig. 19). Cela provient aussi du confinement des porteurs suivant l’axe de croissance. En effet, le confinement a pour conséquence d’augmenter l’énergie de liaison des excitons d’un facteur 2 à 4 et de diminuer leur couplage avec les phonons – plus le couplage exciton-phonon est important et plus l’absorption excitonique est large –, leur permettant ainsi de subsister même à température ambiante.