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INTRODUCTION GENERALE

II. A.2) Réparation cutanée

La réparation du tissu cutané est bien documentée et peut être divisée en trois phases successives : l’inflammation, la prolifération cellulaire/ réépithélialisation et le remodelage.

II.A.2.a) Phase inflammatoire

Suite à une effraction cutanée, les mécanismes d’hémostase vont se mettre en place pour restaurer l’intégrité des vaisseaux sanguins.

Après l’agrégation et la dégranulation plaquettaire au niveau des vaisseaux sanguins lésés, la coagulation du sang conduit en quelques minutes à la formation d’un caillot fibrino-plaquettaire. Le « clou » plaquettaire ainsi formé initie la réaction inflammatoire par libération de facteurs de coagulation, de facteurs vasoactifs, chimioattractifs et de cytokines pro-inflammatoires.

Ce cocktail cytokinique précoce permet le recrutement sur le site lésé de cellules inflammatoires circulantes : neutrophiles et monocytes qui assurent la neutralisation des antigènes étrangers et la stérilisation de la plaie. Les cytokines pro-inflammatoires, principalement IL-1(Interleukine 1) et TNFα (Tumor Necrosis Factor) sécrétées par les macrophages et les neutrophiles induisent elles-mêmes la production autocrine d’IL-6 et d’IL-8 par les fibroblastes et régulent les phénomènes d’adhésion et de transmigration des leucocytes. Cette phase inflammatoire se déroule dans les heures qui suivent l’effraction cutanée. Elle est indispensable pour le recrutement des cellules impliquées dans la réparation tissulaire provenant du derme environnant et de la circulation (Barrientos et al, 2008 ; Gurtner et al, 2008).

Une inflammation prolongée ou survenant de manière plus tardive dans la chronologie de réparation tissulaire aura cependant des effets délétères. Lors de la réponse inflammatoire, un grand nombre de protéases sont activées : les sérine-protéases et les métalloprotéases (MMP) (stimulées par les cytokines inflammatoires) qui participent initialement à la protéolyse matricielle pour favoriser la migration des cellules dans la MEC. Ces protéases sont sous le contrôle d’anti-protéases et d’anti-métalloprotéase (TIMPs) et sont activées par des cytokines pro-inflammatoires (IL1β, IL1α, TNFα, TGFβ (Tumor Growth Factor)). En cas d’emballement des processus pro-inflammatoires, le dérèglement de la balance

protéase/anti protéase provoque une destruction de la MEC empêchant la formation du tissu de granulation et la prolifération des cellules (Rayment and Upton, 2009 ; Gajendrareddy et al, 2013).

II.A.2.b) Phase de prolifération

A l’issue de la phase inflammatoire, le caillot se rétracte et le tissu conjonctif sous-jacent prend le nom de tissu de granulation en raison des granulations roses correspondant aux nombreux capillaires qui l’envahissent. Cette néo-vascularisation est due à l’angiogenèse déclenchée et entretenue principalement par le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) et le bFGF (Fibroblast Growth Factor) sécrétés par les cellules endothéliales lésées et les macrophages. A ce stade, de nombreux fibroblastes stimulés par la sécrétion de TGFβ par les macrophages se transforment en myofibroblastes, ressemblant étroitement à des cellules musculaires lisses (car ils expriment l’alpha-actine). Les fibroblastes et les myofibroblastes interagissent pour produire les protéines de la matrice extracellulaire (Werner et al, 2007 ; Liu et al, 2012). La réépithélialisation de la lésion fait intervenir les différentes cellules souches de la peau : les cellules souches épidermiques et les cellules souches des follicules pilo-sébacés. La part de chacune n’est pas encore clairement déterminée. Des travaux ont démontré que les cellules souches du follicule pileux sont nécessaires pour initier une réépithélialisation rapide mais leur rôle dans la fermeture de la plaie reste contesté (Plikus et al, 2012). Leur différenciation en kératinocytes est dépendante de nombreuses protéines tel que la β-catenine, la BMP-4 (Bone Morphogenic Protein), Wnt 4-6, l’EGF (Epithelial Growth Factor) et la colonisation du tissu de granulation nécessite une migration de ces cellules depuis le bulge jusqu’à la jonction dermo-épidermique (Huelsken et al, 2001 ; Ito et al, 2007). De même que pour les kératinocytes issus de la différenciation des cellules épidermiques, cette migration est assurée par la formation et la stabilisation de points d’adhérence cellule-MEC et par une dégradation de la MEC via la sécrétion, par les cellules souches et les cellules colonisant le tissu de granulation (fibroblastes, myofibroblastes, macrophages), de sérine-protéases et de métalloprotéases (Niu et al, 2007 ; Martins et al, 2013).

La reconstitution d’un épithélium stratifié nécessite une prolifération cellulaire par mitose des kératinocytes stimulés par un mécanisme autocrine impliquant IL1, EGF, et bFGF, complétés par l’action paracrine des fibroblastes et des leucocytes qui libèrent différents médiateurs tels que KGF (Keratinocyte Growth Factor), IGF-1 (Insulin Growth Factor 1), IL1, TNFα, et bFGF. En réponse aux signaux locaux du microenvironnement, les kératinocytes prolifèrent jusqu’à la réépithélialisation de la lésion (Raja et al, 2007 ; Gurtner et al, 2008).

II.A.2.c) Remodelage

La phase de remodelage est la dernière étape mais aussi la plus longue du processus de réparation des plaies. Elle concerne principalement la portion dermique de la cicatrice qui subit de multiples réarrangements afin d'accroître sa résistance mécanique. Elle consiste en un remaniement de la MEC et à une réduction de la densité cellulaire par apoptose des fibroblastes, myofibroblastes, macrophages et cellules endothéliales avec régression vasculaire (Werner et al, 2007).

II.A.2.d) Importance de la vascularisation

Il est important de noter qu’à chaque phase de la réparation cutanée, tous les mécanismes précédemment décrits sont dépendants de la vascularisation des tissus. Les dommages vasculaires influencent l’apport en nutriments et en oxygène aux tissus et la viabilité des cellules épithéliales. L’intégrité des vaisseaux du derme ou la néoangiogenèse (en fonction de la profondeur de la lésion cutanée) sont donc des processus clés de la réparation tissulaire (Tamarat et al, 2012).

La néo-vascularisation débute avec le bourgeonnement de capillaires sanguins à partir des veinules adjacentes à la plaie : en réponse à des stimuli angiogéniques, les cellules endothéliales produisent des enzymes (MMP2, activateurs du plasminogène, collagénase et stromelysine) afin de dégrader la membrane basale et la MEC. Les cellules endothéliales peuvent alors migrer en direction du gradient de concentration des facteurs angiogéniques et proliférer pour fournir la masse cellulaire requise à la néo-vascularisation. Elles se différencient afin de former une lumière à l'intérieur du vaisseau. La membrane basale se reconstitue progressivement et les péricytes entourent les

capillaires. Le développement de ce nouveau réseau capillaire s’avère essentiel à l’apport de nutriments aux nombreuses cellules de la plaie en métabolisme actif (Tonnesen et al, 2000).

Plusieurs facteurs sont responsables de l'angiogenèse. Ils ont pour fonction : la dégradation de la membrane basale et de la MEC, la migration, la prolifération et différenciation des cellules endothéliales. L'EGF, le bFGF, le VEGF, l’ANG1 (Angiopoïétine 1), le TNFα et l’IL8, provenant des plaquettes, macrophages, fibroblastes et kératinocytes, stimulent l’angiogenèse (Gerhardt et al, 2003 ; Li et al, 2003). Les fragments de matrice dégradée (fibronectine), l'hypoxie tissulaire, l’acide lactique et les amines biogéniques contribuent aussi au développement de nouveaux capillaires. Les cellules endothéliales activées sécrètent plusieurs facteurs bFGF, PDGF (Platelet derived Growth factor) et IGF-1, dont l'action autocrine ou paracrine favorise la néo-vascularisation (Iivanainen et al, 2003). L'action angiogénique de ces divers facteurs s'explique par leur effet chimiotactique et mitogène, la production d’enzymes pour dégrader la membrane basale et la matrice extracellulaire et le dépôt de constituants matriciels par les cellules endothéliales ou par d'autres cellules comme les fibroblastes. La stabilisation et la maturation des vaisseaux sont respectivement assurées par la sécrétion de ANG1 (via son récepteur Tie2) et TGFβ par les cellules périvasculaires et les péricytes (Tonnesen et al, 2000) ; (Figure 15).

Figure 15 : Les différentes étapes et les facteurs impliqués dans l’angiogenèse.