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PERRIN, Guy: L'assurance sociale - ses particularités - son rôle dans le passé, le présent et 1 'avenir. In : Beitrdge zu Geschichte und aktueller Situation der Sozialversicherung. Buncker & Humblot. Berlin 1983.

PERRIN, Guy : Le plan Beveridge : les grands principes. Revue interna-tionale de sécurité sociale, 1-211992, pp. 45 ss.

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2.1 Les modes anciens de protection et l'assurance privée

De tout temps, les individus ont cherché à se protéger à 1' égard des risques de la vie. La famille, en tant que cellule de base, a le plus souvent assumé cette tâche, selon ses possibilités.

Parmi les modes de protection, qui ont précédé la sécurité sociale, il convient de citer:

-l'épargne -la charité

-la responsabilité de l'employeur - la mutualité

- 1' assurance privée

- 1' assistance (ou aide) sociale - 1' assurance sociale

L'épargne consiste dans le fait, pour un individu, une famille ou un autre groupe, de garder en réserve une partie de ses ressources. Inconvénients : peu accessible aux classes les plus défavorisées; grande difficulté de prévoir les risques; certains d'entre eux (cf soins médicaux) dépassent la capacité financière de la plus grande partie de la popu-lation. Ainsi, l'épargne peut tout au plus jouer un rôle de complément.

La charité peut être décrite comme une épargne mise à la disposition d'autrui : une ou des personnes aident ceux qui sont dans le besoin. Inconvénients : pas de garantie quant à la protection; dépendance de l'assisté.

La responsabilité de l'employeur a précédé notamment l'assurance-accidents.

La responsabilité a tout d'abord été engagée en cas de faute, puis de manière causale.

Inconvénients : détérioration des relations de travail, vraisemblablement licenciement;

aucune planification possible pour l'employeur, exposé à l'insolvabilité.

La mutualité représente à l'origine une union de travailleurs décidés à faire face ensemble aux risques. Contre paiement de cotisations, les caisses mutuelles (sans but lucratif) garantissent certaines prestations. Inconvénients : limites à la solidité financière;

une sélection de risques n'est pas exclue.

L'assurance privée : «Toute opération d'assurance met en présence deux par-tenaires : d'une part une communauté de personnes qui, exposées à certains risques, les transfèrent à un tiers; d'autre part un organisme qui, prenant en charge ces risques moyennant rétribution, les compense en recourant aux données de la statistique. A partir de cela, l'assurance peut être définie comme l'opération par laquelle une partie, l'assuré, se fait promettre par l'autre, l'assureur, en cas de réalisation d'un risque, une prestation de nature économique en échange d'une contprestation appelée prime. Ainsi, une

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lation juridique se crée entre l'assureur et chacun de ses assurés. >>1 Avantage : dévelop-pement technique très poussé et par là sérieuses garanties de sécurité. Inconvénient : sélection de risques (découlant d'une politique commerciale). Important rôle de complé-ment. A distinguer: l'intervention de compagnies privées d'assurances dans la gestion d'un régime de sécurité sociale (cf l'assurance-accidents LAA), avec observation d'une législation de droit public.

2.2 L'émergence de l'assurance sociale

Les besoins sociaux ont donc conduit au développement des différents modes individuels et collectifs de protection évoqués ci-dessus; ceux-ci sont en partie aussi an-ciens que notre civilisation. Le début de la protection sociale en tant que système organi-sé par l'Etat doit toutefois être situé à la fin du 19e siècle. C'est à ce moment-là que plusieurs pays européens, influencés par l'exemple allemand, ont commencé à mettre en place une forme jusqu'alors inconnue de protection sociale : des assurances sociales cou-vrant certaines catégories de personnes et certains risques sociaux.

C'est en effet au deuxième empire allemand que revient sans doute le rôle pion-nier qui, sous le règne de Guillaume II, fut le premier pays à s'être doté d'une assurance-maladie sociale des travailleurs. Sous pression de la question ouvrière résultant de la première révolution industrielle et de l'exode rural, le chancelier Otto v. Bismarck pré-conisa de tempérer les esprits de gauche en offrant un système d'assurances sociales aux travailleurs. Le film des événements dénote alors une évolution rapide, qui pourrait servir d'exemple aux législateurs contemporains : 1881 promulgation du message de l' empe-reur à l'attention du Reichstag - 1883 adoption de la Loi sur l'assurance-maladie -1884 adoption de la Loi sur l'assurance-accidents du travail - 1889 adoption de la Loi sur l'assurance-invalidité et vieillesse2.

Quels étaient les éléments novateurs du système inventé par Bismarck? Tout en se servant de certains traits de l'assurance privée déjà bien connues à l'époque (répartition du risque au sein de la collectivité des assurés avec péréquation des charges financières au moyen de cotisations), le fondateur de 1' assurance sociale ajouta des carac-téristiques originales pour 1' époque : la finalité de 1' assurance devient sociale en ce qu'elle vise non pas à faire des bénéfices commerciaux mais à protéger la classe défavori-sée contre les risques de la vie; la loi la rend obligatoire; son organisation est surveillée par l'Etat mais elle est décentralisée, c'est-à-dire assumée par des institutions autonomes;

son financement enfin est supporté par le moyen de cotisations avec une participation des employeurs et une garantie étatique.

Bernard VIRET : Droit des assurances privées. Ed. de la Société suisse des employés de

commerce, Zürich 1983, p. 13). ·

2 Aujourd'hui les différentes branches de l'assurance sociale allemande ont été coulées dans une oeuvre législative moderne, le code de sécurité sociale (Sozialgesetzbuch SGB), mais certains traits caractéristiques créés à l'époque ont subsisté (voir point 3.4 Eléments de droit comparé) .

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2.3 L'émergence de la sécurité sociale

La sécurité sociale ne représente pas une rupture dans l'histoire de la protection sociale. Elle est au contraire élaborée à partir des modes qui l'ont précédée. Elle s'est essentiellement nourrie des réalisations et expériences des assurances sociales et de l'assistance sociale (par exemple, la nécessité d'instituer des protections en faveur des salariés, mais aussi de prévoir certaines garanties en faveur de l'ensemble de la popula-tion, la validité des deux finalités représentées par une garantie de revenu en relation avec le gain antérieur et par celle d'un minimum de ressources). La sécurité sociale a aussi bénéficié des techniques très élaborées mises au point par les assureurs privés pour la gestion des risques et des fonds accumulés. Enfin, l'épargne, la responsabilité de l'employeur et les mutuelles peuvent représenter des compléments utiles.

Celui qui mentionne O. von Bismarck comme étant le fondateur de 1 'assurance sociale n'omettra pas d'attribuer ce même rôle à Sir William Beveridge en ce qui con-cerne la sécurité sociale. Cet expert des questions sociales adressa au Gouvernement britannique, en date du 20 novembre 1942, le fameux« Rapport sur l'assurance sociale et les services connexes» («Social insurance and allied services») - dénommé depuis lors« Plan Beveridge». Bien qu'il ne rompit pas avec la tradition de l'assurance sociale, le concept de Beveridge introduisit des éléments novateurs qui, depuis lors, sont devenus des caractéristiques de la notion de sécurité sociale : vision globale des éventualités à couvrir, protection de l'ensemble de la population3 . Les modes de protection antérieurs à l'apparition de la sécurité sociale n'ont pas disparu, mais ils ont été intégrés par celle-ci.

Ils sont devenus des techniques au service de la sécurité sociale. L'assurance sociale re-présente la technique privilégiée des systèmes contemporains de sécurité sociale.

La sécurité sociale est ainsi née pendant la période 1944-19524 . Trois instruments adoptés par l'Organisation internationale du Travail (OIT) ont donné des objectifs et un contenu à cette nouvelle institution :

la Recommandation OIT No 67 concernant la garantie des moyens d'existence (1944),

la Recommandation OIT N° 69 concernant les soins médicaux (1944).

la Convention OIT N° 102 concernant la norme minimum de la sécurité sociale (1952).

L'idée lancée par Bismarck durant les années quatre-vingt du siècle passé a été largement reprise par des législateurs d'autres pays, tels l'Autriche et la France, qui con-naissent comme l'Allemagne un système basé sur l'assurance sociale. De même le modèle proposé une soixantaine d'années plus tard par Beveridge, destiné à former la base théo-rique d'un système de protection sociale modernisée en Angleterre, fut lui aussi une

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Les assurances sociales ne prennent traditionnellement en charge que les travailleurs salariés.

La voie a été préparée par les Social Security Acts des Etats-Unis (1935) et de Nouvelle-Zélande (1938).

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d,. · t" r bt"en des Etats notamment ceux du Commenwealth, comme source msptra ton pou ,

l'Australie et le Canada.

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