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MALADIE DE BEHCET

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Academic year: 2022

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Résumé :La maladie de Behçet est une vascularite à prédominance veineuse. Elle a été décrite initialement comme une triade clinique associant aphtose buccale, aphtose génitale et uvéite antérieure.

Elle touche principalement les sujets jeunes de sexe masculin, originaires d’Extrême-Orient et du bassin méditerranéen. Sa pathogénie est mal connue. Elle met en jeu une hyperréactivité des polynucléaires neutrophiles en rapport avec un terrain génétique prédisposant, des anomalies de fonctionnement des lymphocytes T gd, et des agents microbiens qui joueraient le rôle de facteurs déclenchants. Les manifestations cliniques les plus fréquentes de la maladie de Behçet sont cutanéo-muqueuses, oculaires, vasculaires, neurologiques et articulaires. Il n’existe pas d’anomalie biologique spécifique et son diagnostic reste à l’heure actuelle purement clinique. Son traitement, non codifié, est seulement suspensif. Il repose sur la colchicine, les anti-inflammatoires et différents immunosuppresseurs.

Nous nous proposons de faire une mise au point sur ce sujet à partir de quelques données bibliographiques récentes.

Mots-clés :maladie de Behçet, vascularite , aphtose, uvéite.

MALADIE DE BEHCET BEHCET’S DISEASE

N. FILALI-ANSARY, S. HANNAT, H. AL HALOUI, K. LEBBAR, A. MOHATTANE, A. MAAOUNI, A. BERBICH.

Abstract :Behçet’s disease is a predominantly venous vasculitis. It was first described as a clinical triad associating oral aphtae, genital aphtae and anterior uveitis. It concerns mainly young subjects of male gender originating from the Far-East and the Mediterranean basin. Its pathogenesis is not well known. It comprises neutrophil hyperreactivity owing to genetic predisposition, abnormalities in gd T cell function and microbial agents that could act as a triggering factor. The most frequent clinical manifestations are cutaneo-mucous, ocular, vascular, neurological and articular.

There is no specific biological abnormality and diagnosis is actually still purely based on clinical evidence.

Treatment is not codified and only suspensive. It is based on colchicine, anti-inflammatory drugs and different immuno-supressives. In this work, we present a review on this subject according to some recent bibliographic data.

Key-words :Behçet’s disease, vasculitis, uveitis.

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Tiré à part :N. Filali-Ansary service de médecine « A » - Hôpital Ibn Sina, Rabat – Maroc.

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Maladie de Behcet N. Filali-Ansary et coll.

INTRODUCTION

La maladie de Behçet est une vascularite systémique d’origine inconnue évoluant par poussées et rémissions (1). Elle a été reconnue dans les années 1930 comme entité clinique particulière par le dermatologue turc dont elle porte le nom (2). Néanmoins, la revue critique de la littérature antérieure relève des observations concordantes dès l’antiquité, en particulier à travers les écrits d’Hippocrate, puis ceux de Blüthe, de Planneret Remenovsky, de Shigeta, de Gilbertet du grec Adamantiadesauquel certains auteurs tiennent particuliérement à rendre hommage en associant son nom à celui de Behçet pour désigner cette affection (1,2). Cette dernière, d’abord rapportée comme une triade clinique associant aphtose bipolaire et uvéite à hypopion (3), a vu son cadre s’élargir au fur et à mesure de la description des autres manifestations, en particulier vasculaires, articulaires, neurologiques, digestives, notamment grâce aux travaux de Touraine(2).

Thème de réunions scientifiques régulières à l’échelle internationale, la maladie de Behçet, s’est vue consacrer de nombreux travaux tant sur le plan fondamental que clinique et thérapeutique. Ces derniers ont débouché sur une pléthore d’informations sans que toutes les inconnues soient pour autant élucidées.

METHODE ET RESULTATS

Nous avons procédé à une recherche d’articles portant sur la maladie de Behçet parus au cours des 20 dernières années par le moyen de la base de donnée Medline. Nous avons retenu 64 références, en plus de l’article princeps publié par Behçet lui-même. En la matière, la littérature médicale foisonne avec en moyenne 50 issues par an. En plus d’une actualisation récente [1], nous avons sélectionné 2 à 3 références par type de manifestation clinique et les plus récents en terme d’étiopathogénie. Concernant la thérapeutique, l’accent a été mis sur les essais thérapeutiques réalisés jusque là.

ANALYSE ET DISCUSSION

La maladie de Behçet présente une distribution géographique originale, selon l’ancienne « route de la soie » (1). Elle est fréquente au Japon et dans les pays du bassin méditerranéen.

Elle est également décrite de manière sporadique par ailleurs.

Sa prévalence est en augmentation du fait d’une meilleure reconnaissance. Elle est estimée à 10 pour 100000 habitants au Japon avec une disparité entre le Nord et le Sud de l’archipel. Elle serait de 16 à 100 pour 100000 habitants en Iran, 20 pour 100000 en Arabie Saoudite et de 0,3 pour

100000 habitants en Europe du Nord (1,4).

C’est une maladie qui touche principalement l’adulte jeune et qui débute en général à la troisième décennie. La répartition selon le sexe n’est pas uniforme : dans les pays du pourtour méditerranéen, ce sont les hommes qui sont touchés le plus souvent avec un sex-ratio de 4/1 en moyenne, alors que les femmes sont atteintes avec une égale fréquence si ce n’est plus en Extrême-Orient, en Iran et dans les formes sporadiques (1,4,5).

Des formes familiales sont décrites mais n’excèdent pas les 10% dans les plus grandes séries (1,5). Il semble exister une anticipation génétique, la maladie survenant à un âge plus jeune chez les descendants des sujets atteints (6).

En terme d’étiopathogénie, actuellement trois phénomènes semblent interagir pour favoriser la survenue d’une maladie de Behçet : une hyperréactivité des polynucléaires neutrophiles sous-tendue par l’antigène HLA B5 et plus particulièrement B51, des anomalies de l’immunité à médiation cellulaire et des agents exogènes de nature infectieuse (1,7,8,9).

En effet, les lésions histologiques comprennent une infiltration aseptique par des polynucléaires neutrophiles.

Ces derniers présentent plusieurs anomalies, en particulier l’augmentation du chimiotactisme, de la production de superoxydes, de médiateurs chimiques de l’inflammation et une expression accrue de molécules d’adhésion (10).

Ces anomalies sont également retrouvées chez les sujets sains HLAB51 (10). Les études de biologie moléculaire ont démontré que cet antigène n’était pas directement responsable, mais plutôt en déséquilibre de liaison avec un autre gène situé dans la même région identifié au MICA (MCH Class I Chain-related Gene A) (9).

Le sérum des patients atteints de maladie de Behçet, possède un effet de stimulation sur les neutrophiles des sujets normaux, suggérant la présence de facteurs humoraux activateurs. Par ailleurs, les taux de TNFa, IL1b et IL8 produits par les lymphocytes Tgd sont anormalement élevés indépendamment de l’activité de la maladie (1,7,10). Ces derniers sont prépondérants au niveau des lésions histologiques et contribuent à une activation polyclonale les lymphocytes B avec formation de complexes immuns (7,10). In vivo, l’excès de cytokines contribue au priming des polynucléaires neutrophiles qui vont réagir vivement en produisant à leur tour du TNFa, de l’IL6 et de l’IL8 en quantité plus importante que chez un sujet dont les polynucléaires neutrophiles sont indemnes. Ils contribuent ainsi à l’entretien des phénomènes inflammatoires selon un mode autocrine (7,8). Les cellules endothéliales, également activées par les cytokines lymphocytaires vont surexprimer les molécules d’adhésion à leur surface et interagir avec les polynucléaires neutrophiles (10). L’ensemble de ces phénomènes explique les lésions de vascularite qui rendent compte du substratum anatomique de la maladie de Behçet (1,11).

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N. Filali-Ansary et coll. Maladie de Behcet

La preuve de l’implication d’agents microbiens a été apportée par de nombreuses études. Sont principalement incriminés le Streptocoque sanguis et l’Herpès simplex virus 1 (1,8,12). D’autre part, les lymphocytes T des patients prolifèrent intensément en présence d’un peptide spécifique de la HSP-60 (Human Heat Shock Protein) (1,7). La séquence d’acides aminés 336-351 de l’HSP-60 est en réalité semblable mais non identique à un peptide mycobactérien spécifique dénommé HSP-65 (1,7). L’exposition répétée à cette protéine mycobactérienne peut à la longue rompre la tolérance à l’HSP-60 (du soi) et induire l’activation puis la sélection de lymphocytes T autoréactifs par un mécanisme de mimétisme moléculaire (1,7,8).

De nombreuses particularités distinguent la maladie de Behçet des autres maladies auto-immunes dont la distribution géographique, la prédominance masculine, la rareté d’association à d’autres syndromes auto-immuns et l’absence d’auto- anticorps, à tel point qu’elle devrait être exclue de ce cadre d’après certains (13). La localisation préférentielle au niveau d’un organe ou l’autre reste encore sans explication.

Quel que soit l’organe atteint, les lésions histologiques sont caractérisées par une vascularite avec infarctus qui atteint préférentiellement les veines et veinules (14,15).

Au stade aigu, on observe une vascularite leucocytoclasique plus ou moins associée à une nécrose fibrinoïde. Par la suite, l’infiltrat devient lymphoïde avec disparition de la dégénérescence fibrinoïde (14).

La maladie de Behçet se distingue des autres vascularites par la reproductibilité de ces mêmes lésions par une simple injection intra-dermique de sérum physiologique (16).

Cependant, il n’y a pas de critère histologique spécifique, le diagnostic reposant à ce jour sur la clinique.

La maladie de Behçet s’exprime de manière variable sur le plan clinique, d’un malade à l’autre et d’une poussée à l’autre. Les principales manifestations sont cutanéo-muqueuses, oculaires et vasculaires.

L’aphtose buccale inaugure l’entrée dans la maladie dans 75% des cas. Elle est quasi constante au cours de l’évolution (95 à 100%) et récidive avec une fréquence variable selon les individus, en règles plus de 3 fois par an.

La lésion élémentaire est représentée par une ulcération douloureuse à fond purulent jaunâtre, entourée d’un halo d’érythème, dont la taille varie de quelques millimètres à plusieurs centimètres. Elle peut siéger au niveau de la langue, des gencives, du palais, des faces internes des joues ou même au pharynx, et disparaît sans laisser de trace (1,4,5,17).

L’aphtose génitale représente le deuxième signe cardinal de la maladie. Elle est vue chez 63 à 88% des patients au cours de l’évolution. L’aspect est le même que celui des aphtes oraux, à la différence près que la cicatrisation est plus longue et qu’il persiste habituellement une cicatrice.

Le siège préférentiel chez l’homme est représenté par le scrotum, le sillon balano-prépucial et le gland. Chez la

femme, ce sont les grandes et petites lèvres, le vagin et le col de l’utérus qui sont intéressés (1,4,5,17).

La pseudofolliculite (50%), plus fréquente chez les sujets de sexe masculin, regroupe des lésions papuleuses puis pustuleuses, à contenu aseptique, non centrées par le poil.

Elles siègent habituellement au niveau du dos, de la poitrine et des cuisses, et disparaissent en laissant des cicatrices pigmentées (1,4,17).

Une réaction d’hypersensibilité aux points de ponction veineuse ou lors de l’injection intradermique d’eau distillée, ou même à la simple piqûre par une aiguille G-20 avec lecture à 48 heures (pathergy test) est observée chez 30 à 75% des patients. Elle reproduit une lésion similaire à une pseudofolliculite (1,4,5,17). Elle n’est pas aussi spécifique qu’on le pensait, puisqu’elle peut se voir dans les spondylarthropathies et les leucémies myéloïdes chroniques sous interféron-α(17).

L’érythème noueux siège avec prédilection aux membres inférieurs, et se voit dans 25 à 50% des cas, principalement de sexe féminin (1,4,17).

Tous ces signes cutanéo-muqueux font partie des critères diagnostiques du Groupe International d’étude de la maladie de Behçet (ISG) (18). C’est dire combien ils sont à rechercher minutieusement.

L’atteinte oculaire, notée chez 40 à 75% des patients, représente un enjeu pronostique dans le cours évolutif de la maladie (1,4,5,19,20), et fait également partie des critères diagnostiques de l’ISG (18). En effet, malgré les thérapeutiques agressives mises en jeu, la cécité survient chez 25% des patients après 5 ans d’évolution (1,20). En outre, elle est rarement le mode d’entrée dans la maladie de Behçet (8 à 13%), sauf chez l’enfant et chez les patients non issus des zones d’endémie (1,4). La bilatéralité est notée jusque dans 90% des cas, avec une nette prédilection pour les hommes âgés de moins de 25 ans (1,19,20).

La maladie de Behçet est à l’origine de 25% des uvéites au Maroc (19). La classique uvéite antérieure à hypopion, premier signe ophtalmique de la maladie à avoir été reconnu (3), n’en est pas la manifestation la plus fréquente (1,4). Elle réalise un épanchement purulent de la chambre antérieure de l’œil, de couleur blanc-jaunâtre, aseptique et mobile avec les mouvements de la tête (3). L’uvéite postérieure, plus fréquente et corrélée à un plus grand taux de cécité que la forme antérieure ou intermédiaire (pars planite), réalise une inflammation de la rétine et/ou de la choroïde avec altération du vitré (19). L’uvéite peut être totale (19). L’atteinte vasculaire du pôle postérieure de l’œil prend essentiellement la forme de périphlébites rétiniennes (1,19,20). A un stade précoce, la seule traduction en est une hyperperméabilité vasculaire à l’angiographie fluoresceinique (1). L’œdème papillaire est en rapport avec une hypertension intra-crânienne le plus souvent (4). Les occlusions vasculaires veineuses ou artérielles, l’inflammation de la conjonctive ou

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Maladie de Behcet N. Filali-Ansary et coll.

de la sclère sont plus rares (1,4,5,19).

Le tropisme vasculaire de la maladie de Behçet fait toute sa particularité, et comporte aussi bien l’atteinte des veines que celle des artères. Elle est observée chez 20 à 60% des malades (4,5,21,22), et principalement chez les sujets de sexe masculin (1,4,22,23). L’inflammation pariétale vasculaire semble en être le facteur primitif, sans qu’un état prothrombotique ne puisse formellement être mis hors de cause (22,23).

Les thromboses veineuses sont particulièrement fréquentes sur ce terrain (20%) et se singularisent par leur caractère volontiers extensif mais peu emboligène, avec développement d’une circulation collatérale importante et reperméabilisation possible à la longue (5,22,23). Elles peuvent concerner les territoires superficiels et poser un problème de diagnostic différentiel avec les lésions d’érythème noueux (23). Les thrombophlébites profondes intéressent surtout les axes veineux des membres inférieurs, mais aussi les veines caves inférieure et supérieure et les veines des membres supérieurs (4,5,21,22,23,24,25). L’extension aux veines sus- hépatiques aboutit à un syndrome de Budd-Chiari, et de rares observations d’infarctus entéro-mésentérique d’origine veineuse ont été rapportées (4,26,27). L’atteinte des sinus veineux intra-crâniens est classiquement intégrée dans les manifestations neurologiques de la maladie.

L’atteinte artérielle est plus rare mais de pronostic redoutable, en particulier quand elle se présente sous la forme d’anévrismes pulmonaires dont la rupture peut entraîner une hémorragie foudroyante (4,5,21,28). Elle semble être sous-estimée, puisqu’une étude autopsique japonaise l’a retrouvée dans 1/3 des cas (15). Tous les territoires artériels peuvent être concernés, avec par ordre de fréquence l’aorte abdominale, les artères pulmonaires, les axes fémoro-poplités (4,15,28). Des anévrismes des artères cérébrales et coronaires ont également été signalés (4,15,29). Les formes occlusives et/ou sténosantes sont exceptionnelles (1,15,4,28). La pratique d’une angiographie conventionnelle expose à la constitution d’un anévrisme au site de ponction artérielle, dont le mécanisme semble mettre en jeu une réaction analogue à l’hypersensibilité cutanée (28).

L’atteinte du système nerveux au cours de la maladie de Behçet met en jeu le pronostic fonctionnel. Elle est retrouvée chez 10 à 25% des patients (1,5,30,31,32), mais semble plus fréquente puisqu’elle a été retrouvée dans 34% des cas d’une série autopsique japonaise (15). La prédominance masculine est de règle (1,30,31,32,33). Elle survient habituellement après les autres manifestations de la maladie, la thrombophlébite cérébrale inaugurant parfois le tableau clinique (31).

Il s’agît essentiellement d’atteintes de type central (30,31,32,33). Les formes périphériques sont exceptionnelles et actuellement remises en

question quant à leur réelle appartenance à la maladie (30).

Deux entités différentes sont à distinguer dans le «neuro- Behçet» en fonction du mécanisme physiopathologique mis en jeu (1,30).

Dans la forme où le mécanisme vasculaire prédomine, on classe les thrombophlébites des veines intra-crâniennes, et les manifestations en rapport avec des anomalies artérielles.

La maladie de Behçet est la première cause de thrombophlébite cérébrale, cette dernière comptant pour un tiers de l’ensemble des manifestations neurologiques (34,35). Le pronostic est bon malgré des récidives fréquentes (30). Sont essentiellement concernés les sinus veineux, mais aussi les veines corticales et les veines profondes. La traduction clinique est dominée par le syndrome d’hypertension intra-crânienne avec possibilité de survenue de crises convulsives et de déficits neurologiques qui récupèrent sans séquelles (1,30,34). L’atteinte artérielle peut prendre la forme d’un accident vasculaire ischémique en cas d’artérite ou d’une hémorragie cérébrale en cas de rupture d’anévrisme (30).

Dans la forme dite parenchymateuse, les lésions anatomiques sont davantage médiées par une infiltration aseptique par des polynucléaires neutrophiles que par l’intermédiaire d’une vascularite (30). L’évolution se fait de manière rémittente ou progressive, et pose quelques fois un problème diagnostique avec la sclérose en plaques, surtout quand les autres signes de la maladie de Behçet font défaut (30). Le siège topographique par excellence est le tronc cérébral. La localisation hémisphérique, cérébelleuse ou médullaire n’est pas rare (30,31,32,33,36). Elle s’accompagne d’une inflammation diffuse du système nerveux central qui réalise un tableau de méningo- encéphalite sub-aiguë (30). La clinique est dominée par les déficits moteurs, l’atteinte pyramidale, l’atteinte des nerfs crâniens (troubles de la déglutition et surdité) et les troubles psychiatriques sous forme d’un syndrome pseudobulbaire (30). Les signes sensitifs, cérébelleux et la myélite transverse sont plus rares (30). Des troubles de la mémoire et de l’attention sont fréquents (1). Le liquide céphalo-rachidien est inflammatoire avec une pleiocytose dominée par les lymphocytes (30,31,32). La présence de polynucléaires neutrophiles peut prêter à confusion avec une méningite septique, en particulier chez les patients sous immunosuppresseurs (30).

Les céphalées sont à considérer avec précaution au cours de la maladie de Behçet. Habituellement, elles s’intègrent dans le cadre d’une hypertension intra-crânienne ou d’une méningo-encéphalite (1,30). Cependant, certains patients souffrent de céphalées isolées dont l’intégration parmi les signes neurologiques de la maladie reste discutée (4,30).

L’imagerie par résonance magnétique représente actuellement l’examen morphologique de choix, aussi bien pour les atteintes vasculaires que parenchymateuses. Elle a relégué au second plan la tomodensitométrie (30). L’angiographie cérébrale reste indiquée pour mettre en évidence les thrombophlébites,

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N. Filali-Ansary et coll. Maladie de Behcet

les anévrismes et les sténoses inflammatoires (30), mais on lui préfère chaque fois que possible l’angio-IRM qui reste moins invasive (30).

L’atteinte articulaire se voit chez 40 à 60% des patients (1,4,37). Il s’agit essentiellement de formes périphériques aiguës ou subaiguës. A côté des arthralgies inflammatoires qui représentent la manifestation la plus fréquente, on reconnaît des monoarthrites, des oligoarthrites et plus rarement des polyarthrites (1,4,37). Les grosses jointures sont les plus touchées, principalement celles des membres inférieurs (genoux et chevilles) (1,4,37). Le caractère déformant et/ou destructif est inhabituel (1,4,37).

L’association à une atteinte axiale est rapportée avec une fréquence variable, certains la considérant comme manifestation à part entière de la maladie de Behçet, d’autres l’excluant de ce cadre. Une sacroiliite serait présente dans 34% des cas et également une authentique spondylarthrite ankylosante avec HLA B27 jusque dans 10% des cas (1).

Quelques formes pseudo-goutteuses, de rare nodules pseudo- rhumatoïdes ainsi que des ruptures aiguës de kystes synoviaux poplités sont signalés (37).

Globalement, les manifestations thoraciques de la maladie de Behçet sont peu fréquentes (1,4,5). En dehors de l’atteinte des gros troncs vasculaires, elles traduisent essentiellement une vascularite des petits vaisseaux, aussi bien dans la circulation pulmonaire que systémique (38).

La clinique est dominée par les hémoptysies répétées (38,39,40). On dénombre des infarctus pulmonaires, des réactions pleurales à ces derniers et des pleurites avec liquide inflammatoire, et quelques fois des adénopathies médiastinales (38,39). Les embolies pulmonaires demeurent peu fréquentes sur ce terrain, malgré la proportion élevée qu’ont ces patients à développer des thromboses veineuses (1,23,38).

L’atteinte cardiaque dans le cadre de la maladie de Behçet, retrouvée dans 6% des cas, semble être sous-estimée (15,29).

La péricardite, d’évolution bénigne, en est la manifestation la plus fréquente (29). L’angéite des coronaires peut aboutir à la constitution de sténoses ou d’anévrismes, et détermine une atteinte ischémique qui peut être silencieuse (1,29).

Des atteintes valvulaires ont été rapportées, en particulier de la mitrale et de l’aortique (1,29). Quelques observations de fibrose endomyocardique et de thrombose intracardiaque associée aux anticorps anti-phospholipides sont signalées (41,42). Les troubles du rythme et de la conduction demeurent exceptionnels (29).

La présence concomitante d’anévrismes pulmonaires a été soulignée par plusieurs auteurs (29,41,42).

Les manifestations digestives de la maladie de Behçet sont rapportées avec une fréquence variable d’une région à l’autre (4,43). Elles prennent essentiellement la forme d’ulcérations digestives, en particulier au niveau de l’iléon terminal, du caecum et du côlon, rarement à l’estomac

(1,44,45). Dans ce dernier cas, elles sont à différencier des lésions occasionnées par le traitement anti-inflammatoire (1).

L’évolution vers la perforation est possible et est grevée d’une lourde mortalité (44,45). Les péritonites par perforation d’ulcérations intestinales sont de traitement délicat. La réalisation d’une résection intestinale constitue souvent l’unique solution. Les complications post-opératoires sont fréquentes (péritonite secondaire par lâchage de sutures, abcès et fistules) ainsi que la récidive dans les 6 mois (44,45).

Par opposition aux autres vascularites, l’atteinte rénale au cours de la maladie de Behçet est rare (46).

Elle peut revêtir l’aspect d’une néphropathie amyloïde avec dépôt AA (46,47,48). La différence entre amylose secondaire et amylose de la maladie périodique peut être difficile, compte tenu de la fréquence de ces deux affections dans le bassin méditerranéen. L’apport récent de la biologie moléculaire au diagnostic de la maladie périodique devrait permettre de trancher (49).

Une quarantaine d’observations de néphropathies glomérulaires, principalement à IgA, sont rapportées dans la littérature (46,50).

Elles regroupent quelques cas d’atteinte musculaire (51), des observations de syndrome myélodysplasique (52), des observations où l’entrée dans la maladie a été marquée par une fièvre prolongée inexpliquée (53).

Un syndrome inflammatoire biologique est habituellement constaté au cours des poussées de la maladie. Il comprend une accélération de la vitesse de sédimentation, une élévation des protéines de la phase aiguë de l’inflammation telles la C- reactive protein, des α2-globulines. Les taux des IgA et des IgM, des fractions C3 et C4 du complément et des complexes immuns circulants sont aussi augmentés (1).

Quelques auto-anticorps sont parfois retrouvés, sans que leur signification pathologique ne soit toujours établie. Il s’agît des anticorps anti-phospholipides, des anticorps anti-cellules endothéliales et des anticorps anti-cytoplasme de polynucléaires neutrophiles (ANCA) (1).

Il n’existe pas à ce jour de test diagnostique spécifique de la maladie de Behçet.

Dans l’état actuel, le diagnostic de maladie de Behçet reste purement clinique, et se base sur plusieurs groupes de critères diagnostiques. Les derniers en date, ceux de l’ISG (1990) (18), ont été mis au point dans un but de standardisation :

Ulcération buccale récurrente aphtose mineure, aphtose majeure ou ulcération herpétiforme observée par le clinicien ou par le patient, et survenant au moins trois fois en douze mois.

Plus 2 des signes suivants Ulcération génitale récurrente

aphtose ou cicatrice observée par un clinicien ou le patient.

Lésions oculaires uvéite antérieure, uvéite postérieure ou cellules dans le vitré à l’examen à la lampe à fente ou vascularite rétinienne observée par un ophtalmologue.

Lésions cutanées : erythème noueux observé par le clinicien

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Maladie de Behcet N. Filali-Ansary et coll.

ou le patient, pseudo-folliculite ou lésions papulo-pustuleuses ou nodules acnéiformes observé par un clinicien en dehors de la période d’adolescence et d’un traitement corticoïde.

Test pathergique positif : Lu par un clinicien entre 24 et 48 heures. Le diagnostic de maladie de Behçet est retenu si l’aphtose buccale est associée à au moins deux des autres critères.

Ces critères sont les plus sensibles (95%) et leur spécificité s’échelonne entre 80 et 95% (4). Leur intérêt est avant tout épidémiologique puisque certains patients atteints de maladie de Behçet authentique ne présentent pas tous les critères.

La maladie de Behçet évolue sur un mode chronique avec poussées entrecoupées de rémissions, dont le mode d’expression, la sévérité, la durée et l’intervalle varient selon les sujets. Des études sont en cours afin de mettre au point un score d’activité (54).

Le pronostic vital est rarement mis en jeu. Les atteintes artérielles, en particulier pulmonaires, sont corrélées à la mortalité la plus élevée avec 50% de décès à 10 mois et 80% à 2 ans qui suivent l’installation des hémoptysies (39,40,55). Les thromboses des gros troncs veineux, en particulier des veines caves et sus-hépatiques, sont gravissimes en cas d’installation aiguë (1,22,26,55). La reperméabilisation et le développement d’une circulation collatérale sont compatibles avec une survie relativement bonne (22). Les ulcérations intestinales, du fait d’un risque élevé de rupture avec survenue d’une péritonite, sont à l’origine d’une surmortalité (1,44,45).

Ce sont surtout les atteintes oculaires et neurologiques qui sont à l’origine de séquelles fonctionnelles. En effet, la cécité constitue le terme évolutif de l’atteinte oculaire dans 25% des cas, malgré le traitement (19,20). Un handicap moteur ou cognitif est la règle dans les formes neurologiques parenchymateuses (30).

La survenue d’une grossesse chez une femme atteinte de maladie de Behçet ne semble pas influer sur le cours de la maladie et in versement (56).

Le traitement de la maladie de Behçet n’est pas codifié compte tenu de sa rareté relative, de son mode évolutif en poussées et rémissions spontanées, de son grand polymorphisme, du peu d’études prospectives réalisées à ce jour et du fait que la prise en charge soit assurée par différents spécialistes. La mise en rémission, la prévention de poussées ultérieures et la limitation des séquelles fonctionnelles en constituent les principaux enjeux. Sa nature et son agressivité dépendent des organes atteints. A côté des thérapeutiques locales à visée symptomatique, le traitement médical repose essentiellement sur la colchicine, les corticoïdes et les immunosuppresseurs.

Certaines manifestations requièrent le recours à la chirurgie ou à un autre moyen instrumental.

Aphtes : l’éviction d’aliments acides et/ou épicés et une hygiène orale et génitale rigoureuse sont recommandées (1,17). Des anesthésiques locaux peuvent être proposés en

cas de gêne importante (1,17,20). Une corticothérapie locale plus ou moins en association avec de la tétracycline en pommade peut s’avérer efficace (1,17,20). Le traitement repose surtout sur la colchicine à raison de 1 à 2 mg par jour (1,17,20). En cas d’échec ou d’intolérance, la thalidomide (100 à 400 mg par jour) avec les précautions d’usage ou la dapsone (100 mg par jour) seront proposées (17,20). En cas de lésions sévères, une corticothérapie orale courte à base de prednisone ou de prednisolone est recommandée (1,17). De l’azathioprine pourra être prescrite en cas de manifestation oculaire associée (20).

Erythème noueux : la colchicine est habituellement efficace.

A défaut, on utilisera de la dapsone ou de la prednisone 20 mg par jour en cure courte (1,17).

Œil : sur le plan local, les mydriatiques et les corticoïdes locaux injectables préviennent les synéchies en cas d’uvéite (20,57). Si la colchicine présente un intérêt certain dans la prévention de l’inflammation oculaire, elle reste peu efficace en cas de poussée installée (20,57,58). La corticothérapie orale (40 à 60 mg par jour de prednisolone ou de prednisone) permet d’obtenir une amélioration à la phase aiguë, mais ne contrôle pas l’évolution ultérieure (20,58). Prescrite au long cours, elle serait même délétère (20,58).

Les immunosuppresseurs, qui ont aussi un effet anti- inflammatoire, sont à la base du traitement de l’atteinte oculaire de la maladie de Behçet (20,58). Ils n’améliorent pas l’acuité visuelle quand elle est déjà altérée par les lésions séquellaires (20,58). La durée de prescription doit être d’au moins deux ans. Le chlorambucil a été le premier proposé mais sa myélotoxicité en limite l’usage (20). Le cyclophosphamide en continu (2 à 2,5 mg/kg par jour) ou en bolus (1 g par mois ou 500 mg par semaine) est également bénéfique, mais susceptible d’entraîner une stérilité ou une cystite hémorragique à côté de ses effets hématologiques (20,57,58). Dans une étude contrôlée, l’azathioprine à raison de 2 à 2,5 mg / kg par jour, a prévenu l’atteinte oculaire chez les patients qui en étaient dépourvus et celle de l’œil controlatéral chez ceux qui avaient une localisation monoculaire, au prix d’effets adverses peu importants (hépatiques et hématologiques) (58,59). La ciclosporine (5 à 10 mg / kg par jour) a l’avantage d’une action plus rapide que les immunosuppresseurs classiques, mais ne semble pas avoir de bénéfice plus net à long terme (58,60,61). Un échappement thérapeutique avec effet rebond à l’arrêt du traitement, en plus du coût élevé et des effets secondaires (hypertension artérielle, insuffisance rénale, hirsutisme) en limitent l’usage aux formes sévères (58,60,61). Dans les formes qui n’ont pas répondu à une monothérapie, certains proposent d’associer azathioprine et ciclosporine (20,58). D’autres proposent le méthotréxate à raison de 7,5 à 15 mg par semaine (20,58).

De nouveaux immunosuppresseurs sont à l’étude, le plus

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N. Filali-Ansary et coll. Maladie de Behcet

prometteur semble être le tacrolimus (FK-506), qui aurait un mécanisme d’action similaire à celui de la cyclosporine tout en étant plus puissant (58).

La chirurgie est réservée à certaines complications telles le glaucome ou la cataracte. Un réveil de l’inflammation oculaire peut être observé en post-opératoire à l’instar de la réaction d’hypersensibilité cutanée (20).

Vaisseaux et cœur : le traitement des thrombophlébites au cours de la maladie de Behçet repose sur l’héparine à la phase aiguë relayée par les anti-vitamine K (1,20,57). Il n’y a pas de consensus quand à la durée du traitement anticoagulant. Celui-ci sera d’autant plus prolongé que la thrombose est étendue. Un relais par anti-agrégants plaquettaires est recommandé. Il est à noter que les anticoagulants et les anti-agrégants sont à éviter chez les patients qui présentent des anévrismes artériels concomitants, car ils en potentialiseraient la rupture et le saignement (28,39). L’association d’une corticothérapie ou d’un immunosuppresseur ne fait pas l’unanimité (22,23). Le caractère récent et/ou la coexistence d’un syndrome inflammatoire biologique devraient en retenir l’indication.

L’atteinte artérielle, en particulier les anévrismes, doit faire instituer un traitement énergique. Le cyclophosphamide ou l’azathioprine en association à une corticothérapie orale sont d’usage (28). Le traitement chirurgical doit être proposé chaque fois que possible, et s’effectuer sous le couvert d’une immunosuppression efficace afin d’éviter les récidives au niveau des sites anastomotiques (28,39). Le traitement conservateur reste préférable (anévrysmorraphie) en cas de localisation pulmonaire (38). L’embolisation est une alternative intéressante en cas de contre-indication à la chirurgie. Elle n’est pas dénuée de risques et son bénéfice à long terme nécessite d’être évalué (28).

Dans la fibrose endomyocardique avec thrombus cardiaque, l’évacuation chirurgicale de ce dernier avec ablation de l’endocarde fibrosé est indiquée lorsque le traitement médical est insuffisant (42).

Manifestations neurologiques : en cas d’hypertension intra- crânienne sur thrombose veineuse, un traitement anticoagulant à dose efficace sera instauré parallèlement à une corticothérapie parentérale ou orale (30,31). Il ne faut pas oublier d’associer un traitement anti-épileptique à la phase aiguë (30,34).

Dans les formes parenchymateuses, des bolus de méthylprednisolone (1 g par jour, 3 jours de suite le premier mois puis 1 g par mois en un jour pendant 6 à 8 mois) sont de mise, en association au cyclophosphamide oral ou au chlorambucil (30). D’autres ont recours à un schéma inverse emprunté à la sclérose en plaques, c’est à dire des bolus mensuels de cyclophosphamide après une cure d’induction et prednisone ou prednisolone orale (30). Une corticodépendance est fréquente (30,31). La cyclosporine est inefficace (30,58).

Arthralgies / arthrites : les anti-inflammatoires non stéroïdiens ou une corticothérapie à faible dose (moins de 15 mg par jour de prednisone) sont suffisants dans la majorité des cas (1,20). Certains auteurs, partant de la théorie streptococcique, ont constaté un effet bénéfique de la pénicilline retard (1,2 millions d’unités toutes les 3 semaines) sur l’atteinte articulaire et même cutanée (62).

La sulfasalazine (2 à 3 g par jour) ou l’interféron α2b (5 millions d’unités 3 fois par semaine) semblent être efficaces dans les formes avec destruction/déformation (1,20,63,64).

En cas d’échec, le lévamisole (150 mg 2 fois par semaine) ou l’azathioprine (2,5 mg/kg par jour) sont recommandés (1,20). Une infiltration corticoïde locale est indiquée en cas de monoarthrite sévère (1). Le traitement chirurgical repose sur la synovectomie. A terme, une arthroplastie pourra être proposée en cas de séquelles invalidantes (1,20).

Ulcérations digestives : la thalidomide (300 mg par jour) et la prednisone (30 à 40 mg par jour) ont été les premières utilisées (1,45). Actuellement, on leur préfère la sulfasalazine ( 1 à 3 g par jour) (1,45). En cas de péritonite par perforation, la chirurgie en urgence est le seul recours. Elle comporte une résection intestinale plus ou moins étendue avec stomies, associée à un lavage péritonéal (45). Le rétablissement de continuité pourra se faire dans un deuxième temps, car les sutures sont à éviter sur une paroi inflammée.

Atteinte rénale : la corticothérapie s’est avérée bénéfique dans les formes avec atteinte glomérulaire (46). Différents immunosuppresseurs ont été testés dans des observations individuelles avec des réponses variables (46). Aucune recommandation thérapeutique ne peut être faite dans ce sens.

Maladie de Behçet et contraception : la prescription d’une contraception chez la femme atteinte d’une maladie de Behçet est souhaitable. En effet, si la grossesse ne semble pas avoir d’effet délétère sur le cours de la maladie et inversement, nombre de médicaments potentiellement tératogènes y sont indiqués (colchicine, thalidomide, immunosuppresseurs). De plus, la maladie de Behçet reste une affection hautement thrombogène.

Les avis divergent considérablement sur ce sujet (65).

Pour la multipare, l’abstention de la contraception orale demeure préférable et la pose d’un stérilet semble être la meilleure solution, malgré l’usage potentiel d’anti-inflammatoires qui pourraient en diminuer l’efficacité (65). Pour la nullipare, les gynécologues sont habituellement très réservés quand à la pose d’un stérilet en raison du risque d’infection et de synéchies. La contraception orale à base d’oestrogènes doit être évitée, et l’on préférera les micro-pilules progestatives, tout en sachant qu’elles ne sont pas totalement dénuées de risque (65).

CONCLUSION

La maladie de Behçet, quoique peu fréquente, n’en

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Maladie de Behcet N. Filali-Ansary et coll.

demeure pas moins préoccupante par son retentissement fonctionnel et quelques fois vital.

De diagnostic purement clinique à l’heure actuelle, ses

principales manifestations sont cutanéo-muqueuses, oculaires, vasculaires, neurologiques et articulaires.

Si des progrès indéniables ont été faits dans la

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