Travaux de l'abbaye de Saint-Jérôme sur les psaumes
La Commission instituée par saint Pie X pour la révision et la cor- rection de la Vulgate, et l'abbaye romaine de Saint-Jérôme qui lui a
succédé en 1933
par
la volonté de Pie XI, ontentraîné
les bénédictins dansl'étude
des versions anciennes que reprend et corrige la Vulgate,et dès 1912, ils
inauguraient
des Collectanea Biblica Latina parallèlesà la grande édition. Le cours même de leurs travaux, plus encore que l'actualité, les ont amenés à
publier
ces dernières annéestout un
ensemble d'ouvrages sur le psautier dans la
tradition
latine, ouvra-ges dont l'importance est considérable
tant
dupoint
de vue histori-que que pour aider à résoudre dans l'avenir le problème de la version
liturgique
des Psaumes. Nous aurions aimé en donner plusà loisir
un
compterendu
détaillé, mais il nous a semblé préférable d'en faire aussitôt une présentation succincte pour compléter et appuyer les propositions du P. Roguetqu'on
vient de lire ci-dessus.Voici, dans l'ordre de leur parution, la liste de ces publications.
1. Dom Robert WEBER. Le
psautier
romain et les autres anciens psautiers latins, édition critique. Rome, Abbaye de Saint-Jérôme,1953. XXII-411 pp. (Collectanea biblica Latina, vol. 10). Nous
l'indi-
querons avec le sigle PR.
2. Liber psalmorum ex recensione sancti
Hieronymi.
Romae, Typis polyglottis Vaticanis, 1953, XVI-229 pp. (Biblia sacra iuxta Lati- nam vulgatam versionem ad codicumfidem.
cura et studio mona- chorum abbatiae pontificiae Sancti Hieronymi inUrbe.
édita, X.)Nous
l'indiquerons
avec le sigle PG.3. Dom Henri de SAINTE-MARIE
:
Sancti Hieronymi Psalterium iuxta Hebraeos, édition critique. Rome, Abbaye de Saint-Jérôme,1954, LXXI-262 pp. (Collectanea biblica Latina, vol. 11). Nous utili- serons le sigle PH.
4. Dom Pierre SALMON
:
Les « Tituli psalmorum»
des manuscritslatins. Paris, Éd. du Cerf, 1959, 192 pp. (Etudes
liturgiques.,
3).En abrégé
:
TP.5. Richesses et déficiences des anciens psautiers latins. Rome, Abbaye de Saint-Jérôme, 1959, 267 pp. (Collectanea biblica Latina,
vol. 13). En abrégé
:
RD.Ce dernier volume est un recueil d'articles destiné
surtout
à mon-trer
les possibilités qu'offre l'ensemble desinstruments
dont on dis-pose désormais,
tant
pour juger les anciens psautiers que pour préparer éventuellement des versions nouvelles. Ce ne sont que des sondages, limités aux psaumes 20-25, parfois même àun
seuld'entre
eux,
donnant l'exemple du travail qui devrait être fait sur l'en-
semble, mais les conclusions
qui s'en dégagent dépassent
ces bornesétroites
à cause de la compétence desauteurs.
Au passaged'ailleurs,
ceux-ci
signalent
lescontributions
apportéespar d'autres
spécialistesà la
solution
de problèmesétroitement
connexes comme lavaleur
de la version desSeptante
ou lelatin chrétien.
Tous ceséléments
obli-gent
àreconsidérer
lesprincipes
mêmesqui sont
à la base de laversion
publiée
en 1945par l'autorité du
pape Pie XII;cependant c'est bien
celle-ciqui
astimulé
la recherche et provoquépratique- ment
cerenouvellement
de connaissances.I. LES DIFFÉRENTSQU'ILSPSAUTIERS LATINS
:
LEUR TEXTE ET LE RÔLE RESPECTIFONT EU DANS L'ÉGLISE D'OCCIDENT
Lorsqu'on parle
des versionslatines du psautier antérieures
à celle de Pie XII, on enénumère habituellement
trois:
lepsautier dit
gallican conservé
dans
lebréviaire romain,
lepsautier dit romain, attesté
de nosjours par certains chants du graduale
et conservépar
le
chapitre
deSaint-Pierre
de Rome, lepsautier
«iuxta hebraicam verilatem
» desaint Jérôme qui n'a
jamais étéutilisé par
lalitur-
gie
1.
En gros, il en estbien
ainsi, mais les chosessont tout
de mêmemoins
simples.C'est ainsi que
lepsautier dit romain n'est
quel'un
des
nombreux
textes despsaumes
usitésavant l'époque carolingienne dans
lesliturgies
del'Italie,
de la Gaule, del'Espagne,
de l'Angle- terre:
les différencesentre
cespsautiers sont cependant
assez ré-duites pour que
DomWeber puisse
secontenter d'en présenter
lesvariantes dans l'apparat
de PR. Seuleétait tout
à faitindépendante
la vieille version africaine,
dont
iln'est demeuré que
les éléments éparsdans
despsautiers romains, notamment
celui de Vérone2.On a à
peu
prèsabandonné,
à lasuite
de D. de Bruyne,l'opinion qui
voyait dans lepsautier romain une première
révision faitepar saint
Jérôme. Mais sonimportance ne fait
quegrandir dans l'esprit
des
historiens, d'abord
parceque
son texte, comparé auxpsautiers
espagnol,ambrosien et autres, fait
enquelque
sortefigure d'ancêtre commun, mais surtout
parcequ'il
est auterme d'une
évolution con-tinue que l'on
apprécieraseulement quand l'abbaye
de Beuronaura publié
cettepartie
de la VetusLatina;
ilparaît
avoir conservé assezfidèlement
le texted'une
versionlatine primitive3,
etsaint
Jérôme,dans
sa révisionhexaplaire
en a gardéautant
que possible lalangue et
le style.Le
psautier dit
gallican parcequ'il
a étéintroduit par
la réformecarolingienne dans
laliturgie
de ce côté-ci des Monts, est en effet1.
Cependant, trois manuscrits
espagnols et troisirlandais font
pré-céderde séries
chaque psaume qui d'un titre
liturgique:
PH, p. XII; mais ils'agit
ne
peuvent
s'accorder avec la versionjuxta
hebraeos :TP, pp. 48, 98-99. En fait, cette version a influencé le texte
du
psau-tier
wisigothique:
L. BROU,Hispania
sacra., 9, 1955, p. 360.2. RD, p. 108; PR, p. XII.
3. RD, p. 148; PR, p. VIII.
une révision du « psautier romain
»
faite par saint Jérôme d'aprèsles Hexaples d'Origène. En parcourant même rapidement PG, il est facile de remarquer que le bréviaire romain, qui en principe
l'a
adopté de saint Pie V à Pie XII,
n'en
a pasreproduit
exactementle texte,
quant
au vocabulaire, la ponctuation et les strophes. D'au- tre part, comme la ponctuation fait l'objet de difficultés spéciales dans la transmission manuscrite, souvent les livres de chant consti-tuent un
témoignage intéressant4 quoique limité. Mais iln'est
plus questionaujourd'hui
de revenir à ce psautier tel quel:
malgré lesuccès que lui a assuré Alcuin, il est une œuvre assez peu définie.
Car saint Jérôme avait fait son travail de révision
surtout
sur legrec, avec parfois des corrections capricieuses
qui
sont loin d'amé- liorer le psautier romain5.
Pas davantage n'est-il question de reprendre le psautier
Juxta
Hebraeos. L'analyse très fine que fait Dom H. de Sainte-Marie6 montre les limites de saint Jérôme comme hébraïsant, le caractère
un
peu fantaisiste de sa méthode, la tendance classicisante de son latin:
à aucun moment, cette versionn'a
été conçue pour l'usagede la prière.
Cependant l'établissement
d'une
version, de nos jours, doittenir
le plus grand compte de toutes ces traditions antérieures,
tant
pouren conserver fidèlement les « richesses
»
que pour en éviter les« déficiences ».
2. VALEUR DE LA LATINITÉ DES ANCIENS PSAUTIERS
La première richesse des anciens psautiers, c'est la qualité de leur latin. Cette affirmation peut paraître
surprenante
à des gens dont la culture classique est superficielle, limitée aux formules des écolesdu siècle dernier
:
de ce point de vue, une sérieuse mise à jour s'impose dans les milieux ecclésiastiques, car les universitairesont
sur le
latin
et le grec,d'autres
notions. Les langues évoluenttant
qu'elles sont vivantes; au lieu de refuser cette évolution, en se réfu- giant dans des exercices artificiels de thème selon la syntaxe des dis- cours de Lysias ou des lettres de Cicéron, il faut au contraire décou- vrir le dynamisme qui a provoqué les transformations linguistiques.
Or, les chrétiens latinophones se sont créé une véritable langue de
groupe, dont le caractère le plus remarquable est qu'elle est pro- fondément biblique, dans son vocabulaire et sa syntaxe
:
Mgr Schrij-nen, puis Mlle Mohrmann ont
institué
sur ces faits des analyses donton est obligé
aujourd'hui
detenir
compte. Notons que les articlesde C. Mohrmann sont rendus plus accessibles depuis que certains
d'entre
eux viennentd'être
réunis enun
volume de mélanges7. A4. RD, pp. 2AQ. 256, etc.
5. RD, pp. 148-149; voir ibid., pp. 107-149,
tout l'article
de DomA. THIBAUT, La révision hexaplaire de saint Jérôme.
6. RD, pp. 151-187.
7. C. MOHRMANN, Études
sur
le latin des chrétiens, Roma, Edizionidi storia e letteratura, 1958.
une meilleure connaissance du latin chrétien contribueront
aussibeaucoup
lestravaux
de l'Abbaye deSaint-Jérôme, notamment
lesindices
du
vocabulaire, à la fin dechaque édition
despsautiers;
etl'analyse, dans
RD, decertains termes
commesalutaris, salutare, sperare, misericordia, miserationes8.
Leschrétiens ont
préféré larudesse
dessémitismes,
lelittéralisme,
augenre
académique, etsurtout quand
ils'agit
de textesdestinés
à lamémoire, parti dont
les
traductions
enlangue moderne s'accommodent
deplus
enplus;
saint Jérôme lui-même
arendu hommage
aulatin
desanciens psautiers, dont
iln'a pu
sedépartir entièrement, même dans
latraduction juxta
hebraeos9. C'est
laplus
gravefaute du psautier
de Pie XIId'avoir rompu
avec lalatinité chrétienne, faute unanime- ment
relevéepar
lacritique;
de simplesretouches
nesuffiraient
pasà
l'améliorer.
Enrevanche littéralisme et rudesse
nedoivent
pasaboutir
àl'inintelligible,
commec'est
parfois le cas desanciens psautiers.
3. ATTITUDE DES TRADUCTEURS A L'ÉGARD DU TEXTE HÉBREU
Les
psautiers latins antérieurs
àsaint Jérôme ont
ététraduits non sur l'hébreu, mais sur
lesSeptante.
Cetteméthode était
la seule possiblepour
descommunautés qui
necomprenaient aucun
spécia-liste
deslangues sémitiques.
Mais Origène,puis saint Jérôme ont ramené
leschrétiens
versl'original hébreu.
La fidélité à cette mé-thode nous
engage-t-elle àtraduire aujourd'hui
lespsaumes
direc-tement et exclusivement sur
letexte massorétique,
enrompant
defaçon
délibérée
avec latradition
des Septante?
Leproblème
estmoins
facilequ'il n'y paraît d'abord.
Leretour
àl'hébreu était, pour
Origène,une
nécessitéapologétique contre
lesJuifs, non un
besoin de la prière
10; quant
à latraduction
desaint
Jérôme, il estun fait qu'elle n'a
pas été acceptéepour
les psaumes,quel qu'ait
étéle
motif
de cerefus
11. De lamême
façon, les Grecsont
adopté laversion des
Septante,
etnon
cellesplus
conformes àl'hébreu d'Aquila
ou Symmaque12. Pour
nous, lasituation
estrendue
diffi- ciledu fait que nous n'avons d'autre texte hébreu que
celui des Massorètes : PHtémoigne d'autres lectures, d'autres
vocalisations13, lesdocuments
deQumrân attestent l'existence
devariantes qui
jus-tifient
parfois latraduction
des Septante14.
Mais laquestion
de fondreste
entière:
lesSeptante expriment une évolution du texte dans un esprit plus proche du christianisme, parallèlement d'ailleurs
à8. RD, pp. 73-75, 79-85, 121-122, 131-133. Très précieux
sont
égale-ment
les indices desmots
grecset latins
à la fin de RD.9. RD, pp. 157-15.
10. RD, p. 80.
II.
RD, p. 102.12. RD.
p. 101.
13.
RD.p. 186.
-- 1
14. RD, p. 94.
l'évolution du judaïsme palestinien15;
sur
cette évolution s'appuiele Nouveau Testament;même si
l'on
refuse l'hypothèse del'inspiration
des Septante, il
faut
reconnaître que l'élargissement des perspectives, loin de fausser l'espérance du psalmiste, en explicitel'intuition
reli-gieuse
16.
Toutn'est
même pasdit
encore sur le sens hébraïqueprimitif
de certains psaumes, comme le montre le P. Beaucamp dans son commentaire du psaume 2017. Par ailleurs les Septante repré- sentent dansl'histoire littéraire
del'humanité
une étape prodi- gieuse, dont les travaux modernes nous fontprendre une
cons- cience vive18. C'est aussi une étapepréparant
la prière chrétiennedes psaumes, car les psaumes sont pour nous, avant tout, le for-
mulaire par excellence de la prière.
4. L'UTILISATION DES PSAUMES DANS LA TRADITION
DE LA PRIÈRE CHRÉTIENNE
Le lecteur de La Maison-Dieu est déjà familiarisé avec cette ques- tion,
surtout
depuis la publication del'article
du professeur Bal-thasar Fischer19. Aux collectes du psautier, éditées par Dom Brou dans la Bradshaw society,
s'ajoutent
désormais les Titres des psau- mes, publiés sur notre demande, par Dom Salmon. On voit aisé- ment, par ces vénérables guides de la prière, comment les chrétiens ont fait du psautier leur livre de prédilection:
c'est toujours versle Christ et son Église que va la pensée du fidèle, comme à l'accom- plissement parfait de la prière du poète hébreu inspiré; les com- mentaires patristiques ont puissamment contribué à cette interpré- tation, comme
l'a
montré souvent le P. Daniélou, et cette fois encoreà propos du psaume 22 20; l'exégèse médiévale aussi est fidèle dans
son ensemble à la tradition
patristique
: Dom Jean Leclercq en donne un aperçu suggestif pour les psaumes 20-2521.
Enfin le choix, parfoisla modification, des versets de psaumes pour les antiennes chantées témoigne à sa façon de manière bien émouvante de
l'esprit
deprière qui a guidé ceux qui les
ont
utilisés dans leur psalmodie22.Cependant, le moyen âge
marque
unediminution
du sens bibli-que qui
n'a
fait que s'aggraverjusqu'à
notre époque:
que de choixaberrants, accomodatices de textes bibliques23. Peut-être même fau-
drait-il douter que le Graduel et
l'Antiphonaire
romain suffisent,à eux seuls, à rendre compte de la richesse biblique dont la
litur-
gie a été débordante, — et que
l'on
puisse selimiter
à l'Occident pour l'inventorier. Du moins, faut-il voir avec lucidité que changer15. RD, pp. 99-100.
16. RD, pp. 100-102.
17.
RD,pp. 35-50.
18. RD, pp. 51-59, 91-97.
,..
ni"
T'o.8 - - 1
19. La Maison-Dieu, 27, 1951, pp. 86-113.
20. RD, pp. 189-211.
21. RD,
pp.
213-229.22. RD,
pp. 233,
235,239,240,
245.23. RD, pp. 238, 243, 244.
la version
latine
des textes chantés,c'est condamner
engrande partie
lerépertoire mélodique qui était
lié aupsautier
gallicanet même
aupsautier romain
24.Souhaitons que ces
travaux
que nous venons derésumer
rapide-ment
et en généraltoutes
les étudesqui ont paru
depuis treize anssur
les psaumes,sur
les Septante,sur
lelatin chrétien, aboutissent
à
une
versionqui
répondepour
de longues annéestant
aux exigen-ces de la
qualité
scientifiquequ'au
besoin de laprière
desprêtres,
des
réguliers
et des moniales.AIMÉ-GEORGES MARTIMORT.
Pierre
SALMON,o.s.b.
: Les «Tituli Psalmorum
» desmanuscrits
la-tins
(ÉtudesLiturgiques,
3; Collectanea Biblica Latina, 12). Paris,Cerf, 1959, 190 pp.
Dom Pierre Salmon, Abbé de Saint-Jérôme (le
monastère
de laVulgate à Rome),
bien connu
et estimé dans lemonde
savant,donne une édition critique
des séries detitres chrétiens
des Psaumes ren- contrés dans latradition manuscrite
latine: un
tel don est si bien-venu qu'il mérite
à Dom Salmon la reconnaissance de tous les cher-cheurs qui s'intéressent
auPsautier.
Il a enfin etpour
lapremière
foi
rendu
accessible à la recherche, dansune édition critique
faiteavec soin,
un
deséléments non bibliques
les plusattirants
despsautiers latins, sur
lequel on devaitjusqu'à présent
serenseigner
chez le
cardinal
Tommasi ou dansl'édition presque introuvable
deDom De Bruyne, que ce
dernier estimait lui-même
provisoire. Sansintérêt pour
lapure histoire du
textebiblique,
omis donc à bondroit dans
leséditions critiques
des versions des Psaumes (commecelles que
Saint-Jérôme
nous a données au cours des dernières années), cestitres chrétiens
des Psaumesn'en ont
queplus d'in- térêt pour
celuiqui travaille
dans lechamp
(encoremaintenant
sipeu étudié) de
l'histoire
del'interprétation chrétienne
des Psaumes,puisqu'ils ont
été composés, depuis les environs del'an
300, afin defaciliter
auchrétien qui lit
etqui prie
les Psaumesl'usage
chré-tien
de ceschants
de l'AncienTestament.
Lepremier résultat
del'édition
de Dom Salmon saute aux yeux:
les textes édités,qui
vont de la findu
3e à la findu
6e siècle, nous offrentun échantillonnage
de la piété
psalmique
de ces sièclesqui
nous prouve de façon irré-futable
combien ilallait
de soi quel'ancienne prière chrétienne
des Psaumesfût
concentréesur
le Christ, regardé comme celuiqui priait
le Psaume, ou celui àqui
ons'adressait,
ou comme celuidont parlait
le Psaume,ou
aumoins
en ce sens que le Psaume par-lait
del'ordre
nouveauqui s'est établi
dans le monde avec le Christ.Après
une
brèveintroduction
générale àl'histoire primitive
del'interprétation chrétienne
des Psaumes (pp. 1-39), Dom Salmonprésente
en ordrechronologique
six séries différentes detitres
chré-tiens
des Psaumes. Chacune d'elles comporteune introduction
spé-34. RD, pp. 250-258.
ciale
indiquant
consciencieusement les sources, et chacune a reçuun
nom. Dans deux cas seulement ce nom désigne
l'auteur
(IV:
Eusèbede Césarée; VI : Cassiodore-Bède); les autres noms désignent une ori- gine géographique (I : Columba;
Il
: Augustin de Cantorbéry) ou le milieu spirituel dans lequel ellesont
été composées (III : Jérôme;V : Origène).
Avec raison Dom Salmon s'est contenté de présenter le plus par- faitement possible ces précieux documents
:
il laisse aux historiensde l'exégèse la tâche si intéressante de déceler les rapports de dépen- dance ou de parenté dans
l'interprétation
des Psaumes. Par exem- ple la comparaison avecun autre
élément non biblique des Psau- tiers,les
collectes psalmiques rendues récemment accessiblespar
l'éditionl'occasionL.de mesBrou,promettait
des résultats appréciables:
de fait, àpropres recherches sur la série V (cf. Salmon,
p. 32),
un
travail de séminaire a montré dernièrement une parenté évidente entre cette série et la « série romaine»
de collectes psal-miques : comme Dom Brou me le communique aimablement, toutes deux pourraient dépendre du Breviarium
in
Psalmos pseudo-hiéro- nymien.Faisons quelques remarques, qui
n'entendent
pas enlever à cet ouvragel'interprétation
sahaute
chrétiennevaleur:
dansdes Psaumes onl'esquisse de regrette quel'histoire
primitivene soientde pas mentionnées les si importantes homélies sur les Psaumes d'Asté- rius le sophiste,maintenant
accessibles dansl'édition
critique deSkard-Richard. A' propos d'Eusèbe de Césarée on
pourrait indiquer
que ses autres écrits offrent
une
exégèse très développé des Psau- mes (par exemple dans la Demonstratio evangelica). Aprèsqu'il
aété démontré à la page 136 que le
titre
ex dictis Origenis donné par Tommasi à la série V convient seulement àun
préambule effecti-vement origénien et
n'a
aucunautre
appui dans les manuscrits, on comprend mal pourquoi la série porte finalement letitre
« inspiréed'Origène
»
(p. 133). Sans doute offre-t-elle des réminiscences ori- géniennes (par exemple letitre
du Ps. 40), maisplutôt par l'in-
termédiaire de Jérôme et d'Ambroise que directement àpartir
d'Ori-gène.
Dans sa
rigueur
scientifique Dom Salmon discernel'intérêt
del'objet étudié pour la vie actuelle de l'Église, et cela conquiert d'em-
blée la sympathie. Derrière son édition il
n'y
a pas seulementl'in-
térêt du chercheur pour ces vieux textes, mais aussil'intérêt
renou-velé dans le mouvement
liturgique
pour une prière des Psaumes qui soitauthentiquement
chrétienne (p. 10).L'auteur
espère (et le recenseur aimerait partager cet espoir (p. 10)qu'un
jour on pourra composer des titres chrétiens (p. 39) pour le Psautierd'un
bréviaire réformé (qu'on espère pas trop éloigné), en se fondant sur la grandetradition
des titres chrétiens anciens des Psaumes dont l'accès nousest rendu
:
c'est ce qui avait été fait dans beaucoup de bréviaires de la fin du 18e et du début du 19e siècle (pp. 34 sq.), etqu'on
trouve
aujourd'hui
encore dans les bréviaires cisterciens.BALTHASAR FISCHER,