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Sur le plan opératoire, l’analyse prend corps au fil de six étapes : la codification, la catégorisation, la mise en relation, l’intégration, la modélisation et la théorisation. Chacune de ces étapes est présentée ici.

La codification correspond à l’étiquetage des données présentes dans le corpus initial sous la forme empirique. Il s’agit de résumer, thématiser le propos développé à l’intérieur du corpus. Le chercheur procède à une lecture attentive du corpus et tente de qualifier par des mots ou des expressions le propos d’ensemble. À cette étape, le chercheur répond aux questions : « Qu’est-ce qu’il y a ici? Qu’est-ce que c’est? De quoi est-il question? » (Paillé, 1994 : 154; en italique dans le texte). Le travail de codification initial est d’une grande importance pour la suite de l’analyse, qu’il fonde en partie.

La seconde étape de l’analyse, la catégorisation, consiste en un nouveau codage du corpus avec un outil conceptuel plus riche : la catégorie. C’est un mot ou une expression désignant, à un certain niveau d’abstraction, le phénomène perceptible dans un corpus de données. Ici, il s’agit de porter l’analyse à un niveau théorique en nommant de manière plus riche ce phénomène. Dans un premier temps, le chercheur doit dresser la liste des catégories formées lors de la codification. Dans un second temps, il doit effectuer une nouvelle lecture des documents analysés en inscrivant des catégories à la place des codes. Les questions auxquelles il doit répondre sont : « Qu’est-ce qui se passe ici? De quoi s’agit-il? Je suis en face de quel

phénomène? » (Paillé, 1994 : 159; en italique dans le texte). Pour ce qui est des principales

catégories, le chercheur doit les définir, décrire leurs propriétés, spécifier leurs conditions d’existence et identifier leurs diverses formes et dimensions possibles (intensité, durée) (Glaser et Strauss, 1967; Méliani, 2013; Paillé, 1994).

Notons que le processus de théorisation commence au moment de la catégorisation. Celle- ci sera travaillée pendant tout le processus de conceptualisation et donc pourra être modifiée au cours de l’analyse. Pierre Paillé soutient qu’il est concevable qu’un travail d’analyse se termine avec cette seconde étape (Paillé, 1994). Le chercheur devrait alors être en possession de suffisamment de résultats afin de produire un compte-rendu riche et détaillé du phénomène étudié. Ce compte-rendu prendrait notamment la forme d’une typologie ou d’une description thématisée.

Comme son nom l’indique, la troisième étape consiste à mettre en relation les différentes catégories créées. Il s’agit pour le chercheur de trouver des liens entre celles-ci. En pratique, la mise en relation a déjà débuté lors de la catégorisation, il s’agit maintenant de la systématiser

en répondant à des questions telles : « Ce que j’ai ici est-il lié avec ce que j’ai là? En quoi et

comment est-ce lié? » (Méliani, 2013 : 441; en italique dans le texte). Ces questions se posent

à deux moments : lors du recueil des données (la mise en relation de deux phénomènes se fait déjà) ou au niveau conceptuel (la mise en relation se fait par le chercheur lui-même) (Méliani, 2013). Ceci suppose donc la comparaison des catégories d’analyse. Il faut de fait les examiner une à une en ayant en tête ces mêmes questions.

Cette étape de la mise en relation est déterminante dans une analyse par théorisation ancrée puisqu’elle permet de passer de la simple description à l’explication des données, poussant ainsi l’étude d’un phénomène encore plus loin.

L’étape de l’intégration est capitale et permet un saut dans la compréhension et dans la délimitation de l’objet d’étude. Concrètement, il s’agit de dépasser les différents phénomènes observés sur le plan concret pour voir émerger un phénomène général. Les questions à se poser sont : « Quel est le problème principal? Je suis devant quel phénomène en général? Sur

quoi mon étude porte-t-elle en définitive? » (Méliani, 2013 : 441; en italique dans le texte).

Elle est également très liée à l’étape précédente puisqu’en mettant en relation les catégories, la dynamique sous-jacente émergera plus distinctement pour le chercheur.

Une fois le phénomène général saisi, l’analyse se poursuit à un niveau d’abstraction encore plus élevé par la modélisation. Ici, il s’agit de reproduire l’organisation des relations caractérisant un phénomène. Le chercheur s’interroge sur la manière dont le phénomène se dévoile, ses propriétés, ses causes et ses conséquences, les enjeux qui en découlent (Glaser et Strauss, 1967; Méliani, 2013; Paillé, 1994). Il ne s’agit pas de construire un modèle général,

mais simplement de représenter schématiquement les processus mis au jour au cours des opérations précédentes.

Dans la dernière étape du processus analytique, la théorisation, il s’agit de formuler une théorie tout en ayant à l’esprit que cette dernière ne sera jamais achevée. La théorisation « doit permettre de saisir la complexité du phénomène tant du point de vue conceptuel qu’empirique de ses mises en situation » (Méliani, 2013 : 442). Cette dernière étape est davantage un processus qu’un résultat à atteindre. Elle est davantage un rappel de l’importance de la fiabilité de la théorisation effectuée. Diverses opérations peuvent être mises en œuvre ici afin de renforcer la théorie émergente et affaiblir les explications pouvant en diverger. Comme nous l’avons mentionné, les opérations de la théorisation ancrée relèvent d’un processus itératif. Celui-ci ne peut être retranscrit dans la linéarité de notre mémoire. Afin de favoriser une bonne écriture ainsi qu’une facilité dans la lecture de ce travail, nous avons réorganisé l’ensemble de notre analyse. Dans la section qui suit, nous présentons notre système conceptuel. Dans le prochain chapitre, nous exposerons la mise en relation de nos catégories afin de présenter quatre « modèles » nous permettant de faire une proposition de notre compréhension du phénomène de l’entrée dans la vie adulte tel que représenté dans Yamaska et d’amener cette proposition à un niveau théorique.

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