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— évaluer le volume des marchés potentiels pour déterminer leur intérêt et

l ' i m p o r t a n c e d e s i n v e s t i s s e m e n t s n é c e s s a i r e s à l e u r c o n q u ê t é .

1. Dans les années 60, le « produit nouveau » avait un cours spécifique dans l'ensei- gnement du marketing à la Harvard Business School.

2. C'est encore la définition « officielle » du marketing pour les manuels d'enseigne- ment français de l'économie. Cf. Économie de lre STT (Hachette) : « Mercatique : ensemble des actions destinées à détecter les besoins et à adapter en conséquence et de façon continue la production et la commercialisation. »

Et de proposer des produits pour cadres, des produits pour employés, des produits pour cadres supérieurs et « petits patrons ».

Et aussi des produits pour jeunes, des produits familiaux et des produits pour chiens et chats...

Démarche intéressante qui n'avait pas tout à fait les moyens de ses ambi- tions. On s'aperçut en effet assez vite des limites de cette forme de segmen- tation de la clientèle : très « prédictive » au niveau de la consommation des types de produits, les catégories socioprofessionnelles ne l'était pratique- ment pas au niveau de la préférence pour des marques signalant des pro- duits de même typel.

On inventa alors les styles de vie puis les courants socioculturels. Avec les déboires que l'on connaît. Avant de s'aviser que la meilleure segmenta- tion était peut-être celle qu'opéraient les produits eux-mêmes : le position- nement était né. « Donnez une personnalité différenciée à votre produit, il trouvera sa clientèle spécifique ». À chacun, sa chacune !

En retard d'une guerre

En fait, le positionnement apparut au moment même où la dynamique des marchés était en train de changer de nature.

Au début des années 80, la dynamique d'accession commençait à sta- gner, masquée par l'arrivée économique des baby boomers.

Seule allait demeurer réellement la dynamique de consommation et de renouvellement. Où pour développer ses ventes, il fallait développer sa part de marché. C'est-à-dire prendre des clients aux concurrents.

Or le ticket de première classe2 qui permet de conquérir des acheteurs nouveaux dans une dynamique d'accession ne permet pas de séduire de nouveaux consommateurs dans une dynamique de consommation.

Comment plaire en effet, par notre différence, à ceux qui ont opté juste- ment pour la différence des autres ?

En retard d'une guerre, la doctrine du marketing de la différence arriva au moment même où un marketing de l'imitation devenait nécessaire.

1. « Globalement, il se produit une homogénéisation du mode de vie : les individus consomment les mêmes types de produit. Toutefois la qualité et les quantités de biens et services consommés diffèrent très fortement et sont révélatrices du maintien des dis- parités sociales. » (C. Nava, R. Bénad, J.-P. Jouve, V. Pieulle, D. Larue, A. Caillat, Éco- nomie, lre STT, Hachette).

2. David Ogilvy.

Quoi ? Copier sur ses petits camarades ! Une telle idée froissait les entre- preneurs européens et américains. Seuls les Japonais la pratiqueront. Avec les résultats que l'on sait.

Suivant un principe déjà largement utilisé aux États-Unis, les chefs d'en- treprise occidentaux préférèrent tenter d'accélérer artificiellement la consommation ou le renouvellement par une innovation prolifique, sou- vent intéressante, mais qui tourna peu à peu au gadget...

L'arrivée des baby boomers parmi les consommateurs et la mythologie de la Crise engendrée par les renchérissements pétroliers nous masquèrent la réalité : c'était le jeu économique qui avait changé.

D'un jeu à somme progressive, nous participions désormais à un jeu à somme nulle.

Phénomène brutal : en quinze ans, dans les pays occidentaux, la faible augmentation du pouvoir d'achat qui invite à « se contenter de ce que l'on a » et l'extension du chômage qui limite les ambitions, verrouillèrent les règles du jeu.

Phénomène décapant : pour progresser, pour survivre même, il fallait combattre, il fallait conquérir les positions adverses, il fallait vaincre. Les entreprises les meilleures se musclèrent, les autres disparurent.

Mais la société marchande fit preuve d'un remarquable dynamisme ; elle ne resta pas longtemps coincée dans l'univers qu'elle avait su créer et pro- téger mais qui désormais risquait de l'étouffer.

Par les délocalisations, elle assurerait le démarrage des pays de l'Asie du Sud-Est et de certains pays d'Amérique latine1.

Par la destruction du rideau de fer, elle coloniserait des terres nouvelles dont certaines verraient rapidement progresser leur produit national brut.

Par une ouverture des ententes économiques, en Europe comme aux Amériques ou en Asie, elle faciliterait les échanges.

1. Ce qui est perçu par certains hommes politiques comme la cause de la situation dif- ficile dans laquelle se trouve l'économie française est en réalité, paradoxalement, l'un des remèdes à cette situation. C'est bien ainsi d'ailleurs que le vivent les chefs d'entre- prise qui « délocalisent » et ceux qui vendent aux pays du Sud-Est asiatique et d'Amé- rique du Sud.

À terme, elle s'assurerait ainsi de nouveaux débouchés. Recréant, au niveau mondial, un jeu à somme progressive.

Mais jamais plus, elle ne retrouverait le jeu de guerre fraîche et joyeuse des Trente Glorieuses !

Puis vinrent les barbares...

Pendant les Trente Glorieuses, en Europe, dans la plupart des secteurs d'activité, « le marketing ressemblait à un club chic »'. S'appuyant sur le mur de Berlin2, la concurrence obéissait à des règles tacites de bienséance, les entrepreneurs étaient gens du même monde et ils étaient d'accord pour se reconnaître trois adversaires : l'État qui entrave et ponctionne, les syn- dicats qui en veulent toujours plus et le consumérisme qui cherche la petite bête...

Puis vinrent les « barbares » : la distribution moderne et les Japonais.

Plus moyen de s'entendre : les entreprises occidentales découvrirent alors qu'elles étaient en guerre économique3. On parla beaucoup des Japo- nais, moins des Américains pour s'apercevoir finalement que l'adversaire était aussi le collègue de la Chambre Syndicale.

Davantage que les temps difficiles et la stagnation des marchés, ce sont ces nouveaux arrivants qui provoquèrent une prise de conscience parmi les chefs d'entreprise : ils comprirent qu'au jeu de whist avait succédé un sport de combat.

Avec de nouvelles règles qui nécessitaient d'adopter de nouveaux comportements.

Les cinq principes des maîtres du jeu

En quinze ans, nous avons vu s'effondrer des empires politiques et industriels. Nous avons vu naître de nouvelles nations et de nouvelles entreprises.

1. Didier Pourquery, « Clausewitz à la rescousse du marketing », Le Monde, 30 mars 1990.

2. Il est paradoxal mais vraisemblable que les Trente Glorieuses n'auraient pas pu exis- ter en Europe sans s'appuyer sur le rideau de fer : présence et soutien des États-Unis, paix...

3. Cf. lexique, « Âges du Marketing ».

Aujourd'hui, les jeux sont faits. L'heure est venue d'un premier bilan.

Peut-on dire que rien ne va plus ? Certainement pas. Au contraire, tout est en mouvement pour ceux qui adoptent les quelques principes qui guident le comportement marketing des nouveaux maîtres du jeu.

Principe n 0 1

Même dans l'expansion revenue des marchés, se comporter comme s'il s'agissait de marchés stagnants.

D'abord parce qu'à chaque moment, tout marché est un « marché fini », limité par les possibilités financières, structurelles ou psychologiques du pays ou du groupe de pays « à conquérir » à ce moment-là.

Ensuite parce que la concurrence est ou sera rapidement présente : concurrence de solutions domestiques bien enracinées dans les habitudes ou dans les structures commerciales, sociales ou politiques des pays convoités et concurrence des autres compétiteurs mondiaux.

Principe n 0 2

Se persuader, dès son entrée sur un marché, que le combat marketing est un combat pour la vie : dans la compétition internationale, ou je prends, par anticipation, les points de marché qu'un autre aurait gagnés, ou c'est lui qui les conquiert à mon détriment futur.

Dans un marché en expansion, si mes ventes augmentent moins vite que la progression du marché, je n'ai qu'une seule alternative : ou modifier rapidement cette situation ou me retirer avant d'être éliminé en ayant...

préparé la voie aux adversaires les plus virulents ! Principe n ° 3

Pendant la conception d'un produit nouveau et avant son lancement, se poser la question suivante : « Si mon innovation a du succès, combien de temps mes adversaires mettront-ils pour l'imiter ou pour lancer un produit concurrent ? »

Et tout faire pour retarder, biaiser ou contrecarrer cette inéluctable rencontre.

Principe n° 4

Pour entrer en lice, acquitter au minimum le « ticket d'entrée » en adap- tant son offre à l'offre-marché. C'est-à-dire lui donner au moins les qualités,

caractéristiques ou performances minimales exigées par le type de clientèle convoitée.

Veiller à ce que son offre soit compétitive non avec l'offre-marché telle qu'elle est au moment de sa conception mais telle qu'elle sera au moment du lancement.

Admettre une évidence : ce ne sont plus les « attentes » des clients qui créent l'offre de base, c'est la concurrence. Car dans un conflit, comme l'écrit Clausewitz, « chacun des adversaires fait la loi de l'autre ».

Principe n 0 5

Pour se donner des chances de vaincre, concevoir son offre de préférences, cette partie émergée de l'iceberg qui donnera à la clientèle des raisons de me choisir de préférence aux offres adverses, à mes offres-cibles.

L'expérience montre que les innovations techniques peuvent rarement servir d'offres de préférences. Elles sont dans la plupart des cas trop rapi- dement et facilement imitables. À la différence des offres de service, par exemple.

Le choix d'un soft drink pour un consommateur comme le choix d'un train à grande vitesse pour un gouvernement ne se fondent, à prestations

« techniques » équivalentes (l'offre-marché), que sur l'offre de préférences : image de marque pour l'un, image de service (avant et après-vente) pour l'autre.

Aujourd'hui, l'organisation des clients professionnels, le quasi-profes- sionnalisme des consommateurs, le maillage de plus en plus serré des réseaux d'information et de relations impose d'étudier très en amont la constitution de l'offre de préférences.

C'est le domaine privilégié des concepts, des méthodes, et des tech- niques du Marketing de Combat tels que les pratiquent les maîtres du jeu.

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