• Aucun résultat trouvé

L’ÉNERGIE DU TRIDENT

En 1965, René Kichenin fonde un hebdomadaire d’informations et d’opinions nommé Trident124. Il en rédige les éditoriaux et confie à des amis d’enfance la responsabilité du reste des articles : Paul Cérou, Joseph Varondin, Paul Hoarau, Raymond Lauret…

RK : De temps en temps des gens que je ne connaissais pas participaient à un numéro. Je leur passais un billet.

J’ai interrogé à ce sujet, Paul Hoarau (PH) qui était à la fois éditeur et l’un de ses rédacteurs, Joseph Varondin (JV), Saminadin Axel Kichenin (SAK) et René Kichenin lui-même.

SAK : René est rentré à La Réunion le 6 février 1964. Un petit peu plus d’un an après, il sort un organe de presse Trident. C’était un hebdomadaire à la fois d’opinion mais aussi culturel avec des pages culturelles indianistes. Vous savez, à l’époque, tout ce qui n’était pas de confession catholique n’avait pas accès aux journaux, que ce soit la radio qui était officielle et la télévision pareillement et la presse était très catholique. Il y avait Témoignages, qui était l’organe du parti communiste et le Journal de l’île de La Réunion, Martin Darène125, qui était de confession très, très, catholique. Il n’y avait pas de place pour tout ce qui était de confession autre que celle-là, et en particulier la confession tamoule ou hindoue à propos de laquelle nous aurons l’occasion de reparler.

Il sort ce journal qui a été à l’époque très décrié. Il a pris des coups pour cela parce qu’il a heurté la bourgeoisie bien pensante de l’île. On le voyait comme quelqu’un qui s’intégrait au corps de la bourgeoisie réunionnaise. Il était avocat…On comprenait mal l’affichage d’une indianité comme cela, venant d’un intellectuel.

FC : Vous voulez dire qu’une fois qu’on était entré dans la bourgeoisie, on n’avait plus le droit de….

SAK : De l’afficher du moins. On pouvait le pratiquer, mais en marge de la société officielle.

Et d’ailleurs beaucoup le faisaient comme ça, dans la communauté. Il a eu du courage. Ça, il faut le reconnaître. C’était un acte courageux. Je l’ai bien dit. Il a pris des coups pour ça. Ça sortait le samedi, d’ailleurs, ce qui était bien. Les gens aimaient son éditorial, comme il avait une belle plume, même ceux qu’il attaquait, appréciaient parce que c’était très pesé, réfléchi.

FC : Vous lisiez « Trident » ?

SAK : J’étais passionné ! J’avais 15 ans et j’attendais le samedi avec empressement. Comme je vous dis, il a une belle plume. C’est un latiniste. J’ai connu des aînés qui allaient vendre Trident parce qu’il était peu distribué, il était vendu, comme ça, en porte à porte.

FC : Quel était son tirage et quel impact ce journal a-t-il pu avoir auprès de ses lecteurs126 ? SAK : C’était un peu distribué mais les gens avaient peur de s’abonner127 à Trident. Il n’avait pas beaucoup d’abonnés et c’était presque vendu en sous-main à la porte des gens. C’étaient des militants. Ils se faisaient jeter même chez les Indiens.

124 Le directeur de publication était son oncle, monsieur Mardénalom Emmanuel. Le bureau du journal était au 60 bis rue Jules Auber à Saint Denis.

125 René Martin Darène

126 RK : « Deux mille tirages. Même les Petits et les Gros Blancs lisaient. »

127 RK : « Beaucoup de gens ne voulaient pas recevoir Trident dans leur boîte aux lettres parce que leur courrier était contrôlé par leur patron. »

FC : Même chez les Indiens ?

SAK : Surtout chez les Indiens.128 C’est pour dire le type de société dans laquelle on évoluait.

Une société de peur,129 d’angoisse de s’afficher, d’afficher une opinion.

FC : Pendant combien d’années avez-vous publié Trident ? RK : De 1965 jusqu’en 1969.

FC : Quatre ans de publications hebdomadaires. Vous aviez une équipe ? RK : Oui ! Il y en avait à droite, à gauche, d’autres au centre…

FC : Vous avez eu l’idée de créer ce journal et de mettre ensemble des journalistes de trois bords différents.

RK : C’est la tolérance, l’ouverture ! Vous pouvez vous exprimer.

(Rires)

FC : Pourquoi avez-vous choisi le nom de Trident ? C’est lié à la Trimurti130.

RK : Oui, le trident est l’arme de Shiva. De Gaulle a eu une citation sur Trident dans La Voix des Mascareignes,131 un journal d’extrême droite. Le Directeur de La Voix des Mascareignes a mis ça exprès à mon intention que De Gaulle a dit : ‘Trident c’est la fleur de lys.’

FC : ‘Trident c’est la fleur de lys.’ ? RK : Oui ! Vous pouvez trouver ça ! FC : Je vais chercher.

RK : Trouvez-moi ça dans la Voix des Mascareignes. De Gaulle a dit : ‘Trident, c’est la fleur de lys !’132

FC : Et sur Trident, il y avait un dessin de trident133 ? RK : Oui, trisula.134

FC : Qui l’avait dessiné le trisula ? RK : Moi-même.

Quelques mois plus tard, en janvier 2013, j’ai lu dans le Trident N°17, du 1er au 15 juillet 1966, à la page 2, une mise au point de M Sangeelee qui souhaitait combler l’absence d’explications données aux lecteurs jusqu’à cette date du mois de juillet 1966 alors que le journal existait depuis déjà un an, à propos du sens profond du titre qui lui a été donné, Trident : « Le trident nous rappelle que si nous voulons le salut de l’âme, nous devons extirper de notre cœur ces trois défauts. La luxure qui ruine la santé et sape la morale, la haine qui engendre des pêchés plus graves, mensonges, calomnie, délation, meurtre… et enfin l’avarice qui est de ces trois défauts le plus méprisable pour un Tamoul. Nous devons implorer l’aide de Sivèn si nous voulons nous débarrasser de ces défauts. Puisque les Tamouls de La Réunion, ont choisi le trident pour emblème, ils ne doivent pas perdre de vue l’enseignement qui se dégage de cette arme sacrée. Il est dans la nature du Tamoul de

128 RK : « Ceux qui étaient de l’autre bord, ceux qui avaient peur de l’administration et ceux qui avaient peur des groupes financiers avec qui ils travaillaient, « Sucreries de Bourbon », banques… »

129 RK : « Courber l’échine… »

130 Le trident (Trisula) porte le nom de Vijaya (Victoire). Il matérialise les trois fonctions de la Trinité : la Création ; la Préservation ; la Destruction. Il détruit le mal et l’ignorance.

131 Un hebdomadaire d’informations politiques et sociales.

132 Charles de Gaulle a effectivement dit : « La France fut faite à coups d’épée, la fleur de lys, symbole d’unité nationale n’est que l’image d’un javelot à trois lances. » L’aspect trinitaire de ces deux symboles associés par Charles de Gaulle prend ici toute son importance, celle de deux emblèmes de pouvoir. En France, le centre de la fleur de lys représentait la Loi et la foi des Chrétiens soutenues et gardées par sagesse (connaissance) et noblesse, pétales latéraux, mais la fleur de lys comme Trident expriment au sein de nombreux peuples d’Europe et du Moyen-orient, la fécondité spirituelle autant que le pouvoir souverain. Il faut savoir aussi qu’une vaste opération militaire française pendant la Guerre d’Algérie a porté le nom de « trident » faisant certainement plus allusion au trident poséidonien, lié à la mer, qu’au trident shivaïte.

133 Voir le logo du Trident sur la photographie ci-jointe, d’un numéro dédié à l’Indépendance de l’île Maurice.

134 Le trisula (trident) est le symbole de la Trimurti : Brahma - Shiva - Vishnou.

prendre ce qu’il y a de beau ou de bon, là où il se trouve. Yâdoum ouvê yâvavoum kêlir : Le monde est ma patrie et l’humanité ma parenté. »

FC : Comment aviez-vous recruté vos journalistes ? RK : Je les connaissais ; c’étaient des camarades de lycée.

FC : C’était une équipe de copains. Vous souvenez-vous des noms ?

RK : Paul Cérou écrivait sur la politique étrangère (Che Guevara, c’était lui !) ; Il n’est plus là mais je tiens à lui rendre hommage parce qu’il a été mon bras droit. Il nous a quitté et je garde de lui un excellent souvenir. Son combat à mes côtés dans tous les domaines restera à jamais gravé dans ma mémoire.

AK : La femme de Paul Cérou est la marraine de Gilles.

RK : Pour le sport, c’était un grand monsieur du Port, M Raymond Lauret. Sa chronique sportive avait beaucoup de succès. Elle était très lue. Il y avait aussi Joseph Varondin. Il a une belle plume due à sa culture gréco-latine. Cette plume peut être parfois dure.

Habituellement, je ne lisais pas tous les articles. Un jour, j’étais habitué à dire bonjour tout le temps à quelqu’un jusqu’au jour où il passe devant moi et ne me dit plus bonjour… Jusqu’au jour où je reçois un coup de fil. Quelqu’un me dit : ‘C’est pas gentil ce que Trident a dit !’ La fille de ce monsieur s’était présentée pour un concours de beauté, de miss. Varondin lui a

« coupé la tête » ! Alors, je lui dis : ‘Mais qu’est-ce que tu as fait ? Je connais bien ce monsieur…’etc. J’ai désapprouvé. Ce n’est pas facile même si on était à trois, pas plus ! Varondin me dit : ‘Je vais rectifier le tir en disant que ma rétine était trop imprégnée d’alcool.’ Le remède était pire que le mal fait.

FC : C’était trop tard.

RK : C’était trop tard bien sûr. Je lui ai dit : ‘Surtout ne dis rien de plus ! Ne dis pas ça !’

FC : Vous aviez donc une rubrique sportive, une rubrique politique et le troisième écrivait sur quoi ?

RK : Moi c’était l’édito que je faisais. Et vers la fin, il y avait aussi Philippe Poninbalom qui écrivait. Il a écrit avec nous de 1967 à 1969. (Photo n°13)

FC : Quels thèmes vous abordiez dans l’éditorial ?

RK : Tout ! Mais surtout la philosophie, la réflexion ; j’aimais ça ! Le but était de faire reconnaître les droits humains de tout le monde, en particulier des Tamouls. Trident était très lu.

FC : Il était très lu à Saint-Denis ou partout dans l’île ? RK : À Saint-Denis, surtout.

FC : Il y avait combien de feuillets ? RK : Deux. C’était une feuille de chou135 ! FC : Et où le faisiez-vous imprimer ? RK : Au Progrès de Paul Hoarau*.

JV : Un jour, on s’est dit : ‘Il nous faut un organe de presse.’ Il y avait un petit journal Hebdo-Bourbon qui nous prêtait des colonnes de temps à autre, dirigé par un Zorèy qui avait sévi au J.I.R. et avait eu la sympathie de nous ouvrir ses colonnes. C’était la première fois où une gazette donnait droit à la communauté la parole publique. Il nous encourageait à avoir un journal propre non pas à la communauté mais à notre groupe et on a fondé Trident. Jamais un petit bout de papier n’a autant mis mal à l’aise les autorités préfectorales et parisiennes. Nous étions surveillés à chaque mot qu’on écrivait.

FC : Comment avez-vous contacté Hebdo-Bourbon ?

135 À signaler que cette année-là, le Journal de l’île n’était composé d’à peine quatre pages, au plus, deux pages d’articles et deux pages de petites annonces classées.

JV : René a contacté Hebdo-Bourbon qui d’ailleurs cherchait de la clientèle parce que face au J.I.R. qui était pour Debré à 100%, les autres n’avaient pas beaucoup droit à la parole. L’envie d’écrire nous a toujours titillés à tel point qu’on s’adressait au J.I.R. qui ne nous publiait jamais. Témoignages nous a publié très rarement et le Quotidien est venu après la disparition de Trident et lui nous a publiés assez souvent.

FC : Vous souvenez-vous des articles que vous avez écrits dans Trident ? J’ai cherché votre nom mais sans succès. Vous ne signiez pas ?

JV : Personne ne signait. René non plus je crois.

FC : Quelquefois si, mais de moins en moins. Au fil des années, les signatures disparaissent.

Comment expliquez-vous ça ? Vous aviez peur ? JV : Peur, pas pour moi, mais pour ma famille.

Moi je suis une victime de l’ordonnance de Debré. J’ai fait de la coopération à Madagascar, avant j’étais au Maroc dans le cadre du Ministère des affaires étrangères, et après en Côte d’Ivoire dans le cadre du Ministère de la coopération. D’ailleurs ma fille aînée est née à Abidjan et ma fille cadette est née à Madagascar et elles ont mille problèmes pour faire reconnaître leur nationalité française alors qu’elles ont toutes deux été déclarées à l’Ambassade de France aussi bien à Abidjan qu’à Tananarive et bien que leur mère soit à 100% zorèy. Toujours est-il que quand Vergès demande l’autonomie vers 1959 par là (j’étais à Madagascar de 1960 à 1963), je suis viré de Madagascar sur l’intervention de l’Ambassade de France qui a trouvé comme tout le monde que j’étais anti-français. Du moment qu’on est nationaliste, on est perçu comme anti-français. Et surtout j’étais ami des gens de l’opposition.

J’avais connu Richard Andriamanjato qui était président du conseil municipal de Tana. Il n’y avait pas encore de maire à Tananarive. Nous nous sommes connus à Strasbourg. Il faisait ses études de théologie à la faculté protestante de Strasbourg et moi je faisais sciences-po. (…) Ça n’a pas plu à la présence française à Madagascar et ils n’ont pas renouvelé ma nomination.

J’ai entendu parler de l’autonomie et j’ai décidé de revenir à La Réunion parce qu’on a besoin de nous. Dans le cadre de cette autonomie, il faut quand même que les Réunionnais qui sont allés à l’Université se mettent au service de ceux qui ne sont pas allés à l’école. Entre temps, l’alliance française m’offre un poste de professeur au lycée Labourdonnais à Curepipe. Mon cœur balance entre La Réunion et Maurice. Finalement, je me suis dit qu’en tant que nationaliste, il fallait rentrer à La Réunion. À l’époque pour être affecté en Afrique, à la coopération et à La Réunion, on subissait ce qu’on appelait une enquête administrative qui en réalité était une enquête policière. J’ai subi cette enquête alors que j’habitais à Nice pendant l’été 1963 au Commissariat de la rue Maréchal Foch, dans laquelle j’habitais. J’ai eu quand même une affectation au lycée Juliette Dodu, au mois de juillet, et un mois après, cette affectation a été annulée. Je me suis retrouvé sans poste, sans rien, en plein été. Paris, c’est la fermeture totale. Il n’y a plus que les huissiers dans les ministères. Je me suis dit : ‘Puisque c’est comme ça je rentre à la kaz.’ On ne m’a pas dit que j’avais déserté mais tout juste. Mes dossiers avaient disparu. Au moment de ma réintégration, sous Mitterrand, heureusement que j’avais avec moi mes documents de prise de poste dans chaque établissement, aussi bien au Maroc, qu’en Côte d’Ivoire, et qu’à Antsirabe et c’est un ami sénateur qui s’appelait Jacques Pelletier qui est intervenu. Il m’a aidé à reconstituer ma carrière. J’avais donc cette menace sur ma tête et en plus mon épouse n’était pas titulaire dans un service de la santé. De temps en temps elle était convoquée par un certain Jean Cluchard dans son bureau qui lui disait :

‘Madame, votre mari est un anti-Français, un suppôt du communisme (alors que je n’ai jamais été communiste de ma vie). Si ça continue, je vous fais rentrer en France !’ - ‘ Vous ne pouvez pas m’exclure d’un pays français. Et les partis communistes que ce soit en Europe ou ailleurs ne sont pas bannis. Donc il ne serait pas un hors-la-loi !’ Une fois, deux fois jusqu’au jour où ma femme va voir mon père qui va voir qui de droit dans les hautes sphères qui lui dit : ‘Si Cluchard continue, il va recevoir une balle.’ Cluchard est convoqué. Les

menaces ont été terminées mais il y avait toujours cette pesanteur de la dictature de l’époque.

Ce qui fait qu’écrire, pour nous, surtout ceux qui étaient déjà fonctionnaires… L’ordonnance Debré pouvait jouer à tout moment. Moi ils ne pouvaient plus ; j’étais déjà rayé des cartes.

Notre nom ne figurait pas. Paul Cérou, un vieux de Trident, non plus. René encaissait. Il avait toujours les R.G.136 sur le paletot. Et comme je le dis, jamais un petit papier n’a fait trembler autant la Préfecture et mis mal à l’aise Paris. Il a été éphémère le Trident, mais il a fait son travail pour le peu de temps qu’il a vécu. Il y a une chose cependant, il faut le dire, c’est que la communauté malbare n’est absolument pas solidaire et elle est frileuse. Elle n’a jamais aidé ni René, ni le Trident, ni tous ceux qui sympathisaient autour. Il n’y a eu que des petites gens jusqu’au jour où nous avons décidé de créer l’Union tamoule. Et là ce fut un superbe feu de Cipayes, je ne dis pas feu de paille, mais un feu de cipayes. On a rempli la salle du Casino et là il y avait des gens qui n’étaient pas malbar dont Paul Hoarau qui avait pris la parole et d’autres encore qui étaient là. Je m’en souviens. La Préfecture n’a pas tenu. Pendant la semaine, ils ont tellement, houspillé, j’allais dire même, harcelé René pendant toute la semaine que l’Union tamoule n’a pas tenu. Elle n’a pas été dissoute, mais elle n’a pas duré plus de quinze jours. Ce grand feu de paille, de Cipayes applaudi au Casino et même par les gazettes… Il y avait déjà le Quotidien, il me semble, le J.I.R, Témoignage et tout…

FC : Vous voulez dire un feu de Cipayes comme les soldats indiens ? C’est ça ?

JV : Oui, oui, vous savez que dans la révolte des Cipayes, il y avait plus de Cipayes du côté des Anglais que du côté des Cipayes et que c’est pour cela que cette révolte a été matée. La conquête de Maurice et de La Réunion est un fait de Cipayes plus que d’Anglais. Les chefs sont anglais mais tous les soldats qui ont débarqué à La Redoute où au Butor ou à Sainte-Rose, ce sont surtout des Cipayes. Ici, on a camouflé tout ça dans l’histoire. Les Indiens n’existent pas. Les Cipayes n’existent pas dans l’histoire de France. À Maurice, Docteur Hazareesingh a écrit L’histoire des Indiens à l’île Maurice et il a écrit que la bataille de Long Mountain était le point final de la conquête de l’île Maurice. On les a parqués à Port-Louis et on les a oubliés. Toute la gloire est retombée sur les Britanniques mais ça c’est de l’histoire normale. Quand vous ne tenez pas le stylo, vous n’avez pas le droit d’écrire ! Un cipaye, c’est quoi ? C’est un engagé, comme les Mauriciens les appellent les ‘laboureurs’. Quand on arrive à La Réunion, comme on dit, on cause galeng-galeng…

FC : Galeng-galeng ?

JV : En créole, ça veut dire parler une langue indienne, gudjrati ou tamoul ; Ou koz galeng- galeng. Quand vous êtes convoqués au tribunal et que vous ne parlez que galeng-galeng avec un magistrat qui ne parle que du bon français, vous êtes automatiquement condamnés aux ateliers coloniaux comme on disait à l’époque ; c’étaient pas des ateliers nationaux ! N’ayant pas eu l’adhésion de toute la communauté, l’Union tamoule s’est effondrée d’elle-même en moins d’un mois, elle n’existait plus. À un moment, on a pensé faire une liste pour les Premières Régionales, mais là, il y avait du monde, des petites gens qui ne comptaient pas dans la bourgeoisie ni dans le monde politique ; il n’y avait surtout pas les Virapoullé, et les Malbar qui étaient chez Vergès, au Parti communiste, dont Jean-Baptiste Ponama, le pauvre,

JV : En créole, ça veut dire parler une langue indienne, gudjrati ou tamoul ; Ou koz galeng- galeng. Quand vous êtes convoqués au tribunal et que vous ne parlez que galeng-galeng avec un magistrat qui ne parle que du bon français, vous êtes automatiquement condamnés aux ateliers coloniaux comme on disait à l’époque ; c’étaient pas des ateliers nationaux ! N’ayant pas eu l’adhésion de toute la communauté, l’Union tamoule s’est effondrée d’elle-même en moins d’un mois, elle n’existait plus. À un moment, on a pensé faire une liste pour les Premières Régionales, mais là, il y avait du monde, des petites gens qui ne comptaient pas dans la bourgeoisie ni dans le monde politique ; il n’y avait surtout pas les Virapoullé, et les Malbar qui étaient chez Vergès, au Parti communiste, dont Jean-Baptiste Ponama, le pauvre,

Documents relatifs