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La PAC et les enjeux de l'agriculture

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Academic year: 2021

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Submitted on 5 Jun 2020

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La PAC et les enjeux de l’agriculture

Vincent Requillart

To cite this version:

Vincent Requillart. La PAC et les enjeux de l’agriculture. GREP Midi-Pyrénées, Parcours 49-50, GREP Midi-Pyrénées, 2014, Parcours. �hal-02792565�

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La PAC

et les enjeux de l'agriculture

Vincent Requillart

Directeur de Recherche à l'INRA, spécialiste des politiques agricoles et alimentaires, enseignant à la Toulouse School of Economics.

Bonjour, Je voudrais tout d'abord vous parler de l'évolution de l'agriculture depuis 50 ans, en montrant en parallèle comment a évolué la Politique Agricole Commune pen- dant cette période (les deux se sont infl uencées mutuellement). Ensuite, je vous présen- terai les enjeux actuels et futurs de l'agriculture, et vous donnerai quelques éléments sur les prévisions d'évolutions de la politique agricole dans les années à venir.

Cinquante ans d'évolution de l'agriculture.

En France depuis les années 60 la production agricole a doublé. C'est une réussite éco- nomique à souligner, malgré quelques moments diffi ciles. Cependant la part de l'agri- culture dans le PIB a fortement décru sur la même période, passant de 10 % en 1960 à 2 % aujourd'hui

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Au cours de cette période, les prix agricoles, en monnaie constante, ont été divisés par 2.

Ceci est la conséquence des gains de productivité, c’est à dire du progrès technique. La contrepartie de cela a été une diminution drastique du nombre d'exploitations et de l’em- ploi dans le secteur agricole. Sa part relative dans l’emploi total est passée de 30 % à 4 %.

La productivité agricole a fait un bond remarquable : le rendement du blé à l'hectare est passé de 20 quintaux, dans les années 60, à 70 quintaux en moyenne en France de nos jours. On a vu aussi l'apparition de nouvelles cultures, comme le colza, qui prennent une part croissante de la production agricole actuelle.

La croissance de la production s’est aussi concrétisée en termes de balance commer- ciale : au cours de cette période la France, qui était défi citaire dans les années 50, est devenue exportatrice nette (et c'est aussi le cas de l'Europe prise globalement).

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59 59 Il a fallu pour cela des changements majeurs dans la façon de travailler : mécanisa-

tion très forte, recours massif à des intrants (engrais, pesticides…) permettant des gains de productivité supérieurs à ceux de l'industrie, démentant ainsi l'image traditionnelle qu'on a du secteur agricole. La production a doublé pendant que le volume des facteurs de production restait stable (mais changeait considérablement dans son contenu) : le recours au travail humain a fortement diminué, et les besoins en capital sont devenus considérables. C'est ce qu'on a appelé le modèle intensif, avec énormément d'intrants mis en jeu. Cela a duré jusqu'aux années 90-95, où l'on a pris conscience de la nécessité de maîtriser l'emploi de ces ressources pour une meilleure effi cacité. Depuis une quin- zaine d'années, on constate un certain essouffl ement des gains de productivité et une certaine stagnation de la production.

Comme je l’ai souligné précédemment, les prix des produits agricoles ont augmenté moins vite que l'indice des prix à la consommation, et c'est une baisse relative des prix agricoles permise par les gains de productivité. Quand on a de tels gains de producti- vité dans un secteur d'activité, ils peuvent être utilisés de diverses façons. Ils peuvent être gardés dans le secteur, pour augmenter les salaires par exemple, ou pour faire des investissements, ou pour distribuer des bénéfi ces. Ils peuvent aussi être transférés vers l'aval sous forme de baisse de prix, ce qui va bénéfi cier aux consommateurs, mais plus précisément aux industries agro-alimentaires qui sont les principaux clients de l'agri- culture. La transmission de la baisse des prix au consommateur fi nal dépend alors du comportement des industries alimentaires et de la distribution.

Cette évolution s'est traduite par une baisse considérable du nombre d'exploitations agricoles, qui est passé de plus de 2 millions et demi à moins de 500 000, et la taille moyenne des exploitations s'est donc accrue corrélativement : les exploitations de moins de 20 hectares, qui représentaient 80 % des exploitations en 1950, ne représentent plus aujourd'hui que 40 % (mais par rapport à un nombre plus faible). Et c'est surtout le nombre d'exploitations supérieures à 50  ha qui a fortement progressé  : ce sont elles qui réalisent aujourd'hui la majeure partie de la production. Alors il faut bien sûr être prudent : 20 ha de grande culture, cela n'a rien à voir avec 20 ha d'arboriculture, mais la tendance à l'augmentation de surface par exploitation est incontestable, alors que la surface totale cultivée n'a pas changé sensiblement en 50 ans.

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Une autre évolution remarquable peut se voir dans le domaine des salaires et revenus, qu'on a cherché à rapprocher de ceux des personnes non agricoles. Dans les années 55- 60 les revenus des ménages agricoles étaient en effet plus bas que les autres.

L'image ci-dessous, sur la période récente, (attention, il s'agit d'indices base 100 en 1980) montre que l'évolution de ces revenus est très irrégulière : il y a eu quelques périodes de rattrapage, mais aussi des périodes de baisse relative ou de stagnation de ces revenus, alors que pour l'ensemble de la population on a eu une croissance régulière, qui se ralen- tit néanmoins ces dernières années.

Évolution de la politique agricole commune (PAC) ces 50 dernières années Je vous ai donc présenté de façon très condensée ce qui s'est passé pendant les 50 der- nières années, et j'ai probablement oublié beaucoup de choses, dont on pourra parler pendant le débat si vous le souhaitez.

Je vais maintenant vous présenter comment la PAC a évolué pendant ces 50 années, évolution considérable pas toujours bien acceptée ou comprise.

Les objectifs de départ de la PAC étaient nombreux : d'abord accroître la production agricole et la productivité de l'agriculture, et améliorer le niveau de vie et la qualité de vie du monde agricole. Ensuite, assurer une stabilisation du marché et des cours des produits agricoles, réduire les prix des produits pour les consommateurs et enfi n assurer une sécurité des approvisionnements. A l'époque il y avait un consensus assez général dans la population non agricole aussi bien qu'agricole sur ces objectifs.

Pour atteindre ces objectifs, les outils mis en œuvre par l'Europe ont consisté à la mise en place d'une protection par rapport au reste du monde, en soutenant les prix d'un certain nombre de productions, prix garantis à un niveau supérieur à celui du marché mondial. Il y a donc eu mise en place de taxes aux importations et de garanties de prix sur un certain nombre de produits (pas tous) : les céréales, le sucre, les produits laitiers, et la viande bovine (mais pas le poulet ou le porc par exemple), avec un régime spécial

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61 61 pour les oléagineux. Cette politique a engendré des résultats rapides, et l'autosuffisance

alimentaire a été atteinte au niveau européen (alors que l'on était importateur net jusque dans les années 70) malgré l'augmentation importante de la population.

Il y a eu problème quand les quantités produites sont devenues supérieures à la consom- mation européenne, et qu'il a fallu gérer les excédents, en particulier en cherchant à les exporter. On a alors mis en place des systèmes d'aides aux exportations qui se sont vite révélés très coûteux. Par exemple, il y a eu des périodes où les stocks de beurre et de viande ont été considérables car la Communauté Européenne achetait aux prix garantis des produits difficiles à revendre sur le marché mondial où les prix étaient bien plus bas.

Cela s'est passé dans les années 80, et a amené à repenser la PAC, qui avait atteint ses objectifs initiaux. Un certain nombre de nouvelles mesures ont donc été décidées, en particulier la création de quotas laitiers en 1984 pour limiter la croissance excessive de la production.

Par ailleurs, les produits non protégés par les tarifs douaniers (comme les viandes blanches ou les huiles végétales) avaient des prix plus bas car en concurrence avec le reste du monde, et sont donc entrés en concurrence sur le marché intérieur avec les produits protégés. Les consommateurs se sont donc mis à consommer plus de viande blanche au détriment de la viande de bœuf. Dans le domaine des huiles, pour la même raison, les industriels ont substitué des huiles végétales aux graisses animales (produits laitiers essentiellement). Enfin dans le domaine de l'alimentation animale (céréales, tourteaux d'oléagineux), on a vu apparaître dans l'Union des produits importés, sou- vent des coproduits de l'industrie agroalimentaire, qui sont venus concurrencer les pro- ductions céréalières. Il y a donc eu une sorte de cercle vicieux qui a encore accru les besoins de stockage car les consommations domestiques chutaient. La politique initiale n'était donc plus soutenable.

D'autant qu'à cette période de la fin des années 80 se sont développées les négociations internationales dans le cadre du GATT (l'ancêtre de l'OMC). Les partenaires commer- ciaux de l'Europe lui reprochaient de faire du dumping en protégeant sa production et en aidant financièrement ses exportations, rendant l'agriculture européenne artificiel- lement compétitive. Durant cette période, les prix mondiaux ont donc été tirés vers le bas. Les accords du GATT, au début des années 90, ont reconnu que, si les pays avaient un droit légitime à soutenir leur agriculture, ils ne pouvaient pas utiliser n'importe quel instrument, et qu'il fallait progressivement (on ne pouvait pas changer tout du jour au lendemain) se limiter à certains instruments. On a classé les instruments en boite rouge (les instruments non autorisés qui devraient disparaître à terme, comme les prix garantis), boite verte (outils autorisés et même recommandés) et boite orange (instru- ments en discussion, voire en contestation). Il a donc fallu changer progressivement les politiques agricoles de soutien dans un processus d'évolution continue (et qui n'est pas encore achevé).

Il y a d'abord eu le découplage partiel du soutien : plutôt que de soutenir par les prix, on est passé à un soutien par hectare (différent en fonction de la production qu'on y fait) pour arriver aujourd'hui à un soutien à l'hectare indépendant du type de production.

Cela a pris 15 ans.

Et sous la pression de la société sont apparues les mesures agri-environnementales.

Car, avec l'intensification de l'agriculture, des effets négatifs sur l'environnement se sont multipliés (les pollutions par les nitrates sont les plus connues mais elles ne sont pas les seules !). Et dès les années 90 on a cherché à corriger ces effets nuisibles par des contraintes imposées aux exploitants, mais qui pouvaient être financées par des aides.

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Puis dans les années 2000 est apparu un nouveau champ, plus large qu'un simple sou- tien de l'agriculture, et qu'on a appelé le développement rural : la politique agricole doit permettre de maintenir et développer les activités dans les zones rurales, et pas seulement les activités agricoles (dont l'impact reste quand même prépondérant) : c'est ce qu'on a appelé le deuxième pilier de la politique agricole.

Entre-temps, l'Union Européenne est passée de 6 à 28 membres bientôt, et cela a fait évoluer nos visions de l'agriculture car les situations de tous ces pays sont très différentes.

En 2003, il y a donc eu une réforme très importante. Le découplage est devenu complet, avec la généralisation des aides forfaitaires à l'hectare, mais avec un débat énorme sur la répartition de ces aides selon la taille des exploitations (il semblerait plus juste de donner plus à l'hectare aux petits exploitants), mais aussi sur la légitimité de ces aides à l'agricul- ture (qui peuvent manquer à d'autres secteurs d'activité tout aussi dignes de soutien !) On a vu aussi un renforcement (encore insuffi sant à mon gré) de l'écoconditionnali- té : les aides sont attribuées moyennant le respect de normes environnementales. Mais toutes ces réformes prennent du temps, et l'écoconditionnalité est encore loin de pro- duire les effets attendus, et il ne serait pas très diffi cile de la rendre plus contraignante.

On a aussi assisté au renforcement du deuxième pilier qu'est le développement rural.

Évolution des dépenses de la PAC

On est actuellement à des niveaux considérables, de l'ordre de 50 milliards d'euros pour toute l'Europe. On voit sur le diagramme ci-après que le total a certes un peu augmenté, mais que la structure de ces dépenses a été profondément modifi ée :

- les subventions à l’exportation, qui représentaient la moitié des dépenses il y a 30 ans, ont disparu complètement

- les mécanismes de soutien des prix ont eux aussi disparu quasiment, sous l'effet de la pression du GATT

Et ce sont les paiements directs (couplés, puis découplés) qui les ont remplacés, et on voit apparaître ces dernières années des sommes destinées au développement rural.

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63 63 La situation actuelle de l'agriculture française.

La France est toujours largement le premier producteur agricole de l'Europe.

La France est toujours largement le premier producteur agricole de l'Europe.

La valeur de sa production est de l'ordre de 70 milliards € (50 milliards pour l'Alle- magne). Et l'agriculture reste un secteur économique qui exporte beaucoup.

Nos principaux clients sont européens, et ce sont aussi nos principaux fournisseurs, car la France importe également beaucoup de produits agricoles.

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La PAC a donc permis de maintenir l'importance de notre agriculture.

L'autre objectif important au début de la PAC était d'assurer aux ménages agricoles des revenus équivalents à ceux des autres secteurs économiques. Et on voit sur le graphique suivant (en 2010) que suivant l’orientation productive les revenus varient beaucoup.

La moyenne des revenus se situe à environ 30 000 € par actif non salarié, mais les écarts vont de 1 à 6 entre l'arboriculture et la viticulture ! Et il y a de fortes variations d'une année à l'autre. Pour une même orientation productive, il y a également une grande dis- persion des revenus (partie droite du graphique). Et pour certains producteurs, le revenu serait négatif, c'est-à-dire que leur exploitation fait des pertes ! Cette dispersion est liée à la taille de l'exploitation, à la région où est implantée l'installation, et à la performance individuelle des agriculteurs. C'est un métier très technique, et diffi cile à bien maîtriser.

Et cela complique les débats sur la répartition des aides.

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65 65 Le soutien direct aux exploitations a beaucoup augmenté, il représente environ 10 mil-

liards d'euros, pour 500 000 exploitations, soit une moyenne de 20 000 € par exploita- tion. Il est légitime que la société s'interroge sur la façon dont cette aide est répartie, mais aussi sur la pertinence de l'attribution de cette aide à l'agriculture au détriment d'autres activités qui le mériteraient peut-être autant. Je crois que le secteur agricole ne doit pas refuser de participer à ces débats tout à fait légitimes.

Enfi n la part des subventions dans le chiffre d'affaires des exploitations présente aussi une grande dispersion, en fonction de la géographie. En gros on peut dire que 80 % des soutiens vont à 20-30 % des exploitations, et cette répartition est aujourd'hui sérieuse- ment remise en question.

Enfi n dans le débat actuel sur l'orientation à donner en matière de type de production, pour ne donner que deux exemples, le développement de l'agriculture biologique en France reste très timide comparé à nos voisins, et les progrès en matière de protection de l'environnement tout à fait insuffi sants (voir l'importance des zones vulnérables aux nitrates).

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Les enjeux actuels pour l'agriculture.

On peut les répartir en 3 volets :

- assurer une production alimentaire suffi sante, saine et respectueuse de l'environne- ment. Cela doit se faire en dépassant l'écoconditionnalité (simple respect des normes) mais en exigeant des résultats visibles et mesurables pour avoir droit aux soutiens. Cela permettra de renforcer la légitimité des soutiens, surtout en développant des produc- tions de qualité (agriculture biologique en particulier)

- assurer en même temps la viabilité et la compétitivité des entreprises agricoles et ali- mentaires, (parce que c'est toujours un secteur économique important), avec une sécuri- sation des revenus (en amortissant les variations d'une année sur l'autre en fonction des aléas) : cela passera par une refonte de la répartition des aides

- enfi n, poursuivre le développement des zones rurales : en dehors de l'agriculture, il faut y développer d'autres activités, un tissu économique rural non spécifi quement agricole, en favorisant les zones dites défavorisées.

Quelle PAC pour les années 2014-2020 ?

C'est le résultat d'un long processus dans lequel le Parlement européen est maintenant fortement impliqué contrairement au passé. A partir d'un document de la Commission Européenne de novembre 2010 « la PAC à l'horizon 2020 », des propositions ont été faites en octobre 2011, qui ont donné lieu février 2013 à un « compromis des Chefs d'États sur le cadre budgétaire 2014-2020 », approuvé en juin 2013 par la Commission et le Parlement, donnant lieu en décembre 2013 à de nouveaux règlements approuvés par le Conseil des ministres et par le Parlement pour mise en application dès janvier 2014 et fi nalisation dans chaque pays concerné. En 2014 on va discuter de la réforme de la répartition des aides directes, qui devrait rentrer en application dès 2015. Et l'implica- tion du Parlement européen à ces divers stades (avec des possibilités d'amendement des propositions de la Commission) est la manifestation d'une certaine démocratisation du processus, qui devient moins technocratique !

Cette politique agricole va donc donner lieu à un cadre, une « boîte à outils », que les États peuvent utiliser à leur convenance en fonction de leurs spécifi cités nationales, ce qui donne de la fl exibilité, mais qui demande du courage (on ne peut plus se réfugier

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67 67 derrière le règlement européen !). Et la France ne brille pas vraiment par son courage,

notamment dans le domaine de la répartition des aides (d'autres pays sont allés plus loin dans le sens d'une réallocation plus équitable des aides). C'est donc aux citoyens de chaque pays d'être vigilants sur la manière dont leur propre gouvernement applique l'accord européen. (Et cela vaut pour des domaines autres que l'agriculture !)

Tout cela est en cours actuellement, et la fi nalisation des choix doit intervenir dans les jours qui viennent. 2014 sera une année transitoire, la mise en œuvre complète devant avoir lieu en 2015.

Sur le plan budgétaire, on a opté pour un budget de la PAC stable en euros courants sur les prochaines années, soit donc une baisse régulière si on l'exprime en euros constants (c’est-à-dire hors infl ation) : on va passer de 50 milliards d'euros au début des années 2000 à 35 milliards d'euros vers 2020, tout en conservant une architecture globale à peu près identique entre les aides directes P1 et les aides au second pilier P2, le développe- ment rural, (mais on a réduit un peu plus le niveau des aides au deuxième pilier, ce qui est dommage). Les États ont une certaine latitude pour l'utilisation des enveloppes P1 et P2 qui leur sont allouées.

Il subsiste des différences importantes d'État à État pour le niveau des aides directes à l'hectare, qui s'expliquent surtout par diversité des situations des nouveaux entrants, mais il y a un effort de convergence vers une valeur moyenne de l'ordre de 280 €/ha (dont la France est très proche).

Les principales évolutions des aides du premier pilier concernent l'introduction, à côté d'un droit de base pour toute exploitation et calculé à l'hectare, d'une « surdotation » pour les 52 premiers hectares. C'est la France qui a demandé cette innovation, qui de- vrait avoir des conséquences bénéfi ques très importantes à mon avis car cela réduira les inégalités entre petites et grandes exploitations. On voit aussi apparaître un « paiement écologique », c'est-à-dire que le versement de cette aide sera donné sous condition de respect de 3 grands critères environnementaux (pour simplifi er un système assez com- pliqué)

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Le premier critère concerne la diversité des cultures : il faudra que chaque exploitation produise aux moins 3 cultures différentes, dont la principale représente moins de 75 % du total. Il faut savoir qu'en France, il y a déjà 95 % des exploitations qui respectent ce critère (ce n'est pas le cas partout en Europe)

Le deuxième critère demande le maintien d'une proportion régionale de terrains sous forme de prairies permanentes : il y a divers niveaux requis suivant les régions (mais ce n'est pas vraiment contraignant non plus).

Enfi n, troisième critère, il faut que chaque exploitation conserve au moins 5 % de sur- faces dites d'intérêt écologique (haies, bordures, arbres, bandes tampons), et cela peut être mutualisable entre exploitations voisines. C'est un critère facile à satisfaire en réalité.

Il faudra, pour que ce paiement écologique prenne sens dans le futur et réponde aux attentes de la société, que l'on fasse évoluer ces critères vers des valeurs plus contraignantes, et surtout défi nies et personnalisées par zones géographiques et non pas au niveau national (réfl échir par bassin-versant pour les seuils de nitrates, par exemple).

Concernant le développement rural (deuxième pilier), qui représente dorénavant moins de 20 % du total des aides, il comporte des éléments liés à la compétitivité des exploitations (dotations aux jeunes agriculteurs et prêts bonifi és pour la mo- dernisation des bâtiments d'élevage), à la protection de l'environnement (systèmes herbagers, mesures agroenvironnementales climatiques…), au développement des zones à handicap naturel (ICHN), dont les cartes seront redéfi nies et le plafond des aides relevées et étendues au secteur laitier. Il y aura aussi des aides concernant la forêt, ainsi qu'une rénovation des outils existants en matière d'assurance-récolte et de fonds sanitaire et environnemental, et une participation au renforcement des services ruraux non agricoles.

En conclusion

L'agriculture a connu une évolution extrêmement importante en 50 ans, et c'est plutôt une réussite dans l'ensemble, même si nous sommes aujourd'hui confrontés à une série de défi s majeurs  : les problématiques environnementales deviennent prédominantes,

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69 69 dans un monde concurrentiel où nos marchés à l'exportation sont très exposés, et

nous obligent à repenser nos « positionnements-produits ». Et les attentes de la société concernant l'agriculture ont profondément changé.

La PAC a été et restera un outil indispensable pour permettre ces évolutions, et sa nou- velle réforme en cours me semble aller plutôt dans la bonne direction, (même si c'est très lent), en renforçant dans le futur la prise en compte des impacts environnementaux, le soutien à la production de biens publics et la recherche d'une plus grande équité entre les agriculteurs.

Débat

Un participant - Merci pour cette belle présentation. J'aurais deux questions :

- Dans le schéma que vous avez présenté, des années 50 à aujourd'hui, est-ce que vous avez des chiffres sur les écarts entre ce qui était prévu et ce qui s'est produit, parce que si l'évolution est importante, est-elle conforme, en nombre d'exploitations et en nombre de personnes vivant de ces exploitations ?

- Les rapports entre la production agricole et l'industrie agroalimentaire peuvent-ils complètement remettre en cause la politique agricole commune ? En effet, au niveau du cadre budgétaire de la politique dans laquelle on introduit les productions agricoles, on ne précise pas la définition des produits agricoles qui sont assimilés à des produits agroalimentaires. Ceci fait que cette industrie peut s'approvisionner à l'extérieur et venir concurrencer sa propre production interne. Et çà, c'est une concurrence interne qui m'a toujours paru extrêmement difficile d'admettre.

Vincent Réquillart - Je vais essayer de répondre, mais vous pouvez réagir à mes réponses.

Première question : est-ce qu'on avait prévu une telle évolution ? Je n'ai pas vu de chiffres de prospective établis dans les années 60-70, mais par rapport à ce qui se passe dans d'autres pays, on reste dans des tailles d'exploitations qui sont raisonnables. On est tou- jours dans le cadre d'exploitations familiales, ou de regroupements tels que des GAEC ou autres. Il y a évidemment quelques cas d'exploitations très grandes, (1 000 vaches dans le nord de la France qui ont défrayé la chronique). Globalement, le schéma est celui de l'exploitation familiale. Ensuite, je crois qu'il y a encore des exploitations, compte tenu des conditions de vie actuelles, qui sont difficilement viables pour des jeunes qui n'ont pas forcément les mêmes aspirations que celles qu'avaient leurs parents. Je crois qu’ils comparent ce qu'ils peuvent gagner dans l'agriculture avec ce qu'ils pourraient gagner en ayant un autre métier. On peut évidemment accepter de gagner moins pour exercer un métier que l'on aime, mais il faut aussi tenir compte des autres opportunités. Il y a encore beaucoup d'exploitations dans lesquelles la vie paraît difficile, compte tenu des aspirations qu'on peut avoir à 25 ans. Est-ce qu'on va aller vers des tailles immenses, j'ai

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du mal à le croire. Je pense que, pour des raisons techniques, à partir d'une certaine taille, on ne fait plus tellement d'économies d'échelle. Pour la deuxième question, si j’ai bien compris, cela renvoie à la question des soutiens à l’exportation. Ces aides existaient parce que le prix européen était supérieur au prix mondial : pour exporter, il fallait vendre au prix mondial. L'aide à l'exportation a aujourd’hui quasiment disparu. La politique euro- péenne consiste à aligner pratiquement les prix européens sur les prix mondiaux.

Une participante - Avec la PAC, une collectivité locale peut-elle (a-t-elle) le droit d'aider tel ou tel type de production, ou par exemple inciter le Conseil Général ou Régional à augmenter le budget des collèges ou des lycées pour leur permettre d'acheter la produc- tion locale et améliorer la qualité ?

Vincent Réquillart - On peut soutenir les cantines pour acheter des produits avec des exigences de qualité ; çà ne paraît pas être quelque chose de condamnable comme une pratique déloyale, mais on peut imaginer qu'il y a des exigences d'appel d’offres ; à l'aide du cahier des charges, on offre aux collectivités le moyen d'améliorer la qualité, sans favoriser la production de Monsieur X ou de Monsieur Y.

Sur le principe, çà ne paraît pas antinomique. C'est aux producteurs de valoriser leurs produits de la meilleure façon possible. Si telle exploitation s'oriente vers des produits correspondant à une demande, et qu'elle trouve un marché, il n'y a pas lieu de contester qu'une collectivité locale pousse dans ce sens-là.

Un participant - Vous déplorez que les choses évoluent trop lentement, mais ce n'est pas spécifique à l'agriculture, toute la société est touchée, il suffit de regarder les résistances aux réformes.

Ensuite, vous avez parlé des exportations : On pouvait se poser la question de savoir si elles étaient viables ou pas. Je pense qu'il ne faut pas oublier qu'on ne développe pas suf- fisamment le projet : aujourd'hui, dans la profession agricole, on s'intéresse davantage au modèle qu'au projet.

Vous avez parlé aussi de grandes réformes dans l'agriculture, et au niveau de la société, il y a également de grandes réformes, qu'il s'agisse de l'industrie, de la justice, du com- merce, etc.

Ensuite, par rapport aux restructurations agricoles, dans les années 70, il y avait une sti- mulation très forte, il devait y avoir très peu d'exploitations d'après les simulations mais quand on est arrivé au terme, on s'est aperçu que les résultats ne correspondaient pas du tout aux prévisions faites 20 ans plus tôt. Par exemple, sur le canton de Boulogne, on avait prévu qu'un grand nombre d'exploitations allaient disparaître, et on s'est aper- çu que les choses n'avaient pas évolué comme çà. Le maire avait émis cette réflexion : ceux qui nous manageaient n'avaient pas pris en compte le coefficient de résistance des exploitants du monde agricole.

Vincent Réquillart - Sur le rythme des réformes, je suis d'accord. A titre personnel, je trouve que l'agriculture, dans son ensemble, n'a pas assez pris le virage de la qualité et du respect de l’environnement. Et cela m'étonne que les citoyens ne réagissent pas plus.

Une deuxième réflexion : j'ai toujours été frappé, concernant l'évolution de la politique agricole quand on compare le discours des dirigeants agricoles des autres pays, que la profession française est celle qui a résisté le plus à faire évoluer cette politique agricole.

Quand j'ai l'occasion d'aller à des débats à Bruxelles autour de la politique agricole, je remarque que la France a une position assez conservatrice.

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71 71 On voit bien qu'il y a un certain nombre de possibilités qui commencent à apparaître,

et qui sont des alternatives au modèle dominant ; je pense qu'il faut les favoriser, même si je pense que çà restera toujours une fraction non majoritaire de l'agriculture. Mais ce n'est pas pour autant qu'il ne faut pas les favoriser. Même dans le cadre du modèle, au moins pour un certain nombre de productions, il y a des formes à trouver qui peuvent être compatibles avec les attentes de jeunes qui s'installent. Par exemple, l'élevage est une activité contraignante ; tout le monde n'est pas prêt à accepter ses contraintes, donc il y a des progrès à faire pour, à la fois maintenir cette activité, et permettre qu'elle soit exercée dans de meilleures conditions.

Le participant - Le modèle semble difficilement gérable.

Vincent Réquillart - L'agriculture a évolué de façon forte depuis les années 60, et je pense qu'on n'a plus tellement intérêt à augmenter la taille des exploitations. Il y a eu des pré- visions peu réalistes qui estimaient mal la diminution du nombre des exploitations. Par rapport à l'analyse économique standard, dans le cas de l'agriculture, il y a de fait une capacité de résistance des exploitants en place. C’est au changement de génération que s’effectue le choix de rester dans l’activité agricole et d’arrêter.

Un participant - En 1964, Edgard Pisani était venu dans la région et avait déclaré aux agriculteurs : « Vous ne serez peut-être bientôt plus que deux agriculteurs par village », et il avait ajouté « mais vous aurez un revenu très grand » !

Concernant l'environnement, on dit : « la France est le plus gros consommateur de pro- duits phytosanitaires », mais est-ce que c'est en tonnage ou à l'hectare ?

Un autre point : Aujourd'hui, se développent des techniques de travail adaptées pour lutter contre l'érosion, pour améliorer la qualité de l'eau, pour faire moins de pollu- tion par les carburants par des procédés inavouables… ce qui nécessite la réalisation de travaux importants (qui permettent par exemple d'éviter de combler les fossés par des boues en cas de gros orage…). Et cela permet de faire des économies qui rentabilisent les travaux (irrigation et drainage…) en trois ou quatre ans. Je souhaiterais que l’État considère cela comme un investissement, (je ne demande pas que l'on nous paie le maté- riel) par rapport à la fiscalité, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Vincent Réquillart - Sur la question des phytosanitaires, c’est une question pertinente.

Une tonne de "sulfate de cuivre" ou une tonne d’atrazine pour prendre des exemples n’ont pas du tout les mêmes effets. Ces chiffres globaux de tonnage, il faut s'en méfier, mais il n'en reste pas moins qu'on reste des consommateurs importants par hectare de phytosanitaires et il y a sûrement des domaines dans lesquels on pourrait faire des pro- grès. Le ministère a lancé un programme de réduction des phytosanitaires avec des objec- tifs consistant à réduire de 50 % les consommations de produits phytosanitaires. Il y a, à l’INRA, un certain nombre de travaux pour déterminer, selon la culture, quel pourrait être le taux de réduction sans atteinte forte sur les rendements. Pour les grandes cultures, c'est de l'ordre de 20 à 25 %, au-delà il semble que la perte de rendement devienne non négligeable. Sur l'arboriculture conventionnelle, il semble que ce soit compliqué.

Une participante - Dans les dernières mesures décidées il y a un an ou deux, on a entendu parler de certaines pratiques qui seraient interdites, par exemple les traitements d'épan- dages par voie aérienne ; alors, on a sorti des décrets immédiatement pour accorder des dérogations ! Ce genre d'interdit, j'aimerais savoir où çà en est : en tant qu'agriculteur habitant la campagne, je vois des surfaces toutes rouges (peut-être du glyphosate) à certaines périodes. Est-ce que des pratiques comme celle-là vont continuer à perdurer ?

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Vincent Réquillart - Je ne connais pas le cas spécifique des épandages par avion. Plus généralement, il faut une régulation des pratiques agricoles pour limiter les atteintes à l’environnement, régulation qui puisse être définie par zones. En effet, ce qui est perti- nent dans une zone peut l'être moins dans une autre. J’ose espérer que ceci émergera, peut-être en raison des pressions de la société. En fait ce sera relativement long à mettre en œuvre. Sur des cas plus symptomatiques, tels que dans le cas des algues vertes, on n'a fait relativement peu de chose.

Un participant - Par rapport aux bonnets rouges, les explications n'étaient pas très claires. D'après ce que j'ai compris, ils ne veulent pas payer l'écotaxe des portiques ; il y a plein de bonnets rouges différents, et je n'y comprends rien.

Vincent Réquillart - D'après ce que j'ai compris, il s'agit au départ d’une difficulté liée à la suppression des aides aux exportations dans le cas de la filière poulet. La filière s'est développée à partir d'une qualité standard exportée vers des pays tiers. Le fonde- ment initial des subventions aux exportations était l’existence d’un prix des céréales plus élevé dans l'Union européenne que dans le reste du monde. Ce prix élevé des céréales induisait un coût de production des poulets plus élevé que dans le reste du monde. Pour corriger ce coût plus élevé, des aides à l’exportation de poulets ont été mis en place. A partir du moment où le prix des céréales dans l’Union Européenne n’est plus supérieur au prix mondial, l’existence de ces aides ne se justifie plus. La suppression de ces subventions était prévue depuis longtemps. Les acteurs n’ont pas voulu l’anticiper. C'est l'éternelle question : même quand la suppression des aides est annoncée à l'avance, il y a des acteurs économiques qui en pâtissent car ils n’ont pas pu ou su adapter leur production aux nouvelles règles du jeu. Le problème de fond est celui du positionnement ‘qualité’ des produits que l’on fabrique. Dans le cas des poulets (mais il y a de nombreux autres exemples) une partie de la production est de qualité standard, facile à produire dans d’autres pays. Sur ces produits, la concurrence en prix est forte et nous ne sommes pas toujours dans des conditions de maintenir notre compétitivité. Le débat sur l'écotaxe est différent. C'est un débat plus général, et si on considère que les émissions de CO2 ont un effet néfaste, il est normal de souhaiter qu'on en émette moins, quel que soit le secteur d'activité. Un moyen est de taxer les émissions.

Une participante - Les avancées sont trop lentes, mais pensez-vous que les taxes inter- nationales envisagées depuis 2013 vont nous aider à avancer ? Et est-ce que la politique du GATT puis celle de l'OMC, ou le pacte Europe/États-Unis en cours de négociations, n'ont pas influencé la PAC dans la direction où elle est allée, avec un agrandissement excessif de la dimension des exploitations, comme on l'observe au Brésil ?

Vincent Réquillart - Évidemment, les accords internationaux du GATT, dans les années 85-90, ont eu un impact fort, parce que, si le principe des soutiens a été maintenu, les modes de soutien ont été remis en cause, des modes de soutien ont été interdits et des modes de soutien déclarés compatibles avec les accords. Concernant le débat sur la justification des aides, on voit apparaître, surtout dans le discours international, l'exi- gence d'une contrepartie concernant l'environnement et l'intérêt public, qui peut même concerner les paysages. L'idée c'est de dire que le soutien à l’agriculture doit être lié à l'apport de l'agriculture, soit au respect de l'environnement, soit à la production d'élé- ments dont la société a besoin ou envie, par exemple la randonnée, ou le maintien de la biodiversité.

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73 73 Avec les États-Unis, on n'a quasiment plus de barrières douanières, mais le grand débat

avec les États-Unis, ce sont les OGM, ou disons plutôt, les produits issus des biotechno- logies. On voit bien que les consommateurs européens sont réticents face à ces produits.

A l’heure actuelle, la négociation est très opaque. La Commission a des pouvoirs à par- tir des mandats qui lui sont confiés par les Chefs d’État qui sont censés nous représenter.

Mais je ne sais pas à quel stade de la négociation le Parlement européen interviendra dans cet accord international.

Une participante - A propos de la ferme des mille vaches et des emplois concernés, qui va négocier ? Comment la PAC va-t-elle intervenir ?

Vincent Réquillart -Cette ferme ne sera pas soutenue différemment des autres. La base de soutien des exploitations n'est pas liée à la production : La base, ce sont les hec- tares, il n'y a pas de dérogation par rapport à çà. Après, il y a un élément qui favorise ces exploitations ; il s’agit du traitement des effluents. L’autre question est celle du plafonnement des aides. On a vu que la mise en place d’un plafonnement des aides est lente en raison principalement de l’opposition des États (et non pas de la Commission Européenne).

Un participant - Vous avez dit tout à l'heure qu'il y aurait, pour les premiers hectares, une aide plus importante que pour le reste, il me semble que le seuil se situait autour de 52 hectares. J'avais cru comprendre au début que les demandes venant du monde agri- cole situaient ce seuil plus bas, de manière à favoriser davantage les petites exploitations.

Est-ce que le chiffre de 52 correspond à un objectif signifiant que c'est la bonne taille, ou est-ce le résultat d'un marchandage dans lequel le lobby des grandes exploitations s'imposait au détriment des petits exploitants ? L'idéal ne serait-il pas d'aller, après une subvention à la production ou à une subvention à l'hectare, à une subvention à l'exploi- tant, puisque l'objectif serait de permettre aux agriculteurs de faire leur travail dans de meilleures conditions ? Peut-être qu'à ce moment-là, on se rendrait compte que les gros exploitants de 200 ou 500 hectares, comme les grands céréaliers, n'ont pas vraiment besoin de subventions.

Vincent Réquillart - J'imagine qu'il y a dû y avoir des négociations. La Commission prévoyait une dégressivité des aides à partir d'un certain niveau, mais çà avait été com- battue par l'exécutif. La proposition d’aider davantage les « premiers hectares » est un moyen technique qui semble aller dans la bonne direction. Les simulations qui ont été faites ont montré qu'il y avait des effets pervers à évaluer le soutien par emploi : une grande partie des subventions bénéficiait à des secteurs non jugés comme prioritaires.

Il n'est pas simple de définir les bons critères et les simulations sont très utiles pour les trouver.

Un participant - J'ai lu que la France n'est pas seulement importatrice de bananes (ce qu'on peut comprendre) mais aussi de viande. Mais pourquoi importons-nous de la viande ?

Vincent Réquillart -C'est vrai qu'on importe de la viande, qu'on en exporte, et qu'on en réimporte. Pour la viande de porc et de poulet, je ne pense pas qu'on en importe. D'une façon générale, même quand on est globalement exportateur de certains produits, il y a toujours des créneaux d'importation pour des qualités spécifiques. On peut très bien imaginer qu'on importe certaines catégories de produits laitiers et qu'on exporte une autre catégorie de produits laitiers.

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Un participant - Du fait de la désertification des campagnes, il y a beaucoup d'actifs agricoles qui ont disparu, avec un impact sur l'environnement. Y a-t-il dans la PAC des mesures qui permettent aux gens de se fixer sur un sol et d'y rester ?

Vincent Réquillart - On a beaucoup parlé des revenus avec les hommes en toile de fond, à savoir la possibilité de pouvoir vivre de leur activité. Votre question renvoie au volet

‘développement rural’ de la PAC. Ce que l’on appelle le second pilier. On peut citer no- tamment le soutien aux zones difficiles, via l'agriculture. Les politiques qui permettent de donner des soutiens à certains territoires ne se résument pas forcément à la politique agricole. Ce second pilier prend progressivement de l’importance. Même si on peut esti- mer qu'on ne fait pas assez, il y a eu cette prise en compte progressive, et quand on dit développement rural, il y a une bonne partie qui concerne des zones où il y a eu déser- tification, là où l'agriculture est difficile. Et cela reste un objectif majeur pour la PAC dans la prochaine décennie.

Saint-Gaudens, le 18 janvier 2014

Notes biographiques

Vincent Réquillart, originaire d'une commune rurale du Pas de Calais, est ingénieur d'Agro-Paris (Institut national agronomique Paris-Grignon, aujourd'hui AgroPa- risTech), et également Docteur en économie.

Il est entré à l'INRA (Institut national de Recherches agronomiques) et a fait l'es- sentiel de sa carrière à l'INRA-Toulouse, où il a été Directeur de l'Unité Économie et Sociologie Rurales, et où il est aujourd'hui Directeur de Recherches, ses centres d'intérêt concernant l'économie industrielle appliquée à l'agro-alimentaire, les mé- thodes quantitatives appliquées à l'analyse des politiques agricoles, et l'évaluation de politiques nutritionnelles.

Cela l'a amené à enseigner à la Toulouse School of Economics (dans le cadre d'un partenariat INRA-TSE), école très internationale tant par son corps enseignant que par le recrutement de ses élèves, et dont la plupart des cours se font en anglais.

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