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I- Objectifs de thèse

A mon arrivée au laboratoire, les effets cytopathiques (cytosquelette et cycle cellulaire) induits par Cif avaient été décrits. Au niveau du cycle cellulaire, il fut établi que l’accumulation des cellules en phase G2 induite par Cif est associée à l’accumulation de la

forme inactive de CDK1. Toutefois, la voie de signalisation cellulaire induite par Cif pour activer le point de contrôle en G2/M restait inconnue. Là résidait l’objet de mon projet qui

consistait à mettre en lumière la voie de signalisation eucaryote piratée par Cif.

Dans cette partie « Résultats », je dévoilerai les deux grands axes du travail que j’ai réalisé. Premièrement, j’ai étudié deux voies de signalisation cellulaire pouvant conduire à l’inhibition de l’activité de CDK1 à savoir la présence de dommages à l’ADN (article 1) ou la participation des CKIs (article 2). La présence de lésions sur l’ADN et l’activation de cette voie ont été explorées car ce type de dommage induit une cascade de signalisation qui aboutirait à l’arrêt en phase G2 (Sancar et al., 2004). Une fois cette hypothèse écartée,

pourquoi s’intéresser aux CKIs alors que la protéine CDK1 est maintenue inactive par une phosphorylation inhibitrice ? Pour deux raisons principales : tout d’abord parce que pour être totalement active, la kinase CDK1 active une boucle d’autoamplification se traduisant par des rétrocontrôles positifs et négatifs envers respectivement ses activateurs (les phosphatases Cdc25s) et ses inhibiteurs (les kinase Myt1 et Wee1) (Lindqvist et al., 2009). En se fixant aux CDKs et en inhibant leur activité, les CKIs pourraient empêcher la mise en place de ces boucles de rétrocontrôle et donc expliquer le maintien de la forme phosphorylée et inactive de CDK1 en présence de Cif. La deuxième raison résulte de la constatation que Cif inhibe non seulement la transition G2/M mais aussi la transition G1/S. Le contrôle de ces deux transitions

fait intervenir des protéines communes parmi lesquelles les CKIs. Le second axe de mon travail a consisté à caractériser un nouvel effet de Cif sur les cellules eucaryotes qu’est l’apoptose (article 3). A travers ces trois articles, nous verrons que Cif met en lumière un nouveau mécanisme de contrôle du cycle cellulaire eucaryote par les bactéries. Il nous apparaîtra également que l’effet cyclomoduline de Cif ne pourrait être qu’une étape intermédiaire dans l’établissement de l’apoptose.

II- Article 1 :

Escherichia coli cyclomodulin Cif induces G2 arrest of the host cell cycle without

activation of the DNA-damage checkpoint-signaling pathway.

Frédéric Taieb, Jean-Philippe Nougayrède, Claude Watrin, Ascel Samba-Louaka et Eric Oswald.

Cellular Microbiology (2006), Vol 8 (12), p1910 – 1921.

Dans cet article, nous avons étudié la voie de signalisation cellulaire activée suite à des dommages sur l’ADN en présence de Cif. En effet, dans de nombreuses situations, l’activation du point de contrôle en G2/M fait suite à ce type de dommages. Comme la

protéine Cif, la cyclomoduline CDT provoque un arrêt du cycle cellulaire en G2/M ainsi

qu’une apparition de fibres de stress. Or CDT possède une activité DNase et induit des cassures double-brins de l’ADN eucaryote (Frisan et al., 2003). Cette similitude dans les effets entre Cif et CDT nous a conduits à explorer la possibilité que Cif provoque des dommages au niveau de l’ADN des cellules infectées.

Tout d’abord, nous avons montré que la protéine Cif était présente et fonctionnelle dans des souches d’EPEC d’origine humaine et animale, B171 et E22 respectivement. Nous avons également prouvé que Cif est nécessaire mais aussi suffisant pour induire les effets cytopathiques sur la cellule eucaryote.

Pour étudier les effets des cyclomodulines sur les cellules eucaryotes, nous avons développé une technique de microbiologie cellulaire qui est utilisée dans les 3 articles présentés. Brièvement, les cellules eucaryotes sont co-cultivées en présence de la souche bactérienne d’intérêt pendant 2 heures. La bactérie est alors éliminée par lavages et les cellules sont incubées en présence d’une haute concentration d’antibiotique jusqu’à l’analyse. Cette technique nous permet d’observer des effets tardifs jusqu’à 72h après infection alors que les analyses « classiques » développées par d’autres laboratoires se limitent généralement à des effets immédiats (quelques heures après infection).

Les cellules HeLa sont le modèle cellulaire utilisé au laboratoire pour étudier les effets de Cif. Cependant, les entérocytes sont la cible physiologique des EPEC. Nous avons donc vérifié l’effet de Cif sur une lignée cellulaire humaine provenant d’un carcinome du colon (Caco-2) ainsi que sur des cellules non-transformées de rat venant de l’intestin grêle (IEC-6).

59 Dans les deux cas, nous obtenons un arrêt du cycle cellulaire et une accumulation de phospho- CDK1. Toutefois, contrairement aux cellules HeLa, aucune modification du cytosquelette n’est observée sur les cellules Caco-2 et IEC-6. Ces résultats confirment que l’arrêt du cycle cellulaire ne résulte pas de l’activation des fibres de stress et des plaques d’adhésion focale. Contrairement à CDT, Cif ne provoque pas de dommages au niveau de l’ADN eucaryote. En effet, nous n’observons aucune activation (phosphorylation) de l’histone H2AX, témoin des cassures double-brins de l’ADN (Rogakou et al., 1998). De même, les protéines « senseurs » ATM et ATR (ATM and Rad3 related) qui détectent les dommages et activent les voies de signalisations en aval, ne sont pas activées par Cif.

Les bactéries, par l’intermédiaire de leurs cyclomodulines, ont formidablement appris à détourner les voies de signalisation de la cellule à leur profit. Pour activer le point de contrôle en G2/M, Cif pouvait détourner un des composants de la signalisation en aval des protéines

ATM et ATR sans pour autant interférer avec l’ADN. Nous avons vérifié cette hypothèse et aucune molécule de la voie de signalisation faisant suite à des dommages à l’ADN ne semble être piratée. En effet, l’utilisation de la caféine et de UCN-01, respectivement inhibiteurs pharmacologiques des kinases ATM/ATR et des protéines Chks, ne restaure pas l’entrée en mitose. De plus, les protéines Chks ne sont pas activées et le niveau ainsi que la localisation des phosphatases Cdc25s ne sont pas modifiés en présence de Cif. La phosphorylation inhibitrice de CDK1 se maintient y compris en présence des Cdc25s nucléaires.

Si l’infection des cellules eucaryotes avec une EPEC qui exprime Cif n’active pas la voie de réponse aux dommages à l’ADN, elle ne la bloque pas non plus. En effet, nous avons montré que le traitement par la toxine CDT des cellules infectées avec une EPEC qui exprime Cif active la voie de réponse aux dommages à l’ADN.

Cif met donc en jeu un mécanisme original qui empêche l’activation de CDK1 sans passer par la voie de réponse aux dommages à l’ADN.

Cellular Microbiology (2006) 8(12), 1910–1921 doi:10.1111/j.1462-5822.2006.00757.x First published online 11 July 2006 Blackwell Publishing LtdOxford, UKCMICellular Microbiology1462-5814Journal compilation © 2006 Blackwell Publishing Ltd; No claim to original French government works???200681219101921Original ArticleBacterial effector Cif interferes with the host cell cycleF. Taieb et al.

Received 3 January, 2006; revised 25 May, 2006; accepted 29 May, 2006. *For correspondence. E-mail f.taieb@envt.fr; Tel. (+33) 5 61 19 32 86; Fax (+33) 5 61 19 39 75.

Escherichia coli cyclomodulin Cif induces G

2

arrest of

the host cell cycle without activation of the DNA-damage

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