L’intuition de Marcel Mauss que des techniques particulières du corps représentent une base somatique indispensable à l’expérience du religieux semble confirmée par les résultats ultérieurs de l’anthropologie et d’autres sciences sociales. A leur lumière, il apparaît qu’une certaine négation des fonctions organiques ordinaires à travers les restrictions alimentaires, la continence sexuelle, les pratiques vestimentaires et les ornements, etc., de même que l’emploi des techniques corporelles extra-quotidiennes telles que les danses, les prosternations, les tournoiements, constituent une condition obligée de toute expérience religieuse ou, du moins, des formes virtuoses de l’engagement religieux.
Les degrés de la mobilisation du corps varient non seulement selon la tradition concernée mais également selon le statut et la fonction des individus au sein de chaque monde religieux. Ainsi, les spécialistes – le clergé, les officiants des rites ou autres médiateurs officiels – se voient souvent imposer des règles de conduite assez strictes, allant au-delà de ce qui est demandé aux simples fidèles. L’accession à ce type de fonction comporte d’ordinaire un changement sur le plan corporel, qu’il s’agisse d’un acte d’investiture sous forme de rite de passage douloureux, de l’ingestion de substances réputées actives ou encore de la mise en contact physique de la personne de l’aspirant avec celle du maître ou avec des objets ou images de culte. Son corps subit alors une certaine transformation signifiant son rapport privilégié à un ailleurs, quoi qu’on entende par ce terme.
Un tel rapport, qui est loin d’être l’apanage des seuls spécialistes institutionnels, semble toujours s’accompagner d’une pratique corporelle singulière. Tous ceux qui prétendent entrer dans une carrière de virtuose – les saints, les mystiques, les maîtres spirituels, les guérisseurs, mais aussi les femmes participant aux cultes de possessions dans un champ religieux dominé par les hommes – semblent ainsi portés vers des usages du corps spécifiques les distinguant d’autres membres de leur communauté. Une certaine distorsion du vécu corporel ne serait-elle pas une condition du dépassement de l’univers quotidien, ne servirait-elle pas de signe d’expertise dans le domaine du religieux ?
L’objectif de la journée d’étude « Le corps et le religieux : entre virtuoses et fidèles ordinaires » est de se pencher sur ces questions dans une perspective comparatiste (bouddhisme, christianisme, hindouisme, islam, judaïsme, religions africaines) à travers trois points d’entrée : 1. Le corps dans l’espace public : enjeux religieux.
2. Des techniques profanes du corps qui conduisent au religieux.
3. Corporéité, subjectivité, identité.
& Le entre virtuoses et fidèles ordinaires corps le religieux:
Toulouse
Université de Toulouse II-Le Mirail
Maison de la Recherche
19-20 mai 2014
JOURNÉES
D’ÉTUDES INTERNATIONALES LABORATOIRE LISST-CAS en tre v irtu os es e t f id èl es o rd in air es & co rp s re lig ie ux :
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Conception graphique : Benoît Colas, UTM / CPRS - DAR. Photographie : © Emma Tarlo, G. Rozenberg, L. Endelstein.
Lundi 19 mai
11.45
Ouverture et accueil Discours de bienvenue
(Jean-Pierre Albert, EHESS, CAS-LISST et Agnès Kedzierska Manzon, UTM, CAS-LISST)
12.00 – 13.30
Déjeuner
13.30 – 15.15
Première session : Le corps et ses limites.
Modératrice : Chantal Bordes-Benayoun (CNRS, LISST-CAS)
• Lucine Endelstein (CNRS, CIEU-LISST) Le shabbat, le corps et l'espace urbain
• Emma Tarlo (Goldsmith University, Londres, R-U) Head to Head: religious encounters through hair
15.15 – 15.30
Pause-café
15.30 – 17.45
Deuxième session : Corps comme véhicule.
Modératrice : Adeline Grand-Clément (UTM, PLH-ERASME)
• Jean-Claude Penrad (EHESS, CEAf-IMAf)
Le corps en quête de ses marges - oubli de soi et expérience soufi
• Odile Journet Diallo (EPHE, CEMAf-IMAf)
Des corps sacrificiels. À propos d’un rite d’appel à la pluie en pays jóola (Sénégal/ Guinée-Bissau)
Mardi 20 mai
9.00 – 10.50
Troisième session (1) : Corps, religion, personne.
Modératrice : Marine Carrin (CNRS, CAS-LISST)
• Guillaume Rozenberg (CNRS, CAS-LISST) Personhood and the Body in Burmese Religion
• Dorota Hall (Institute of Philosophy and Sociology of Religion of the Polish Academy of Sciences) Discovering the Truth: Transgender Christians in Poland
10.50 – 11.00
Pause-café
11.00 – 12.50
Troisième session (2) :
• Agnès Kedzierska Manzon (UTM, CAS-LISST)
Aux marges du religieux : la chasse comme rituel (Mandingues, Afrique de l’Ouest)
• Rane Willerslev (Aarhus Institute of Advanced Studies, Aarhus, Danemark) The spiritual trap: rethinking the transition from nature to culture
12.50 – 14.00
Déjeuner
14.00 – 16.00
Table ronde finale.
Modération : Jean-Pierre Albert et Agnès Kedzierska-Manzon