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Émetteur unique couplé à une nanoantenne

Chapitre 4 Propositions de métasurfaces pour la polarisation circulaire

A. Émetteur unique couplé à une nanoantenne

A.1. Proposition d’émetteur couplé à une antenne

L’article [Sakat et al. 2018] propose de considérer un émetteur diélectrique cubique chaud de côté w = 200 nm, posé sur un substrat froid. Il peut alors se refroidir par conduc- tion thermique en un temps caractéristique τ = w2/D, où D est la diffusivité du substrat. τ est de l’ordre de 40 ns pour une diffusivité de 1 × 10−6m2/s, ce qui permet de moduler la température d’un tel émetteur jusqu’à une fréquence de 1/2τ = 12,5 MHz. La puissance émise par incandescence par un tel système peut donc être calculée en utilisant la forme locale de la loi de Kirchhoff [Greffet et al. 2018]. En effet, cette forme locale est nécessaire puisqu’il ne se trouve pas à l’équilibre thermodynamique. La luminance émise par l’émet- teur diélectrique porté à la température T , à la longueur d’onde λ et dans la direction u vaut alors :

L(λ,u) = Z

V

αabs(r,u,λ)L0[λ,T (r)]d3r. (4.6)

En supposant que la température du nanoémetteur est homogène, la luminance devient :

L(λ,u) = σabs(λ,u)L0(λ,T ), (4.7)

où σabs(λ,u) = RV αabs(r,u,λ)d3r désigne la section efficace d’absorption de l’émetteur. Le

problème qui se pose maintenant est que σabsest très faible a priori. En effet, son maximum

II. Métasurface pour la modulation rapide du rayonnement en bande III

considéré, c’est-à-dire seulement un quart de sa surface géométrique. Cela signifie que ce cube, porté à la température T émet quatre fois moins de puissance qu’un corps noir de même surface à la même température.

Cependant, cette section efficace n’est pas intrinsèquement liée au cube de nitrure mais dépend aussi fortement de son environnement électromagnétique. Nous avons donc montré qu’il est possible d’augmenter de quatre ordres de grandeur la section efficace d’absorption du cube de nitrure en lui adjoignant une nanoantenne dimère, composée de deux parallélé- pipèdes rectangles en or, comme illustré sur la figure 4.12. En optimisant la longueur des bras de l’antenne, σabspeut atteindre 14,21 µm2 à λ = 13,24 µm, comme le montre la figure

4.13 (b). Ceci est à comparer avec le maximum de la section efficace d’absorption pour une particule dipolaire électrique qui vaut σmax =

2

= 20,9 µm2 à λ = 13,24 µm. Ainsi, l’émetteur chaud entouré par cette antenne émet à λ = 13,24 µm une puissance 10000 fois plus importante que lorsqu’il est isolé.

D’un point de vue thermique, la dynamique n’est pas modifiée. En effet, seul le cube de nitrure doit être chauffé, l’antenne quant à elle reste froide et ne sert qu’à modifier l’environnement électromagnétique de l’émetteur. Ainsi il se refroidit toujours en un temps caractéristique τ = w2/D.

A.2. Puissance maximale qu’une antenne peut transférer à une nanoparticule dipolaire.

D’un point de vue électromagnétique, le problème posé dans le paragraphe précédent est : pour un certain émetteur – un cube de nitrure de silicium – comment optimiser la géométrie de l’antenne qui l’entoure pour maximiser sa section efficace d’absorption ?

À l’inverse, pour une antenne donnée, nous pouvons nous demander comment transférer le plus efficacement possible la puissance qu’elle collecte vers une nanoparticule diélectrique placée à côté. De la même façon qu’on peut choisir une charge adaptée en impédance à une antenne radio, il est possible de choisir une nanoparticule adaptée en impédance à une nanoantenne et ainsi de maximiser l’absorption dans la particule. Ce maximum d’absorp- tion caractérise uniquement l’antenne, ce qui permet de comparer des antennes entre elles, indépendamment du choix de l’émetteur. C’est l’objet de l’article [Sakat et al. 2019] dont nous résumons les étapes principales de la démonstration.

Puisque le cube émetteur est petit par rapport à la longueur d’onde 200 nm  10 µm, nous pouvons le modéliser par une polarisabilité dipolaire électrique α. Reformulons notre problème de la façon la plus générale. Nous considérons une particule modélisée par une polarisabilité α placée au point r0 dans un environnement dont le tenseur de Green est G. Éclairons avec un champ incident Einc et calculons la puissance absorbée par la particule.

Soit Eb le champ en r0 en l’absence de particule et g = 12µ0ω2G(r0,r0). Alors on peut

montrer que la puissance absorbée par la particule possède un maximum en fonction de α qui vaut Pmax= ω 16Ebg −1 Eb, (4.8) 99

CHAPITRE4 : PROPOSITIONS DE MÉTASURFACES

FIGURE4.13 – (a) Partie réelle et partie imaginaire de la permittivité diélectrique du niture

de silicium. (b) Section efficace d’absorption du nanoémetteur deSiNxseul (tirets rouges) et avec une antenne dimère optimisée. (c) Ratio entre la section efficace d’absorption avec et sans antenne. Figure extraite de E. SAKAT et al., « Enhancing thermal radiation with nanoantennas to create infrared sources with high modulation rates », Optica5, 175-179

II. Métasurface pour la modulation rapide du rayonnement en bande III

où † désigne la transposée conjuguée. Ce maximum est atteint lorsque le dipôle vaut :

popt= i 4g

−1

Eb. (4.9)

Cette équation 4.9 traduit la condition d’adaptation d’impédance entre la particule et l’envi- ronnement, qui garantit que l’absorption est maximale. Dans ce cas, l’extinction se répartit pour moitié entre la diffusion et l’absorption.

La quantité Pmax donnée par l’équation 4.8 est donc une quantité qui caractérise l’an-

tenne seule indépendamment de la particule absorbante. Cela nous permet donc de comparer des géométries d’antennes entre elles.

Dans le cas où le champ incident est une onde plane, nous pouvons calculer la section efficace d’absorption associée à Pmaxen divisant par le flux du vecteur de Poynting incident

1

20cn|Einc|2. Si on fait l’hypothèse supplémentaire qu’il est possible de négliger la nature

vectorielle du problème et que tout se passe selon l’axe z, on obtient alors :

σmaxabs = 2 8πn |Eb|2 |Einc|2 g0 gzz , (4.10)

où gzz est la composante zz de la partie imaginaire du tenseur de Green g et g0est la même

quantité, mais dans un milieu homogène d’indice n. g0= ω3n

c312π

0. Ainsi, en rappelant que la section efficace maximale d’une particule dipolaire dans un milieu homogène est σ0 = 2

8πn, nous pouvons finalement écrire :

σabsmax= σ0 Exaltation de champ

Exaltation de densité d’états locale. (4.11) En effet, la densité d’états locale (LDOS : local density of states) est proportionnelle à g.

Ainsi nous voyons que la quantité à maximiser pour obtenir une antenne qui réalise une absorption importante dans une particule dipolaire n’est ni l’exaltation de champ électrique, ni la densité d’états locale, mais Pmax qui, dans le cas scalaire, est le rapport des deux.

Dans le cas scalaire, nous retrouvons en outre un résultat bien connu sur les antennes, qui lie la section efficace d’absorption aux propriétés de l’antenne en émission. Précisons quelques définitions. Plaçons un dipôle au point r0 pour alimenter l’antenne en émission. Le gain G(θ,φ) est la puissance émise dans la direction θ,φ par unité d’angle solide, divisée par la puissance totale. La directivité est cette même puissance émise dans la direction θ,φ, divisée par la puissance rayonnée. Alors :

σmaxabs = G(θ,φ) λ 2

4πn2. (4.12)

Nous voyons alors que pour obtenir une très grande section efficace d’absorption, il faut choisir une antenne avec un très fort gain, elle doit donc être directionnelle.

Dans cette sous-partie, nous avons donc présenté une nouvelle géométrie théorique

CHAPITRE4 : PROPOSITIONS DE MÉTASURFACES

d’émetteur chaud couplé à une antenne froide. Dans un premier temps, l’exemple a montré qu’il était possible d’exalter la section efficace d’absorption d’un cube de nitrure de sili- cium d’un facteur 10000 en lui ajoutant une antenne adaptée en impédance, la dynamique thermique restant inchangée. Dans un second temps, nous nous sommes intéressés à l’étude théorique de ces systèmes et avons mis en évidence la grandeur à optimiser pour maximiser l’absorption dans une particule dipolaire. Dans l’approximation scalaire, il s’agit du gain de l’antenne. Pour des antennes grandes par rapport à la longueur d’onde, le maximum de la section efficace d’absorption est la moitié de la section géométrique de l’antenne. Dans ce cas, il faudrait alors une antenne la plus grande possible.