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Un élève souffrant de dyslexie et d’un trouble de l’attention

Dans le document Sociologie de l'éducation (Page 119-122)

Confrontons le récit suivant à certaines des habitudes du travail scolaire.

L

ETTRE OUVERTE D

UNE MERE A LA DIRECTRICE

:

« N

E VOUS INQUIETEZ PAS

… »

Publié le 7 septembre 2012 par Pierre Bouillon, Le Soir, Salle des profs

Voici la lettre ouverte qu’une maman a rédigée à l’intention de la directrice de l’école de son fils. Agé de 19 ans, cet élève souffre de dyslexie et d’un trouble de l’attention. « Ne vous in- quiétez pas », répétait la direction aux parents. Mais les difficultés de cet adolescent n’ont pas été prises en compte. En juin, il a échoué.

Madame la Directrice

Nous avons accompagné notre fils de 19 ans quand il est venu s’inscrire dans votre école. Nous vous avons signalé qu’il était dyslexique, nous avons demandé qu’il soit autorisé à prendre note avec son iPad en classe. Vous n’avez pas dit oui, vous n’avez pas dit non, vous nous avez répondu “ne vous inquiétez pas”.

Jusqu’en novembre, notre fils a pris ses notes en classe avec son iPad. Ses notes de cours étaient complètes, organisées, exploitables avec son logiciel de lecture (WoDy), échangeables et archivées.

Peu d’élèves ont réussi les partiels de novembre, et notre fils en faisait partie. Vous lui avez demandé de s’installer “devant”, de ne pas se “cacher” dans le fond de la classe, car les pro- fesseurs voulaient savoir qui était ce “bon” élève. Inquiets car expérimentés, nous vous avons expliqué qu’il avait un trouble déficitaire de l’attention, qu’il lui était difficile de rester con- centré, que c’est la raison pour laquelle il préférait rester dans le fond de la classe. Vous avez insisté, vous nous avez dit “ne vous inquiétez pas”.

Il a changé de place, et sous la pression des professeurs, a rapidement abandonné l’iPad, “on ne sait pas ce qu’il fait, avec son iPad”…… il a pris note avec une feuille et un stylo. Les notes sont devenues rapidement inexploitables avec son logiciel de lecture WoDy, incom- plètes, illisibles, perdues. Le soir et le week end, il a recommencé à recopier à la main les notes de cours de ses copains, notes qu’il nous fallait aller chercher et reporter, photocopier et lire avec lui.

Il a troqué son logiciel de lecture devenu inutilisable pour une paire de lunettes prismatiques et une rééducation visuelle. Et il a lu et relu, copié, copié et recopié ses notes de cours à la main, y consacrant toutes ses heures de loisir. Il était certain qu’à force de “travail”, il y arri- verait.

En classe, ses mains n’étant plus occupées par son clavier, il a recommencé à dessiner au lieu de noter, à parler avec sa voisine, à répondre avec trop d’impulsivité aux questions des pro- fesseurs, et les remarques sont devenues quotidiennes, vous lui avez demandé de changer de

comportement. Nous vous avons expliqué une nouvelle fois ce qu’est un déficit d’attention. Vous lui avez dit qu’il devait aller en remédiation. Et il y est allé. Et il y a lu, relu, copié et recopié, les formules, les schémas, les exercices, et essuyé les remarques de son professeur, parce qu’il était trop distrait.

En mai, l’optométriste qui lui a prescrit ses lunettes et ses exercices de rééducation visuelle nous a conseillé de vous demander d’interroger notre fils à l’oral et d’éviter les QCM. Vous nous avez dit que c’était impossible, vous avez essayé ses lunettes prismatiques, trouvé que ça colorait en bleu, et vous nous avez dit “ne vous inquiétez pas”.

Notre fils a échoué en juin, comme 90% des élèves de sa classe dans votre école, Madame la Directrice, seuls sept élèves sur quatre vingt ont été admis en deuxième année à l’issue des examens de juin. Les 27, 28 et 29 juin, vous nous avez refusé l’accès aux copies des examens corrigés de notre fils, vous avez refusé notre demande d’aménagements raisonnables eût égard à sa dyslexie pour préparer ses examens de septembre, au prétexte qu’aucun cadre légal ne vous y obligeait.

Nous avons obtenu rendez-vous dans votre école avec quatre de vos professeurs.

Le premier a interrogé notre fils à l’écrit sur des feuilles bleues, il n’a pas été informé qu’il était dyslexique et qu’il portait des lunettes prismatiques qui colorent légèrement son champ visuel en bleu.

Le deuxième a interrogé notre fils à l’écrit sur des feuilles vertes. Nous avons été ravis d’apprendre que notre fils est “un de ses meilleurs élèves”. Mais lorsqu’il lui a demandé s’il voulait bien l’interroger à l’oral en septembre, le professeur lui a répondu que c’était impos- sible, pour deux raisons : la première est que ça fait vingt ans qu’il travaille dans votre école et cela ne s’est jamais fait, et la deuxième est qu’il n’est pas pour un traitement de faveur, car après, il faudra le faire pour tout le monde, et là, il aura un problème.

Le troisième lui a dit qu’il estimait qu’à son âge, il devait être capable de rester concentré trois heures sur sa feuille d’examen, et qu’il était impossible de l’interroger à l’oral, car les schémas doivent être faits à la latte et doivent être précis au mm près. Il lui a aussi dit qu’il ne lui en voulait pas (!?).

Le dernier lui a dit qu’il ne voulait pas l’interroger à l’oral. Ce n’était pas discutable. Il lui a montré que la copine avec laquelle il avait préparé son examen de juin avait fait les mêmes fautes que lui, prouvant là qu’il n’était ni dyslexique, ni TDA.

Madame la Directrice, au terme de longues démarches qui nous ont coûté beaucoup de temps, d’énergie et d’argent puisque nous avons dû faire appel à un avocat, nous avons enfin eu l’accès aux copies des examens corrigés de notre fils le 14 août. Vous lui avez fait signer un document par lequel vous précisez que cet accès lui a été accordé exceptionnellement, uni- quement parce qu’il est dyslexique, et que votre médecin scolaire devra recevoir une confir- mation médicale de ce trouble de l’apprentissage justifiant un tel traitement de faveur.

Il a fallu attendre le 20 août pour que vous consentiez à recevoir notre fils pour qu’il vous explique comment il s’estimait capable de passer ses examens de passage. Cette session commençait le 21 août. Un report de délibération était inévitable : impossible de s’organiser,

tant pour notre fils que vous même, pour l’examen de passage prévu le 22 août. Notre fils vous a demandé de reporter cet examen, ainsi que ceux prévus le 23 août. Il vous a ensuite remis son passeport dyslexie qu’il a fait cet été à Louvain la Neuve, et vous a expliqué qu’il souhaitait faire ses examens comme ses copains, avec ses copains, mais qu’il demandait l’autorisation de lire la question avec son casque et de répondre à la question avec son clavier. Il vous a expliqué que sa lecture et son écriture sont déficitaires, manquent de vitesse et de précision, et que ces deux outils lui permettent de lire et écrire comme les autres, qui lisent avec leurs yeux, et qui écrivent avec leur stylo. Il n’en coûterait pas un euro à l’école, il pro- posait de venir avec son ordinateur, d’utiliser les logiciels qui sont agrées par la Communauté française de Belgique, et que la Commission de pilotage autorise aux élèves dyslexiques et TDA pour passer l’épreuve externe du CEB.

Vous n’avez dit ni oui, ni non.

Le cabinet de la Ministre vous a autorisé à permettre un report de délibération.

Ce lundi 27 aout, vous avez dit à notre fils qui vous a téléphoné qu’il pouvait venir faire son examen mercredi mais qu’il fallait qu’il le fasse avec une feuille et un stylo, parce que le pro- fesseur estime que c’est beaucoup plus difficile d’écrire des maths avec un clavier, et que de toute façon, vous n’avez pas encore reçu l’ordinateur que vous avez acheté pour mettre à sa disposition.

Comme ses copains, notre fils a étudié tout l’été. Contrairement à ses copains qui ont déjà bien avancé dans leur session d’examen, il est toujours sous la pression de sa deuxième ses- sion, il ne sait pas quand il pourra présenter ses examens, ni même dans quelles conditions. Il était en classe avec eux, il a étudié avec eux, il voulait présenter ses examens comme et avec eux, mais vous en avez fait une exception, un traitement de faveur, un paria. Quoi qu’il fasse, il ne sera plus jamais un étudiant heureux parmi les autres dans votre école.

Quel immense gâchis, Madame la Directrice. Nous avions raison de nous inquiéter.

http://blog.lesoir.be/salledesprofs/2012/09/07/lettre-ouverte-dune-mere-a-la-directrice-ne-vous-inquietez- pas/

Ce qui a posé problème aux yeux de la narratrice. Envisageons ici les aspects très « pra- tiques ». ………. ………. ………. ………. ………. ………. ……….

Quelles étaient les préoccupations ou les attentes de la narratrice ? ………. ………. ………. ………. ………. ………. ………. ………. ………. ………. ………. ……….

Dans le document Sociologie de l'éducation (Page 119-122)