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État de l’art des différentes approches de discrétisation des équations

CHAPITRE 2 LE MODÈLE DIRECT

2.2 Discrétisation du modèle physique et formulation matricielle

2.2.1 État de l’art des différentes approches de discrétisation des équations

Le choix de la méthode numérique pour modéliser les phénomènes électromagnétiques est très important et dépend du problème traité. Un mauvais choix peut conduire à des résultats erronés ou à des coûts de calcul trop importants. De nombreuses méthodes numériques ont été développées pour modéliser une grande variété de problèmes électromagnétiques. Cette science a pris le nom de Computational Electromagnetics. On peut citer par exemple l’optique ondulatoire (Physical Optics, Akhmanov et Nikitin (1997)) ou l’approche UTD (Uniform

Theory of Diffraction, Kouyoumjian et Pathak (1974)) qui sont des modèles valides pour de

très faibles longueurs d’ondes par rapport aux objets. En tomographie micro-ondes, les objets étudiés sont généralement de taille de l’ordre de grandeur de quelques longueurs d’onde. Comme vu précédemment, deux familles de méthodes numériques sont très fréquentes en TMO : les méthodes différentielles et les méthodes intégrales.

Ces deux types d’approche s’opposent sur un certain nombre de points que nous allons détailler :

— Le milieu de référence. Comme nous l’avons vu précédemment, on fait l’hypothèse dans la formulation intégrale que le milieu de référence est homogène (de nombre d’onde kb). La solution intégrale fait alors intervenir le tenseur de Green homogène. Avoir une configuration où le milieu de référence n’est pas homogène rend le problème bien plus complexe car cela requiert le calcul d’un tenseur de Green inhomogène qui perd les propriétés utiles (symétrie, convolution) du tenseur homogène. En revanche,

ce problème ne se pose pas pour les approches différentielles qui peuvent prendre en compte un milieu de référence hétérogène.

— Les conditions limites. La formulation intégrale fait l’hypothèse d’un milieu infini ce qui suppose que le milieu est ouvert : l’énergie des sources est supposée se disperser à l’infini (condition de rayonnement de Sommerfeld). Les méthodes intégrales sont donc bien adaptées pour les problèmes ouverts mais ne conviennent pas à des problèmes fermés comme des cuves métalliques par exemple. Au contraire, les méthodes différen- tielles prennent facilement en compte des contraintes de bords pour des milieux fermés. En revanche, considérer des milieux ouverts nécessitent l’introduction de conditions limites d’absorption qui compliquent le problème (Berenger, 1994). En conclusion, les méthodes intégrales sont mieux adaptées aux milieux infinis, tandis que les méthodes différentielles sont mieux adaptées aux milieux fermés.

— Le volume de discrétisation. Les approches intégrales considèrent uniquement le do- maine de l’objet pour la discrétisation : toute zone où le contraste est nul ne nécessite pas d’être prise en compte. Cela se remarque dans les équations (2.11) et (2.12) où l’intégrale n’agit que sur le volume V où le contraste est non nul. Ce volume à discré- tiser est donc restreint aux inhomogénéités dans l’espace. Au contraire, les approches différentielles nécessitent de prendre en compte aussi bien le volume des objets que les sources et les récepteurs. Cela revient en général à discrétiser un volume bien plus conséquent contenant tout le dispositif d’acquisition. Pour des problèmes 3-D de grande taille, le nombre de voxels peut rapidement exploser avec les méthodes différentielles.

— Les quantités matricielles. L’équation intégrale du domaine (2.12) montre que le cal- cul du champ total en un point nécessite de connaître celui-ci sur tout le volume V . Lors de la discrétisation dans les méthodes intégrales, cela implique que les quanti- tés matricielles intervenant dans le modèle numérique sont pleines (c’est-à-dire avec peu de valeurs nulles). L’espace mémoire nécessaire pour stocker ces quantités peut être conséquent. On verra dans la suite qu’il est tout de même possible de réduire l’espace mémoire en profitant des propriétés de convolution du tenseur de Green. Au contraire, les méthodes différentielles sont basées sur une approximation locale des opérateurs différentiels. Cela implique que le champ total en un point ne dépend que de son voisinage. Algébriquement, les quantités matricielles impliquées dans un modèle numérique différentiel sont alors creuses (c’est-à-dire contenant beaucoup de valeurs

nulles). L’espace mémoire nécessaire s’en retrouve réduit et des algorithmes adaptés à des problèmes parcimonieux peuvent être appliqués.

Parmi ces deux grandes familles, nous pouvons citer quelques méthodes numériques utilisées en TMO. Davidson (2010) détaille certaines de ces méthodes. Pour les approches intégrales : — la méthode des moments (MoM) (Harrington et Harrington, 1996; Maniatis et al., 2000; Zhang et al., 2003a; Hu et al., 2005; Franceschini et al., 2005; Eyraud et al., 2009; De Zaeytijd et Franchois, 2009; Pastorino, 2010; Barrière et al., 2011; Rubaek et al., 2011; Oliveri et al., 2012; Abubakar et al., 2012a; Estatico et al., 2013)

— la méthode Discrete Dipole Approximation (DDA) (Goodman et al., 1991; Draine et Flatau, 1994; Chaumet et al., 2004; Yurkin et Hoekstra, 2007; Meaney et al., 2012; Grzegorczyk et al., 2012; Flatau et Draine, 2014)

— Fast Multipole Method (FMM) (Geng et al., 1999; Darve, 2000; Wu et al., 2005) Pour les approches différentielles :

— la méthode des différences finies (FDM) (Zainud-Deen et al., 2008; Abubakar et al., 2008a; Fhager et al., 2009; Gilmore et al., 2009a; Fang et al., 2010; Golnabi et al., 2011; Al Sharkawy et El-Ocla, 2013)

— la méthode des éléments finis (FEM) (Rekanos et Tsiboukis, 1999; Fang et al., 2004; Soleimani et al., 2006; Meaney et al., 2007; Zakaria et al., 2010; Zakaria et LoVetri, 2011)

Comme nous venons de le voir, le choix du type d’approche dépend grandement du problème à traiter. Bien que les deux types soient applicables théoriquement pour la modélisation en TMO en 3-D, il est plus fréquent de trouver des modèles numériques basées sur des approches intégrales. Nous avons donc fait le choix d’utiliser un schéma numérique basé sur la méthode des moments. Plusieurs arguments justifient ce choix. Tout d’abord, nous disposons déjà d’une expertise concernant les méthodes intégrales dans le département de Génie Électrique de l’École Polytechnique Montréal et au laboratoire IRCCyN de l’École Centrale de Nantes à travers la thèse Barrière (2008) qui utilise un modèle numérique basée sur la méthode des moments en 2-D. Le développement d’un modèle 3-D semble donc naturel. De plus, nous nous sommes intéressés à la base de données Fresnel dont la difficulté pour reconstruire certains objets est un réel défi. Le montage d’acquisition et le problème à traiter ne permettent pas d’utiliser facilement des approches différentielles. Le choix d’une méthode intégrale était donc indispensable. Le choix de la méthode des moments semblait alors le plus judicieux.

Nous allons maintenant voir l’application de la méthode des moments pour la discrétisation des équations intégrales en TMO.