• Aucun résultat trouvé

ÉLÉMENTS D'ANATOMIE, DE PHYSIOLOGIE, DE PATHOLOGIE ET D'IMAGERIE PULMONAIRE

2 ÉLÉMENTS DE PHYSIOLOGIE PULMONAIRE

La fonction principale du poumon est l'échange de gaz entre l'air ambiant et le reste de l'organisme, par l'intermédiaire du sang (apport d'oxygène et élimination de dioxyde de carbone) ; cet échange, facilité par la grande surface constituée par l'ensemble des alvéoles, se fait donc entre les deux réseaux : le réseau aérien (arbre trachéo-bronchique) et les vaisseaux sanguins.

2.1

VOLUMES PULMONAIRES

Le poumon, par sa fonction, a un volume variable. Les variations de volume sont importantes, d'un sujet à l'autre et, pour un même sujet, d'un cycle respiratoire à l'autre. L'inspiration est active et met en jeu une pression sous-atmosphérique dans le thorax grâce au travail des muscles respiratoires ; l'expiration est normalement passive et liée à l'élasticité du poumon qui revient en place. Schématiquement, on peut considérer, pour un sujet donné, un cycle respiratoire moyen au repos et des mouvements respiratoires plus amples avec possibilité d'une inspiration maximale et d'une expiration maximale. Ceci permet de définir différents volumes spirométriques (cf. Figure 1-7) pour lesquelles il existe des normes tabulées selon les paramètres morphologiques, l'âge et le sexe. Ces volumes peuvent être mesurés dans les Services d'Exploration Fonctionnelles au cours de tests appelés Épreuves Fonctionnelles Respiratoires (EFR).

La fréquence respiratoire est variable mais voisine de 15 min-1 au repos.

Par ailleurs, un autre volume rentre en jeu au cours de la respiration ; il s'agit du volume mort V qui correspond au volume des voies aériennes conductrices. Ce volume est une partieD

du volume courant qui ne parvient pas aux alvéoles (cf. Figure 1-8). Il est dû au fait que l'entrée et la sortie de l'air dans le poumon se font par le même réseau et non deux réseaux séparés comme pour le système circulatoire. Si l'on considère une ventilation d'un volume courant V àT

partir du volume résiduel VR, le gaz restant dans les poumons (de volume VR) va être dilué par la partie du gaz inspiré qui parvient jusqu'aux poumons soit VT − . Le facteur de dilutionVD * est donc : dilution T D VR VR V V = + − <1-1>

À l'extrême, une ventilation d'un volume inférieur au volume mort est totalement inefficace. Ce volume mort est de l'ordre de 150 ml chez l'homme jeune debout ; il est diminué (environ 110 ml) en décubitus, augmenté (de l'ordre de 250 ml) en inspiration profonde, plus élevé (de l'ordre de 180 ml) chez l'homme âgé, et plus faible (environ 100 ml) chez la femme [17

- Comroe 1965].

Figure 1-7 Volumes spirométriques. VT est le volume courant (de l'ordre de 0,5 l), VR le volume résiduel (1 à 2 l), VRE le volume de réserve expiratoire (1 à 2 l), VRI le volume de réserve inspiratoire (1,5 à 3,5 l), CI la capacité inspiratoire (2 à 4 l), CRF la capacité résiduelle fonctionnelle (3 à 3 l), CV la capacité vitale (3 à 5 l) et CPT la capacité pulmonaire totale (5 à 7 l). Ces valeurs [14 - Grippi 1996, 16 - Lebeau 1989, 19 - Isselbacher 1998] sont donnés uniquement à titre indicatif et varient de manière importante d'un sujet à l'autre.

On peut donc définir le volume de ventilation alvéolaire comme le volume efficace de renouvellement de l'air alvéolaire :

( )

A T D V = VV <1-2> respiration courante expiration forcée maximale inspiration forcée maximale CV T V VRE VR VRI CPT CI 0,0 l 1,5 l 2,5 l 3,0 l 6,0 l CRF

Figure 1-8 effet du volume mort : le volume courant (trame serrée) n'est pas efficace en totalité ; une partie (le volume mort VD) ne parvient pas jusqu'aux alvéoles. Le gaz initialement dans les poumons (trame lâche) s'est dilué en fin d'inspiration d'un facteur donné par la formule <1-1>.

2.2

DISTRIBUTION DE LA VENTILATION PULMONAIRE

La ventilation pulmonaire stricto sensu est le rapport du débit d'air arrivant au poumon au volume pulmonaire ventilé ; c'est donc l'inverse d'un temps de renouvellement ; ce paramètre n'est pas facile à mesurer. Par extension, le terme de ventilation est parfois utilisé pour désigner le volume pulmonaire ventilé ou le débit ventilatoire. D'après <1-2> et la Figure 1-7, la ventilation pulmonaire physiologique est :

1 500 150 1 15 min 2 min 2500 T D V V ml ml V f CRF ml − − = × = × = <1-3>

Le débit de ventilation alvéolaire étant :

(

T D

)

15 min 1

(

500 150

)

5250 min 1

V= ×f VV = × mlml = ml <1-4> soit un débit comparable au débit sanguin pulmonaire.

La ventilation n'est pas répartie de manière uniforme dans le poumon. Cette répartition dépend à la fois des forces mises en jeu et des résistances. La force qui meut l'air est la différence de pression entre l'air atmosphérique et la pression pleurale. Le poids du poumon fait que pour un sujet debout ou assis, la pression est plus élevée vers la base du poumon que vers les apex (d'environ 8 cm d'eau) [14 - Grippi 1996]. Les sommets sont davantage en dépression que les bases et leurs alvéoles sont donc plus gonflées donc moins compliantes. La ventilation est donc en principe moindre aux sommets (cf. Figure 1-9). Il faut noter que ce phénomène est lié à la pesanteur donc à la position du sujet. En décubitus dorsal, ce sont les régions postérieures qui seront les mieux ventilées.

{

D

V

R

Figure 1-9 ventilation prédominant dans les régions déclives (d'après [14 - Grippi 1996])

Ce phénomène peut s'illustrer par l'analogie avec un ressort (cf. Figure 1-10). Toutefois, ce phénomène n'est pas seul en jeu. Lors d'une inspiration à fort débit, l'impédance des voies aériennes va contrebalancer cet effet de compliance statique et la ventilation sera plus homogène

[20 - Bake 1974] (cf. Figure 1-11).

Figure 1-10 ventilation plus importante des régions déclives : analogie du ressort de [21 - Siegel 1973] : sous l'effet de son propre poids, un ressort est plus étiré vers le haut ; lorsqu'on le tire vers le bas, ce sont donc les spires inférieures qui vont le plus s'écarter.

D'autres effets encore entrent en jeu : la ventilation est différente selon l'amplitude des mouvements respiratoires ; une ventilation superficielle privilégiera les régions périhilaires tandis qu'une ventilation plus profonde privilégiera les bases (cf. Figure 1-12) [21 - Siegel 1973]. Enfin, lorsqu'on trace la ventilation, l'image obtenue dépend de la façon d'administrer le traceur (en embole, lors de toute l'inspiration, ou en respiration en circuit fermé jusqu'à équilibre), ainsi que du volume pulmonaire d'où l'on part (VR, CRF, par exemple) [22 - Susskind 1978].

-7,5 mm Hg -1,5 mm Hg

} }

P

∆ ∆P

BASE APEX 1 V2 V

P

V

Figure 1-11 ventilation alvéolaire pour trois régions (base milieu et sommet) en fonction du débit inspiratoire. À bas débit, les effets de compliance statique prédominent et la ventilation est plus forte aux bases ; à haut débit, les effets d'impédance tendent à homogénéiser la ventilation (figure tirée de [20 - Bake 1974]).

La répartition de la ventilation est donc complexe et son étude nécessite en principe de bien contrôler les conditions de ventilation.

Figure 1-12 une respiration superficielle privilégie les régions périhilaires tandis qu'une ventilation plus profonde privilégie les bases (figure tirée de [21 - Siegel 1973]).

2.3

ÉCHANGES GAZEUX ALVÉOLO

-

CAPILLAIRES

Le point clef de la fonction pulmonaire est l'échange de gaz entre le sang et l'air inspiré. Cet échange se fait au niveau de la barrière alvéolo-capillaire.

Cette barrière est composée de trois éléments :

la paroi de l'alvéole composée d'une couche de cellules (épithélium)

une substance intermédiaire (interstitium)

respiration

superficielle respirationprofonde

BASES

la paroi du capillaire sanguin (endothélium).

Cette barrière est très mince (de l'ordre de 0,1 µm [17 Comroe 1965] à 0,5 µm [18

-West 1975]) ce qui permet une diffusion rapide des gaz.

Le volume de sang capillaire contenu dans le poumon est de l'ordre de 70 ml [18 - West

1975]. Considérant un débit sanguin de 5 l.min-1, une estimation rapide conduit à un temps de séjour capillaire du globule rouge d'environ 1 s. Pendant cette durée, ce globule traverse probablement deux à trois alvéoles [18 - West 1975]. Le sang artériel pulmonaire arrivant dans les capillaires a un contenu en oxygène correspondant à une pression partielle d'environ 40 torr alors que l'alvéole a une pression partielle d'environ 100 torr. Au cours de son transit capillaire le sang va équilibrer sa pression partielle en oxygène avec l'alvéole. Le passage de l'oxygène vers le sang est rapide puisque le plateau est obtenu en 0,3 s environ soit un tiers du temps de transit capillaire [14 - Grippi 1996].

Figure 1-13 Photographie en microscopie électronique de la membrane alvéolo-capillaire tirée de [23 - Weibel 1970]. EP désigne l'épithélium alvéolaire, MB les membranes basales, IN l'interstitium, EN l'endothélium, C la lumière du capillaire et GR le globule rouge. L'épithélium alvéolaire est tapissé d'un tensioactif (le surfactant) non visible sur cette photographie.

En respiration courante, le volume d'air en début d'inspiration est la CRF d'environ 2,5 l. Cet air est à une pression partielle en oxygène d'environ 100 torr. L'oxygène de l'air inspiré (de volume 0,5VT  l) est à une pression partielle d'environ 150 torr (21% d'oxygène pour l'air sec, avec une saturation de 47 torr en eau). Le mélange en fin d'inspiration courante est donc à 108 torr. Un quart de l'oxygène apporté passe dans le sang ce qui fait redescendre la pression

partielle à environ 100 torr en fin d'inspiration. La concentration alvéolaire d'oxygène varie donc de moins de 10% au cours du cycle respiratoire normal.

L'oxygène dans le sang se trouve sous deux formes : lié à l'hémoglobine ou dissous dans le sang. Le contenu en oxygène (traditionnellement exprimé en ml de gaz par dl) est donc :

[ ]

2 2 2

forme liée forme dissoute

1,34 0,0031

a O a O a O

C =  Hb S⋅ + ×P <1-5>

où [ ]Hb est la concentration sanguine en hémoglobine (en g/dl), Sa O2la saturation des sites de l'hémoglobine en oxygène et

2

a O

P la pression partielle en oxygène (en torr). <1-5> peut donc s'écrire [14 - Grippi 1996] :

[ ]

2 2 2

1 1

forme liée forme dissoute

60 . 0,14 .

a O a O a O

C = µmol gHb S  + µmol torr ×P <1-6>

soit environ 8,7 mmol.l-1 (8,7 mmol.l-1 sous forme liée et 22 µmol.l-1 sous forme dissoute) pour une concentration d'hémoglobine de 15 g/dl, une saturation de 97% et une fraction d'oxygène de 21% sous pression atmosphérique.

Le passage du dioxyde de carbone est 20 fois plus rapide encore que celui de l'oxygène [14

- Grippi 1996].

2.4

RÔLE DE L

'

OXYGÈNE SUR LA RÉGULATION DE LA

RESPIRATION

Contrairement au cœur dont le mouvement autonome n'est que modulé par des systèmes de régulation extra-cardiaques, le poumon a un mouvement sous commande nerveuse directe ; cette commande, à la fois automatique et volontaire, est contrôlée essentiellement par des centres bulbaires et protubérantiels répondant à différents stimuli. Les stimuli augmentant la ventilation sont principalement [17 - Comroe , 18 - West ] :

l'hypercapnie (augmentation de la concentration en dioxyde de carbone dans le sang)

l'hypoxie (diminution de la concentration en oxygène dans les tissus)

la baisse du pH sanguin

Par ailleurs, la distension thoracique a un effet inhibiteur sur la ventilation (réflexe de Hering-Breuer).

Chez le sujet sain, le stimulus le plus fort de la ventilation est probablement l'hypercapnie. L'hypoxie en revanche est un stimulus faible en l'absence d'hypercapnie (cf. Figure 1-14). Les conséquences de ce point sont exposées plus loin.

Figure 1-14 Courbe de réponse physiologique (en terme de ventilation pulmonaire) à différentes pressions partielles alvéolaires en oxygène. Lorsque la concentration en dioxyde de carbone dans l'alvéole est pauvre (cercles), le stimulus de l'anoxie est faible sur une très large gamme : l'hyperventilation n'est enregistrée que pour des pressions inférieures à 40 torr. En revanche, il existe une synergie de l'hypercapnie (triangles puis croix) qui augmente la réponse à l'hypoxie et en élève le seuil (figure empruntée à [24 - Loescheke 1958] cité par West [18 - West ]).