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Contribution à une théorie de la firme : routines et incitations

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Academic year: 2022

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Une nouvelle théorie de la firme peut chercher à intégrer trois mécanismes essentiels : les mécanismes de coordination, les mécanismes incitatifs, les mécanismes cognitifs. Dans le cadre d'une activité de résolution de problèmes, ce travail est une étude exploratoire de l'interaction entre ces trois mécanismes. Il analyse la coordination d'équipes d'agents confrontées à un problème complexe et cherche à mesurer l'efficacité de cette coordination dans différents systèmes incitatifs. Un cadre d'analyse théorique du comportement de ces équipes d'agents, le “jeu de coordination logique”, est proposé. L'analyse théorique de l'influence du système incitatif dans ce jeu conduit à deux propositions sur l'effet d'une situation de compétition : des équipes d'agents plus efficaces (PA), et une répartition différente des modes de coordination possibles (PB). Des résultats expérimentaux, obtenus dans une recherche précédente – en accord avec PA, en désaccord avec PB – sont brièvement rappelés. Ces résultats questionnent la relation, supposée efficace en économie, entre le système incitatif et la motivation des agents.

Mots-clés : coordination, incitations, routines, économie expérimentale.

I. Introduction

La théorie économique n’a longtemps réservé à la firme qu’une place secondaire. Dans les modèles d’équilibre général et d’équilibre partiel, l’analyse de la firme n'est qu'une composante de la théorie des prix et de l'allocation des ressources. Ces modèles d'équilibre traitent comme un agent individuel une entité collective, en lui prêtant un principe de comportement, la maximisation du profit. Les théories de la concurrence imparfaite vont renouveler profondément cette microéconomie des marchés et de la firme.

La firme devient l'acteur principal de la théorie économique (tout du moins en ce qui concerne la théorie des marchés). De nouvelles théories cherchent à rendre compte d’une conception de la firme qui soit à la fois réaliste et logiquement valide (Coriat et Weinstein, 1995). En recourant à l’hypothèse de rationalité parfaite (théorie de l’agence, théorie des droits de propriété) ou de rationalité limitée (théorie évolutionniste), elles analysent les interactions entre les membres de la firme.

Alexis Garapin

IREPD, Université Pierre Mendès France de Grenoble

(Alexis.Garapin@upmf- grenoble.fr)

firme : routines et incitations *

* Une première version de ce texte a été présentée le 7 mai 2001 à l’Ecole Thématique « Contrats de travail, compétences et organisation des entreprises » organisée par l’UFR Economie des Organisations (Université Mohammed V-Agdal, Rabat). Je remercie ses participants pour leurs questions et leurs remarques. Merci également à Frédéric Corolleur et à Michel Hollard (IREPD, Université Pierre Mendès France de Grenoble) pour leurs commentaires et leurs suggestions.

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Cependant, ces théories de la firme se sont développées de manière relativement indépendante. Ainsi, le rôle du système incitatif est souligné par la théorie de l'agence et des incitations, en vue de l'obtention d'un effort maximal des agents. Celle-ci, en revanche, n'envisage pas la possibilité d'une évolution des capacités de calcul des agents dans leur tâche. Les évolutionnistes quant à eux ont pour l’essentiel analysé le rôle des mécanismes cognitifs dans les interactions stratégiques entre agents. Mais le rôle du système incitatif dans ces interactions est presque totalement absent de leurs travaux.

Pour Cohendet, Llerena et Marengo (1998), la théorie évolutionniste de la firme est donc incomplète et reste à construire. Ils estiment que celle- ci doit tenir compte de l’interaction entre trois mécanismes : les mécanismes cognitifs, les mécanismes incitatifs, les mécanismes de coordination. Les mécanismes cognitifs permettent la constitution d’une base de connaissances collective qui fonde la coordination. Ils incluent l’échange et l’acquisition d’informations. Les mécanismes incitatifs peuvent être définis comme une fonction de gains destinée à guider les actions dans une certaine direction. Ils incluent les systèmes de contrôle, de surveillance, de compétition. Enfin, les mécanismes de coordination permettent de réunir les actions individuelles pour réaliser un ensemble donné d’objectifs.

Ce travail cherche à contribuer à la construction de cette nouvelle théorie de la firme, en proposant une étude exploratoire de cette interaction entre mécanismes de coordination, incitatifs, et cognitifs. Plus précisément, la question principale soulevée est celle de l'influence d'une compétition entre les équipes d'agents sur l'efficacité etle comportement des agents en situation de coordination tacite. Un tel dispositif d'incitation est-il susceptible de contribuer plus efficacement à l'apprentissage de cette coordination et d'en améliorer l'efficacité ? Changer le système incitatif peut-il exercer une influence sur la manière dont les agents mobilisent leurs capacités de calcul ? La question principale est traitée en trois étapes.

On propose d’abord un cadre d’analyse théorique particulier, qualifié de jeu de coordination logique, où les agents peuvent utiliser des routinespour résoudre des problèmes de coordination qu’ils perçoivent comme complexes.

Considérer que des routines peuvent être utilisées pour résoudre des problèmes complexes peut paraître paradoxal, dans la mesure où le concept de routine renvoie spontanément à des problèmes récurrents et simples. Néanmoins, la distinction faite par la théorie évolutionniste entre routines statiques et routines dynamiques (Dosi, Teece, Winter, 1990) permet de lever ce paradoxe.

En effet, elle permet de proposer deux modes de coordination permettant aux agents de résoudre le problème complexe : la coordination stabilisée(avec des routines statiques) et la coordination évolutive (avec des routines dynamiques). En fonction de ces deux modes de coordination, nous verrons que les capacités de calcul des agents sont différentes.

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Dans une seconde étape, des propositions théoriques sont avancées. Ces propositions mettent en relation les trois mécanismes qui, pour Cohendet et alii (1998), sont fondateurs d’une nouvelle théorie de la firme évolutionniste. Elles concernent l'effet d'une variation du système incitatif sur l'efficacité de la coordination des agents etsur leurs capacités de calcul.

Dans un jeu de coordination de type jeu d’équipe, le système incitatif est basé sur une coopération interne entre les membres de l’équipe. Ces membres sont des partenaires qui doivent se coordonner pour atteindre un même objectif, en partageant égalitairement le gain collectif qui en résulte. La variation introduite consiste à placer ces équipes d'agents en situation de compétition avec d’autres équipespour atteindre un même objectif, tout en maintenantla coopération interne aux équipes. En situation de compétition, il est supposé des équipes d'agents plus efficaces (proposition PA), et une répartition différente des équipes selon qu’elles adoptent une coordination stabilisée ou évolutive (proposition PB). Ces propositions ont été testées expérimentalement dans un autre travail (Garapin et Hollard, 1999), en utilisant le jeu de coordination Target The Two. Ce jeu, créé par Cohen et Bacdayan (1994), présente les caractéristiques d'un jeu de coordination logique. On rappelle seulement les résultats obtenus, en accord avec la première proposition, mais non avec la seconde.

Dans une troisième étape, ces résultats expérimentaux sont discutés.

Ceux-ci suggèrent que le rôle du système incitatif pour apprécier l'efficacité du comportement des agents est essentiel pour élever leur niveau d'effort, mais pas pour faire évoluer leurs capacités de calcul. Ce résultat peut tenir à la nature cognitive de la tâche à résoudre avecTarget The Two.

Il questionne cependant la relation supposée en économie entre le système incitatif et la motivation. Kreps (1997) estime ainsi qu'ajouter des motivations monétaires à une tâche pour laquelle l'individu est intrinsèquement motivé peutdiminuer la performance de cet individu. Cette considération semble pertinente pour poursuivre la réflexion théorique et expérimentale, initiée dans ce travail, sur l'interaction des mécanismes cognitifs, incitatifs et de coordination dans la firme.

Ce travail est divisé en cinq parties. Une première partie présente le cadre d'analyse théorique élaboré pour rendre compte des activités de coordination dans la résolution de problèmes complexes (§2). L'analyse théorique de l'influence du système incitatif dans les problèmes de ce type conduit à deux propositions, pour lesquelles les résultats expérimentaux obtenus sont rapidement présentés (§3). Enfin, les interrogations suscitées par cette recherche sont développées (§4), avant d'en tirer les conclusions (§5).

II. Analyse théorique

2.1. Un jeu de coordination complexe

Pour formaliser des problèmes de coordination, l’économiste a fréquemment recours à la théorie des jeux, propice à l’analyse des interactions

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stratégiques entre les agents. Les jeux de coordination à équilibres multiples et les jeux de coordination pure sont ainsi des jeux à information complète permettant d’analyser les choix entre stratégies de coordination concurrentes.

Mais la théorie des jeux peut-elle rendre compte des problèmes de coordination dans les activités de résolution de problèmes complexes ? Il nous faut d’abord définir ce qu’il est entendu ici par “problèmes complexes”. Pour Le Moigne (1990), la complexité est postuléepar l'individu, sans que celui-ci s'astreigne à croire à l'existence naturelle d'une telle propriété dans la nature ou la réalité. La définition que nous proposons de la complexité des problèmes (définition 1) s'inspire librement de cette position de Le Moigne.

Définition 1.Problèmes complexes

« Un problème sera perçu comme complexe par un individu quand il est caractérisé par une imprévisibilité potentielle ou une prévisibilité incalculable des décisions d'action nécessaires pour le résoudre. »

Dans la firme, ces problèmes perçus comme complexes sont par exemple des problèmes de conception. La résolution d’un nouveau problème de conception est rarement le fait d'individus isolés. Elle est plutôt une activité distribuée entre plusieurs agents qui leur impose d'innover, en décidant d'une stratégie nouvelle, qui leur permettra tout à la fois de se coordonneret de résoudre ce problème. Or, les agents ne disposent pas d'une stratégie de résolution donnée, dans la mesure où leur information sur les états initiaux du problème est incomplète. Ils doivent donc faire des conjectures sur les moyens d'atteindre leur objectif, qu'ils doivent élaborer conjointement dans la pratique de leur tâche.

On conçoit que pour de tels problèmes, la théorie des jeux, où les stratégies et la fonction de gains sont données aux joueurs, n’est pas un outil approprié.

En effet, ils se posent dans une situation de coordination où les agents doivent apprendre à élaborer de façon constructivedes procédures leur permettant de transformer un état initial en un état final. Il s’agit d’une situation où les agents ne disposent pas de critères certains et partagés pour évaluer le gain associé à chacun de leurs choix.

Supposons alors un jeu où l'identification d'une stratégie ne peut pas être issue d'une exploration exhaustive de l'arbre de jeu, car les joueurs ne disposent que d'une information incomplète, du fait de l'explosion combinatoire. La stratégie mise en œuvre est alors toujoursincomplète, elle n'est basée que sur un nombre limité de coups et de réactions à ces coups et ne peut donc pas définir un comportement à suivre durant tout le jeu (1). Pour signaler que l'acception de cette stratégie est différente de celle de la théorie des jeux, nous parlerons pour la désigner de stratégie de résolution.

Ces stratégies de résolution sont desstratégies conjecturales: les joueurs savent qu'une solution existe au problème de coordination, mais ne savent

(1) On se réfère ici à la définition classique d’une stratégie en théorie des jeux (Rasmusen, 1994).

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pas comment l'atteindre. Ils doivent faire une conjecture (2) pour transformer cette stratégie en une ou plusieurs procédures qu'ils doivent apprendre à élaborer conjointement. Le problème de coordination des agents ne consiste donc plus seulement à choisir une stratégie compatible avec leurs choix individuels. Il consiste également à découvrir les procédures permettant de mettre en œuvre cette stratégie. Ces procédures représentent la séquence de coups (ou de transformations d'un état en un autre état) qui doit être effectivement suivie par les deux joueurs. Ainsi, pour reprendre les termes d'Egidi (1996), la coordination stratégique se double d'une coordination procédurale (3). Nous appellerons les jeux réunissant ces deux problèmes de coordination de jeu de coordination logique. La coordination est “ logique ” parce qu’elle suppose des procédures de résolution compatibles.

Par rapport aux jeux de coordination de la théorie des jeux, la coordination dans un jeu de coordination logique apparaît donc comme plus complexe. Face à une telle complexité, les agents peuvent adopter deux modes de coordination : la coordination stabilisée, fondée sur des routines statiques, et la coordination évolutive, fondée sur des routines dynamiques.

Ces deux modalités de coordination ont en commun de s’appuyer sur des règles (de type condition-action).

2.2. Coordination stabilisée et coordination évolutive Routines statiques et coordination stabilisée

Quand ils s'engagent dans une coordination stabilisée,les agents adoptent un comportement routinier au sens de March et Simon : «Nous considérerons un ensemble d'activités comme routinières, alors, dans la mesure où le choix aura été simplifié par la mise en œuvre d'une réponse déterminée à des stimuli définis. Si la quête a été éliminée, mais que le choix demeure sous la forme d'une routine de calcul systématique clairement définie, nous dirons que les activités sont routinières(4) » (1958, p. 142). Les agents routiniers reconnaissent automatiquement les conditions de la mise en œuvre d'une règle de type condition-action. La coordination stabilisée correspond ainsi à une situation où la “recherche a été éliminée”, c'est-à-dire que les joueurs ont cessé d'apprendre, pour répéter mécaniquement la stratégie de coordination qu'ils ont découverte. Dans la définition de March et Simon, la routine de calcul – la routine statique - est bien ici un synonyme du terme

“algorithme”. D'après leur approche, les comportements routiniers apparaissent donc sous la forme d'actions basées sur des règles (de type condition-action). Les routines suivies par les individus pour se coordonner, qui s'appuient sur ces règles, peuvent être considérées comme des “procédures non complètement spécifiées” (Egidi, 1996). Ces routines exigent le déroulement de l'action pour pouvoir prendre forme.

Adopter une coordination stabilisée, en utilisant une seule stratégie qui coordonne automatiquement leurs actions, évite aux joueurs d'utiliser toute l'information disponible. Des agents installés dans une coordination stabilisée

(2) Le terme “conjecture”

est ici pris dans son acception large, c'est-à- dire comme une simple supposition fondée sur des apparences, qui n'a encore reçu aucune confirmation. En théorie des jeux, la conjecture peut avoir une définition précise : il s'agit de l'évaluation par un joueur de la probabilité de choix d'une stratégie par un autre joueur

(Branderburger, 1992).

(3) Imaginons un Rubik cube joué collectivement (hypothèse absurde, mais pratique pour illustrer notre propos). La stratégie à laquelle peuvent songer d'emblée les joueurs novices est de commencer par faire d'abord une face de même couleur (même si cette stratégie n'est pas la bonne pour atteindre l'objectif final : obtenir six faces de même couleur). Il doivent donc se coordonner sur cette stratégie de réalisation du but intermédiaire “une face de même couleur”

(coordination stratégique). Mais pour atteindre ce but, plusieurs séquences de

transformation des couleurs en d'autres – plusieurs procédures – sont possibles, ce qui pose un second problème de coordination, dite

“coordination procédurale”.

(4) «We will regard a set of activities as routinized, then, to the degree that choice has been simplified by the development of a fixed response to defined stimuli. If search has been eliminated, but a choice

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ne supportent plus un risque d'échecs de coordination et ne sont plus soumis à une incertitude stratégique. Paradoxalement, un tel comportement peut être efficace en termes de coordination en supprimant l'ambiguïté des coups du partenaire, coups qui ne peuvent pas être toujours interprétés clairement. Mais il peut également enfermer les agents dans une stratégie et des procédures de coordination sous-optimales. En effet, la même stratégie est répétée dans toutes les configurations, y compris celles où d'autres stratégies peuvent être plus efficaces. Cette sous-optimalité occasionnelle des routines statiques est soulignée par de nombreux auteurs (Cohen et Bacdayan, 1994 ; March, 1988 ; Egidi et Narduzzo, 1997).

Routines dynamiques et coordination évolutive

Si la coordination stabilisée est celle des joueurs qui utilisent des routines statiques, la coordination évolutive est celle des joueurs qui utilisent des routines dynamiques. Pour reprendre les termes de Dosi, Teece et Winter, ces routines dynamiques sont “explicitement tournées vers l'apprentissage” (1990). La coordination évolutive est également basée sur des règles de type condition-action, mais les agents développent des procédures de recherche basées sur des processus délibératifs. Contrairement aux agents qui adoptent une coordination stabilisée, les agents peuvent ici changer de règles si de nouvelles conditions se présentent dans leur relation de coordination. Les stratégies de résolution générées par les agents peuvent donc fournir une orientation et une structure commune pour traiter de nouveaux problèmes similaires (Winter, in Cohen et alii1996).

Les joueurs engagés dans une coordination évolutive ont, tout comme les joueurs engagés dans une coordination stabilisée, des capacités de traitement et de mémorisation des informations limitées. La différence essentielle entre les deux types de coordination réside dans les capacités d'apprentissage et d'interprétation des actions du partenaire. Dans une coordination stabilisée, les joueurs limitent l'apprentissage du jeu à une phase initiale qui leur permet de trouver une stratégie qu'ils répéteront jusqu'à la fin de leur interaction. Durant cette phase initiale, l'apprentissage par l'observation des coups effectués par le partenaire de jeu s'ajoute à l'apprentissage par la pratique. Puis l'apprentissage par l'observation disparaît tandis que les rendements de l'apprentissage par la pratique (5) sont décroissants. Dans une coordination évolutive, en revanche, si l'apprentissage par la pratique est également limité au début de la relation de coordination, les comportements individuels sont tels que l'apprentissage par l'observation ne cesse pas durant l'interaction des joueurs.

Dans un jeu de coordination dit “tacite”, qu'il soit stratégique ou logique, les joueurs ne peuvent pas communiquer verbalement avant et pendant le jeu. Les seules sources d'information sont donc la configuration du jeu à un moment donné et les coups du partenaire. Dans un jeu de coordination logique, pour réduire la complexité perçue, les joueurs peuvent décomposer

remains in the form of clearly defined and systematic computing routine, we will say that the activities are routinized» (March et Simon, 1958, p. 142).

(5) Qu'on mesure ici comme la diminution du temps nécessaire pour effectuer un coup dans le jeu de coordination logique.

(7)

le problème en buts intermédiaires (subgoals) plus facilement gérables. La coordination nécessite alors que chaque joueur poursuive des buts intermédiaires (ou sous-objectifs) compatibles entre eux. Or, dans certaines phases de jeu, il peut être difficile pour le joueur d'interpréter clairement l'action de son partenaire et de savoir quel but intermédiaire celui-ci compte atteindre. Dans une coordination stabilisée, les joueurs ne perçoivent pas l'ambiguïté de cette situation, qu'ils réduisent en limitant la source d'information pertinente pour leur coordination. Dans une coordination évolutive, les joueurs perçoivent l'ambiguïté de certaines situations de jeu et s'exposent davantage à des échecs de coordination.

Le tableau 1 résume les principales caractéristiques des deux types de coordination tacite, stabilisée et évolutive. Celles-ci ont été présentées comme les coordinations possibles face à la complexité de la coordination (stratégique et procédurale) d'un “jeu de coordination logique”.

Tableau 1

Coordination stabilisée et coordination évolutive dans un jeu tacite

Coordination stabilisée

Par la pratique

Par l’observation (limité) Statique : mise en œuvre automatique

Suppression de l’incertitude stratégique

Sous-omptimalité occasionnelle

Coordination évolutive

Par la pratique Par l’observation

Dynamique : mise en œuvre soumise à délibération et interprétation

Capacité de recherche (search capability) Risque d’échecs de coordination Comportements

Apprentissage

Routine

Source d’efficacité

Source d’inefficacité

– Basés sur des règles de type condition-action

Le poids relatif des agents adoptant une coordination stabilisée ou une coordination évolutive dépend du contexte dans lequel ils se trouvent, ainsi que de leurs caractéristiques individuelles. Du point de vue économique, ce contexte est notamment marqué par le système incitatif existant. Dans le paragraphe suivant, nous avançons des propositions permettant de faire interagir les mécanismes de coordination, incitatifs et cognitifs. Ces propositions ont été testées expérimentalement.

III. Effets d'une variation du système incitatif 3.1. Vers des propositions théoriques

On peut considérer un jeu de coordination “logique” répété comme outil d'analyse théorique d'un système de productionformé par une équipe de deux agents. Les agents doivent élaborer conjointement des procédures de

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résolution de problème, en vue d'atteindre à chaque période un objectif donné, objectif qui peut être considéré comme “l'output” de leur relation de coordination. Une réflexion peut alors être engagée sur le système incitatif capable d'amener les agents à fournir le plus efficacement possiblecet “output”

de leur coordination. La théorie économique tenant pour essentiel le rôle du système incitatif dans la réalisation d'une tâche, cette efficacité peut être mesurée dans différents systèmes incitatifs (6).

Classiquement, dans un jeu de coordination, le système incitatif est celui des jeux d'équipe, basés sur la coopération des deux agents. Ils ne peuvent obtenir de gain que s'ils se coordonnent sur le même équilibre, ou, en termes plus généraux, s'ils atteignent en commun le même objectif. A la fin du jeu, chaque membre de l'équipe reçoit la moitié du gain total qu'il a généré avec son partenaire. Dans un tel système incitatif, les joueurs ne sont pas soumis à des pressions externes. La variation qui est dès lors envisagée est l'addition d'une pression externeà ce système. La coopération interne (7) est maintenue, mais les équipes d'agents sont mises en compétition pour atteindre un même objectif donné. Les systèmes de compétition sont souvent mis en œuvre par les entreprises, car ils sont supposés accroître l'intensité de l'effort, tout en évitant la nécessité d'une mesure de performance absolue qui serait déterminée arbitrairement. Au sein d'un même établissement, une telle compétition peut consister en l'instauration d'un marché interne : le revenu d'une équipe d'employés sera d'autant plus élevé qu'elle sera la première à atteindre l'objectif de production fixé par sa direction.

La possibilité d'une influence d'une variation du système incitatif sur la façon dont les agents utilisent leurs capacités de calcul, laquelle peut à son tour affecter l'efficacité de leur coordination, est une question encore peu explorée. Pour la traiter, il faut emprunter à des courants théoriques distincts, la théorie des incitations et la théorie évolutionniste, qui certes se complètent mais qui n'ont pas de lien direct entre elles. En effet, la théorie des incitations (théorie de l'agence et des contrats) estime que les capacités de calcul des agents sont données. Elle n'envisage pas qu'un processus d'apprentissage puisse modifier ces capacités de calcul. Les mécanismes cognitifs jouent en revanche un rôle essentiel dans la théorie évolutionniste de la firme, mais l'analyse des mécanismes incitatifs y est presque totalement absente.

L'efficacité attendue en situation de compétition

La théorie des incitations consacrée aux systèmes de tournoi, et plus généralement à la rémunération des tâches collectives (Prendergast, 1999), et une expérience conduite sur l'efficacité relative de différents systèmes incitatifs (Nalbantian et Schotter, 1997) aboutissent à la même conclusion : la mise en compétition des équipes d'agents est un bon moyen pour accroître l'intensité de leur effort. Cela permet d’avancer une première proposition (proposition PA).

(6) On définit un système incitatif comme une fonction de gains destinée à guider les actions dans une certaine direction.

(7) En ce sens que les membres de l’équipe ne sont pas rivaux pour atteindre le même objectif. Ils doivent au contraire coopérer pour atteindre collectivement et si possible efficacement cet objectf.

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Dans la pratique quotidienne de leurs tâches, les agents en situation de production et de coordination sont généralement soumis à un délaidans la réalisation de leurs tâches. La définition proposée de l'efficacité prend en compte à la fois les ressources et le temps des agents pour atteindre l'objectif de leur coordination (définition 2). Cette définition doit permettre de comparer l'efficacité des agents dans chacun des deux systèmes incitatifs du jeu de coordination.

Définition 2.Efficacité de la coordination d'une équipe d'agents

La coordination des agents sera considérée comme plus efficace que celle d'autres agents si elle permet d'atteindre le même objectif par un nombre de coups inférieur ou égal et dans un délai total inférieur ou égal(l'une au moins des deux dernières inégalités étant stricte).

Modes de coordination attendus dans un système de compétition

Il est avancé ici une proposition sur l'influence de la compétition sur les capacités de calculdes agents, appréciées par leurs modes de coordination possibles. Cette proposition est en fait une alternative, inspirée par les approches de Leibenstein (1982) et de Heiner (1983). Leibenstein (1982) fournit des hypothèses sur une modification du comportement des agents en fonction de l’intensité des pressions externes qu’ils subissent. Heiner (1983) avance quant à lui que c’est le degré d’incertitude qui pèse sur sa prise de décision.

On peut considérer qu'un système incitatif de compétition accroît l'intensité des pressions externes qui sont exercées sur les agents.

Leibenstein (1982) considère qu’un tel accroissement a pour conséquence de modifier le comportement des agents. Ceux-ci sortent d’une “zone d'inertie”, dans laquelle l'agent suit par convention un comportement sous- optimal, pour tendre vers un comportement “maximisateur”. Ce terme ne renvoie pas chez Leibenstein au comportement d’un agent à rationalité parfaite. Il s’agit plutôt d’agents qui “admettent leurs erreurs”, c'est-à-dire qui sont dotés de capacités d'apprentissage qui leur permettent de remettre en cause les pratiques existantes (Leibenstein, 1982 ; Leibenstein et Maital, 1994 ; Argyris et Schön, 1978).

En revanche, selon l'approche de Heiner (1983), l’instauration d’un système de compétition correspond à un accroissement de l'incertitude dans l'environnement où les agents doivent se coordonner. En effet, le problème de coordination des agents est rendu plus complexedans la mesure où leur performance dépend non seulement d'eux-mêmes mais aussi de celle de

Proposition PA.Les équipes d'agents seront d'autant plus efficaces dans un jeu de coordination qu'elles sont en situation de compétition pour atteindre leur objectif.

(10)

leurs compétiteurs. Dans ces conditions d'incertitude croissante, le coût de recherche (en termes de temps et du nombre de coups nécessaires) d'une stratégie de coordination optimale peut être supérieur à son efficacité espérée.

Le comportement de l'agent sera alors contraint à des modèles de résolution de problèmes plus simples et plus faciles à identifier par l'observateur. Heiner qualifie un tel comportement de “régulier”. Il estime que dans des conditions d'incertitude croissante, le comportement devient de plus en plus régulier et prévisible.

Précisons les positions des deux auteurs dans notre cadre d'analyse des jeux de coordination logiques. Dans le système incitatif de base du jeu (coopération interne sans compétition externe), les agents peuvent adopter une coordination stabilisée ou une coordination évolutive. Si l’on s’inspire de l’approche de Leibenstein, on supposera que l’ajout d’une pression externe sous forme de compétition aura pour conséquence d’accroître la proportion des agents adoptant une coordination évolutive. En revanche, si l’on s’inspire de l’approche de Heiner, dans un système de compétition, c’est la proportion des agents adoptant une coordination stabilisée qui sera plus grande. Une seconde proposition (proposition PB) peut donc être énoncée.

3.2. Test expérimental de ces propositions

Une expérience a été conduite pour tester en laboratoire les propositions précédentes avec le jeu de coordination Target The Two. En effet, comme il est montré dans Garapin (1999), ce jeu appartient à la classe des “jeux de coordination logiques”. Il permet donc d'illustrer les problèmes de coordination qui caractérisent ces jeux. Dans la pratique de ce jeu, les individus peuvent être confrontés à des problèmes de coordination stratégique (choix entre les différents chemins de l'arbre de jeu) et de coordination procédurale (choix entre les procédures possibles pour chaque chemin). Pour résoudre ces problèmes, ils peuvent s'engager dans une coordination stabilisée, basée sur des routines statiques, ou dans une coordination évolutive, basée sur des routines dynamiques.

Le jeu Target The Twoest un jeu de coordination tacite (c’est-à-dire sans communication possible entre les joueurs) qui se compose de six cartes, trois de cœur et trois de trèfle, qui sont distribuées successivement selon 42 donnes initiales différentes (8). Il a été utilisé par plusieurs chercheurs (Cohen et Bacdayan, 1994 ; Egidi et Narduzzo, 1997) pour étudier les comportements routiniers et l'apprentissage collectif dans les activités de résolution de

Proposition PB.En situation de compétition, relativement à une situation où cette compétition n'est pas présente, un plus grand nombre d'équipes d'agents tendra vers un coordination évolutive ou, au contraire, vers un comportement stabilisé.

(8) Cette distribution a d’abord été faite à la main (Cohen et Bacdayan,

(11)

problèmes. Le problème de coordination est créé grâce à une division des tâches (chaque membre du couple a un rôle individuel précis (9)) et à une information incomplète (quatre des cartes sont face cachée). En partant des 42 donnes initiales, des équipes de deux joueurs doivent se coordonner en échangeant à tour de rôle une carte avec l’une des autres cartes de la donne.

L’objectif est que l’un d’entre eux pose l’une des cartes sur un emplacement particulier du tapis de jeu, dénommé “cible”. Dans le système incitatif de base (coopération interne sans compétition entre les équipes), cet objectif doit être atteint avec un nombre minimal de manipulations de cartes. En effet, l’équipe supporte un coût pour chaque échange, imputé à une dotation initiale en francs français (ou en lires italiennes) remise à niveau au début de chaque donne. La figure 1 illustre un exemple de coordination à partir d'une donne initiale dans Target The Two.

Ce jeu de cartes est assez simple pour permettre à l'expérimentateurde déterminer deux stratégies efficaces en théorie (c’est-à-dire permettant de poser la bonne carte sur la cible en un minimum d’échanges). Mais pour des joueurs qui doivent y jouer pour la première fois, il est perçucomme complexe. En effet, les joueurs ne peuvent pas découvrir d'emblée ces deux stratégies efficaces. Mais le jeu leur permet de développer un apprentissage par la pratique et par l’observation qui peut leur permettre de découvrir l’une d’entre elles, voire les deux. En effet, les donnes se répètent un grand nombre de fois, avec des configurations de départ différentes d'une fois à l'autre, mais suffisamment proches les unes des autres pour permettre aux joueurs d'identifier une stratégie de résolution. Chaque donne des cartes constitue pour les individus un problème à résoudre, qui nécessite de leur part une coordination efficace. Ce jeu fournit donc un environnement idéal pour l'analyse de la coordination dans la résolution de problèmes perçus comme complexes.

1994) avant d’être informatisée pour les expériences ultérieures.

(9) L'un des joueurs (le Joueur des Couleurs ou Colorkeeper) est spécialisé dans la manipulation des couleurs, tandis que l'autre (le Joueur des Chiffres ou Numberkeeper) est spécialisé dans la manipulation des chiffres.

3

4

4

2

4

4 Jch

Cible Up

Jco

A

3

2

2

4

2

2 Jch

Cible Up

Jco

B

A. Tapis de jeu tel qu’il apparaît aux joueurs après la distribution d’une donne.

B. Jeu après que le Joueur des Couleurs (Jco) a échangé sa carte avec celle de la cible

(12)

(10) Pour le détail du protocole et de la procédure de

l’expérience, cf. Garapin et Hollard (1999).

2

2

2

4

3

3 Jch

Cible Up

Jco

C

2

2

2

4

3

3 Jch

Cible Up

Jco

D

C. Jeu après que le Joueur des Chiffres (Jch) a échangé sa carte avec celle de la cible

D. Jeu après que le Joueur des Couleurs (Jco) a passé son tour et que le Joueur des Chiffres (Jch) a échangé sa carte avec celle de la cible,

terminant ce tour de jeu Figure 1 (d’après Garapin et Hollard, 1999, p. 468) Un exemple de coordination à partir d’une donne initiale

dans Target The Two.

L’objectif pour l’équipe est de poser le 2 de cœur sur la cible On se limite ici à rappeler les résultats d'une expérience conduite à Grenoble et à Trente avec 45 couples de participants (10). Cette expérience est divisée en deux traitements : A sans compétition, B avec compétition.

Dans le traitement A, les sujets doivent terminer les 42 donnes dans un délai de 40 minutes. Dans le traitement B, l'objectif pour chacun des couples est de terminer plus de donnes que les autres, dans un délai inconnu à l'avance.

Dans le traitement B, seul un certain nombre de mains est payé sur le total des donnes pouvant être réalisé par les couples participant à une même session.

Les résultats obtenus ont été les suivants.

En accord avec la définition 2, les participants se coordonnent plus efficacement quand ils sont en compétition les uns avec les autres. En effet, le temps total consacré par les équipes à la conclusion d'un même nombre de donnes est inférieur dans le traitement B, tandis que le nombre d'échanges effectués n'est pas significativement différent dans les deux traitements.

Quelles que soient les phases de jeu, et notamment dès les premières donnes, les sujets du traitement Bont joué plus rapidement que ceux du traitement

Résultat A.Les équipes se coordonnent plus efficacement quand elles sont en compétition les unes avec les autres.

(13)

A. L'efficacité dans l'expérience correspond donc à l'amélioration des performances d'une équipe en termes de délai. Ce résultat confirme l'intérêt d'une définition dynamique de l'efficacité, qui ne soit plus mesurée exclusivement par les ressources épargnées.

Dans le jeu Target The Two, deux stratégies, que l’on note s1 et s2, permettent en théorie de réaliser l’objectif donné – poser la bonne carte sur la cible – avec un minimum d’échanges. Dans l’expérience que nous avons conduite, après une phase initiale d'apprentissage (les 13 premières donnes) où s1est la stratégie optimale, la seconde phase de l'expérience (les 31 donnes suivantes) est constituée de donnes où s1 et s2 sont alternativement les plus efficaces. La coordination des joueurs est considérée comme stabilisée dès lors qu'ils continuent à utiliser le plus fréquemment s1dans cette seconde phase, même quand celle-ci n'est pas optimale.

Les résultats du traitement A montrent une tendance des couples de participants à adopter une coordination stabilisée. Le traitement Bintroduit une incertitude sur le temps car les participants à une même session de l'expérience ne savent pas quel est le nombre de donnes qui est réalisé par leurs “concurrents”, ni à quel moment le seuil de l'ensemble des donnes payées est atteint au cours de l'expérience. Selon l'approche de Heiner, on peut s'attendre à ce que cette incertitude liée à la compétition amène les joueurs à renforcer l'usage exclusif de la stratégie s1. La proportion des équipes adoptant une coordination stabilisée sera alors plus importante relativement au traitement A. En revanche, d'après les travaux de Leibenstein, la compétition constitue une pression externe. Celle-ci devrait accroître la proportion de couples qui adopte une coordination évolutive. Dans le contexte de Target The Two, tendre vers une coordination évolutive se traduit par une plus grande aptitude des équipes à utiliser s1et s2en fonction de leur efficacité théorique pour chacune des donnes.

Or, dans le traitement B, la proportion des équipes adoptant une coordination stabilisée n'augmente pas significativement, tandis que la proportion des couples qui adopte une coordination évolutive est similaire à celle du traitement A. Les observations de l'expérience ne sont pas en accord avec la proposition PB.

Ce résultat questionne l'influence supposée du système incitatif sur les capacités de calcul des individus. Dans le jeu Target The Two, l'attention des sujets est focalisée sur un problème commun à résoudre, ce qui nécessite

Résultat B.En situation de compétition, la proportion des joueurs qui adopte une coordination évolutive n'augmente pas, tandis que celle qui adopte une coordination stabilisée augmente mais non significativement.

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un effort mental important de leur part. Il n'est donc pas certain que les sujets soient aussi sensibles à la rémunération de leurs actions que dans d'autres cas. Cela suggère une hypothèse: l'efficacité des incitations ne peut être analysée sans tenir compte du contenu du travail et du sens que lui attribuent les individus.

On revient dans le paragraphe suivant sur cette dernière hypothèse, et plus généralement sur le problème de l'influence supposée du système incitatif sur l'efficacité et les capacités de calcul des agents.

IV. Les résultats expérimentaux obtenus et la relation entre incitations et efficacité

Dans l'expérience, les individus se coordonnent plus efficacement quand ils sont en compétition les uns avec les autres. Les sujets seraient donc sensibles à une variation du système incitatif auquel ils sont soumis.

Néanmoins, le caractère particulier de la tâche à accomplir par les sujets avec ce jeu doit être souligné. Il s'agit d'une tâche cognitive qui exige de leur part des efforts de réflexion et de compréhension. La fixation de l'attention des sujets sur l'objectif à atteindre peut être telle que l'impact d'un système de rémunération en espèces de leurs actions est moindre que dans d'autres jeux expérimentaux. Ces considérations suggèrent deux questions.

4.1. La question de l'influence d'un système incitatif basé sur une rémunération en espèces des sujets en économie expérimentale La première question est celle de la motivation des individus à accomplir une tâche. Existe-t-il d'autres motivations à agir que celle de la maximisation du profit ? La plupart des économistes n'écartent pas cette hypothèse. Dès lors, pourquoi les économistes expérimentaux recourent- ils dans leurs expériences à un système incitatif basé uniquement sur une rémunération en espèces des participants ?

Comme le remarque Loeweinstein (1999, p.31), l'utilisation d'un système incitatif basé sur une rémunération en espèces des sujets est devenue une convention en économie expérimentale. Si cette rémunération en espèces des sujets s'est imposée en économie expérimentale, c'est parce qu'elle s'avère facile à quantifier, à expliquer (aux sujets des expériences) et à justifier (auprès des autres chercheurs de la communauté) (11). L'utilisation d'une rémunération en espèces permettrait de contrôler le système incitatif des expériences. Sans les incitations monétaires, les sujets ne révéleraient pas leurs préférences réelles, et leurs réponses aux problèmes qui leur sont posés pourraient être fantaisistes. De plus, les effets des incitations monétaires seraient relativement uniformes entre les sujets. Tous les sujets auraient une fonction d'utilité monotone croissante pour l'argent, alors qu'ils ne réagiraient pas de la même manière à d'autres signaux induits par des instructions spécifiques (Budescu, Erev et Zwick, 1999).

(11) La plupart des expérimentateurs se réfèrent à la Théorie de la valeur induitede V. Smith (1976) pour justifier la rémunération monétaire des participants à une expérience. Pour Smith, le contrôle expérimental nécessite

cinq conditions :

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L'usage d'incitations monétaires est en revanche peu répandu en psychologie expérimentale. Amon Rapoport a été l'un des premiers à accepter cette convention du paiement en espèces des sujets en fonction de leurs décisions. Cette méthodologie est maintenant répandue dans le domaine de la prise de décision en groupe, mais pas nécessairement dans d'autres branches de la psychologie. Kahneman et Tversky (1979) par exemple, dont le travail est devenu une référence en théorie de la décision en économie, ne rémunèrent pas leurs sujets en espèces dans leurs expériences.

L’expérience de Kahneman et Tversky confirme l’effet de rapport commun de Maurice Allais : les agents ont tendance à préférer les options certaines par rapport aux options probables. Mais elle met également en évidence l'effet d'inversion des préférences. Si l'effet de rapport commun est obtenu avec des gains positifs, que se passe-t-il si les gains sont remplacés par des pertes ? Kahneman et Tversky on remplacé chacun des gains associés aux problèmes de choix de leurs expériences par des pertes, de telle sorte que ces problèmes avec pertes soient le “miroir” de ceux qui ont des gains. Ils ont constaté une inversion des préférences des sujets dès lors que les issues sont affectées d'un signe négatif. Des économistes (Grether et Plott, 1979) ont répété cette expérience de Kahneman et Tversky en introduisant des incitations monétaires. Loin d'infirmer le phénomène d'inversion des préférences de Kahneman et Tversky, leurs expériences suggèrent une amplificationde ce phénomène.

Pour certains psychologues, comme Thaler (1987), c'est là le signe que dans bien des expériences, introduire des incitations monétaires n'est pas nécessaire pour obtenir des résultats robustes. Cela a des avantages pour les expérimentalistes des deux disciplines. Poser des questions purement hypothétiques est une méthodologie pratique, rapide, et qui ne coûte rien.

Elle permet de conduire des expériences avec un nombre de sujets beaucoup plus important que dans le cas des expériences rémunérées. De plus, dans certains cas, l'utilisation d'espèces est impossible (pour examiner les préférences des sujets impliquant de grosses sommes d'argent) ou délicat (exposer les sujets à des pertes réelles même modérées).

Mais Thaler cite plusieurs expériences conduites par des économistes et des psychologues (Pommerehne, Schneider et Zweifel, 1982 ; Tversky et Kahneman, 1983 ; Reilly, 1982) qui concluent que l'addition d'incitations monétaires induit les sujets à être “un peu plus attentifs”, de sorte que les réponses données par les sujets sont moins dispersées. Smith et Walker (1993) ont réalisé une expérience qui suggère que les résultats changent selon que les gains de sujets passent de zéro à vingt fois le montant normal. Leur étude porte sur une grande diversité d'institutions et d'environnements : une décision de choix à la Bernoulli, une négociation bilatérale, un oligopole à la Bertrand et une enchère au deuxième prix. Les observations de l'expérience font apparaître que l'accroissement des gains monétaires a pour effet de réduire l'erreur moyenne des observations autour de la décision optimale estimée.

la saillance des récompenses, leur dominance, la monotonicité des préférences, la non- saturation et l'information privée.

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La conclusion est finalement nuancée : dans certaines expériences, la rémunération en espèces semble exercer une influence sur les décisions des sujets, tandis que dans d'autres cela ne semble pas être le cas (comme dans Hey, 1987). Cette dernière possibilité suggère que des incitations de nature non-monétaire peuvent expliquer les choix des sujets (ce que n'écartent pas d'ailleurs les expérimentalistes en économie). L'interaction entre ces incitations de nature non-monétaire et les incitations monétaires est encore peu étudiée et mal comprise. Par exemple, dans un tournoi, il semble que les sujets soient davantage motivés par la différence(même faible) de montant des prix alloués aux gagnants et aux perdants que par leur montant en eux- mêmes (Loeweinstein, 1999).

Pour le moment, les expérimentateurs en économie ont mis en place des procédures d'anonymat qui cherchent justement à éliminer ces motivations alternatives à celles de la maximisation du profit. Et l'on ne peut pas reprocher aux économistes expérimentaux de ne pas mettre en évidence des motivations qui ne sont pas mentionnées (en général) dans les théories qu'ils testent. Pourtant, devant des résultats qui suggèrent que des formes d'incitations non-monétaires peuvent expliquer le comportement des sujets, il est légitime de questionner ce parti-pris de l'économie expérimentale.

La question se posera d'autant plus si l'économie expérimentale s'intéresse à des motivations qui ne sont pas toujours intégrées par la théorie mais qui sont observées dans le monde réel : réputation, estime de soi, pouvoir, réciprocité, bienveillance (Zwick, Erev et Budescu, 1999). Le contrôle de ces motivations “sociales” est cependant difficile dans un laboratoire. Du point de vue méthodologique, le concours des expérimentateurs de la psychologie peut être utile, mais le dialogue s'annonce difficile. Les psychologues essaient d'induire les “motivations sociales” par des instructions telles que “Imaginez que vous êtes un homme d'affaires qui...”.

Peut-on concevoir de telles phrases dans un protocole d'économie expérimentale ? A priorinon, car une expérience en économie ne consiste pas en un “jeu de rôles”.

4.2. La question de l'interaction entre la motivation endogène et les incitations exogènes dans la réalisation d'une tâche

Dans le cas d'une tâche cognitive telle que celle qui est assignée aux joueurs dans Target The Two, on peut envisager que les individus soient motivés intrinsèquement par le problème de coordination et l'atteinte de l'objectif en commun. Gagner de l'argent (incitation exogène) peut être une préoccupation secondaire, après la simple envie de résoudre un problème de logique, comme dans les casse-tête. Il est évidemment difficile de déterminer dans quelle mesure l'effort d'un individu ou d'un groupe d'individus dépend de motivations endogènes, exogènes ou d'une combinaison des deux. Bien qu'il ne traite pas spécifiquement des tâches

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cognitives, Kreps (1997) propose cependant des éléments de réflexion intéressants sur cette question.

Kreps reprend un fait stylisé audacieux, mis en évidence en psychologie expérimentale (Deci, 1971) : les incitations exogènes peuvent être contre- productives, parce qu'elles peuvent supprimer la motivation endogène de l'agent (12). L'assertion est contraire au postulat des modèles de base de la théorie de l'agence, selon lequel l'introduction d'incitations exogènes ne peut pas diminuer le niveau d'effort de l'agent. Sans les incitations exogènes, l'effort est nécessairement à son plus bas niveau. Deux questions se posent alors : comment définir la “motivation endogène” ? Sans les incitations exogènes, pourquoi l'agent ferait-il un effort quelconque ?

Ce que l'on appelle motivation endogène (la fierté du travail bien fait, l'intérêt pour le travail) ne peut d'abord être que la réponse de l'agent à des incitations exogènes confuses: la peur que la tâche confiée ne lui soit retirée, la recherche de l'estime de ses pairs. Puisque ces incitations externes sont confuses, l'observateur ne les voit pas toujours et peut attribuer leurs conséquences à une “motivation endogène” de l'agent. Dans ce cas précis, introduire des incitations endogènes explicites peut annuler l'effet de ces incitations exogènes confuses et provoquer finalement une diminution de l'effort. C'est là la première explication du fait stylisé par Kreps, qu'il illustre par un exemple.

Supposons que la motivation de l'agent soit simplement celle de conserver son emploi. L'entreprise signifie à cet agent que son maintien dépend de sa capacité à atteindre un certain niveau d'effort, niveau d'effort qu'elle ne lui précise pas. La réponse de l'agent à cette incitation extrinsèque confuse peut être de développer un effort supérieur au niveau requis (que l'entreprise connaît mais que lui ne connaît pas), pour être sûr de conserver son emploi.

Si au contraire le niveau d'effort demandé est d'emblée explicité par l'entreprise, l'agent peut se contenter de l'atteindre, alors que l'aversion au risque pourrait l'amener à dépasser ce niveau s'il n'est pas précisé dès le départ. En éliminant cette aversion au risque, les incitations exogènes explicites peuvent de ce fait diminuer le niveau d'effort qu'elles sont censées augmenter.

Une autre possibilité pour définir la motivation endogène est d'affirmer que la “désutilité de l'effort”, couramment proposée dans les modèles d'agence simples, est totalement fausse (Baron, 1988). L'utilité tirée de la seule fierté des agents à réaliser leur tâche peut suffire pour atteindre le niveau d'effort attendu par l'entreprise. Le fait stylisé avancé par Kreps peut dans ce cas être “rationalisé” en supposant que l'imposition d'incitations exogènes change la désutilité de l'individu pour le travail qu'il effectue.

Les agents apprécient leur tâche uniquement en l'absence d'incitations exogènes.

Cette dernière explication sera contestée par les économistes. Pour lui donner quelque crédit, il faut approfondir la manière dont sont

(12) L'expérience a été conduite avec

24 étudiants en première année de psychologie à l'Université de Rochester (New York).

Ces étudiants devaient assembler 7 pièces (elles- mêmes composées de 3 ou 4 cubes) d'un puzzle appelé “Soma”, selon des configurations dessinées à l'avance par

l'expérimentateur. Cette tâche de type cognitif, qui s'appuie sur un jeu de logique, rappelle donc la tâche demandée aux participants aux expériences réalisées avec Target The Two, sans la dimension de

coordination. Comme le note Deci (1971, p. 108),

«this task was especially selected because it seemed that most college students would intrisically be motivated to do it».

L'expérience est divisée en 3 périodes. Les sujets perçoivent une rémunération en espèces durant la seconde période seulement (1 dollar pour chaque configuration atteinte en moins de 13 minutes).

(18)

déterminées les fonctions d'utilité, en s'appuyant éventuellement sur les travaux de la psychologie sociale. Les psychologues sociaux par exemple expliquent le fait stylisé de Kreps de la façon suivante. Quand un agent accomplit un acte, il cherche un raisonnement qui puisse justifier ses actions.

Si un agent effectue un effort sans être soumis à des incitations exogènes, il rationalisera son effort comme étant le reflet de son plaisir pris à la tâche.

Et puisque cette tâche lui plaît, il travaillera de plus en plus dur pour l'accomplir. Mais si des incitations exogènes sont mises en place, il attribuera son effort à la seule présence de ces incitations et se désintéressera de sa tâche en n'assurant plus l'effort requis.

Kreps (1997) pose des pistes de recherche audacieuses et intéressantes sur l'influence de l'interaction entre la motivation endogène et des incitations exogènes sur la performance de l'individu pour réaliser une tâche. La réflexion qu'il a engagée est délimitée avec le vocabulaire et les outils de la théorie économique. Il lui est alors difficile de définir autrement que par défaut la motivation endogène, qui n'est pas prise en compte dans la théorie de l'agence. C'est pourquoi il évoque alors le concours éventuel des psychologues pour éclairer certaines des pistes de recherche qu'il suggère, comme la rénovation des fonctions d'utilité.

A cet égard, la théorie psychologique dite de “l'efficacité personnelle”

(Bandura, 1986) semble intéressante. Bien qu'elle n'ait pas été élaborée dans le domaine du travail, cette théorie postule que la capacité de se représenter en pensée les résultats futurs des actions fournit des informations importantes sur la motivation des sujets. L'efficacité personnelle est un mécanisme cognitif basé sur des anticipations qui correspond au jugement que porte une personne sur sa capacité à organiser et à utiliser les actions inhérentes à la réalisation d'une tâche particulière.

Elle peut être mesurée de différentes manières. Par exemple, il peut être demandé aux sujets, à qui l'on vient de montrer un certain nombre d'opérations arithmétiques, de dire le nombre d'opérations qu'ils jugent être capables de réaliser en moins de 30 minutes.

Les prédictions théoriques du système conceptuel de Bandura ont reçu des confirmations expérimentales (Locke et alii, 1984) et empiriques (Mudde et alii, 1995). Les résultats de ces études suggèrent que plus une personne est convaincue qu'elle possède les capacités requises pour réaliser une tâche cognitive et physique, plus elle intensifie ses efforts et se montre persévérante. Néanmoins, certains résultats de ces études demandent à être expliqués plus avant. Par exemple, deux individus d'un même niveau d'efficacité personnelle, réalisant la même tâche, peuvent avoir des modèles de comportement effectifs très différents. Ou, à l'inverse, deux individus de niveau très différent d'efficacité personnelle peuvent produire en définitive des performances équivalentes (Mauchand, 1997).

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Conclusion

Ce travail présente une analyse théorique et expérimentale des activités de coordination avec des routines dans la résolution de problèmes perçus comme complexes. L'analyse aboutit finalement à deux résultats essentiels.

Le premier résultatest que les agents confrontés pour la première fois à ces problèmes ont tendance à adopter une coordination stabilisée. Une fois qu'ils ont découvert une stratégie leur permettant à la fois de se coordonner et de résoudre le problème, et donc qu'ils ont innové, les agents tendent à exploiter cette stratégie, en continuant à la suivre quand ils rencontrent des problèmes qui leur paraissent similaires. Cette coordination leur assure une efficacité satisfaisante, en dépit du risque de sous-optimalité occasionnelle de la stratégie suivie. Le second résultatest que le rôle du système incitatif pour apprécier l'efficacité des agents est essentiel pour élever leur niveau d'effort, mais qu'il ne l'est pas pour faire évoluer leurs capacités de calcul. Ce résultat peut tenir à la nature cognitive de la tâche à résoudre avecTarget The Two.

Le thème de ce travail – la coordination dans la résolution de problèmes complexes – fonde une étude exploratoire de la relation entre les mécanismes de coordination, d'incitation et cognitifs au sein de la firme. Celle-ci constitue encore un questionnement nouveau en économie. De ce fait, la littérature pertinente est encore rare et relativement hétérogène. Le choix de la méthode expérimentale, qui aide à la proposition d'un cadre théorique simple et à une définition précise des concepts utilisés, a permis de suggérer quelques éléments de réponse à ce questionnement.

Suivant les modalités de pilotage des problèmes à résoudre dans la firme, le résultat du système incitatif sur la performance des sujets peut être différent. Dans un problème de conception par exemple, la performance des sujets peut être la conséquence d'une interaction entre la motivation endogène du sujet et les incitations exogènes, voire, comme l'avance Kreps (1997), de sa seule motivation endogène. L'identification et le contrôle de ces incitations peuvent être facilités avec la méthode expérimentale. Pour cela, l'expérimentaliste en économie doit convenir que des motivations non- monétaires peuvent joueur un rôle sur la prise de décision individuelle, parallèlementaux motivations pécuniaires.

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