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2.2 Optique intégrée sur verre

2.2.4 L’échange ionique sur verre

Lorsqu'un verre, contenant des ions A+verre monovalents liés aux atomes d'oxygène avec une énergie de liaison faible tels que les modificateurs de réseaux, est mis en contact avec une source contenant des ions B+sel, de même polarité, il y a apparition d'un gradient de concentration et de potentiel. Cet état est décrit sur la figure 2.5 [28]. Dès lors, un échange ionique peut apparaître à la surface du verre et peut être représenté par la relation chimique suivante :

A+verre + B+sel↔ A+sel + B+verre (2.21) Dans le cas où la source est un bain de sels à une température où la mobilité des ions devient importante, la cinétique de la réaction dépend principalement de l'agitation thermique dans le verre et du gradient de concentration créé. Les ions B+verre diffusent d'une manière isotrope de plus en plus loin dans le substrat pour réduire le déséquilibre. L'augmentation de la température liée à une agitation thermique plus intense accélère le processus.

Figure 2.5 Echange ionique.

2.2.4.1 Les sources de variation de l'indice de réfraction

L'échange entre les deux types d'ions provoque une modification locale du verre dont la structure de base reste cependant inchangée. Ses propriétés mécaniques et optiques sont ainsi localement modifiées, comme par exemple l'indice de réfraction. Ceci est dû à deux effets principaux : la polarisabilité et la taille de l'ion échangé.

Un modèle théorique donne la variation d'indice de réfraction ∆n après un échange ionique [101] : ∆n = Vχ o R - Ro V Vo , (2.22) où χ est le rapport entre le nombre d'ions diffusés et le nombre d'ions non échangés dans le verre, Vo est le volume du verre par mole d'atome d'oxygène, Roest la réfractivité par mole d'atomes d'oxygène, ∆V et ∆R sont les variations respectivement de Vo et Ro après l'échange ionique. ∆R est lié à la différence de polarisabilité électronique et ∆V à la différence de volume.

Ce type de relation s'applique très bien pour des échanges où les polarisabilités électroniques entre A et B sont différentes mais leur volume proche. En revanche, dans le cas où leur volume diffère fortement, de fortes contraintes mécaniques peuvent alors s'exercer entre la partie échangée et non échangée du verre. Des variations d'indices de

Sel fondu B+ NO3- O2- Si4+ A+ Verre NO3+

réfraction supérieures à celles prédites par la relation 2.22 [102] peuvent alors être observées grâce à ces contraintes mécaniques.

En général, la relation 2.22 est peu utilisée en pratique pour la conception de composants d’optique intégrée. Très souvent, nous nous contentons d’admettre que ∆n est proportionnel à la concentration relative des ions dopants :

nverre = ∆n.f(χ,y) +nb (2.23) où nb est l’indice du verre et f(χ,y) est une fonction qui décrit la distribution de profil d’indice du guide d’onde à l’intérieur du verre. C’est cette relation que nous utiliserons par la suite de l’étude.

2.2.4.2 Les ions dopants et le choix du verre

Les ions monovalents utilisés pour l'échange ionique des verres à base d'oxydes sont principalement les ions Na+, K+, Rb+, Ag+, Cs+ et Tl+. Dans le tableau 2.1, nous présentons les différences de polarisabilités électroniques et de rayons ioniques d'ions les plus utilisés au laboratoire IMEP. Suivant les propriétés recherchées, il faut trouver le verre ainsi que la paire d'ions participant à l'échange ionique. Nous utilisons principalement à l’IMEP des verres silicates. Ainsi les échanges les plus courants se font avec les ions Ag+↔Na+, K+↔Na+ et Tl+↔K+ (ou Tl+↔Na+). Les verres sont en général des verres commerciaux tels que le B1664 de Corning, le B270 de Schott ou des verres flottés tels que le verre Menzel. Toutefois, certains verres spéciaux sont également utilisés.

Tableau 2.1 Ions dopants utilisés à l’IMEP.

Ion dopant (B+) Ion substrat (A+) Polarisabilité 3] Rayon ionique [Ǻ] n Pertes Remarques Na+ - 0,43 0,95 - - - K+ Na+ 1,33 1,33 0,001 <0,2 dB/cm Biréfringence, contraintes Ag+ Na+ 2,4 1,26 0,1 <0,2 dB/cm précipités Tl+ Na+ ou K+ 5,2 1,49 0,1 <0,2 dB/cm très toxique

- L'échange Ag+Na+ permet d'obtenir des guides de très bonne qualité, avec un contraste d'indice relativement élevé (∆n≈ 0,1). De plus, l'augmentation de l'indice est essentiellement obtenu grâce à la différence de polarisabilité des deux ions participant à l'échange et non à cause de contraintes mécaniques induites dans le verre. Cela permet d'obtenir des biréfringences très faibles et de réaliser l'enterrage des guides.

Malheureusement, l'argent sous forme ionique a une très forte tendance à se réduire sous forme métallique en formant des agrégats de taille nanométrique, qui absorbent très fortement la lumière. Pour cette raison, la mise en œuvre d'une technologie d'échange à l'argent est délicate et la composition du verre doit être bien maîtrisée pour éviter la présence de métaux de transition qui ont une tendance marquée à réduire l’ion argent. La réactivité de l'argent rend préférable la réalisation de guides enterrés pour obtenir des composants à faible perte (< 0,1 dB/cm).

- L'échange K+Na+ permet d'obtenir des contrastes d'indice maximaux de l'ordre de 0,01 grâce aux contraintes mécaniques introduites dans le verre à cause de la différence de taille ionique entre le potassium et le sodium. Cette caractéristique rend l'échange potassium/sodium inadapté à la fabrication de guides enterrés et rend donc difficile 1a réalisation des composants présentant de très faibles pertes de couplage avec les fibres optiques, même si les guides de surface peuvent être de bonne qualité. C’est néanmoins un échange bien maîtrisé aujourd’hui qui permet de réaliser certains prototypes assez rapidement.

- L'échange Tl+K+ permet d'obtenir des guides avec un contraste d'indice élevé (∆n≈ 0,1), sans les problèmes liés à la réactivité de l'argent. L'augmentation d'indice est due à la différence de polarisabilité, ce qui permet de minimiser l'effet des contraintes mécaniques dans la structure. Ceci permet de réaliser des guides avec des pertes de propagation faibles qu'ils soient à la surface ou enterrés dans le verre. L'inconvénient majeur de cette technologie est la toxicité du thallium, ce qui entraîne la nécessité de travailler sous boîte à gants en atmosphère contrôlée. De plus, nous travaillons à des températures proches de la dévitrification du verre. Une variante possible de l'échange est représentée par le couple T1+↔Na+, mais la forte disparité des rayons ioniques pose des problèmes au niveau des contraintes mécaniques qui peuvent être développées pendant l'échange.

2.2.4.3 Technique de réalisation de guides canaux par échange d’ions

Après vérification de l’état de surface de l’échantillon, les différentes étapes de fabrication des guides optiques confinés sont les suivantes :

- Nettoyage avec un produit tensioactif

- Dépôt par évaporation ou bien pulvérisation d’une couche d’aluminium d’environ 220 nm sur le verre.

- Dépôt d’une couche de résine photosensible sur la couche d’aluminium. - Exposition de la résine aux rayons UV via un masque dont on veut reporter

les motifs sur le verre.

- Développement de la résine, qui consiste à mettre l’échantillon dans une solution spécifique afin d’éliminer la résine exposée aux UV (aux endroits non protégés par le masque).

- Gravure de l’aluminium aux endroits non protégés par la résine. Ceci est réalisé en plaçant l’échantillon dans une solution d’alu-etch. L’aluminium restant sur le verre a pour rôle d’empêcher, lors de l’échange ionique, le phénomène de diffusion. Celui-ci se produit alors uniquement sur les parties où nous voulons réaliser les guides.

- Retrait de la résine photosensible sur toute la surface du substrat à l’aide d’un rinçage à l’acétone.

- Vérification au microscope de l’état de gravure des guides et de leurs dimensions afin de s’assurer du bon déroulement du processus.

- Echange d’ions : l’échantillon obtenu est immergé dans une solution de sels fondus, qui fournit les ions à échanger avec ceux du verre. Cette phase produit des guides en surface dont la géométrie suit les ouvertures de la couche masquante.

- Enterrage : si nécessaire une étape d’enterrage peut être réalisée pour que les ions migrent vers l’intérieur de l’échantillon. Quand le verre sort du bain, une diffusion des ions persiste à haute température : c’est la diffusion thermique. C'est une première méthode simple pour enterrer légèrement les guides. Une deuxième méthode d’enterrage est l'application d'un champ électrique dans la lame de verre pour créer un courant qui déplace les ions B+verre. Cette méthode permet d'enterrer plus profondément

les guides sous la surface et d'améliorer le profil d'indice en le rendant plus symétrique.

Le schéma de la figure 2.6 résume les étapes de fabrication :

Figure 2.6 Principe de réalisation des guides canaux par échange d’ions

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