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Dans les systèmes à 2 niveaux

Les oscillations cohérentes de population2 ont été initialement étudiées dans le cadre de la théorie du fonctionnement multimode des lasers à gaz [75,76], où il a été mis en évidence que des “pulsations de population” sont générées aux multiples de l’intervalle spectral libre du laser, induisant une contribution à la saturation croisée entre modes. La première étude théorique dédiée spécifiquement aux CPO dans les systèmes à 2 niveaux remonte à 1967 [44]. Schwarz et Tan ont montré qu’en présence d’une pompe de forte intensité à la fréquence ω0, le spectre d’absorption d’un milieu absorbant à élargissement homogène, pour une sonde d’intensité faible, présente un creux spectral centré à ω0, et de demi-largeur à mi-hauteur T−1

1 . Cette étude a été reprise dans un cadre plus général par Sargent dans [77], qui en donne une interprétation simple sous le nom de “creux cohérent” (coherent dip en anglais).

Ce phénomène peut effectivement s’expliquer assez simplement : considérons un milieu à gain, assimilé à un système à deux niveaux, en présence d’une pompe à la fréquence ω0, et d’une sonde à ω0 + Ω. L’intensité optique totale est alors modulée en amplitude à Ω. Dans un premier temps, considérons que Ω est très inférieur à T−1

1 . Comme nous l’avons illustré sur la Fig. II.8(a), l’intensité de la pompe étant élevée, l’intensité optique totale va plus ou moins saturer le milieu : l’inversion de population est donc modulée en opposition de phase par rapport à l’intensité optique incidente. Cela implique que le gain est lui aussi modulée en opposition de phase. On observe alors en sortie une réduction de la profondeur de modulation de l’intensité optique. En revanche, lorsque Ω est très supérieur à T−1

1 , la population du niveau excité a une dynamique trop lente pour percevoir la modulation rapide de l’intensité optique. Ainsi, l’inversion de population et le gain ne sont pas modulés, et la profondeur de modulation de l’intensité optique n’est pas réduite à la sortie du milieu (Fig. II.8(b)). Ainsi, le spectre du gain optique de la sonde présente un creux spectral centré à ω0 et de demi-largeur à mi-hauteur T1−1 (Fig. II.9(a)). Un raisonnement similaire peut être conduit pour le spectre d’absorption d’un milieu absorbant.

Les premières observations expérimentales du creux spectral induit par CPO ont été rappor-tées au début des années 1980 dans le cas de Sm+2: CaF2[78] et dans le rubis [79]. La courbe de

1. Acronyme venant de l’anglais Coherent Population Oscillations.

2. L’origine historique et la signification du terme “oscillations cohérentes de population” sont proposées dans la note2située en bas de la page67.

Equations de propagation en présence de CPO dans un SOA 64 t Intensité optique en entrée Population Gain Intensité optique en sortie t t t t t E Ea E Eb

(a) (b)

Ea Eb

Ω . T1 1 Ω . T1 1

Figure II.8 – Principe des oscillations cohérentes de population (CPO), illustré dans un milieu à gain à deux niveaux. Nous avons représenté l’évolution temporelle de l’intensité optique entrante, de la différence de populations, du gain associé et de l’intensité optique sortante, (a) à basse fréquence, lorsque Ω est inférieur à T−1

1 et (b) à haute fréquence, lorsque Ω est supérieur à T−1

0 1

Ecart en fr´equence Ω

V

ar

iat

ion

d

u

gai

n

(u

.a.

)

(a) 2 T1 0 1

Ecart en fr´equence Ω

V

ar

iat

ion

d

’i

n

d

ic

e

(u

.a.

)

(b) 2 T1

Figure II.9 – (a) Variation du gain vu par la sonde dans un milieu à gain assimilé à un système à deux niveaux, en présence de CPO, en fonction de son écart en fréquence Ω avec la pompe. (b) Variation d’indice vue par la sonde dans un milieu à gain assimilé à un système à deux niveaux, en présence de CPO, en fonction de son écart en fréquence Ω avec

la pompe.

dispersion associée par les relations de Kramers-Konig à ce creux spectral a été théoriquement étudiée dans [80]. Nous l’avons représentée sur la Fig. II.9(b) : sur une fenêtre centrée à ω0 et de largeur 2T−1

1 , la dispersion présente une variation rapide en fonction de la fréquence. Nous avons montré, dans le chapitre I, que cela est associé à de la lumière dite “lente” ou “rapide”, selon le signe de la pente de la courbe de dispersion. Dans le cas décrit sur la Fig. II.9, le creux spectral dans le gain est associé à de la lumière rapide. Rappelons qu’en 2003, Bigelow et al. ont expérimentalement montré qu’il était possible d’utiliser cette dispersion due aux CPO dans le rubis pour ralentir la lumière jusqu’à 57, 5 ms−1 à température ambiante [12]. Néanmoins, la bande passante était limitée à T−1

1 soit 36 Hz.

Dans les semi-conducteurs

La durée équivalente de T1 dans les semi-conducteurs est la durée de vie spontanée des porteurs τs, qui est proche de la nanoseconde. Ainsi, comme nous l’avons évoqué au chapitre I, l’un des avantages d’utiliser les CPO dans les semi-conducteurs est de contrôler la vitesse de groupe de la lumière sur une bande passante proche du GHz.

Les CPO dans les semi-conducteurs ont aussi été initialement étudiées dans le cadre du fonctionnement multimode des lasers à semi-conducteurs. Bogatov et al. ont été les premiers à observer en 1975 que les CPO conduisent à une interaction asymétrique entre les modes spectraux d’un laser à semi-conducteurs, ce qui favorise le mode qui est à la plus grande longueur d’onde lorsque le courant d’injection est suffisamment élevé. Ils ont qualifié cette asymétrie “d’anormale”, car elle est spécifique aux lasers à semi-conducteurs, et donc non observée dans les autres types de lasers. Ils ont montré théoriquement que l’existence de cette interaction asymétrique est liée à la valeur non nulle du facteur α dans les lasers à semi-conducteurs. Agrawal a étudié théoriquement en 1988 les CPO dans un amplificateur à semi-conducteurs [74]. Son étude confirme que la courbe de gain de la sonde est asymétrique à cause du facteur

Equations de propagation en présence de CPO dans un SOA 66

α, et diffère ainsi de la réponse classique des systèmes à deux niveaux.

Ainsi, afin d’étudier les CPO dans les amplificateurs à semi-conducteurs et de mettre en évidence les différences entre les CPO dans les semi-conducteurs et les systèmes à deux niveaux, nous allons établir dans les paragraphes suivants les équations de propagation dans un SOA en présence de CPO, dans le cadre du modèle phénoménologique que nous avons introduit dans la partie II.2. Le but étant d’utiliser ce modèle pour les simulations des expériences que nous présenterons dans les chapitres III et IV, nous veillerons à développer un modèle valable quelles que soient les conditions d’utilisation (courant injecté, puissance optique incidente), tout en ayant un minimum de paramètres non issus d’une mesure expérimentale. Une fois ce modèle établi, nous analyserons dans la partie II.5 les courbes de gain et de dispersion induites par les CPO dans un SOA.