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Compte rendu de l’ouvrage de Laetitia Merli, De l’ombre à la lumière, de l’individu à la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste

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Compte rendu de l’ouvrage de Laetitia Merli, De l’ombre à la lumière, de l’individu à la nation. Ethnographie du

renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste

Christophe Pons

To cite this version:

Christophe Pons. Compte rendu de l’ouvrage de Laetitia Merli, De l’ombre à la lumière, de l’individu à

la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste. Archives de Sciences

Sociales des Religions, Éditions de l’EHESS, 2012. �halshs-01417953�

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des religions

160  (octobre-décembre 2012) Bulletin Bibliographique

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Christophe Pons

Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste

Paris, EPHE, Centre d'Études Mongoles et Sibériennes, 2010, 333 p.

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Référence électronique

Christophe Pons, « Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste », Archives de sciences sociales des religions [En ligne], 160 | octobre- décembre 2012, mis en ligne le 19 mars 2013, consulté le 14 juin 2016. URL : http://assr.revues.org/24657 Éditeur : Éditions de l'École des hautes études en sciences sociales

http://assr.revues.org http://www.revues.org

Document accessible en ligne sur : http://assr.revues.org/24657

Document généré automatiquement le 14 juin 2016. La pagination ne correspond pas à la pagination de l'édition papier.

Archives de sciences sociales des religions

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Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation. Ethnographie du renou (...) 2

Archives de sciences sociales des religions, 160 | octobre-décembre 2012

Christophe Pons

Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste

Paris, EPHE, Centre d'Études Mongoles et Sibériennes, 2010, 333 p.

Pagination de l’édition papier : p. 240

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Cet ouvrage est le fruit d'un travail doctoral que Laetitia Merli a mené durant plusieurs années auprès des chamanes mongols de la ville d'Ulaanbaatar et ses provinces. Dès les premiers chapitres, on est saisi par la profonde intimité et connaissance de l'auteur pour ce terrain et ses acteurs. Cette remarquable imprégnation permet une assise ethnographique fouillée qui est l'une des grandes qualités de l'ouvrage. Son fil conducteur est tissé de rencontres de chamanes, hommes et femmes, auxquels Laetitia Merli donne la parole tout en restituant finement les scènes de leurs vies et pratiques quotidiennes. Ces personnages, souvent excentriques et hauts en couleur, nous introduisent eux-mêmes aux diverses thématiques de l'ouvrage. On découvre ainsi comment, après des décennies de rejet par l'idéologie socialiste, le chamanisme resurgit dans la société mongole en étant réinventé par les velléités individuelles de ces chamanes. Mais cette réinvention, qui se proclame aussi comme un retour à la « culture ancestrale » et entend plonger ses racines dans les profondeurs de l'âme du peuple mongol, revêt également une dimension nationaliste. L'ouvrage situe dès lors sa réflexion sur le chamanisme à la lisière des réinventions et prétentions individuelles, et aussi des revendications collectives et nationales.

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L'ouvrage se compose de trois grandes parties de cinq à dix chapitres chacune. La première se concentre sur les identités individuelles des chamanes qui racontent leur propre histoire, la deuxième porte davantage sur le chamanisme lui-même, et la dernière sur la fabrique nationaliste d'un chamanisme d'État.

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Parmi les portraits de chamanes que le lecteur découvre peu à peu, certains se révèlent comme de petits entrepreneurs de bien de salut, indépendants et parfois « opportunistes », cherchant à développer une activité généralement lucrative, et quelquefois aussi un centre ou école chamanique autour de leur propre personne. Une différence ressort entre villes et campagnes ; les zones rurales sont volontiers associées à la tradition, à l'ancestralité et à l'authenticité.

Dès lors, les cures sont fréquemment perçues, par les clients urbains, comme plus sincères et efficaces. Cependant le monde urbain s'ouvre comme le lieu de toutes les possibilités, l'espace où chacun peut tenter sa chance. L'auteur suit plusieurs d'entre eux en révélant les heurs et malheurs de leurs entreprises. Si les portraits sont contrastés, la plupart cependant sont « pris » dans l'étau d'un même exercice : celui qui consiste à trouver l'équilibre entre une identité personnelle « originale » à réinventer – leur permettant de mener à bien cette petite entreprise individuelle – et une référence appuyée aux traits signifiants d'un chamanisme que l'on veut authentique, ancestral et d'identité mongole. Ici le recours à une biographie balisée est particulièrement évident. Les « narrations de soi » suivent toutes la trame récurrente d'un chamanisme héréditaire dont on souffre autant que l'on tire parti : enfances douloureuses, souffrances, appels, événements traumatiques, révélations, usages. Et tous, dans ces parcours, sont marqués par l'héritage des répressions antireligieuses de l'époque communiste, et d'un bouddhisme dont leur chamanisme est aujourd'hui profondément empreint.

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Le personnage de Bazaar, homme cultivé qui se découvre chamane sur le tard n'est pas

sans rappeler Quesalid le « sceptique », un autre chamane devenu célèbre sous la plume de

Franz Boas, et qui critiquait ses pairs en dénonçant chez eux un arrivisme mercantile (Franz

Boas, « The Religion of the Kwakiutl », New York, Colombia University Contributions to

Anthropology, vol. X, 1930, p. 1-41). Bazaar réintroduit la critique ; pour lui le chamanisme

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de préserver avec soin. Avec les écoles des chamanes bouriates, les récentes percées des centres chamaniques dans la capitale, et les figures de Ceren, Nergüj, Enhbold, Balžir ou Enhtuja, le rôle nationaliste du chamanisme n'a de cesse de s'affirmer : une part grandissante de la population se projette volontiers dans le fantasme d'un mysticisme attractif et Bazaar dénonce le risque de ces nouveaux acteurs contemporains qui tirent parti d'un chamanisme qu'ils chargent d'éléments « néo- », et qu'ils projettent dans la perspective globalisée d'un tourisme spirituel. Pour le lecteur, ces multiples rencontres sont aussi l'occasion d'une mise en scène théâtrale du travail religieux ; les cures rituelles sont décrites dans leur technicité matérielle (accessoires, calendriers, costumes...) et spirituelle (esprits d'alliances, ancêtres, héros – et antihéros – de référence...).

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Dans la deuxième partie, «  Histoires de chamanismes  », l'auteur opère un glissement des acteurs au système en interrogeant tout d'abord les places tenues par l'astrologie, le bouddhisme et l'idéologie soviétique dans le chamanisme actuel. Elle souligne un mélange des genres rendant les classifications difficiles puis, au travers de la nosologie qui conduit à consulter les chamanes, esquisse un ensemble d'analyses sur les formes diverses de la réparation du mal. Ces pages sont l'occasion d'interroger les causes et modalités de l'infortune (physique, immatérielle) dans la Mongolie d'aujourd'hui, jusqu'aux techniques et supports de leur purification. L.  Merli a ici recours à ses qualités d'observatrice pour mettre en scène, de manière fort réussie, une ethnographie des consultations, de leur construction et notamment des dialogues et interactions sociales qui y ont cours ; ceux-ci s'avèrent riches d'enseignements pour la compréhension de la société mongole contemporaine. On notera trois chapitres qui mettent également l'accent sur les trois thèmes récurrents de l'argent, l'amour et l'alcool, si souvent causes et profits de l'attraction exercée aujourd'hui par le religieux dans un nombre grandissant de sociétés globalisées du monde.

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Bujan, une femme chamane critique et militante qui rappelle Bazaar, rencontré plus haut, nous introduit progressivement à la troisième – et importante – partie de l'ouvrage qui inscrit les individus et les chamanismes dans une perspective « nationaliste ». Bien qu'elle ne soit pas en reste en matière de réinventions de ses propres recettes et méthodes, Bujan est mécontente, car elle regrette que son peuple perde la connaissance coutumière du chamanisme. Parmi les gens qui viennent la consulter, elle déplore un oubli des techniques et des savoirs les plus élémentaires qui devraient pourtant demeurer le ciment de l'identité mongole. Aussi peste- t-elle contre ceux qui ne savent plus interpréter ni comprendre ce qui leur arrive. Mais en creux, cette critique, qu'elle porte à l'endroit des Mongols qui oublient ce qu'ils devraient conserver comme leur bien le plus précieux, est adressée à l'encontre de tous les éléments qu'elle considère comme envahissants, soit le communisme, le bouddhisme, le christianisme, la globalisation. C'est ainsi que se dessinent peu à peu les traits d'un chamanisme nationaliste et nationalisant qui, malgré tout, est aussi nourri d'influences extérieures de type New Age.

Laetitia Merli distingue alors deux modalités du chamanisme, l'une orientée vers la sphère privée et le rite pour soi, l'autre politisée et orientée vers la sphère du national.

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Enfin, c'est autour du chaman Tömör que sont appréhendées les premières créations des

associations culturelles et chamaniques dans la ville d'Ulaanbaatar en 1996. Là encore, la

qualité ethnographique provient d'une présence continue de l'auteur sur le terrain à l'époque

des faits. S'appuyant sur le culte national à Chinggis Khan, héros populaire considéré

comme fondateur de «  l'Empire mongol  » au XII

e

  siècle, l'auteur retrace et analyse le

processus de fabrique de ces centres (néo-)chamaniques urbains qui se veulent rassembleurs,

pacificateurs, unificateurs. Ces centres organisent des manifestations qui prennent un caractère

de revitalisation du patrimoine folklorique, et servent de tribunes politique, identitaire et

nationaliste ; supports d'un néo-traditionalisme instrumentalisé par les élites nationalistes, ils

conduisent à une certaine forme de patriotisme. Et bien que le chamanisme soit aujourd'hui

totalement pénétré de divers autres éléments (non seulement le bouddhisme et l'astrologie,

mais aussi le médiumnisme de possession, l'ésotérisme moderne et même les «  églises

étrangères de Jésus » qui sont de plus en plus présentes notamment dans la capitale), plus que

jamais la relation du peuple mongol à son chamanisme veut être pensée en termes génétiques :

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Archives de sciences sociales des religions, 160 | octobre-décembre 2012

« si on réveille le chamanisme, on redécouvre comment les Mongols pensaient, longtemps avant les influences étrangères. C'est pour cela que le chamanisme nous est utile » (p. 273).

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Dans la dernière section de l'ouvrage, le focus est encore plus porté sur les dimensions nationalistes de ce qui devient un chamanisme d'État. On découvre trois nouveaux centres ouverts autour de trois chamanes à prétentions quasi prophétiques  : Tömör, Bajarbileg et Zorigbaatar. En s'appuyant chacun sur des héros spécifiques, ils entendent donner un souffle inédit à la nation mongole. Leurs projets, communément appuyés sur une volonté politique d'affirmation identitaire, vont cependant entrer en forte concurrence les uns avec les autres.

Il est à noter qu'on trouve là quelques belles pages mettant en scène un véritable « théâtre des morts  » où, à l'occasion d'une pratique chamanique qui a définitivement glissé sur le versant de la possession médiumnique, les ancêtres et héros du peuple mongol resurgissent pour conseiller les vivants et, plus largement, motiver leur identité nationale. Ce mécanisme, par lequel les ancêtres attisent les nationalismes, est d'usage classique dans les possessions médiumniques, mais moins souvent relevé dans les contextes de chamanismes.

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Cet ouvrage, qui témoigne de la grande connaissance de Laetitia Merli sur le chamanisme contemporain, s'inscrit sans aucun doute dans le groupe des travaux importants récemment menés sur la Mongolie postcommuniste. Mais il est également un support majeur d'intelligibilité et de légitimité scientifique aux multiples films documentaires qu'elle a réalisés sur ces thématiques depuis les années 2000, et dont les deux derniers (Shaman Tour, 2009 ; La Revanche des chamanes, 2011) ont été reconnus et salués par la critique.

Référence(s) :

Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste, Paris, EPHE, Centre d'Études Mongoles et Sibériennes, 2010, 333 p.

Pour citer cet article Référence électronique

Christophe Pons, « Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation. Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste », Archives de sciences sociales des religions [En ligne], 160 | octobre-décembre 2012, mis en ligne le 19 mars 2013, consulté le 14 juin 2016.

URL : http://assr.revues.org/24657 Référence papier

Christophe Pons, «  Laetitia Merli, De l'ombre à la lumière, de l'individu à la nation.

Ethnographie du renouveau chamanique en Mongolie postcommuniste », Archives de sciences sociales des religions, 160 | 2012, 240.

Droits d’auteur

Archives de sciences sociales des religions

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