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3.4 Équations hydrodynamiques

En l’état, nous ne pouvons pas utiliser les équations de bilans (3.15), (3.20) et (3.24), car elles sont pour l’instant dépourvues de relations de fermeture ou autrement dit, d’équations constitutives. En effet, les équations de bilans de quantité de mouve-ment et d’énergie interne font intervenir le tenseur des contraintes visqueuses P et le flux de chaleur par conduction q. Or, ces quantités sont des moments de la fonction de distribution f, dont le calcul nécessite d’en connaître l’expression. Il nous faut donc déterminer une forme pertinente de f pour en déduire P et q et ainsi donner aux équations de bilan précédentes un sens physique, celui des équations hydrody-namiques. Pour trouver une forme pertinente pour f, nous suivrons la démarche de Chapman et Enskog, présentée ici.

Rappelons d’abord que le comportement hydrodynamique d’un fluide nécessite la séparation des échelles micro/macro. Cette séparation, caractérisée par un nombre de Knudsen (Kn = λ/L) petit, implique que le fluide soit toujours très proche de l’équilibre thermodynamique local.

Pour de tels systèmes, proches de l’équilibre, il semble naturel d’utiliser la théorie des perturbations. C’est ce qui est fait dans le développement de Chapman-Enskog, qui consiste en un développement perturbatif de la fonction de distribution f, autour de l’équilibre local feq.

Le petit paramètre ǫ utilisé dans le développement devant refléter la séparation des

échelles, il pourra être assimilé au nombre de Knudsen. De plus, nous supposerons

que f ne s’écarte que linéairement de l’équilibre1. On écrira donc f sous la forme suivante :

f = f(0)+ f(1), (3.25) où f(0) est d’ordre ǫ0 = 1 et f(1) d’ordre ǫ, on à donc f(1) ≪ f(0) et f(0) ≡ feq. À l’ordre zéro en ǫ, pour f = feq, les contraintes visqueuses Π(0) et le flux de cha-leur q(0), moments associés de la distribution de Maxwell-Boltzmann, sont nuls. On parle donc, à cet ordre, d’hydrodynamique non dissipative et les équations hydro-dynamiques associées sont les équations d’Euler.

À l’ordre 1 en ǫ, la contribution aux contraintes visqueuses P(1)et au flux de chaleur q(1) sont les moments associés de la distribution f(1), dont nous ne connaissons pour l’instant pas l’expression. Tachons donc d’évaluer l’ordre de grandeur de cette partie

1. Il faut en effet se demander ici, s’il est justifié de poursuivre le développement de f au-delà de l’ordre en ǫ. En effet, étant donné la petitesse de ǫ ≡ Kn, le fluide doit se trouver très proche de l’équilibre et son éloignement à celui-ci devrait donc se limiter à une réponse linéaire. Néanmoins, des développements à des ordres supérieurs sont pratiqués et débouchent sur les systèmes d’équa-tions de Burnett [GCVU08,BL08,XJS01,XL04] (limitées à des nombres de Knudsen Kn≤ 0,1 pour les premières (cf. [XJS01])) et Super-Burnett [Xu03]. Ce problème dépasse le cadre de cette thèse et nous nous limiterons au cas de la réponse linéaire, qui est suffisant pour obtenir les équations de Navier-Stokes-Fourier.

3. Limite hydrodynamique de l’équation de Boltzmann 38 hors équilibre de f. Sachant que la longueur caractéristique macroscopique de notre système est L et considérant la vitesse du son cs comme vitesse caractéristique, nous pouvons approximer la partie transport de l’équation de Boltzmann (2.42) par :

Lf ∼ cs

Lf. (3.26)

Ainsi, nous aurons :

cs

Lf ∼ −τ1(f − feq), (3.27) soit, en remplaçant f par son développement perturbatif (3.25) :

cs Lf (0)+cs Lf (1) ∼ −1 τ(f(0)+ f(1) − feq), (3.28) qui selon les hypothèses f(1)≪ f(0) et f(0) ≡ feq, donne :

cs

Lf

eq ∼ −1

τf

(1). (3.29)

Cette expression nous permet d’écrire :

f(1) ∼ −τ cs

L f

eq = −Knfeq, (3.30) car τcs = λ est le libre parcours moyen des particules. On montre ainsi que f(1)

est bien d’ordre ǫ ≡ Kn, et que ce développement ne sera valide que dans la limite hydrodynamique.

Formellement, nous écrirons finalement : Lfeq= −1

τf

(1), (3.31)

ou encore :

f(1) = −τ (∂t+ v · ∂x+ g · ∂v) feq, (3.32) à l’ordre d’approximation considéré.

L’équation (3.32) nous permet alors de calculer les contraintes visqueuses P(1) et le flux de chaleur q(1), moments associés de la distribution f(1), car l’expression de

feq est connue. Après quelques calculs, relativement techniques (voir par exemple Pottier [Pot07] ou Wolf-Gladrow [WG00]), on obtient :

P(1) = −ρνΛ, (3.33) avec ν = θτ la viscosité cinématique et Λ le tenseur déviatorique, tel que :

Λαβ = ∂αuβ+ ∂βuα2

39 3.4. Équations hydrodynamiques Le Tenseur des pressions est finalement P = P(0)+ P(1) :

P = ρθI − ρνΛ, (3.35) la viscosité de volume est donc nulle.

Et pour q(1) ≡ q :

q= −D+ 22 ρα∇θ. (3.36) Dans cette expression, α = θτ, est la diffusivité thermique et le facteur (D + 2)/2 =

Cp, est la capacité calorifique pour un gaz monoatomique.

Pour ce développement de f, au premier ordre en ǫ, les équations hydrodynamiques obtenues sont celles de Navier-Stokes-Fourier, valides pour les fluides dissipatifs,

i.e. visqueux et conducteurs de la chaleur.

On remarquera que dans l’approximation du temps de relaxation, la viscosité ciné-matique (diffusion de quantité de mouvement) et la diffusivité thermique sont égales. Le nombre de Prandtl Pr = ν/α sera donc égal à l’unité.

Une autre méthode pour déterminer une forme pertinente pour f a été proposée par H. Grad [Gra49b, Gra49a]. Elle consiste à rechercher des solutions de l’équa-tion Boltzmann-BGK projetée sur la base des polynômes d’Hermite. La méthode de Grad permet de déterminer des équations pour le tenseur des pressions et le flux d’énergie, formant, avec les équations de bilan (3.15), (3.20) et (3.24) ce que l’on appelle la théorie des 13 moments de Grad. Nous n’entrerons pas ici dans les détails du développement de cette théorie, mais utiliserons le développement selon les poly-nômes d’Hermite. Car comme cela a été proposé récemment par Shan et He [SH98] (voir [ZSC06] pour une présentation plus simple de la méthode) et comme nous le verrons, partir d’un tel développement permet d’étendre les méthodes de Boltzmann sur réseau (LBM) au régime transitionnel. La démarche de développement des LBM proposée par Shan et He présente certains intérêts pour l’hydrodynamique. Notam-ment, pour corriger un défaut d’invariance galiléenne des schémas LBM [NSC08] ou encore supporter la thermique (voir en priorité les travaux de Karlin, Bardow et Ansumali). Signalons enfin que cette démarche n’a pour l’instant été que très peu exploitée pour étendre les LBM aux écoulements microscopiques. Les principaux travaux effectués en ce sens (principalement par Kim [KPB08a, KP08, KPB08b] et Ansumali [CAK06, AKFB06], bien que Ansumali ne développe pas la fonction d’équilibre de la même façon) sont tous basés sur l’utilisation d’une quadratique de Gauss-Hermite d’ordre 4 (que nous appellerons H4).

L’analyse systématique des différents ordres réalisée dans cette thèse est inédite. Cette analyse nous permettra par ailleurs de proposer un nouveau type de schémas, que nous qualifierons de composites. Ces schémas seront introduits pour accélérer la convergence de la procédure de Shan et He, que nous verrons être lente.

3. Limite hydrodynamique de l’équation de Boltzmann 40