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Co-infection tuberculose et VIH : enjeux thérapeutiques

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Academic year: 2022

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(1)

F. Charbonnier A. Calmy

J.-P. Janssens

introduction

La tuberculose (TB) est la maladie opportuniste la plus fréquen­

te dans le monde. La TB est également un critère de définition du sida. Sur les 9,4 millions de nouveaux cas de TB diagnosti­

qués dans le monde en 2009, l’OMS évalue qu’entre 11 et 13%

des cas sont co­infectés par le VIH.1 En Suisse, d’après l’OFSP, ce taux est de 4,4% pour la période 2005­2008.2

Les interactions entre la TB et le VIH sont multiples et modi­

fient l’épidémiologie, la présentation clinique et la prise en charge de ces maladies. Le diagnostic de TB est difficile chez les personnes co­infectées, celles­ci étant plus fréquemment asymptomatiques que les patients séronégatifs et les anomalies radiologiques étant moins spéci­

fiques, avec notamment moins d’images cavitaires. De plus, l’examen direct des expectorations est plus fréquemment négatif.

Le risque de développer une TB active lors d’infection latente dépend du de­

gré d’immunosuppression. Ainsi, la trithérapie antirétrovirale joue un rôle majeur en réduisant l’incidence de TB active de plus de 90%. Le traitement de la tuber­

culose latente (qui n’est pas abordé dans cette revue) est aussi efficace lors de co­infections pour prévenir la progression de la tuberculose latente en tubercu­

lose active. Nous nous proposons ici de traiter trois défis rencontrés dans le trai­

tement de la co­infection tuberculose active et VIH :

1. quand débuter le traitement antirétroviral chez un patient traité pour une tu­

berculose ?

2. Quelles molécules antirétrovirales utiliser ?

3. Quelles sont les principales complications des traitements combinés antiré­

troviraux et antituberculeux ?

modalitésdutraitementantituberculeux

Le traitement de la tuberculose du patient infecté par le VIH n’est pas a priori différent du traitement d’une personne séronégative et repose sur un traitement combiné (deux mois d’une quadrithérapie «intensive» associant rifampicine, iso­

niazide, éthambutol et pyrazinamide, et quatre mois de bithérapie «de consoli­

Tuberculosis and HIV co-infection : A therapeutic challenge

Tuberculosis (TB) is the most frequent op­

portunistic infection in patients infected by the Human immunodeficiency virus (HIV).

The mortality related to this co­infection can be reduced by the early introduction of an antiretroviral treatment. However, when trea­

ting subjects with TB and HIV, interactions between antiretroviral and tuberculostatic treatments can be problematic; also, these patients may develop, under treatment, an immune reconstitution inflammatory syn­

drome (IRIS). This review aims to summarize the necessary therapeutic adjustments which should be performed when treating patients co­infected with TB and HIV, the most impor­

tant interactions between HIV and TB treat­

ments, and the medical management of the IRIS.

Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 2295-300

La tuberculose (TB) est la maladie opportuniste la plus fré- quente chez les patients infectés par le virus de l’immunodé- ficience humaine (VIH). La mortalité induite par cette co-in- fection peut être diminuée par l’introduction d’un traitement antirétroviral. La prise en charge de la co-infection VIH/TB pose cependant plusieurs problèmes parmi lesquels, la surve- nue possible d’interactions entre les traitements antitubercu- leux et antirétroviraux et d’un syndrome inflammatoire de re- constitution immunitaire (IRIS). Cet article vise à préciser les modifications thérapeutiques à réaliser en cas de tuberculose active chez un patient co-infecté par le VIH, les interactions médicamenteuses à connaître et la conduite thérapeutique à tenir en cas de survenue d’IRIS.

Co-infection tuberculose et VIH : enjeux thérapeutiques

mise au point

Dr Florian Charbonnier Pr Jean-Paul Janssens Service de pneumologie Dr Alexandra Calmy

Service des maladies infectieuses Département des spécialités de médecine

HUG, 1211 Genève 14 florian.charbonnier@hcuge.ch jean-paul.janssens@hcuge.ch alexandra.calmy@hcuge.ch

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dation» associant rifampicine et isoniazide) pour une du­

rée totale de six mois. Une méta­analyse récente suggère, toutefois, une augmentation du taux d’échec et de rechute si la phase intensive du traitement antituberculeux est ad­

ministrée en prise intermittente (trihebdomadaire) plutôt que quotidienne.3 Ainsi, les recommandations de l’OMS 2010 pour le patient co­infecté par le VIH préconisent une prise quotidienne durant la phase intensive ; la prise tri­

hebdomadaire n’est envisageable durant la phase de con­

solidation que si elle est supervisée (DOT, directly observed therapy). En cas d’atteinte du système nerveux central, comme chez le sujet immunocompétent, la prolongation du traitement à douze mois est conseillée.4

quand débuterletraitementanti

-

rétroviral chezunpatient sous traitementantituberculeux

?

Lors du diagnostic d’une co­infection VIH/TB, le traitement antituberculeux doit être débuté dans les plus brefs délais.

Le meilleur moment pour introduire le traitement antiré­

troviral est resté longtemps débattu. Les recommandations antérieures repoussaient l’introduction des antirétroviraux jusqu’à la complétude de la thérapie antituberculeuse (trai­

tement séquentiel). Le rationnel était de favoriser l’adhé­

rence thérapeutique (diminution du nombre de comprimés par jour), et de limiter à la fois les interactions et les effets secondaires médicamenteux et la survenue du syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire. A l’inverse, l’introduction précoce de la trithérapie ferait baisser la mor­

talité en diminuant la morbidité et la mortalité liées au sida (figure 1).

L’étude SAPIT 5,6 a fourni l’an passé des données robus­

tes en faveur de l’initiation concomitante des antirétrovi­

raux et du traitement antituberculeux. Il s’agit d’une étude prospective, randomisée et contrôlée, réalisée à Durban en Afrique du Sud, qui a étudié trois stratégies. Dans les deux

premières, le traitement était combiné et les antirétrovi­

raux ont été débutés, soit dans les quatre semaines qui suivaient le début des antituberculeux, soit après huit se­

maines. Le traitement était séquentiel dans le troisième bras, avec une trithérapie initiée dans les quatre semaines qui suivaient la fin des antituberculeux. L’analyse intermé­

diaire a montré un risque de décès de 5,45% par 100 pa­

tients/année pour les stratégies combinées et un risque de 12,1% dans le groupe traité de manière séquentielle, soit une réduction du risque relatif de décès de 56% et un nom­

bre de patients à traiter de quinze pour 100 patients/année afin d’éviter un décès. Les recommandations de l’OMS ont été revues à la lumière de ces nouvelles évidences en 2010, et proposent de débuter une thérapie antirétrovirale chez tous les patients VIH+ avec une TB active quel que soit leur nombre de CD4+, bien que les données soient limitées pour ceux qui présentent un taux L 350 mm3. La trithérapie devrait être introduite dès que possible, idéa­

lement dans les deux semaines, et au plus tard dans les huit semaines après le début du traitement antitubercu­

leux.7 Les données préliminaires de l’étude CAMELIA, ef­

fectuée au Cambodge, ont ensuite affiné ces résultats et ont démontré que l’introduction de la trithérapie, dans les deux semaines qui suivent le début du traitement antitubercu­

leux, s’associe à une réduction du risque relatif de décès de 33% par rapport à une introduction dans les huit semai nes du diagnostic de tuberculose, dans une population extrême­

ment immunosupprimée (médiane des lymphocytes CD4 : 25/mm3).8 Les premiers résultats de l’étude A5221 ont con­

firmé que l’introduction des antirétroviraux, dans les deux premières semaines chez les patients avec l 50 CD4/mm3, permet de diminuer la mortalité et l’acquisition de mala­

dies opportunistes qui définissent un stade sida.9 Pour les patients avec moins de 50 CD4/mm3, l’introduction dans les deux premières semaines s’impose donc.

Pour les patients avec une tuberculose touchant le sys­

tème nerveux central, l’introduction différée de la trithérapie est toutefois à considérer. En effet, le risque de survenue d’un syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire met ces patients particulièrement à risque, de par la loca­

lisation de leur infection : on craint en particulier la surve­

nue de tuberculomes avec effet de masse et symptômes neurologiques. Dans une étude randomisée et contrôlée récente réalisée au Vietnam, qui a inclus 253 patients très immunosupprimés (taux moyen de CD4 : 41/mm3) avec mé­

ningite tuberculeuse, sous dexaméthasone, les auteurs n’ont pas trouvé de différence de mortalité, que la trithérapie soit introduite dans les deux semaines qui suivent le dé­

but des antituberculeux ou après deux mois. Les effets se­

condaires de grade IV étaient cependant plus fréquents dans le groupe traité précocement.10

quellesmolécules antirétrovirales choisir

?

Le choix d’un traitement antirétroviral lors de TB repose d’abord sur une analyse du cumul des effets secondaires.

L’hépatotoxicité que l’on peut craindre lors de l’utilisation de pyrazinamide avec les inhibiteurs non nucléosidiques de la rétrotranscripase (NNRTI), ou la neurotoxicité avec la

Risques :

• Risque accru d’IRIS

• qInteractions médicamenteuses

• Toxicités cumulées

• Nombre de comprimés plus important

Bénéfices :

• Réduction de la mortalité précoce

• Prévention des autres maladies opportunistes Introduction précoce du traitement antirétroviral

Figure 1. Risques et bénéfices de l’introduction précoce du traitement antirétroviral lors d’une co-infection tuberculeuse

La balance penche en faveur de l’introduction dès la 2e semaine et avant la 8e semaine du début du traitement antituberculeux.

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stavudine ou la didanosine en coprescription avec l’iso­

niazide (INH), en sont quelques exemples. Ensuite, il faut considérer les interactions pharmacologiques liées à l’in­

duction puissante des cytochromes P450 (particulièrement de l’isoforme CYP3A) par la rifampicine. Des interactions sont attendues avec les deux familles de médicaments très utilisées dans le traitement antirétroviral : les NNRTI et les inhibiteurs des protéases (IP), dont les taux plasmatiques peuvent diminuer à des taux infra­thérapeutiques et con­

duire à des échecs de contrôle de la virémie, et donc à une perte de l’efficacité du traitement. A l’inverse, il n’y a pas d’interaction significative entre la rifampicine et les inhibi­

teurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (NRTI).11 Le choix d’un traitement doit donc prendre en compte ces différentes exigences : en Suisse actuellement, le pre­

mier choix chez un patient co­infecté et n’ayant jamais reçu de traitement antirétroviral est la combinaison de ténofovir, emtricitabine et efavirenz, ce traitement existant en com­

binaison à dose fixe (Atripla) et pouvant être employé avec

la rifampicine sans ajustement posologique. L’autre traite­

ment combiné parfois prescrit est le Trizivir qui associe trois NRTI (zidovudine, abacavir, lamivudine). Il s’agit également de l’association antirétrovirale la moins susceptible d’en­

gendrer une atteinte hépatique. Son introduction ne peut cependant pas se faire si la charge virale initiale est élevée (L 100 000 copies/mm3), car cette combinaison est moins puissante que les associations antirétrovirales habituelles et impose d’exclure la présence de l’allèle HLA B*5701 afin de diminuer le risque d’hypersensibilité.

Parmi les NNRTI, l’efavirenz est la molécule de choix si le génotype est sensible. L’efavirenz peut être prescrite avec la rifampicine sans adaptation de dose, alors que la poso­

logie de la rifabutine doit être augmentée à 450 mg/jour si elle est employée conjointement. La névirapine, moins coû­

teu se, s’est cependant montrée moins efficace que l’efavi­

renz lors d’une récente RCT réalisée au Mozambique,12 elle n’est donc pas recommandée en première intention.

La prescription d’IP requiert généralement la coadminis­

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Tableau 1. Interactions médicamenteuses entre les traitements antiviraux et antituberculeux NRTI = inhibiteurs nucléosidiques de la rétrotransciptase ; NNRTI = inhibiteurs non nucléosidiques de la rétrotransciptase.

Traitements VIH Traitements TB Interactions Recommandations

Antiprotéases (IP) (sans booster)

Atazanavir Rifampicine Plus de 80% de réduction de l’aire sous la courbe Contre-indiqué de l’atazanavir

Rifabutine Augmentation des taux plasmatiques de rifabutine A éviter, éventuellement diminuer la dose de rifabutine Antiprotéases (IP) (avec booster, ritonavir)

Atazanavir Rifampicine Diminution significative des taux d’IP Double dose d’IP parfois suggérée (! toxicité), association

Lopinavir à éviter

Darunavir

Rifabutine L’association avec le ritonavir augmente le taux Rifabutine diminuée à 150 mg/j ou 150 mg 3 x/sem,

de rifabutine dose IP inchangée

NNRTI

Efavirenz Rifampicine Diminution des taux d’efavirenz d’environ 20% Utilisation d’efavirenz sans modification de dose – discuter augmentation d’efavirenz à 800 mg selon taux plasmatiques Rifabutine Elimination de la rifabutine augmentée de 30-40% Augmenter la rifabutine à 450 mg 1 x/j ou 600 mg

3 x/semaine

Névirapine Rifampicine Diminution des taux (AUC et Cmin) d’environ Coadministration possible mais suivi rapproché de la

50% charge virale. Ne pas utiliser de dose de charge.

Préférer l’efavirenz

Rifabutine Pas d’interactions majeures Augmenter la dose de rifabutine à 600 mg 3 x/sem.

Préférer l’efavirenz

Etravirine Rifampicine Coadministration contre-indiquée

Rifabutine Rifabutine sans modification de dose. Attention : ne

pas utiliser la darunavir en association Inhibiteur de l’intégrase

Raltégravir Rifampicine La rifampicine augmente le métabolisme avec Certains auteurs proposent de doubler la dose de ralté- réduction de 60% des concentrations résiduelles gravir à 800 mg deux fois par jour si pas d’autre choix de raltégravir

Rifabutine Concentration résiduelle de raltégravir diminuée Pas de modification de dose de 20% sans modifier l’AUC

NRTI

Zidovudine Rifampicine La rifampicine diminue la concentration de Signification clinique inconnue, probablement insignifiante zidovudine (aire sous la courbe) mais l’effet

intracellulaire est non connu

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tration de petites doses de ritonavir, qui inhibe le CYP3A4, afin d’augmenter leurs taux plasmatiques (effet booster).

La rifabutine, quant à elle, est un substrat de l’enzyme CYP3A4 ; sa concentration est donc augmentée par les IP.

L’administration conjointe de rifabutine et d’un IP boosté est possible sans modification de la dose des IP, mais en diminuant la posologie de la rifabutine à 150 mg/jour ou trois fois par semaine. Notons que l’efficacité de la rifabu­

tine semble être comparable à celle de la rifampicine.

Le tableau 1 résume les interactions avec les molécules les plus utilisées en Suisse.

galéniqueetobservance

L’existence de présentations galéniques des antituber­

culeux majeurs permettant de réduire au strict minimum le nombre total des comprimés est très importante pour l’ob­

servance et la tolérance au traitement, en particulier en as­

sociation avec un traitement antirétroviral. La non­disponibi­

lité, en Suisse, de ces présentations galéniques de manière récurrente est problématique. Ainsi, le Rimstar, permettant une quadrithérapie antituberculeuse avec trois à cinq com­

primés/jour (adultes), a été retiré du marché sans préavis et ce pour une durée indéterminée. Le nombre minimal de comprimés pour la phase initiale d’un traitement antitu­

berculeux a de ce fait doublé.

syndromeinflammatoiredereconstitu

-

tionimmunitaireettuberculose

Le syndrome inflammatoire de reconstitution immuni­

taire (ou IRIS, immune reconstitution inflammatory syndrome) est une complication du traitement antirétroviral, qui résulte d’une réponse inflammatoire anormale et exagérée vis­à­vis des antigènes des agents infectieux opportunistes présents au moment du rétablissement du système immunitaire. Les facteurs de risque de survenue sont : un taux bas de lympho­

cytes CD4, une présentation disséminée ou extra­pulmo­

naire de la tuberculose et un délai court entre le début du traitement antituberculeux et l’initiation des antirétroviraux.

Afin d’homogénéiser la recherche sur le sujet, la défini­

tion du syndrome de reconstitution immunitaire en lien avec la tuberculose (TB­IRIS) a fait récemment l’objet d’un consensus (tableau 2).13 On distingue à présent deux caté­

gories cliniques (paradoxical tuberculosis-associated IRIS et un- masking tuberculosis-associated IRIS), et le nombre de lympho­

cytes CD4 ainsi que la charge virale ne sont plus retenus comme critères (ce qui est plus approprié pour les envi­

ronnements où les ressources sont limitées). L’IRIS dans sa forme dite «réaction paradoxale» est parfois décrite comme un effet secondaire des thérapies antirétrovirales en pré­

sence d’un traitement antimycobactérien avec aggravation d’une manifestation clinique ou radiologique de la tuber­

culose, une fois le traitement antirétroviral débuté. Sa pré­

valence est estimée à 4­10% des cas.12,14 Dans une étude de cohorte prospective de 80 patients avec TB­IRIS, on a rapporté dans 44% des cas l’apparition de nouvelles adé­

nopathies ou une augmentation de leur taille, dans 28%

des cas l’aggravation ou l’apparition d’un infiltrat radiolo­

gique et, dans 16% des cas, d’un épanchement ; 85% des

patients ont des symptômes généraux (fièvre, perte pon­

dérale,…).15

Si les manifestations cliniques peuvent être protéiformes, et inquiéter le clinicien en présence de symptômes nou­

veaux et inattendus chez un patient correctement traité, la mortalité rapportée du TB­IRIS est faible : 0 à 4%.16 Elle at­

teint cependant 13% dans le suivi de patients qui présen­

tent un TB­IRIS avec atteinte neurologique.17 Du point de vue thérapeutique, la survenue d’un TB­IRIS lors du traite­

ment d’une co­infection VIH/TB ne nécessite pas d’inter­

ruption de la trithérapie, hormis quelques rares cas avec atteinte neurologique où le pronostic vital est en jeu. Le bénéfice de l’ajout de corticostéroïdes (prednisone 1,5 mg/

kg/jour pendant deux semaines, suivi de 0,75 mg/kg/jour pendant deux semaines supplémentaires) a été documenté dans une étude randomisée récente avec une diminution du nombre d’hospitalisations, et du besoin de recourir à des pleurodèses ou à des aspirations d’adénopathies dans le groupe traité.18 Chez les patients infectés par le VIH, l’intro­

duction de corticostéroïdes doit cependant être confrontée au risque de favoriser une hépatite virale, une maladie her­

pétique ou un syndrome de Kaposi.

Enfin, il est intéressant de noter que des évolutions pa­

radoxales sous traitement antituberculeux bien conduit, existent aussi chez le sujet immunocompétent en l’absen ce de résistance au traitement et touchent classiquement les adénites, les atteintes pleurales et les atteintes du SNC.

Tableau 2. Définition de l’IRIS dans sa forme

«réaction paradoxale»

(Adapté de ref.13).

IRIS : immune reconstitution inflammatory syndrome.

Pour répondre à la définition, les prérequis et les critères cliniques doivent être remplis en l’absence (raisonnable) de diagnostic différentiel Prérequis

• Diagnostic de tuberculose retenu selon les critères de l’OMS

• Stabilisation ou amélioration clinique avant l’initiation de la thérapie antirétrovirale

Critères cliniques

• Les manifestations de l’IRIS doivent débuter dans les trois mois qui suivent l’introduction de la thérapie antirétrovirale

• Un critère majeur ou deux critères mineurs doivent être présents : Critères majeurs

• Adénopathies, abcès froid, autre atteinte tissulaire (par exemple : arthrite tuberculeuse) : apparition nouvelle ou en augmentation de taille

• Atteinte radiologique nouvelle ou en augmentation

• Atteinte tuberculeuse du système nerveux central nouvelle ou en aug- mentation

• Sérosité nouvelle ou en augmentation Critères mineurs

• Symptômes constitutionnels (fièvre, sudations nocturnes, perte pon- dérale) nouveaux ou en aggravation

• Symptômes respiratoires (toux, dyspnée, stridor) nouveaux ou en aggravation

• Douleur abdominale, péritonite, organomégalie, adénopathies abdomi- nales nouvelles ou en aggravation

Explications alternatives à la détérioration clinique à exclure

• Tuberculose résistant au traitement antituberculeux

• Mauvaise adhérence au traitement antituberculeux

• Présence d’une autre infection opportuniste ou d’une néoplasie, par- ticulièrement en cas de diagnostic de tuberculose retenu en l’absence de preuve microbiologique

• Toxicité médicamenteuse

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conclusion

Lors d’une co­infection VIH/TB, les recommandations actuelles préconisent de débuter un traitement antituber­

culeux pour une durée de six mois. La prise du traitement doit être quotidienne au moins durant les deux premiers mois. La trithérapie antirétrovirale doit commencer dès que possible après le début des antituberculeux, idéalement dans les deux semaines suivant l’initiation du traitement antituberculeux. Pour les patients avec l 50 CD4/mm3, l’in­

troduction dans les deux premières semaines est impéra­

tive ; ces conclusions devront toutefois être revues à la lu­

mière des résultats définitifs des études CAMELIA 8 et A5221.9 Les interactions médicamenteuses entre les traite­

ments antituberculeux et antirétroviraux sont multiples et peuvent nécessiter des adaptations de doses ou le recours à la rifabutine. La survenue d’un TB­IRIS ne justifie pas l’arrêt des antirétroviraux sauf les quelques rares cas où l’atteinte implique le système nerveux central.

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23 novembre 2011 1 Global tuberculosis control : WHO report 2010.

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* à lire

** à lire absolument

Bibliographie

Implications pratiques

Lors du diagnostic d’une co-infection VIH/TB, le traitement antituberculeux est à débuter immédiatement pour une du- rée de six mois (sous réserve de modifications du schéma thérapeutique) et le traitement antirétroviral est à commen- cer dès que possible, idéalement après deux semaines Les interactions entre les traitements antituberculeux et anti- rétroviraux sont multiples

La survenue d’un syndrome inflammatoire de reconstitution immunitaire durant le traitement ne justifie généralement pas l’interruption des antirétroviraux

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