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Cette égalité doit permettre d'assurer un débat contradictoire 155,

sition d'un témoin décédé depuis ; la situation étant ici toutefois différente, puisque l'on aurait pu, de toute façon, lire les déclarations d'un témoin décédé.

On se demandera dans quelle mesure ce mode d'audition respecte non seu-lement le droit d'être confronté avec les témoins, mais simpseu-lement le principe d'immédiateté, propre à tout procès accusatoire.

153 « Waffengleichheit » : non debet actori licere quod reo non permittitur.

154 Principe consacré par la Déclaration universelle (article 10), énoncé à l'article 14, § 1, du Pacte international, à l'article 8, § 2, al. 1, de la Convention américaine ; voir également les «Principes d'égalité clans l'administration de la justice» approuvés par la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, à sa 29• session (Genève, février-avril 1973).

Le droit d'être emenclu implique cette égalité des armes (au stade du juge-ment) : « L'égalité des parties est assurée par la loi pour les débats du tribunal de jugement. Elle ne l'est pas nécessairement au stade de l'instruction prépa-ratoire : le juge peut et doit alors prendre les mesures nécessaires pour éviter que la réalisation du but de l'instruction ne soit mise en péril » (arrêt du Tribunal fédéral du 2.2.1972, RO 98 1 a, pp. 226, 238).

Ce qui ne devrait pas conduire à retenir que l'égalité n'existerait pas du tout dans la phase de l'instruction préparamire ; car le principe d'égalité vaut pour

!'ensemble de la procédure avec, selon les systèmes, des exceptions possibles dans la phase précédant le jugement.

Ainsi Kohlmann (« Waffengleichheit... », p. 319) : «Man wird daraus, ohne das Prinzip der Rechtsstaatlichkeit überzustrapazieren, den Schluss ziehen dürfen, dass der Grundsatz der W affengleichheit heu te allgemein für das gesamte Strafverfahren gilt.

« Ebenso wie im Haupfverfahren kann diese Geltung jedoch nicht unein-geschrankt sein. Wenn man das Ziel des Strafprozesses, die materielle Wahr-heit zu ermitteln, nicht aufgeben will werden die sachlogischen Unterschiede der einzelnen Verfahrensabschnitte zu berücksichtigen sein. So wird etwa die Aus-pragung des Grundsatzes der Waffengleichheit für das Ermittlungsverfahren und das Haftprüfungsverfahren anders ausfallen ais für das Hauptverfahren.

Kurzum : Waffengleichheit um jeden Preis kann aus dem Prinzip der Rechts-staatlichkeit sicherlich nicht hergeleitet werden ».

155 Carnelutti constatait que : « l'accusa deve essere bilanciata, e percio integrata, dalla difesa » : pour s'équilibrer, accusation et défense tendent ainsi à s'intégrer (« Principi... », p. 46).

Et d'ailleurs, pour Carnelutti : « Le ministère public et la défense sont faits pour se contredire : et cette contradiction est nécessaire au juge comme l'oxy-gène de l'air qu'il respire».

On rappellera, pour Genève, ce qu'écrivait le Procureur général Dufernex -auteur du projet de code qui a introduit, en 1884 déjà, une instruction prépara-toire très largement contradicprépara-toire et qui voulait que s'ouvrît «une ère nouvelle, une ère d'égalité et de franchise, où le Procureur général et la défense puissent

Il s'agit d'un principe fondamental non écrit inclus dans la notion de procès équitable et dégagé par la jurisprudence de la Commission 156•

La Commission a notamment déclaré que ce droit implique que toute partie

à

une procédure (pénale ou civile) doit avoir une possibilité rai-sonnable d'exposer sa cause au tribunal dans des conditions qui ne la désavantagent pas d'une manière appréciable vis-à-vis de la partie adverse 151.

70. La Commission envisage in concreto le rôle des parties ; et elle apprécie la procédure dans son ensemble, nous l'avons relevé.

Elle est ainsi amenée à rechercher si, en fait, la prétendue inégalité a eu des effets défavorables pour l'accusé : ne retenant une violation du principe de l'égalité des armes que dans l'affirmative 158,

combattre face à face, pied à pied, avec les mêmes armes, pendant la durée de l'information» (Mémorial des séances du Grand Conseil, 1883-1884, tome 3, p. 1463, séance du 4 octobre 1884).

156 «En l'espèce, il s'agit de savoir si la notion de «procès équitable»

Pnglobe un droit quelconque relatif à la défense autre que les droits minima énoncés au paragraphe 3. La Commission est d'avis que ce que l'on appelle généralement « l'égalité des armes», c'est-à-dire l'égalité dans la procédure entre l'accusé et le ministère public, est un élément inhérent à tout procès équitable» (Requ. n° 524/59 et 617/59, rapport de la Commission du 23.11.1962, Ann. 6 (1963), pp. 681, 697).

151 Toutefois, le tribunal n'a pas l'obligation d'entendre les parties orale-ment, pourvu que celles-ci aient la possibilité, en toute égalité, d'exposer leurs arguments par écrit.

158 Sur cette question du « préjudice» que doit avoir causé l'inégalité, on relèvera que la Commission a dû examiner diverses requêtes fondées sur l'iné-galité que crée l'article 294, § 3, du code autrichien de procédure pénale (ensuite modifié, précisément à la suite de ces requêtes), cette disposition prévoyant, avant sa modification, que la cour d'appel siégeait à huis clos et statuait «après avoir entendu le Procureur général» en l'absence du requérant et de son avocat.

Or, une loi de 1962 ayant modifié le code pour rendre la procédure publique et contradictoire, et une loi de 1963 ayant institué une nouvelle voie de recours permettant la «réouverture» des procédures d'appel, en matière pénale, le

«préjudice» disparaissait et cette affaire ne devait pas avoir de suite devant la Commission.

Dans une autre espèce, la Commission devait constater que le pourvoi du condamné ne pouvait pas conduire à une décision qui lui fût défavorable (à cause de l'interdiction de la reformatio in pejus) ; dès lors une violation de l'égalité entre les parties n'était pas retenue ; alors que, lorsqu'une aggravation de la situation de l'accusé est possible, sur recours, la Commission retient qu'une stricte observation de l'égalité des armes s'impose.

A relever toutefois que, curieusement, dans une autre cause encore, la Com-mission a considéré que, alors que la Cour suprême avait examiné un pourvoi en cassation en l'absence de l'accusé, mais en présence de !'Avocat général, il n'y avait pas eu de violation de la Convention « étant donné que le Procureur général exerce ses fonctions d'une manière indépendante, sans ingérence du gouverne-ment... » (Requ. n° 3692/68, Ann. 13 (1970), pp. 523, résumé p. 1039) : décision pour le moins discutable, car l' « indépendance » du Procureur général n'ôte rien à son rôle de partie : ici incontestablement avantagée.

54 LA PROTECTION DE L'ACCUSÉ PAR LA CONVENTION EUROPÉENNE

La Commission semble admettre que l'égalité serait respectée, au sens négatif, lorsque ni l'une ni l'autre partie ne sont entendues ou présentes ; cel::i. nous paraît regrettable, car dans cette « égalité par le bas» l'accusé - toujours en position d'infériorité, de toute façon -est incont-establement désavantagé : privé d'un droit, il ne trouve pas de réelle compensation dans le fait que le ministère public le soit éga-lement.

La vraie égalité consiste à ne pas reconnaître à l'accusateur plus de droits qu'à l'accusé, et non pas à restreindre les droits de ce dernier, quitte à ce qu'il se trouve à « égalité» avec l'accusateur 150.

71. Les cas d'application du principe de l'égalité des armes sont nom-breux, ainsi que nous avons pu le voir 160, et que cela apparaîtra 161,

étant observé, une fois encore, que cette notion et les autres, énoncées à l'article 6, se complètent et s'éclairent, et ne peuvent en définitive être examinées séparément.

Nous avons vu, d'autre part, que l'application de ce principe a déjà eu pour effet que des législations nationales ont été modifiées 162.

159 C'est ainsi que la Commission a retenu, notamment, que la question de l'égalité des armes ne se posait plus, dans une affaire où un appel avait été jugé en l'absence de l'avocat du requérant, mais aussi en l'absence du Procureur général. A rapprocher de la règle de la procédure pénale soviétique selon laquelle le tribunal n'autorisait la présence de l'avocat que s'il admettait celle du Procureur ...

Relevons d'autre part la disposition du code de procédure pénale bernois (article 41) qui prévoit qu'un avocat devra toujours assister l'accusé à l'audience de jugement lorsque le ministère public ( « Staatsanwaltschaft ») y est lui-même présent.

160 A propos de la composition de la juridiction de jugement, notamment, du droit de faire citer et interroger des témoins.

161 Notamment à propos des procédures de recours en ce qui concerne l'examen de la légalité de la détention, la consultation du dossier, ou encore le droit à un conseil : celui précisément que l'on a qualifié de «the equalizer ».

162 Nous l'avons vu ci-dessus ad note 158 à propos de 1' Autriche ; en Répu-blique Fédérale d'Allemagne, après des modifications du code de procédure pénale, le ministère public doit, dans la procédure de cassation, faire connaître préalablement à l'accusé ses conclusions tendant au rejet ; et l'accusé détenu, doit être représenté par un défenseur devant la cour de cassation (voir note 312).

A relever que la « legge delega » du 3 avril 1974 (N. 108) énonce le principe de la « participazione dell'accusa e della difesa su basi di parità in agni stato e grado del procedimento » (article 2) et prévoit la « garanzia del contraddit-torio » dans une série de procédures : notamment en matière d'ordonnance pénale (decreto), en cas de recours contre la décision de détention ou le maintien de celle-ci, en ce qui concerne la modification et l'exécution de la peine, la réhabilitation, etc.

Il semble toutefois que ce principe d'égalité (combiné avec d'autres, et notamment avec celui des « facilités nécessaires »

à

la préparation de la défense) devrait trouver une application plus vaste, si l'on veut bien envisager de remettre en cause un certain nombre de dispositions ou de situations que l'on continue d'accepter sans esprit critique 163 •

En particulier - sans prétendre dresser ici un catalogue, ni affirmer que, dans les cas indiqués, le principe d'égalité serait incontestablement violé 1 64 - on se demandera comment est compatible avec le principe d'égalité le fait que l'accusé indigent ne bénéficiera pas toujours, et d'emblée, de l'assistance d'un conseil : celle-ci ne devrait-elle pas être obligatoire? Car

à

quoi cela sert-il d'accorder des droits si celui qui en bénéficie ne les connaît pas ou n'est pas

à

même de les faire valoir 1 65 ? Comment admettre qu'une procédure par défaut pourrait se dérouler selon les règles du « procès équitable » - et respecterait l'égalité des parties - alors que le ministère public est présent, et que l'avocat de l'accusé est exclu 166?

163 Nous faisions allusion ci-dessus à cette nécessité de « penser Convention » et de rechercher, comme dans le jeu des erreurs, celles qui doivent apparaître si l'on veut bien les trouver 1

164 Mais en posant la question, et en la développant ultérieurement, s'il y a lieu, lorsque ce sujet (par exemple celui du droit à un conseil) sera abordé.

165 La Convention (nous le verrons à propos du droit à un conseil) ne prévoit la défense d'office pour l'accusé indigent que « lorsque les intérêts de la justice l'exigent». Or, il peut être difficile d'apprécier d'emblée si «les intérêts de la justice » exigent la nomination d'un avocat d'office, car on ne connaît pas nécessairement d'avance tous les développements d'un dossier ; et si par la suite la nécessité de l'assistance d'un conseil s'impose, on constate que l'accusé en aura été privé dans une première phase, parfois essentielle.

D'autre part, compte tenu du large pouvoir d'appréciation que les juridictions supérieures reconnaissent à ceux qui doivent trancher en premier lieu, ce critère, relativement vague, des « intérêts de la justice» permet de restreindre considé-rablement le droit à l'assistance d'un conseil pour l'accusé indigent.

Enfin et surtout ne devrait-on pas retenir a priori que, dans doutes les espèces (sauf peut-être dans les cas dits « bagatelle » ), par une sorte de pré-somption irréfragable, les intérêts de la justice exigent toujours l'assistance d'un conseil, si l'on veut réellement assurer l'égalité entre l'accusé qui est natu-rellement en position d'infériorité et le ministère public ?

166 Au contraire, la présence du conseil devrait être ici (comme c'est le cas en République Fédérale d'Allemagne) obligatoire ! D'ailleurs : «L'argument que dans un procès non contradictoire, l'intervenfion du ministère public n'a pas violé l'égalité des armes n'a aucune valeur. Toute procédure qui se déroule en l'absence de l'accusé ou du condamné alors que le ministère public ait été présent ou ait été entendu, viole automatiquement le principe du procès équi-table» (Antonopoulos, «La jurisprudence ... », p. 138). Et la possibilité de faire opposition ne dispense certes pas quiconque de juger, la première fois déjà, selon les règles du procès équitable.

En particulier, les règles de la procédure de contumace, en France, nous paraissent violer d'une mamère certaine la Convention : non seulement l'avocat

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LA PROTECTION DE L'ACCUSÉ PAR LA CONVENTION EUROPÉENNE

Quid, dans certains pays, de la position du représentant du minis-tèrP public qui prend place sur une estrade, alors que c'est l'accusé qui se trouve au « parquet » 161 ?

Quid de l'acte d'accusation auquel on ne peut opposer, au début de l'audience, un « acte de défense » 168 ?

Quid également de la présence,

à

certaines audiences, du ministère public, alors que l'accusé et la défense en sont exclus 169

?

On constate ainsi que, sans prétendre réaliser une égalité parfaite 110, on devrait pouvoir, avec un effort de recherche et d'imagination, parvenir

à

mieux assurer le respect de ce principe de I' « égalité des armes».

§ 4 :

La publicité des audiences

"Where there is no publicity there is no justice"

72. Le procès accusatoire est un procès public 111.

Le principe de la publicité des débats est reconnu et appliqué par toutes les législations 172 , avec des limites et des dérogations, que connaît est exclu, mais l'accusé ne peut même pas bénéficier des circonstances atté-nuantes ! sans préjudice du fait que, selon les cas, certains prononcés par défaut, au correctionnel, seront « réputés contradictoires», et donc sans opposition possible (voir ci-après n°' 122-123).

167 «Une erreur de menuisier», selon un mot connu. Rien ne devrait assu-rément faire obstacle à ce que l'égalité ne se réalise à cet égard également : c'est le cas d'ailleurs, notamment dans les pays anglo-saxons et, pour la Suisse, clans plusieurs cantons, ainsi qu'au Tribunal fédéral !

168 On sait que c'est par un anachronisme que l'on avait conservé cet équi-valent de l' « indictment », alors que ce dernier devait être remplacé par l'arrêt de renvoi, le jury d'accusation n'ayant pas été maintenu.

Supprimé en France, l'acte d'accusation existe encore, notamment à Genève (il a disparu dans le projet de nouveau code).

169 Ainsi notamment à Genève lorsque l'inculpé, placé au secret, comparaît devant la chambre d'accusation.

170 C'est le mot de Chaix d'Est-Ange : «Nous sommes tous deux égaux ici, Monsieur l' Avocat général... au talent près ».

111 Au plein sens du terme : il s'agit tant de la publicité pour les parties (ce que les auteurs italiens appellent pubblicità interna, et que l'on rend impar-faitement par Parteiiiffenthchkeit), que de la publicité pour les tiers (pubblicità esterna) ; tant de la publicité immédiate (par l'admission du public à l'audience), que de la publicité médiate (par la possibilité de rendre compte des débats).

112 On trouvera dans l'ouvrage de Velu, «Le problème ... » (p. 130), une énumération des pays - et notamment des parties contractantes à la Conven-tion - dont la Constitution contient une disposition relative à cette règle.

Citons également l'article 10 de la Déclaration universelle (qui ne garantit que la publicité des audiences et non du prononcé des jugements), l'article 14,

§ 1, du Pacte international, l'article 8, § 5, de la Convention américaine et également le VI• amendement de la Constitution des Etats-Unis.

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