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Signatures observationnelles de la sédimentation des grains

4.4 Étude d’un disque circumbinaire

L’étude de l’anneau circumbinaire de GG Tau (section 3.4) semble indiquer qu’un disque stratifié est le modèle le plus simple pour expliquer l’ensemble des observations. Pour cela, nous avons eu besoin d’introduire une ségrégation des grains non seulement verticale mais aussi radiale.

Étude d’un disque circumbinaire 161

Figure 4.8 – Profils verticaux de température avec (courbe pleine) et sans sédimentation (courbe en tirets) à des distances de l’étoile dans le plan médian de 2 AU (à gauche) et 100 AU (droite).

Nous nous proposons ici de tester la validité de cette hypothèse, en nous appuyant sur une modélisation physique des processus de sédimentation et migration radiale des grains. 4.4.1 Distribution de poussière

Nous considérons donc le cas d’une étoile binaire entourée d’un disque. Nous choisissons des masses stellaires de M∗1 = 0.5 M et M∗2 = 0.65 M, un demi-grand axe a = 35 AU, une excentricité e = 0.25, une masse de disque Mdisque = 0.13 M (gaz) avec un rapport gaz sur poussière de 100. Nous nous concentrons dans cette partie sur les signatures en lumière diffusée. Notre étude de GG Tau dans le chapitre précédent a montré que nous n’étions pas sensibles aux grains plus gros que quelques microns. De ce fait, nous n’avons calculé les distributions spatiales que pour les tailles de grain 1, 2.5, 7.5, et 10 µm.

Sur la figure 4.9, sont tracées les distributions de densité dans le plan (r, z), pour trois tailles de grains : 1, 5 et 10 µm (de gauche à droite), dans le cas du disque circumbinaire. On observe que l’échelle de hauteur caractéristique diminue avec la taille des grains, comme l’on s’y attend en présence de sédimentation. La répartition radiale présente également des différences en fonction de la taille des grains3. Les grains de 1 µm s’étendent plus près de l’étoile que les grains de 5 et 10 µm, ce qui semble confirmer notre modèle analytique de stratification radiale et verticale (section 3.4.4) où les petits grains forment une couche qui entoure les parties centrales de l’anneau dans lesquelles les gros grains sont présents.

Cette distribution spatiale est liée au fait que le frottement aérodynamique du gaz sur les grains a pour effet de les faire migrer vers les zones de plus fortes densités. Les grains de 10 µm, plus perturbés par ce frottement, se dirigent plus rapidement vers le centre de l’anneau que les grains de 1 µm, ce qui produit le décalage observé.

Dans la figure 4.10 sont représentées, dans le cas du disque circumbinaire, les échelles de hauteur et densité en fonction de la taille des grains. La figure met en relief les résultats décrits ci-dessus, à savoir une échelle de hauteur qui décroît avec la taille des grains dans les zones externes de l’anneau et une densité de surface qui semble se décaler vers les plus grands

3Le bord interne obtenu dans les simulations est de quelques dizaines d’unités astronomiques, soit sensible-ment moins que le bord interne de GG Tau (180 AU). Cette différence est due au fait que les paramètres de la binaire ne correspondent pas à ceux de GG Tau et la déplétion des parties centrales du disque n’est donc pas identique. Cela introduit simplement un facteur d’échelle et ne modifie en rien les résultats présentés dans ce chapitre.

162 4.4.2 Images en lumière diffusée

Figure 4.9 – Densité de la poussière dans le disque circumbinaire dans le plan (r, z) en fonction de la taille des grains : 1 µm (panneau de gauche), 5 µm (centre) et 10 µm (droite). L’échelle de couleur est donnée en unité arbitraire mais est identique pour les trois panneaux.

100 200 300 400 0 10 20 30 40 50 60 70 r (AU) H (AU) 10 µm 7,5 µm 5 µm 2,5 µm 1 µm 50 100 200 300 400 10−7 10−6 10−5 10−4 10−3 r (AU)

Sigma (unites du code)

Figure 4.10 – Échelle de hauteur (à gauche) et densité de surface (à droite) pour les petits grains, de 1 à 10 µm dans le disque circumbinaire, 32 orbites après l’injection de la poussière.

rayons lorsque la taille des grains augmente. 4.4.2 Images en lumière diffusée

La figure 4.11 montre la comparaison des images synthétiques avec et sans sédimentation des grains, pour les bandes I, J, H et L’. Les différences entre les modèles avec et sans sédimentation sont importantes en particulier au niveau de la face arrière du disque. Comme dans le cas de la stratification analytique que nous avions utilisée, nous observons les petits grains au bord interne du disque. Ces derniers sont des diffuseurs isotropes et renvoient une fraction de lumière plus importante que les grains plus gros, dont nous détectons la lumière diffusée lorsque tous les grains sont bien mélangés.

Sur la figure 4.12 sont présentés les profils de brillance dans les cas avec et sans strati-fication. Nous avons également superposé les profils observés de GG Tau. Nous souhaitons souligner ici que les modèles ne sont pas un ajustement aux données, qui sont tracées comme référence afin d’étudier le comportement qualitatif de nos modélisations.

La prise en compte de la sédimentation va dans la bonne direction pour expliquer les observations de GG Tau. On constate en particulier que nous sommes essentiellement sensibles à la stratification radiale au niveau de la face arrière. La lumière provenant de la surface de l’anneau, qui correspond aux angles entre 0 et 90 d’une part et 270 et 360d’autre part n’est

Résumé et prochaines étapes 163 I J H L’ av ec sa ns st ra ti fic at io n st ra ti fic at io n

Figure 4.11 – Images synthétiques du disque circumbinaire sans (en haut) et avec stratification (en bas), dans les bandes I, J, H et L’, de gauche à droite.

en définitive que peu affectée par la sédimentation et les deux profils de brillance (avec et sans stratification) sont pratiquement identiques. La face arrière est en revanche sensiblement plus brillante dans le cas avec stratification, pour les raisons évoquées ci-dessus.

Il apparaît que la stratification calculée par le modèle hydrodynamique n’est pas tout-à-fait suffisante pour expliquer les profils de brillance. Cela est peut-être dû au temps relati-vement court sur lequel l’évolution dynamique est suivie, ou à des processus physiques qui conduisent également à une ségration spatiale des grains dans le disque et qui ne sont pas considérés ici, comme une croissance préférentielle des grains dans les zones les plus denses du disque.